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KTM 790 Duke — Husqvarna Svartpilen 801 — Husqvarna Vitpilen 801

Photos © Didier Constant, Claude Privée, Richar Turenne, KTM, Husqvarna 

 

Une place à part dans le monde des Twins verticaux

Les roadsters à moteur bicylindre parallèle de moyenne cylindrée ont le vent en poupe depuis quelques saisons, comme le démontre le succès incontesté des Aprilia Tuono 660, BMW F 900 R, Honda CB750, Kawasaki Z650, Suzuki GSX-8 S ou T/TT et autre Yamaha MT-07 sur de nombreux marchés, et plus particulièrement en Europe, où ces machines trustent régulièrement les premières places en termes de vente. 

À l’exception de la Kawasaki, qui possède un twin classique à 180°, les autres motos mentionnées plus tôt sont équipées d’un moteur bicylindre vertical calé à 270°, ce qui leur confère une personnalité plus affirmée. Dans le cas des machines austro-suédoises, elles se démarquent du lot par leur moteur KTM LC8c au calage inédit de 285°.  Par rapport aux Twins à 270°, le LC8c diffère par l’angle entre les manetons du vilebrequin, ce qui influence la sonorité, les vibrations et le caractère moteur ; le 270° simule un V-Twin (son rauque, couple élevé), avec un intervalle d’allumage irrégulier, tandis que le 285° est plus proche dans son comportement d’un calage à 360° (son plus continu, plus lisse), mais avec une meilleure répartition de la puissance et un équilibre dynamique amélioré. Il offre un compromis entre sonorité, souplesse, régularité et facilité d’exploitation. 

Le LC8c qui propulse nos trois belligérantes comporte deux balanciers d’équilibrage, dont un logé dans la culasse, afin de contrer au mieux les vibrations inhérentes aux bicylindres verticaux. Une mission qu’il accomplit avec brio.

Fabriqué en Chine par CFMOTO, qui l’utilise également dans ces IBEX 800, par exemple, c’est un moteur moderne avec une lubrification par carter sec, dont les intervalles d’entretien surviennent aux 15 000 km. Il est doté de carters en aluminium, de pistons forgés et est contrôlé par un système de gestion du moteur (EMS) Bosch, avec un accélérateur électronique Ride by Wire. Il est alimenté par une injection électronique DKK Dellorto à corps de papillon de 46 mm et est secondé par une boîte de vitesses à six rapports, avec quickshifter bidirectionnel optionnel, et un embrayage antidribble PASC, actionné par câble.

Le châssis est également commun aux trois machines. Il s’articule autour d’un cadre treillis au chrome-molybdène dans lequel le moteur agit comme un élément porteur contribuant à sa rigidité. La boucle arrière en aluminium coulé est boulonnée au cadre principal ; elle intègre astucieusement la boîte à air. Ce design léger et boulonné rend la moto agile et maniable, en plus de permettre des réparations au bâti arrière en cas de chute. Sur les deux Husqvarna, leur carrosserie spécifique modifie légèrement la disposition du filtre à air. De plus, l’échappement des deux Suédoises diffère de celui de l’Autrichienne.

L’électronique est similaire sur les trois machines, avec une centrale inertielle, un ABS cornering avec mode Supermoto, trois modes de conduite standard (Rain – Street – Sport) et un mode Dynamique optionnel qui permet de gérer la cartographie de l’accélérateur, les niveaux d’intervention du frein moteur, l’antipatinage (sur 10 niveaux), l’antiwheeling (sur cinq niveaux) et le dérapage de la roue arrière sur neuf crans. Il dispose également du mode MSR (Moto Slip Régulation), une aide électronique à la conduite qui fonctionne avec le système de contrôle de traction (MTC) pour empêcher le blocage ou le dérapage de la roue arrière lors d’une décélération brutale, comme un rétrogradage rapide ou une coupure soudaine de l’accélérateur. On retrouve également un régulateur de vitesse, l’application pour téléphone KTM My Ride et la surveillance de la pression des pneus. Le tout est sélectionnable par l’intermédiaire d’un écran TFT couleur de 5 pouces. Au niveau de l’éclairage, les trois roadsters adoptent des DELS partout. 

La KTM dispose de son côté de deux modes de conduite optionnels — Track et Performance —, et du controversé mode Démo qui vous permet de goûter à toutes les options électroniques pendant les 1 500 premiers kilomètres pour vous les retirer si vous ne les payez pas au terme de cet essai gracieux.

Au niveau de l’électronique, la principale différence entre la KTM et ses cousines suédoises réside dans l’adoption d’une cartographie moteur différenciée, selon le caractère de chaque moto.

Finalement, les trois sœurs ennemies se distinguent par leur apparence (phare, accastillage), leur ergonomie (guidon plus relevé sur la Svartpilen pour une position de conduite plus droite et détendue, plus basse et sportive sur la Vitpilen et la Duke) et leurs pneus. La KTM roule sur des pneus Maxxis Supermaxx S, la Svartpilen est équipée de pneus à crampons Pirelli MT 60 RS et la Vitpilen est pourvue de pneus Michelin Road 6 pour une meilleure adhérence sur l’asphalte.

Maintenant que nous avons fait la présentation des trois opposantes, voyons comment elles se comportent dans le détail.

KTM 790 Duke : le roadster sportif

Look angulaire, coloris iconique, le roadster autrichien respire la performance et attire l’attention. C’est un m’as-tu-vu. Un roadster sans compromis. Et le modèle que j’avais en essai poussait la sportivité une coche plus loin, avec son échappement optionnel Akrapovic, ses commandes reculées, sa poignée à courte course et ses pièces du catalogue PowerParts (leviers de frein et d’embrayage repliables et ajustables, couvercles divers, etc.). 

La KTM 790 Duke est plus directe et agressive. Elle est optimisée pour la performance pure, avec des modes de conduite spécifiques (notamment le Launch Control) pour une utilisation sportive, malgré des bases électroniques communes. 

Elle est plus nerveuse et plus incisive que ses cousines suédoises. Avec son ergonomie agressive, sa selle plus haute de 5 mm et sa position de conduite basculée vers l’avant, davantage axée sur la conduite sportive, elle se révèle extrêmement précise dans les grands virages rapides, comme dans les courbes serrées, les épingles et les pifs pas. Au point de pouvoir s’aventurer sur piste, occasionnellement, pour des journées de roulage, pour peu qu’elle soit chaussée des bons pneus. Sur les routes sinueuses, la Duke est à sa place et mérite bien son surnom de « scalpel ». C’est une moto sportive affûtée qui peut sans crainte rivaliser avec tous les roadsters sportifs du marché.

Son confort est légèrement en retrait par rapport à celui que procurent les deux Husqvarna, en raison du tarage de ses suspensions et de leurs possibilités de réglage moindres. Et, en raison de sa selle passager minimaliste, elle ne se destine pas forcément à la conduite en duo.

C’est également la plus légère du lot, par environ 6 kilos, ce qui renforce sa facilité de prise en main, sa maniabilité et sa sportivité. 

En revanche, son style taillé à la serpe, caractéristique propre à la marque, et ses coloris iconiques voyants (orange/blanc/noir) ne sont pas forcément du goût de tout le monde, au point que certains clients les trouvent rédhibitoires. 

Choisissez la Duke pour son agressivité sportive pure et son rapport qualité-prix. Vous ne le regretterez pas.

Husqvarna Svartpilen 801 : le Scrambler classieux

Look élégant et moderne pour la Husqvarna Svartpilen 801 (Flèche noire) qui est une moto de type Scrambler équipée d’un guidon haut et de pneus à crampons Pirelli MT 60 RS. Avec son allure d’aventurière chic, la Husqvarna Svartpilen 801 distille une ambiance de conduite esthétique, élégante, rétro-moderne et urbaine, avec un attrait haut de gamme. Elle se distingue des autres Scramblers du marché en s’éloignant des codes propres à ce créneau.

Sa position de conduite plus droite et plus confortable, grâce à un guidon plus haut, est mieux adaptée à un usage quotidien sur route, voire en sentiers roulants. C’est une moto parfaite pour navetter, pour circuler en ville ou pour des balades dominicales bucoliques. Ses suspensions WP Apex proposent un réglage davantage axé sur le confort que sur la performance. Cependant, la Svartpilen est presque aussi efficace que la Duke et la Vitpilen sur les routes secondaires sinueuses. Au niveau de la maniabilité, elle offre une sensation stable et neutre, avec un angle de direction détendu. Et par rapport à ses deux opposantes du moment, elle permet de s’échapper hors des sentiers battus si l’envie vous en prend ou si la situation l’exige.

Contrairement à la Duke ou à la Vitpilen, elle dispose d’une cartographie moteur affinée qui met de l’avant une courbe de puissance plus douce et progressive, plus agréable pour une conduite quotidienne et relax. Sur ma moto d’essai, j’avais également les options Easy Shit (le shifter bidirectionnel de Husqvarna) et le régulateur de vitesse. Personnellement, j’ai eu un coup de cœur pour cette Svartpilen, dont le caractère docile est bien adapté à sa nature, sans pour autant se montrer moins performante au quotidien.

La Husqvarna Svartpilen 801 est idéale pour les motards soucieux de leur style et qui favorisent une conduite plus coulée et plus confortable pour les trajets quotidiens, ou les longues balades urbaines et périurbaines.

Husqvarna Vitpilen 801 : le Café racer moderne

Look élégant et moderne, lignes tendues, coloris sobres : la Vitpilen respire le sérieux et la classe. Très proche de la KTM, en matière de sportivité, elle est moins agressive et offre une conduite plus droite et plus confortable pour la route. Son moteur et sa partie cycle adoptent des réglages légèrement différents, une finition haut de gamme et un prix potentiellement plus élevé (1 000 $). Avec son look unique et son caractère urbain, elle attire les regards et s’adresse à une clientèle de connaisseurs qui recherchent autant le style que la performance. 

La Vitpilen est agile, amusante à piloter, mais néanmoins stable et affûtée. Elle offre un niveau de performance qui rivalise avec la KTM, mais se montre marginalement plus confortable sur route, particulièrement quand la chaussée se détériore. Grâce à son guidon plat, à son rapport poids/puissance et à ses pneus Michelin Road 6, la Flèche blanche est un plaisir à piloter avec enthousiasme sur les routes secondaires sinueuses. Ses périphériques de qualité lui permettent de briller dans cet environnement et de donner la réplique aux autres roadsters de moyenne cylindrée du marché. Réglée en mode Dynamique, la Vitpilen distille un comportement plus sportif et plus agressif. 

Sur ma moto d’essai, j’avais également les options Easy Shit (le shifter bidirectionnel de Husqvarna) et le régulateur de vitesse. 

En raison de sa selle passager étroite, peu rembourrée et haut perchée, la Vitpilen favorise la conduite solo et les plaisirs solitaires. La réponse à l’accélérateur est franche et l’injection est bien calibrée. Ses suspensions qui offrent plus de réglages que celles de la KTM permettent d’adapter le comportement de la moto aux conditions de la route plus facilement. Elles favorisent la performance, mais aussi le confort.

Le freinage est respectable sans être spectaculaire et, à aucun moment, il ne m’a fait défaut.

La Husqvarna Vitpilen 801 est un Café racer amusant à piloter, performant et élégant qui se démarque par son style unique. C’est une moto qui ne ressemble à aucune autre sur le marché. Et, rien que pour cela, elle mérite toute notre attention et notre respect.

En conclusion 

En dépit du fait qu’elles partagent la même motorisation et la même partie cycle, ces trois motos austro-suédoises affichent des caractères et des comportements différents. Et des styles qui leur sont propres. Chacune d’elles se destine à une clientèle ciblée ne recherchant pas forcément les mêmes plaisirs. En espérant que cet article vous aidera à faire votre choix parmi ces trois sœurs ennemies.

FICHES TECHNIQUES

KTM 790 Duke — Husqvarna Svartpilen 801 — Husqvarna Vitpilen 801

INFORMATIONS GÉNÉRALES

  • Poids sans carburant : 174 kg — 181 kg — 180 kg
  • Hauteur de selle : 825 mm — 820 mm — 820 mm
  • Capacité essence : 14 L
  • Consommation : 5,1 L/100 km
  • Autonomie : 275 km
  • Durée de l’essai : 850 km
  • Prix : 12 449 $/13 449 $/13 449 $
  • Coloris : orange/argent ou noir/argent — noir — argent ou jaune

MOTEUR

  • Moteur : bicylindre parallèle, 4-temps, DACT, refroidi au liquide. Calage à 285°
  • Puissance : 105 ch à 9500 tr/min
  • Couple : 65 lb-pi à 8000 tr/min
  • Cylindrée : 799 cc
  • Alésage x course : 88 x 65,7 mm
  • Rapport volumétrique : 12,7 : 1
  • Alimentation : injection électronique
  • Transmission : 6 rapports, quickshifter bidirectionnel de série
  • Entraînement : par chaîne

PARTIE CYCLE

  • Suspension : fourche inversée WP de 43 mm de diamètre, dépourvue de réglage (réglable en compression et en détente sur les Husqvarna); monoamortisseur WP réglable en précontrainte du ressort (et en détente sur les Husqvarna)
  • Empattement : 1 475 mm — 1 388 mm — 1 475 mm
  • Chasse/Déport : 24°/98 mm — 24,5°/98 mm — 24,5°/98 mm
  • Freins :
    AV — double disque de 300 mm, étriers radiaux à 4 pistons;
    AR — simple disque de 240 mm pincé par un étrier simple piston. ABS Bosch 9.3 MP débrayable de série, avec fonction en courbe et mode Supermotard
  • Pneus : Maxxis Supermaxx ST — Pirelli MT 60 RS — Michelin Road 6
    120/70ZR17 à l’avant
    180/55ZR17 à l’arrière

Les points communs

  • Même moteur bicylindre LC8c
  • Même cadre treillis tubulaire
  • Même bras oscillant
  • Mêmes suspensions WP Apex
  • Mêmes freins J. Juan
  • Même ABS Bosch 9.3 MP
  • Même électronique (réglages spécifiques)

Les différences

  • Le style
  • Le tableau de bord
  • Les guidons
  • Les boucles arrière sur les Husqvarna
  • L’ergonomie
  • Les finitions
  • Les positions de conduite
  • Les cartographies moteur
  • Les pneus
  • Les réglages de suspension
  • Le confort
  • Le prix (en faveur de la KTM)

ÉQUIPEMENT DU PILOTE (KTM 790 Duke)

ÉQUIPEMENT DU PILOTE (Husqvarna Svartpilen 801)

ÉQUIPEMENT DU PILOTE (Husqvarna Vitpilen 801)