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La BMW R1200GS Adventure vue par deux anciens propriétaires de R1200GS

Textes : Didier Constant, Dave Beaudoin et Richard Turenne
Photos : Didier Constant, Dave Beaudoin, Richard Turenne et BMW Motorrad

Depuis la présentation de la BMW R1200GS Adventure 2014, presque toute l’équipe de motoplus.ca est tombée sous le charme de la baroudeuse allemande. À commencer par Costa Mouzouris qui l’a découverte lors de son lancement nord-américain, en Arizona et qui terminait son article en ces termes élogieux : « Si je planifiais un voyage à travers le pays en empruntant principalement les chemins de terre, ce qui serait nettement plus intéressant et proposerait un plus grand défi que de suivre les routes pavées, la seule moto que je considèrerais est la BMW GS Adventure. En doutiez-vous encore? »

Dans mon cas, le coup de foudre a eu lieu au début du mois d’octobre. Au retour du voyage annuel de motoplus.ca en France, que j’ai effectué au guidon d’une BMW R1200GS 2014, j’ai eu à mon tour l’occasion de passer deux semaines en compagnie de l’Adventure et donc de la comparer avec le modèle de base. Une rencontre mémorable qui m’a fait regretter de ne pas être plus riche.

À la même époque, Dave Beaudoin, alors propriétaire d’une R1200GS 2009 affichant plus de 80 000 km succombait aux charmes de la GSA et signait un chèque en blanc à son concessionnaire ravi de l’aubaine, pour un modèle 2014 tout équipé et une foule d’accessoires.

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De son côté, Richard Turenne, rongé par l’envie, a résisté tout l’hiver, tentant de se convaincre que sa R1200GS 30e anniversaire était la meilleure moto au monde et que changer pour une GSA ne lui apporterait pas beaucoup plus que ce qu’il avait déjà. Mais une visite chez son concessionnaire, à la fin d’un hiver interminable, lui a été fatale. Après s’être assis sur un modèle de démonstration, des images de dunes de sable chaud, dans le désert du Sahara ont soudain envahi son esprit. Il se voyait déjà parcourir le monde au guidon de sa GSA, traversant des contrées lointaines et mystérieuses à la recherche de son « moi intérieur », de sa nature profonde. Il redécouvrait soudainement le baroudeur qui sommeillait en lui depuis des années… et signait, à son tour, un gros chèque à son concessionnaire (le même que celui de Dave) pour une GSA 2015 tout équipée.

Après quelques semaines en compagnie de leur nouvelle monture, Dave et Richard justifient leur geste dans une courte apologie de l’aventurière ultime de BMW qui pourrait se résumer par la citation de René Barjavel « L’inutile et le superflu sont plus indispensables à l’homme que le nécessaire… ». Cette citation, extraite de son livre Si j’étais Dieu… se poursuit par la démonstration suivante : « … Le chant du merle est inutile, la rose est superflue. Le travail est nécessaire. » 

Comme vous le voyez, on flirte avec les grands esprits. Voici, pour vous, le plaidoyer de nos deux grands (dé) penseurs!

Je dépense donc je suis!

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Au premier coup d’œil, on voit que la R1200GSA 2014 est plus qu’une simple évolution cosmétique de la GS. Sa ligne moderne, voire futuriste et ses arceaux de protection tubulaires en acier galvanisé qui font passer la BMW pour invulnérable constituent des signes extérieurs de robustesse et de sérieux. Ces avantages esthétiques sont complétés par des aides électroniques au goût du jour — accélérateur Ride-by-Wire, suspensions électroniques dynamiques, multiples cartographies moteur — et fort utiles au demeurant. Ces dernières réussissent à rendre la conduite encore plus excitante et la BMW plus polyvalente, sans pour autant se montrer trop interventionnistes.

Propriétaire d’une GS depuis 2009, j’ai eu un coup de foudre lors du dévoilement de la nouvelle GSA au Salon Intermot de Cologne. J’ai cependant dû patienter jusqu’à la toute fin de la saison dernière pour enfin mettre la main sur la mienne, un modèle 2014 tout équipé, magnifique dans sa robe blanche virginale. Avec elle, j’ai étiré la saison jusqu’à ce que la neige, la glace, le sel, et les lois stupides sur les pneus d’hiver mettent un bémol à mon envie de deux roues, pendant quelques mois. L’homo motardus est une espèce qui hiberne, particulièrement au Québec.

Durant les premières semaines de mon idylle avec la belle Teutonne, moment trop bref entre le début octobre et la mi-novembre, j’ai parcouru environ 2 500 km. Bien que la perfection ne soit pas de ce monde, je suis convaincu que la GSA est ce qui s’en rapproche le plus. Compte rendu tout à fait partial d’un nouveau propriétaire enchanté.

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Ce qui frappe le plus, dès les premiers tours de roue, c’est évidemment le moteur. Les vingt chevaux supplémentaires annoncés par BMW — par rapport à ma GS 2009 — sont bel et bien là et ne se font pas prier pour vous botter le cul. Le plus pénible pour moi a été la période de rodage. Un vrai calvaire! Se limiter à passer les rapports en deçà de 5 000 tours est frustrant, surtout que c’est à ce régime que vos bras commencent à s’allonger à l’accélération et que l’exquise mélodie du pot d’échappement, même d’origine, commence à vous chatouiller les tympans.

La livrée de cette puissance doit sa brutalité en partie à l’apparition de l’accélérateur Ride-by-Wire et des modes de cartographie qui l’accompagnent. Avant d’essayer, j’étais partisan du mode de cartographie au poignet, le seul et unique reconnu par les puristes. Les modes ne sont pas strictement obligatoires, mais viennent quand même ajouter de la douceur à la conduite, selon les conditions rencontrées et le rythme désiré. Ils sont également harmonisés par défaut avec un réglage de suspension correspondant (« Soft » en mode « Rain », « Hard » en mode « Dynamique ») ainsi qu’avec la réactivité de l’antipatinage. Le mode « Rain » préconise la sécurité absolue, alors que le mode « Dynamique » laisse la roue avant s’envoler dans les airs à la moindre sollicitation des gaz en 1re, 2e ou même 3e. Attention cependant aux démarrages sur les bandes de peinture routière (traverses de piétons, lignes médianes, etc.) quel que soit le mode sélectionné. Une rotation trop optimiste de l’accélérateur pourrait vous envoyer au tapis.

Les ajustements de la suspension électronique se montrent aussi très pratiques lorsque vient le temps de voyager en duo. La molette de la précharge est remplacée pour un bouton qui durcit la suspension et augmente aussi son débattement. Plus besoin de descendre de la moto, il suffit d’appuyer sur le bouton et de laisser l’électronique faire son boulot.

Petite déception du côté des commandes au guidon. Outre l’aspect un peu fragile des boutons, par rapport aux anciennes versions, j’ai dû faire mon deuil des clignotants indépendants, de chaque côté du guidon. Décision au fondement incompréhensible, puisqu’il n’existe pas de méthode plus fluide, à mon avis. Mon deuil n’est toujours pas terminé, puisque je suis souvent obligé de détourner mon attention de la route et de relâcher le guidon un bref instant (possiblement fatal sur nos belles routes au Québec!) pour activer les clignotants.

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Ma moto est équipée pour recevoir le GPS Navigator V de BMW. Pratique pour les voyages en terrains peu connus, ce GPS dédié offre également quelques bribes d’information télémétriques, sa borne étant reliée a l’ordinateur de la moto. Avant même d’en faire l’acquisition, je me suis questionné vivement sur l’emplacement de la fameuse molette multifonctions. Inexplicablement, celle-ci se retrouve entre la poignée et le commodo gauche plutôt qu’à la droite de ce dernier, les ingénieurs ayant jugé que le GPS était une commande prioritaire par rapport à celles incluses sur le commodo (trip et infos, ABS et ESA, régulateur de vitesse, feux d’urgence, phares, clignotants et klaxon). On doit donc survoler la molette pour atteindre ces commandes. Et bien entendu, on l’accroche chaque fois. Ce qui est gênant, car la GS n’est pas une RT : si le GPS n’est pas présent, la roulette ne contrôle rien d’autre, pas même la navigation dans le menu de l’ordinateur. Bon nombre de constructeurs automobiles apposent un « verrou » électronique sur l’opération du GPS embarqué lorsque le véhicule est en mouvement. Là, chaque clic gauche ou droit vous fait naviguer, tel que prévu, dans les multiples écrans du GPS mais on doit dorénavant porter attention à nos mouvements latéraux des mains sur la poignée pour ne pas effleurer la molette par mégarde. Le cas échéant, il faut alors quitter la route des yeux quelques secondes pour compléter le cycle de navigation entre les écrans et retrouver l’affichage de la carte. Je ne désespère pas malgré ces débuts difficiles, en me disant que ces désagréments s’atténueront avec l’usage.

Le dernier point gênant concerne l’alarme antivol. Celle-ci est très efficace avec ses capteurs de mouvements multiples et accomplit son travail très efficacement. Cependant, sur la nouvelle génération de GS, BMW a remplacé la commande à distance pour l’alarme par un système qui s’arme automatiquement 30 secondes après avoir coupé le contact. Remarquez ces derniers mots. En effet, si vous coupez le contact et demeurez sur la moto pendant que vos partenaires de balade font le plein, ce qui arrive un arrêt sur deux grâce au réservoir sans fond de la GSA, l’alarme se déclenche instantanément au moindre mouvement. J’ai demandé à un concessionnaire de vérifier auprès de BMW Canada s’il existait un moyen quelconque d’atténuer cet irritant. On m’a répondu qu’il n’existait malheureusement pas « autre méthode que de désactiver l’alarme, dans les options de la moto. Aveu à mots couverts sur ce mauvais système de la part du constructeur? L’alarme est le premier réglage dans les options…

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Pour remédier à ce problème, les versions 2015 pourront désormais être équipées d’un système sans clef appelé « Keyless » (il fallait y penser). Avec ce système, offert en option, évidemment, l’alarme s’enclenchera lorsque la clé ne sera plus détectée par la moto, sauvegardant ainsi votre ouïe. Attention cependant à ne pas l’échapper malencontreusement dans la boue ou dans un caniveau ou encore de l’oublier après avoir démarré.  Je reprendrais volontiers ma télécommande : elle doit coûter une fraction du prix de l’option « Keyless ».

Outre ces petits désagréments, certains changements sont toutefois les bienvenus. L’inclinaison de la bulle est désormais ajustable grâce à une molette facile à opérer, même en mouvement (déconseillé, évidemment). Le compartiment à l’avant du réservoir est un ajout très pratique pour transporter de menus objets. Je m’en sers comme cache pour mes bouchons d’oreille, en attendant d’y ranger mes jetons pour le pont Champlain…

En conclusion, malgré quelques choix de design questionnables, la GSA marque une grande évolution par rapport à mon ancienne GS. Avec son gros réservoir et son débattement rehaussé, elle incarne l’aspect ultime de la GS liquide introduite en 2013 et saura se montrer à la hauteur de mes attentes, lorsque je pourrai enfin l’amener jouer les aventurières en sentier!

— Dave Beaudoin

Ce n’est pas ma faute… C’est BMW qui m’a forcé la main!

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À l’automne 2013, j’ai eu la chance d’essayer la toute nouvelle R1200GS à refroidissement liquide. Comme je possédais une R1200GS de la version précédente, j’ai pu comparer les deux. Et comme je m’y attendais, j’ai préféré… ma 2010 à la nouvelle venue! Les principales raisons étaient le look trop techno et plastique de la nouvelle venue ainsi que le son moins « organique et sensuel » de son échappement. En revanche, je ne pouvais que constater l’écart de performance favorisant grandement la version « liquide ».

Dans le même article, j’admettais, en conclusion, que je finirais probablement par succomber à la version liquéfiée dans cinq ou six ans. Disons que l’attente a été écourtée! Il a fallu moins de deux ans pour que je craque! L’élément déclencheur fut la sortie de la version Adventure. La démesure de sa prestance m’a subjugué. Elle en jette plein la vue à ceux qui la croisent. Sa présence physique en impose, son large carénage avec ses arceaux de sécurité impressionnent (regardez-la face à face et essayez de soutenir son regard sans cligner des yeux). Sans parler de la partie arrière décorée des valises latérales et du top case; c’est du gros, c’est du solide! Les caches latéraux argentés pour les radiateurs de la GS standard, qui offensaient mes yeux, sont éliminés sur l’Adventure, pour son plus grand bien esthétique.

Ce qui devait arriver arriva; mon banquier aura un plus gros bonus en fin d’année! J’ai en effet décidé de m’offrir un cadeau pour mes 60 ans… que je n’aurai que dans quelques années. Et j’ai pris possession de ma nouvelle acquisition il y a peu de temps. Étant moi-même un « vieux modèle », je dois avouer que je ne suis pas très friand de l’électronique tous azimuts qui barde les motos récentes, toutes marques confondues. Inutile de dire que ma GSA en est très bien pourvue. Lorsque je suis revenu chez moi avec ma nouvelle monture, le mercure stagnait largement sous zéro et même si j’étais bien habillé, j’avais hâte d’arriver à la maison; je n’avais rien à faire de tous ces boutons garnissant le guidon, pas plus que du panneau à cristaux liquides m’indiquant plein d’informations diverses, dont la température. Pas besoin du flocon de neige ni de l’affichage de la température qui clignotent constamment pour réaliser qu’il fait froid. Je le sens bien, pas nécessaire d’en rajouter!

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Depuis, j’ai pu rouler à des températures plus clémentes et la GSA a immédiatement conquis mon cœur! Quelle machine superlative! Elle m’a déjà fait oublier la mélopée « organique » de ma 2010! Les performances sont à couper le souffle, je suis même déjà accroc à l’ajustement électronique des suspensions (ESA) que l’on peut modifier selon l’état de la route ou de notre humeur. L’électronique a peut-être du bon malgré tout! J’ai aussi commencé à apprivoiser le shifter élecgtronique (Gear Shift Assistant Pro). On peut monter ou descendre les rapports sans embrayage et sans relâcher l’accélérateur. Je dois reconnaître que pour rétrograder je préfère encore utiliser l’embrayage, ce qui me permet de moduler mes décélérations plus facilement. En revanche, à l’accélération, le passage des rapports se fait de façon transparente et est accompagné d’un léger retour de flamme! « Addictive! » comme disent les Anglos.

Dans la circulation urbaine intense, il est surprenant d’entendre un ventilateur tourner sur un Boxer BMW… j’avais presque oublié qu’elle est maintenant équipée de deux radiateurs pleins de liquide vert! Toujours dans le même environnement urbain, il ne faut pas oublier la largeur de la GSA avec ses valises quand vient le temps de se faufiler entre les autres usagers de la route. Si la délinquance vous amène à tenter l’interfile, il n’y a pas que la maréchaussée qui pourrait vous arrêter, mais aussi un parechoc frottant contre une de vos magnifiques valises en alu!

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La seule circonstance où le poids de la GSA est plus notable, au point de constituer un handicap, c’est lorsque l’on tente de déplacer la moto à la force des bras; surtout si le réservoir de 30 litres est presque plein. Il faut dire que mes 6’2’’ m’aident sûrement un peu! Sinon, l’équilibre général de la moto fait en sorte qu’elle est beaucoup plus maniable et agile qu’elle en donne l’impression.

Je n’ai pas encore essayé ma GSA sur des routes de terre ou de gravier, mais j’ai hâte de tester le mode « Enduro ». D’ailleurs comme je n’ai pas le choix de partir à la découverte du monde avec cette moto (c’est l’image qu’elle projette) je commence déjà à planifier mon prochain week-end de trois jours : Terre de Feu ou Alaska?

BMW m’a encore forcé à faire une dépense, rendant du même coup mon directeur de banque et mon concessionnaire heureux, mais aussi, et c’est le point le plus important, moi par la même occasion!

— Richard Turenne

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Une réponse à “Face à face fratricide”

  1. Guy

    « Comme vous le voyez, on flirte avec les grands esprits. »
    LOLLL!!!

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