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Après un hiatus d’un lustre, je succombe à nouveau à l’appel de la route…

Par Guy Parrot — Photos Guy Parrot et Didier Constant

Ça faisait cinq ans que je n’avais pas roulé à moto. Que la flamme s’était éteinte ! Plus envie de rien. Pourtant, l’article de Patrick Laurin — qui a fait le tour de la Gaspésie, en Gold Wing, en 2021 — a ravivé ma flamme. Au point que j’ai acheté une Honda Gold Wing Tour DCT 2022 avec l’intention bien arrêtée de moi aussi faire le tour de la Gaspésie. Ce que je fis.

La familiarisation

J’avais brièvement parlé au Boss de mon projet de voyage. Je ne sais pas si c’était prévu de sa part, mais quand je lui ai appris que la GL était achetée, il m’a invité à l’accompagner pour faire un aller-retour vite fait de Montréal à Toronto. Sous la pluie. Encore. Quand nous voyageons ensemble, Zeus s’invite immanquablement à la fête. J’ai l’impression qu’une malédiction pèse sur nous… Et qu’est-ce qu’on a dégusté ! Enfin, lui, pas moi. Derrière l’immense pare-brise (comme une porte de grange) que j’ai remonté au max, je suis resté au sec. Lui ? Il vous racontera si l’envie lui prend. Bien qu’on ait emprunté l’autoroute le plus clair du temps, j’ai eu la chance d’apprendre à mater la grosse Bertha. Avec ses différents modes de conduite. Notamment le mode « Rain ». 

Lors de notre aller-retour Montréal-Toronto, le Boss a pris la flotte pendant des heures sur la Kawasaki Z900 50e Anniversaire tandis que moi, j’étais abrité derrière le gigantesque pare-brise de la Gold Wing…

À destination, se promener dans les rues de Toronto n’était pas évident non plus avec cette grosse moto, d’autant plus que la dernière machine que j’ai pilotée était une BMW R 1200 GS. Vous voyez le delta-poids, entre les deux ? 450 kg vs 230 kg. Et je ne vous parle même pas de la différence d’empattement.

Bref, j’ai fait l’aller-retour Montréal-Toronto, soit plus de 1 200 km, cinq jours seulement après l’achat de ma moto et, qui plus est, sans l’échapper. Pour moi, c’est mission réussie. Mes jambes, mon dos et mes cervicales n’étaient pas du tout endoloris. Tout ça, sans compter le retour à la maison, à Kamouraska, 465 km plus loin.

En route pour la Gaspésie

Fort de cette expérience, j’ai repris la main et le pied marin, et voyagé seul. J’ai embarqué le matériel de camping dans le coffre arrière et vogue la galère. Première destination : le camping d’Escuminac.

Ça paraît peu 365 km, à peine quatre heures de route, mais j’ai encore des croûtes à manger, surtout avec le système de navigation de la GL. Je laisse tomber les autoroutes sans intérêt. Et je roule mollo entre les Harley et les trois roues qui sont omniprésents. Un voyage qui devait prendre quatre heures en a finalement pris un peu plus de six, avec les nombreux arrêts, notamment au restaurant Le Capitaine Homard.

La route qui relie Mont-Joli est pleine de touristes roulant à des vitesses variables. Toute mon attention est dirigée vers les véhicules devant moi, je n’ai donc pas trop le temps de regarder le paysage, même sous un ciel limpide. J’avoue par contre que le goût de rouler est revenu et j’éprouve un plaisir incommensurable à faire corps avec cette immense moto. Il suffit de deux ou trois tours de roue pour que tout son poids disparaisse avec l’effet gyroscopique des roues qui fait son œuvre. Et là, c’est le pied ! En revanche, quand on arrête, il faut calculer la distance nécessaire pour démarrer et faire tourner les roues en ligne droite avant d’amorcer un virage et hop ! Le tour est joué ! Rien de bien compliqué, il suffit de comprendre l’effet d’inertie de la moto.

Quand je rattrape les Harley, je me mets en mode « Sport » et je dépasse tout le monde comme si un tsunami me poursuivait. Leurs pilotes doivent me croire complètement fêlé de rouler ainsi, mais moi, ça me fait marrer. Et c’est vrai que la GL peut accélérer en un tournemain (littéralement). Bien entendu, ce n’est pas une BMW S 1000 RR, mais ça m’épate quand même, chaque fois. 

Ma Gold au camping d’Escuminac

J’arrive à Escuminac vers 17 heures ; il n’y a qu’un seul autre campeur sur tout le terrain ! Pourtant, on disait partout que les campings seraient envahis par les gens qui fuient la ville. Alors je monte la tente à toute vitesse pour être à l’abri des moustiques et autres brûlots qui pourrissent l’existence de tous les campeurs du monde. Bonus sur ce terrain : le Wi-Fi ! Je peux donc me rapporter à tous ceux qui pensent que je suis un peu cinglé d’entreprendre un tel voyage après cinq ans d’inaction.

La Baie des Chaleurs

Je suis debout tôt, j’ai hâte de repartir. Défaire la tente n’est pas plus long que la monter. J’avale deux oranges sanguines et je lève l’ancre vers 7 h du matin puisque le couvre-feu de 21 h à 7 h (vous vous souvenez de ça ?) se termine à ce moment-là. L’autre campeur m’envoie la main et me souhaite bon voyage. La distance à parcourir est minime : 315 km. Pour une moto qui est conçue pour bouffer de la borne, c’est juste une petite mise en jambes. 

Cette fois-ci, c’est moi qui roule pépère. À cette heure, peu de trafic sur la route, je peux donc profiter du panorama. Et je me régale ! La section de la Baie des Chaleurs de la Gaspésie est absolument magnifique. J’avoue que je voulais rouler en Gaspésie dans le sens inverse des aiguilles d’une montre (pour ceux qui se rappellent ce qu’est une montre) pour être du côté de la mer. Si je regarde vers l’est, j’imagine le Groenland un peu plus loin. 

Le fameux rocher percé

Rendu à Percé, même si le village fait à peine deux kilomètres de long, je constate que la population doit être équivalente à celle de Rome en été. Bonjour les touristes (moi inclus). J’aurais voulu manger à Percé, mais je constate que tous les touristes sont à la queue leu leu devant les restos. Je passe mon tour et je file direction Gaspé. J’arrête ça et là pour prendre des photos et au bout de quelques moments, la pile de mon appareil photo tombe à plat… J’ai quand même eu le temps d’en prendre quelques-unes.

L’auberge Le Caribou, à Rivière-au-Renard

La ville de Gaspé est fort jolie, sans aucun doute, mais je me dis que l’hiver, ça doit être froid et venteux, face à l’Atlantique Nord. Je ne m’y arrête même pas, préférant continuer ma route vers Rivière-au-Renard où j’ai décidé de prendre une chambre à l’Auberge Le Caribou. Bien entretenue, ménage impeccable, ma chambre dispose aussi d’un frigo où je peux refroidir mes bouteilles d’eau. Après une bonne douche, je ne prends pas beaucoup de temps avant de m’endormir, la nuit précédente ayant été particulièrement courte. J’aurais pu aller visiter l’endroit un peu, mais l’effet de la douche se fait ressentir et je me blottis rapidement dans les bras de Morphée.

Suite et fin

Le Gîte du Mont-Albert

Le lendemain, la route devait me mener jusqu’au camping de l’Auberge Le Gîte du Mont-Albert. Le hic, c’est qu’il est 7 h 15 et que je ne peux me présenter au camping avant 16 h. Pourtant, c’est une balade d’à peine 2 h 30, soit environ 200 km.

Je ne sais vraiment pas ce que je pourrais faire entre 10 h (mon heure d’arrivée prévue) et 16 h. Je dois sûrement manquer d’imagination… De plus, j’ai appris que la route entre Murdochville et la 299 n’était pas pavée. Je sais très bien que la GL pourrait se débrouiller sur une « route de bois », mais ce n’est pas une GS non plus. Et si je crève un pneu, ça va être la galère à réparer, surtout le pneu arrière. J’opte alors pour le plan B et je rentre à la maison par la 132 qui longe la côte nord de la Gaspésie, une balade de 500 km, plus dans les cordes de la GL.

Le Phare de la Martre, dans toute sa splendeur, est l’un des rares attraits de la 132, entre Matane et Sainte-Flavie

Malgré les touristes, les trois roues et les innombrables travaux routiers, j’arrive à la maison vers 16 h, au moment où j’aurais pu me présenter au camping. La route que j’ai longée n’est pas ma préférée et ne présente pas d’attrait spécial, mais, jusqu’à Cap-Chat, il n’y a pas beaucoup de véhicules dans un sens ou dans l’autre. En revanche, sur cette section de la route, jusqu’à Matane, il faut vraiment s’assurer d’avoir suffisamment de carburant, les stations d’essence étant rares. Et quand on arrive à une pompe, il y a une pancarte sur le bord de la route qui met les voyageurs en garde : prochaine station dans 90 km ! Quand on a un réservoir de 21 L et qu’on est quasiment en réserve, on y pense deux fois avant de tenter sa chance jusqu’à la prochaine station. N’empêche, et même si je n’ai pas roulé comme un déchaîné, la GL m’a gratifié d’une consommation de 4,8 L/100 km. Pour un gros moteur de 1,8 L, c’est plus que satisfaisant. Il est vrai que pour atteindre ce chiffre, je me baladais à des vitesses légales, avec la bulle abaissée au minimum pour éviter de présenter un immense pan de mur au vent. Avec mon mètre soixante-dix-sept, cette position de la bulle me protégeait très bien le buste et la tête.

Les couchers de soleil de Sainte-Flavie sont légendaires

La prochaine fois que je referai ce voyage, pour éviter la partie nord de la 132, je vais traverser le centre de la péninsule, en passant par Murdochville et le parc de la Gaspésie. Ça changera le décor. En attendant, je sème déjà la graine d’un futur voyage à Terre-Neuve… À suivre !

Une réponse à “Retour de flamme”

  1. Denis V

    Belles images Guytou ! Le vaisseau amiral de Honda semble facile à conduite malgré son poids !

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