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Duel au sommet entre la BMW S 1000 XR et la Suzuki GSX-S1000 GX

Par Didier Constant et Richard Turenne — Photos : Didier Constant, Richard Turenne et constructeurs

Nous aurions également aimé inclure une Ducati Multistrada V4S, une Kawasaki Versys 1000, une KTM 1290 Super Duke GT et une Yamaha Tracer 9 GT+ dans ce comparatif, mais ces motos n’étaient pas disponibles au moment de cet essai. Nous avons donc fait contre mauvaise fortune bon cœur et sommes partis à l’aventure avec nos deux sœurs ennemies. 

Les belligérantes

Lorsque Suzuki a dévoilé la nouvelle GSX-S1000 GX au Salon de Milan 2023, la cible de la GT-Sport de la firme d’Hamamatsu était claire. Elle attaquait frontalement la BMW S 1000 XR qui trône au sommet de la catégorie depuis son lancement en 2015. L’Allemande est une des motos favorites de la rédaction de Motoplus.ca. Nous avons essayé toutes ses itérations et avons même réalisé des essais à long terme des modèles 2016 et 2020. Nous étions donc impatients de la confronter à la Suzuki. D’autant plus que nous avions adoré la GSX-S1000 GT, dont elle reprend l’intégralité des spécifications mécaniques, lors de sa sortie en 2022.

Pour développer leur Crossover — c’est ainsi que l’on nomme les GT sportives offrant une position de conduite plus droite et des suspensions à débattement long —, les deux marques ont adopté la même recette. BMW est parti de la superlative S 1000 RR lancée en 2010, une moto qui domine la catégorie des Superbikes depuis lors. De son côté, Suzuki s’est inspiré de sa légendaire GSX-R1000, une moto qui a redéfini la catégorie à son époque. Les deux bases sont excellentes, comme nous l’avions constaté lors de notre comparatif des hypersportives en 2017. Et ça se confirme lors de ce match comparatif.

La BMW S 1000 XR s’appuie sur la partie cycle du roadster de la marque allemande, la S 1000 R, elle-même dérivée de celle de la S 1000 RR. Le cadre périmétrique en aluminium redessiné qui intègre le moteur comme élément porteur reçoit un bras oscillant plus long pour une meilleure motricité. La boucle arrière a elle aussi été revue afin d’accueillir les valises et a été renforcée pour supporter la charge accrue en duo, avec bagages. La géométrie de direction adopte de valeurs de chasse de 25,2 degrés et de déport de 118 mm, ainsi qu’un empattement long de 1 541 mm afin de procurer à la XR une stabilité directionnelle à toute épreuve et une bonne motricité. Les suspensions semi-actives avec ESA Dynamic offrent un débattement de 150 mm et sont réglables en tout sens. La selle culmine à 850 mm (10 mm de plus que sur le millésime précédent).

En 2024, le quatre cylindres en ligne de la BMW gagne cinq chevaux, sa puissance passant de 165 à 170 chevaux, lesquels sont délivrés au même régime, soit 10 000 tr/min, grâce à de nouveaux canaux d’admission et à une cartographie adaptée. Le couple demeure le même avec 84 lb-pi à 9 250 tr/min.

La Suzuki GSX-S1000 GX s’appuie quant à elle sur la partie cycle de la GSX-R1000 dont elle reprend le cadre périmétrique à double berceau, en aluminium, le bras oscillant également en aluminium et une boucle arrière boulonnée au cadre. Celle-ci est renforcée pour supporter le poids d’un passager et des bagages. 

La géométrie de direction affiche des valeurs de chasse de 25,6 degrés (0,4 degré de plus que la XR), un déport de 97 mm (21 mm de moins que la XR) et un empattement de 1 470 mm (71 mm de moins que la XR). En théorie, ces chiffres suggèrent une moto plus vive que la BMW, mais marginalement moins stable. Mais ça, c’est en théorie seulement et nous avions hâte de le vérifier.

Des suspensions semi-actives Showa offrant 150 mm de débattement complètent l’ensemble. La hauteur de selle grimpe à 845 mm, tout en restant accessible au plus grand nombre. Dans ce châssis rigide et efficient, Suzuki a logé le gros bloc à quatre cylindres de 999 cc à course longue (59 mm contre 49,7 mm pour la XR) emprunté à la GSX-R 1000 des années 2005 à 2008, lequel développe une puissance de 152 ch à 11 000 tr/min (18 ch de moins que la XR) pour un couple de 78,2 lb-pi à 9 250 tr/min (5,8 lb-pi de moins que la XR). Ce bloc est performant, endurant et fiable. Parfait donc pour une moto destinée à voyager loin à bonne vitesse, avec un passager et des bagages.

Les deux belligérantes adoptent un arsenal électronique complet qui inclut entre autres choses des suspensions à réglage électronique, un accélérateur Ride-by-Wire, plusieurs modes de conduite, un ABS de virage, un quickshifter bidirectionnel, un régulateur de vitesse et un contrôle de traction.

Comme on le voit, ces deux Crossovers sont très similaires et partagent la même philosophie.

La balade des gens heureux

Pour ce voyage de deux jours, nous avons privilégié les routes secondaires — notamment la route 138 qui longe la rive nord du Fleuve, à partir de Batiscan —, n’empruntant l’autoroute que pour sortir de Montréal et y rentrer. Et comme nous menons une bonne vie, nous avons eu une température magnifique. 

À l’aller, nous avons parcours près de 600 km jusqu’à notre destination finale, l’hôtel « Mon coin de pays », à Sacré-Cœur, un village localisé à une quinzaine de kilomètres au nord-ouest de Tadoussac, sur le bord de la route 172 qui mène au Saguenay, puis au Lac-Saint-Jean. Sur nos routières confortables, la balade a été magique. Ceux qui connaissent cette région vous confirmeront que les panoramas sont sublimes. Particulièrement dans Charlevoix et au début de la Côte-Nord. À Baie-Saint-Paul, nous avons opté pour la route 138 qui traverse Saint-Hilarion, La Gadelle et Clermont avant d’arriver à La Malbaie. De là jusqu’à Baie-Sainte-Catherine, la route longe le Saint-Laurent en traversant des villages pittoresques — Cap-à-l’Aigle, Saint-Fidèle, Port-au-Saumon, Port-au-Persil, Port-aux-Quilles, Pointe-au-Bouleau — que je connais bien et dans lesquels je m’arrête pour faire des photos de paysages, mais aussi des photos des motos sur fond de mer. Nous sommes arrivés à notre hôtel en fin d’après-midi, vers 18 heures, après avoir fait quelques photos dans les dunes de Tadoussac, un arrêt incontournable. 

Arrivés à l’hôtel de Sacré-Cœur sous un magnifique soleil couchant

Après nous être installés et avoir rangé nos bagages, nous sommes retournés à Tadoussac à la brunante pour souper. Les restaurants sont rares et ferment tôt à Sacré-Cœur. La température avait chuté sous les 18 degrés et le soleil s’était couché, rendant cette balade de fin de journée plutôt fraîche. À Tadoussac, nous avons galéré pour trouver un restaurant à notre goût et dans nos moyens. De nombreux établissements, dont la Galouine, un de mes restos préférés, ont fermé leurs portes depuis la COVID. Et ceux qui restent sont débordés en fin de saison ou manquent de personnel. Du coup, on s’est rabattu sur le Bistro Chez Mathilde, une bonne adresse, quoique chère. Nous avons fait l’impasse sur le menu dégustation cinq services à 98 $ par personne, boissons non comprises, pour nous rabattre sur le menu à la carte qui propose des petits plats — à la façon des tapas espagnols — tout simplement délicieux. La soupe aux panais était succulente et mon risotto au homard du Saint-Laurent à se rouler à terre. 

Quand nous avons quitté le restaurant vers 22 h 30, il faisait nuit noire et l’humidité s’était installée. En sortant de Tadoussac, la route n’est plus éclairée, sinon que par les phares des véhicules que l’on croise. À un moment, en rase campagne, un véhicule s’est dirigé droit sur nous, phares en grand. Je pensais qu’il ne nous voyait pas et allait nous percuter quand j’ai réalisé au dernier moment qu’il s’agissait d’un quad qui circulait dans le sentier longeant la 172. Personnellement, j’ai trouvé l’expérience un peu traumatisante, d’autant que ma vision nocturne n’est plus ce qu’elle était jadis. Nous avons néanmoins rejoint l’hôtel sans encombre, malgré nos visières fumées.

Malgré le soleil matinal, il fait frais quand on se lève pour reprendre la route

Après une nuit agitée en raison de l’insonorisation déficiente de l’hôtel, nous sommes partis tôt, vers 6 heures du matin, pour aller déjeuner à l’entrée de Tadoussac et prendre le traversier de 7 h 30, avant que le trafic des touristes ne soit trop important. Le soleil se levait à peine et la rosée qui recouvrait la campagne et nos motos amplifiait la fraîcheur aurorale. Du coup, j’ai enfilé une couche coupe-vent supplémentaire sous ma veste REV’IT!, essuyé la selle de la Suzuki et taillé la route jusqu’au restaurant Chantmartin où nous attendait un bon petit-déjeuner québécois classique — 2 œufs, bacon, patates rissolées, rôties — accompagné d’un bon café. A cette heure-là, l’endroit était quasiment désert et nous avons pu déjeuner rapidement et en toute tranquillité, pour arriver à l’heure au traversier. Sans attendre. 

Grange à la sortie de Baie-Sainte-Catherine

À la sortie de Baie-Sainte-Catherine, nous nous sommes arrêtés pour faire des photos dans la lumière rasante du matin. Un vrai délice. En roulant direction ouest vers La Malbaie, nous découvrons tous les villages traversés la veille sous une autre lumière, dans une perspective inédite. Les maisons sont baignées d’une lumière orangée magique et nos ombres longues et déformées nous précèdent. Féérique ! Particulièrement dans la fraîcheur du début de septembre. À La Malbaie, nous bifurquons au Sud pour prendre la route 362 ouest qui longe le Fleuve et traverse les villages classés de Saint-Irénée et des Éboulements. Cette route au relief vallonné est tout simplement sublime. Elle sillonne le littoral et offre des panoramas à couper le souffle. De Saint-Joseph, on a une vue imprenable sur L’Île-aux-Coudres où j’apprends que Richard a déjà eu une copine. Avec laquelle il n’a plus de contact. Heureusement ! Je ne me sentais pas l’âme aux retrouvailles. Puis, c’est l’arrivée glorieuse sur Baie-Saint-Paul, par le promontoire qui surplombe la cité artistique de Charlevoix, nous offrant une vue imprenable sur le village et sa magnifique baie. Là, nous faisons halte dans un petit resto au bord de la 138 pour un café croissant bienvenu. Il est 10 h. La température s’est réchauffée et atteint les 20 degrés. C’est le temps d’ôter une couche en vue de la traversée de Québec. Comme nous arrivons dans la capitale provinciale aux alentours de midi, nous décidons de poursuivre notre jusqu’à Donnacona, pour le lunch. 

Grange dans le coin de Batiscan

Le retour par la 138, jusqu’à Batiscan, puis par la 40 jusqu’à Montréal, est une formalité. Il fait désormais chaud — environ 25 °C — et nos deux montures sont tellement confortables que nous ne ressentons aucune fatigue. Juste le plaisir de rouler, de nous imprégner des paysages en nous faisant chauffer la couenne au soleil. Quand la monotonie s’installe, nous faisons une pause photographique et nous changeons de motos.

Autant la BMW que la Suzuki se sont avérées de formidables compagnes de voyage. Ce sont des motos superlatives, luxueusement équipées et parfaites pour tailler la route à bonne vitesse, avec armes et bagages. Mais ça, nous allons vous en parler plus en détail dans les paragraphes qui suivent. Bonne lecture !

 

COMPARATIF

LOOK/STYLE

1 — S 1000 XR  / 2 — GSX-S1000 GX

« La beauté est dans l’œil de celui qui regarde, » prétend l’adage. Et dans le cas présent, les deux motos sont loin de faire l’unanimité autour de leur plastique. La BMW, à sa sortie, n’a pas vraiment été considérée comme une belle moto. Certains critiquaient son bec tronqué ou son regard de coque l’œil, lequel a été abandonné récemment. Mais là, dans sa livrée Gravity Blue, avec des accents jaunes et blancs, elle est plutôt esthétique et dégage un air de qualité, de classe même. Ça change du sempiternel rouge trop souvent vu chez l’Allemande. Ou encore de la livrée M Motorsport (bleu-blanc-rouge) que l’on retrouve dans beaucoup de marques dernièrement, particulièrement chez Honda. La XR est une belle machine qui a superbement bien évolué au fil de ses itérations.  

Loin d’être laide, la Suzuki est en fait beaucoup plus belle en personne qu’en photo, surtout dans sa livrée bleue/grise iconique de la marque. Le même bleu habille aussi les roues ; une belle touche de la part des designers. Le silencieux noir est bien intégré et pas trop volumineux. Personnellement, je préfère de loin les phares disposés verticalement de la GX à ceux de la GT qui sont horizontaux.

FINITION/QUALITÉ

1 — S 1000 XR / 2 — GSX-S1000 GX

La BMW remporte encore la palme à ce chapitre. Quand on l’observe à la loupe, toutes les pièces sont de grande qualité, la finition est excellente, comme toujours chez BMW. En fait, tout est flatteur à l’œil du « voyeur » esthète. Une impression de solidité et de qualité se dégage de la moto.

La Suzuki est un poil en retrait, quelques commandes au guidon font plus « plastique » et ne donnent pas le même sentiment qualitatif que l’Allemande à ce chapitre. La qualité générale de la moto est de haut niveau, mais pâlit un peu en comparaison directe avec sa rivale qui établit de nouveaux standards.

ÉQUIPEMENT DE SÉRIE

1 — S 1000 XR / 2 — GSX-S1000 GX

Il peut être difficile de classifier les deux protagonistes à ce niveau. La BMW offre différents niveaux d’options ou d’accessoires ; dont la plupart ne sont souvent disponibles que sous forme de groupes d’options, parfois d’options simples. Mais toujours onéreuses. De fait, une BMW S 1000 XR de base est quasiment impossible à obtenir rapidement, et il faut la commander à la saison morte pour l’avoir au début de la saison suivante, sans toutes les options des motos proposées par les concessionnaires. Sur notre machine qui comprenait plusieurs packs d’options, l’équipement était pléthorique, mais cela se répercutait sur le coût de la machine.

La Suzuki quant à elle fait l’impasse sur des équipements qui devraient être présents de série, considérant le tarif exigé et l’usage auxquels elle est destinée : poignées chauffantes, pare-brise ajustable sans outils, béquille centrale, trousse à outils décente.

Dans les circonstances, difficile de ne pas donner les points de la première place à l’Allemande.

ÉLECTRONIQUE

1 — S 1000 XR / 2 — GSX-S1000 GX

Les deux en ont trop ! Mais elles sont dans l’air du temps et répondent aux demandes d’une partie de la gent motarde. Je ne nie pas l’utilité de certaines fonctions (ABS, contrôle de traction, injection, régulateur de vitesse), mais la majorité des utilisateurs ne modifieront pas toutes les autres fonctions une fois la moto ajustée à leurs besoins et l’effet de nouveauté passé.

Nous donnons ici l’avantage à la BMW parce que l’utilisation de l’électronique est relativement simple et que son écran TFT est sublime, toujours très lisible même quand le soleil se reflète dessus. Et, cerise sur le sundae, deux boutons indépendants à fonction unique contrôlent les poignées chauffantes et le mode de conduite ! Nul besoin de les chercher dans les innombrables menus !  

ERGONOMIE/POSITION/PROTECTION

Ex aequo

La position de conduite est confortable sur les deux motos. Le dégagement pour les jambes est suffisant, même pour Richard et ses grandes guiboles. 

La protection au vent est également équivalente ; pas d’excès de turbulences, il faut seulement se souvenir que nous ne sommes pas sur une grosse moto de tourisme et accepter le fait qu’un peu d’air fasse du bien à notre cerveau ! Pour information, sur la GX, nous avions réglé la bulle sur la plus haute des trois positions du carénage. Un ajustement qu’il faut faire à l’arrêt et nécessite l’usage d’une clé hexagonale (fournie dans la trousse à outils qui ne compte que deux clefs). 

La position du guidon sur les deux motos est idéale, pour Richard, en tout cas, et n’occasionne aucune douleur particulière au cou ou au dos, même après un long relais sur autoroute. Dans mon cas, le guidon de la XR est trop bas et trop avancé, comme je l’avais noté lors des essais longue durée que j’ai effectués sur des modèles 2016 et 2020. À cette époque, j’avais dû installer des rehausses de guidon pour relever et rapprocher ce dernier vers moi, si je ne voulais pas développer des douleurs dans le bas du dos. Sinon, nous avons tous les deux apprécié le confort des selles sur les deux motos. Lesquelles offrent à peu près la même hauteur d’assise (BMW : 850 mm — Suzuki : 845 mm), facilitant l’accès des motos aux pilotes de gabarit moyen.

MOTEUR

1 — S 1000 XR / 2 — GSX-S1000 GX

Si on parle de performance pure, la BMW domine surtout à haut régime. En bas de 5 000 tr/min, le quatre en ligne allemand est relativement discret, bien que son caractère reste très performant et sa sonorité plaisante. Mais à plus haut régime, la cavalerie se déchaîne et alors tout le paysage se met à défiler à vitesse grand V !

Le moteur de la Suzuki est plus démonstratif en bas de 4 000 tr/min ; le son guttural de la boîte à air ajoute à la trame sonore, et on a l’impression que ce moteur est plus coupleux que celui de la BMW, bas dans les tours, même si la fiche technique indique le contraire. Peut-être que le bruit émis par le moteur et la boîte à air amplifie la sensation de puissance ?

Ce moteur de près de 20 ans d’âge a pu franchir le cap d’Euro 5 et est toujours aussi plaisant à utiliser. Avec les années, il a fait ses preuves et je pense qu’on peut encore le qualifier de « belle jeunesse » !

Comme beaucoup de quatre en ligne les moteurs de la XR et de la GX vibrent passablement entre 4 000 tr/min et 7 000 tr/min, au point d’altérer l’image que renvoient les rétroviseurs. On ressent les vibrations principalement dans les guidons et à la base de la selle.

TRANSMISSION

Ex aequo

Les deux machines étaient équipées d’un quickshifter bidirectionnel au fonctionnement irréprochable, autant à la montée qu’à la descente des rapports. Aucun faux point mort, étagement idéal pour un usage routier, définitivement des exemples à suivre.

Si on veut vraiment couper les cheveux en quatre, on dira que le point mort était parfois difficile à synchroniser sur la BMW. Mais la moto avait à peine 1 000 km quand on en a prit possession. Au terme de cet essai, il était plus facile d’enclencher le point mort. Mais là, on chipote, vous en conviendrez.

FREINAGE

1 — S 1000 XR / 2 — GSX-S1000 GX

À ce chapitre, il n’y pas à tortiller. C’est la BMW qui remporte l’affrontement haut la main, tant le freinage de la Suzuki est décevant. C’est le point faible de cette moto : dans la phase d’attaque, on a l’impression que rien ne se passe, nos yeux s’agrandissent au fur et à mesure que l’obstacle se rapproche de nous à grande vitesse. On applique alors plus de pression au levier et enfin on obtient un ralentissement digne de ce nom. Je ne sais pas si le problème provient du maître-cylindre, des étriers ou des plaquettes, mais il y a quelque chose qui ne va pas. Peut-être pourrait-on l’améliorer en installant des durites tressées et des plaquettes plus mordantes, mais ça demeure difficilement explicable sur une moto de ce prix.

En comparaison, le freinage de la BMW est exemplaire ; puissant et facilement dosable. On voit aussi que les composants retenus sont d’une génération et d’une technologie plus récentes.

Le freinage déficient de la GX était encore plus apparent lorsqu’on alternait d’une moto à l’autre. Peut-être qu’un propriétaire de la Suzuki s’y habituera à l’usage et apprendra à doser le freinage plus efficacement. Ça reste à voir.

SUSPENSIONS

1 — GSX-S1000 GX 2— S 1000 XR

Sur ce point, nous donnons un léger avantage à la Suzuki parce que ses suspensions sont plus confortables sur nos routes défoncées, une fois correctement ajustées. Celles de la BMW réagissent plus sèchement sur revêtement dégradé, même en mode « Road ». En mode « Dynamic », il faut accepter des à-coups pas toujours agréables pour les lombaires. Sinon, les deux systèmes sont faciles à régler et se montrent extrêmement efficaces.

TENUE DE ROUTE/MANIEMENT

Ex aequo

Au niveau de la tenue de route, la BMW est plus incisive, plus sportive dans son comportement. Elle est aidée en cela par ses excellents pneus Bridgestone Battlax T32 qui offrent un excellent toucher de route et une motricité exemplaire. Cependant, nous n’avons pas roulé assez pour attester de leur longévité. Dans le cas des Dunlop de la Suzuki, ils affichaient plus de 4 000 km et une usure prononcée, avec un plat marqué au centre des pneus, surtout à l’arrière.

À ce chapitre, la Suzuki se situe plus du côté GT de l’équation. Et les Dunlop RoadSport 2 d’origine japonaise qui l’équipent sont indignes d’une moto de ce calibre et de ce prix. C’est, avec le freinage et l’éclairage, l’autre gros point faible de cette moto autrement bonne sous tout rapport.

Le maniement des deux motos à basse vitesse ou lors de manœuvres de déplacement est équivalent. Le rayon de braquage est aussi très bon dans les deux cas.

POIDS

Ex aequo

Données constructeurs : BMW 227 kg — Suzuki 232 kg. On ne fera pas de chichi pour 5 kg de différence. Surtout que ça ne se sent pas à l’utilisation. On est d’accord ?

VILLE

Ex æquo

Les deux motos sont faciles à vivre en milieu urbain (sauf à Montréal parmi les cônes…). Autant la position de conduite détendue que la docilité des motos à basse vitesse rendent la conduite de ces machines bardées de chevaux quand même aisée. Aucun à-coup du système d’injection, bon rayon de braquage et des rapports de transmission bien étagés aident le pilote à demeurer calme malgré la circulation qui circule à peine… La BMW dégage un peu plus de chaleur, mais rien de rédhibitoire. J’en ai connu des plus chaudes !

ROUTES SECONDAIRES

1 — S 1000 XR / 2 — GSX-S1000 GX

Sur les routes secondaires sinueuses, la BMW aura l’avantage sur la Suzuki, au détriment du confort du pilote, mais il ne faut pas donner une importance exagérée à cet aspect, vous ne perdrez pas vos obturations dentaires non plus. À un rythme soutenu, le comportement de la S 1000  R est plus sportif, surtout si on règle les suspensions sur le mode « Dynamic ». Au pire, vos lombaires grimaceront un peu. C’est le prix à payer pour avoir un comportement très rigoureux et solide de la partie cycle. Après tout, la BMW est une sportive haute sur pattes. Sur la GSX-S1000 GX, le comportement sera un poil moins sportif, plus axé sur le confort. Mais toujours intègre.

VOIES RAPIDES/AUTOROUTES

Ex æquo

Comme noté plus haut, les deux machines exhibent un trait de caractère commun aux moteurs 4 cylindres en ligne : des vibrations de haute fréquence plus haut dans les tours et à vitesse constante. À partir de 4 000 tr/min et jusqu’à environ 7 000 tr/min, les deux motos vibrent un peu au niveau du guidon et à la base du réservoir. Au point où l’on peut ressentir quelques picotements aux doigts de la main droite sur la BMW lors de longues portions d’autoroute. Il suffit alors d’activer le régulateur de vitesse et tout rentre dans l’ordre. Nonobstant ce léger désagrément, ces vibrations ne sont pas rédhibitoires et on peut avaler les kilomètres en toute tranquillité et en tout confort sur ces motos.   

TOURISME

Ex aequo

Les deux motos peuvent facilement être équipées de valises rigides du constructeur ou d’un équipementier indépendant ou encore de sacs étanches. Lors de cet essai, aucune n’était équipée des valises rigides optionnelles du constructeur. Malgré tout, nous avons pu très facilement y arrimer des sacs de réservoir et de selle de contenance suffisante pour nos besoins. La BMW était équipée par GIVI et la Suzuki par SW-Motech. Pour des sorties de plus longue durée, des valises latérales pourront vous permettre d’emporter tout le nécessaire. Particulièrement si vous voyagez en duo.

Comme mentionné plus haut, le confort, la performance et la protection contre les éléments font de ces machines d’extraordinaires voyageuses au long cours. En solo ou avec un passager puisque la puissance du moteur ne sera pas déficiente, même lorsque la moto est chargée de bagages, mais aussi parce que les deux motos sont pourvues de selles passager moelleuses et de poignées de maintien solides et bien placées.

TARIF

1 — GSX-S1000 GX 2— S 1000 XR

La GX sera définitivement plus douce pour votre portefeuille, mais nous sommes quand même en présence d’une moto relativement dispendieuse. Elle se détaille en effet 21 495 $, sans valises, hors rabais du constructeur. Cependant, elle est quand même moins onéreuse que la XR qui est quasiment impossible à obtenir en version de base, au tarif annoncé de 20 995 $. Notre version avec ses groupes d’options dépassait allègrement les 25 000 $. C’est maintenant devenu une réalité, les prix montent en flèche dans le domaine de la moto neuve. Surtout dans ce créneau premium.

CONCLUSION

Lors de ce voyage express qui correspond à l’usage typique qu’en feront leurs propriétaires, ces deux motos se sont révélées être de superbes voyageuses confortables et performantes. Des motos qui font honneur à leur héritage génétique de sportives. Que vous choisissiez l’une ou l’autre, vous posséderez une authentique GT sportive montée sur échasses, capable de vous mener au bout du monde à la vitesse TGV.

Quand on regarde froidement le classement, on a l’impression que la BMW est de beaucoup supérieure à la Suzuki. Mais la réalité est plus subtile. Sur beaucoup d’aspects les deux motos font jeu égal.

Le type de conduite de l’acquéreur potentiel pourra aussi jouer pour beaucoup dans la balance : conduite sportive (XR) ou plus « tourisme », domaine dans lequel la GX excelle. 

L’aspect financier pourra aussi être un facteur déterminant pour nombre d’acheteurs ; le coût d’acquisition, d’entretien et d’assurance pourrait être différent entre les deux motos. Matière à réflexion…

Fiche technique BMW S 1000 XR

INFORMATIONS GÉNÉRALES

  • Poids tous pleins faits : 227 kg
  • Hauteur de selle : 850 mm
  • Capacité essence : 20 L
  • Consommation : 5,8 L/100 km
  • Autonomie : 350 km
  • Durée de l’essai : 1300 km
  • Prix : 20 995 $ (de base)
  • Coloris : noir — bleu — blanc M Motorsport

MOTEUR

  • Moteur : 4 — cylindres en ligne, 4 — temps, double arbre à cames en tête, refroidi par eau, 4 soupapes par cylindre
  • Puissance : 170 ch à 11 000 tr/min
  • Couple : 84 lb-pi à 9 250 tr/min
  • Cylindrée : 999 cc
  • Alésage x course : 80 x 49,7 mm
  • Rapport volumétrique : 12,5 : 1
  • Alimentation : injection électronique
  • Transmission : six rapports, Quickshifter bidirectionnel
  • Entraînement : par chaîne

ASSISTANCES ÉLECTRONIQUES

  • Suspension à réglage électronique
  • Ride-by-Wire
  • Modes de conduite
  • ABS de virage
  • Quickshifter bidirectionnel avec blipper
  • Régulateur de vitesse
  • Contrôle de traction

PARTIE-CYCLE

  • Suspension : Fourche inversée Ø 45 mm, réglable électroniquement en compression, précontrainte du ressort et détente. Débattement : 150 mm. Monoamortisseur arrière simple, ajustable électroniquement en compression, précontrainte du ressort et détente. Débattement : 150 mm.ESA Dynamic de série
  • Empattement : 1 541 mm
  • Chasse/déport : 25,2 degrés/118 mm
  • Freins : deux disques avant Ø 320 mm avec étriers à 4 pistons à fixation radiale ; simple disque arrière Ø 265 mm avec étrier à 2 pistons ; ABS semi-intégral BMW Motorrad
  • Pneus : Bridgestone Battlax T32
    120/70ZR17 à l’avant ;
    190/55ZR17 à l’arrière.

Verdict

On a aimé

  • Moteur explosif
  • Quickshifter bidirectionnel
  • Partie cycle affûtée
  • Suspensions électroniques
  • Assistances électroniques efficaces
  • Monte pneumatique d’origine
  • Freinage puissant et modulable

On a moins aimé

  • Esthétique torturée
  • Protection moyenne
  • Les vibrations à mi-régime (5 000 à 7 000 tr/min)

Galerie

Fiche technique Suzuki GSX-S1000 GX

INFORMATIONS GÉNÉRALES

  • Poids tous pleins faits : 232 kg
  • Hauteur de selle : 845 mm
  • Capacité essence : 19 L
  • Consommation : 6,2 L/100 km
  • Autonomie : 305 km
  • Durée de l’essai : 1300 km
  • Prix : à partir de 21 495 $ 
  • Coloris : bleu/gris argenté — noir/gris anthracite

MOTEUR

  • Moteur : Quatre cylindres en ligne quatre temps, DACT, refroidi au liquide, 4 soupapes par cylindre
  • Puissance : 152 ch à 11 000 tr/min
  • Couple : 78,2 lb-pi à 9 250 tr/min
  • Cylindrée : 999 cc
  • Alésage x course : 73,4 x 59 mm
  • Rapport volumétrique : 12,2:1
  • Alimentation : injection électronique
  • Transmission : six rapports, Quickshifter bidirectionnel
  • Entraînement : par chaîne

ASSISTANCES ÉLECTRONIQUES

  • Assistance au démarrage en côte
  • Suspensions à réglage électronique
  • Ride-by-Wire
  • Modes de conduite
  • ABS de virage
  • Quickshifter bidirectionnel avec blipper
  • Régulateur de vitesse
  • Contrôle de traction

PARTIE-CYCLE

  • Suspension : fourche inversée Showa SFF-CA de 43 mm réglable en compression, en précontrainte du ressort et en détente. Débattement : 150 mm. Monoamortisseur Showa BFRC-Lite réglable en compression, en précontrainte du ressort et en détente. Débattement : 150 mm. Contrôle électronique par système SAES
  • Empattement : 1 470 mm
  • Chasse/Déport : 25,6 degrés/97 mm
  • Freins : 2 disques de 310 mm et étriers Brembo radiaux à 4 pistons à l’avant ; simple disque Nissin de 220 mm avec étrier un piston à l’arrière. ABS de série.
  • Pneus : Dunlop RoadSport 2
    120/70-17 à l’avant ;
    190/50-17 à l’arrière.

Verdict

On a aimé

  • Moteur disponible
  • Quickshifter bidirectionnel
  • Partie cycle affûtée
  • Suspensions électroniques superbes
  • Assistances électroniques bien gérées
  • Confort de selle adéquat

On a moins aimé

  • Esthétique clivante
  • Monte pneumatique d’origine indigne
  • Freinage décevant
  • Éclairage de nuit moyen
  • Les vibrations à mi-régime (4 000 à 6 500 tr/min)

Galerie

Équipement du pilote