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Le retour du Scrambler

Photos © Didier Constant, Nathalie Renaud, Honda

Premier contact

La nouvelle SCL500 joue sans complexe la carte « rétro » en puisant son inspiration auprès de la CL72 de 1962, le Scrambler Honda des années 60. Née pour les rigueurs de la ville, la SCL500 est légère et est prête à briller en tout chemin à défaut d’être dédiée aux sentiers.

Stylistiquement parlant, la SCL500 s’appuie sur le cadre et le réservoir de la Rebel 500 — ce qui est dommage à mon avis —, car il y avait sûrement mieux à faire en matière de look. Honda aurait pu s’inspirer du CL72 pour arriver à un résultat plus original et plus équilibré. Mais il s’agit là d’un jugement purement personnel. Je suis persuadé qu’il y aura des gens pour aimer le style de la SCL500.

Honda CL72 1962

Puisqu’on parle de l’allure de la SCL500, signalons qu’elle est due au coup de crayon du designer maison Takeru Kurobe. En ce qui me concerne, je dois reconnaître que j’aime bien le gros phare rond, le garde-boue avant court, les soufflets de fourche accordéon, le réservoir muni de grippes-genoux, la selle fine et plate — autant d’éléments qui respectent les codes du genre —, ainsi que le coloris, même s’il est classique et sobre. En revanche, je ne saurais pas en dire autant de l’énorme échappement plutôt disgracieux, malgré la plaque métallique ajourée qui recouvre sa partie supérieure. Sans être calé en design, je suis persuadé qu’il y aurait eu moyen de faire plus esthétique — en dédoublant le silencieux, par exemple, ce qui aurait permis d’avoir suffisamment de volume pour passer les tests sonores et la norme Euro5 et serait plus conforme à la tradition. Mais les ingénieurs avaient sûrement des impératifs techniques et économiques à respecter que je ne connais pas.

Sinon, la SCL500 est homogène, bien finie et très fine. À l’exception du réservoir — seul élément peint de la moto —, celle-ci est entièrement drapée de noir mat, que ce soit au niveau du cadre, du moteur et des principales composantes, incluant les jantes à bâtons. Des jantes tubeless à rayons auraient certainement mieux cadré avec l’esprit et le look Scrambler, mais le prix aurait alors augmenté de façon sensible. Et il faut garder à l’esprit que la SCL500 est une moto d’initiation conçue pour accompagner les néophytes dans leurs premières aventures motorisées.

Au niveau de la motorisation, la SCL500 reprend le bicylindre en ligne de 471 cm³ des autres 500 de la gamme Honda, inauguré en 2013, il y a déjà 10 ans — ça commence à faire un bail —, un moteur vivant et volontaire qui délivre un couple de 32 lb-pi pour une puissance de 46,6 ch. La centrale électronique reçoit des réglages spécifiques afin de coller à la vocation de la petite Honda, tandis que la démultiplication finale raccourcie privilégie volontairement les accélérations, au démarrage comme au niveau des reprises. La boîte de vitesses à six rapports est associée à un embrayage à glissement assisté.

Le cadre tubulaire en treillis est à la fois un élément de style et la garantie d’un comportement dynamique et facile. Il a fait ses preuves sur la Rebel 500 et est repris intégralement de la custom. Seule la boucle de cadre arrière diffère.

Les suspensions affichent des débattements relativement courts, pour un Scrambler (150 mm/145 mm). Elles se composent d’une fourche de 41 mm de diamètre dépourvue de réglages et d’une paire d’amortisseurs (pour le look) réglables en précontrainte du ressort. Les roues — 19 pouces à l’avant et 17 pouces à l’arrière — chaussent des enveloppes mixtes Dunlop Trailmax Mixtour. Les freins sont assistés par un ABS dont les réglages ont été spécialement adaptés à une utilisation sur tous les types de surfaces, y compris dans les chemins.

L’intégralité de l’éclairage est à DEL, l’instrumentation fait appel à un écran ACL et les clignotants disposent d’une fonction « signal de freinage d’urgence ». Voila pour le tour du propriétaire. Passons maintenant au comportement dynamique.

Prise en main

La SCL500 est fine et élancée, la selle est plutôt basse pour un Scrambler (790 mm), ce qui permet de bien poser les pieds au sol et le poids est raisonnable (192 kg en ordre de marche). C’est une vraie Honda. C’est-à-dire une moto docile et souple, pas intimidante pour un rond.

La position de conduite est à mi-chemin entre celles de la CB500F et de la Rebel 500. On a le dos droit, les bras détendus grâce au guidon cintré plutôt étroit et les jambes raisonnablement repliées. La position debout sur les cale-pieds est similaire à celle de la Honda CB500X et permet d’évoluer en chemin facile sans difficulté majeure.

Comme sur la Rebel, la clef de contact se trouve sur le côté gauche et le blocage de la direction, sur le côté droit. Il ne faut pas oublier de déverrouiller la direction avant de décoller, les deux fonctions étant dissociés. Au démarrage, le bicylindre émet une sonorité plutôt feutrée. Rien pour réveiller vos voisins, rassurez-vous. L’embrayage est souple, tout comme la boîte de vitesse et la moto s’élance en douceur, en parfait contrôle.

Le tableau de bord issu de la Rebel 500 est dépourvu de compte-tours. Il se compose d’un compteur rond à affichage ACL, à fond noir, plutôt compact, qui affiche l’heure, le rapport engagé, la vitesse et le niveau d’essence. Il comporte également un totalisateur kilométrique et deux partiels.

Quant aux commodos classiques, ils sont sobres et peu encombrés. La moto étant dépourvue d’électronique, en dehors de l’ABS et de l’injection, les boutons et indicateurs qui ont fleuri sur nos guidons depuis quelques années sont absents. Ça fait du bien. On revient ainsi à l’essentiel. De chaque côté du compteur, on trouve un bouton permettant de sélectionner les informations affichées, dont la consommation moyenne et instantanée, et de les réinitialiser au besoin.

Le bicylindre parallèle qui propulse la SCL500 est un moteur que l’on qualifierait de carré, car ses valeurs de course et d’alésage sont quasiment identiques (67 x 66,8 mm), ce qui permet de réaliser un moteur assez court, bien rempli à tous les régimes et très linéaire, un caractère que les néophytes apprécient habituellement. Le vilebrequin est calé à 180 degrés — ce qui explique son manque relatif de caractère — et un arbre d’équilibrage est logé derrière les cylindres, afin de réduire les vibrations au minimum. Ce choix contribue également à la compacité du moteur. Le twin développe une puissance de 46,6 ch à 8 500 tr/min et un couple de 32 lb-pi à 6 250 tr/min. La réponse à l’accélérateur est immédiate et la puissance est délivrée de façon très linéaire. Il distille une plage d’utilisation étendue et tire librement. Son couple modeste oblige à jouer du sélecteur, particulièrement en ville. Sur route ouverte, il faut parfois tomber un ou deux rapports pour dépasser un autre véhicule avec autorité ou obtenir des reprises franches.

Avec son injection électronique bien calibrée, le moteur de la CB répond sans à-coups, à tous les régimes. Relativement souple, il reprend sans rechigner dès les bas régimes pour monter rapidement dans les tours, sans crête de puissance ni coup de pied au cul. Cette grande linéarité est un avantage sur une moto qui se destine avant tout aux débutants, lesquels n’auront pas à craindre de se faire surprendre par un déferlement soudain de chevaux. Dans le milieu de sa plage de régimes, le twin commence à vibrer. Rien de rédhibitoire cependant, mais notable.

La SCL500 est une moto à vocation urbaine. C’est un milieu dans lequel elle est à l’aise, grâce à sa finesse, à la légèreté relative et à son agilité. Elle se faufile dans la circulation avec aisance et son moteur disponible et souple — il évolue sans broncher à 40 km/h sur le dernier rapport — permet de s’en extraire facilement. D’autant que la boîte de vitesse et l’embrayage sont souples et précis. En ville, on évolue principalement sur les rapports intermédiaires. Le moteur ne chauffe pas trop, il ne broute pas excessivement et sa puissance est facile à doser.

En revanche, le rayon de braquage limité de la SCL500 ne favorise pas les manœuvres à basse vitesse et il faut parfois s’y reprendre à deux fois pour effectuer un demi-tour sur une voie simple.

Sur les routes secondaires, la Honda se retrouve dans un environnement favorable. Elle danse d’un virage à l’autre avec aisance et fait preuve de grâce. Sur les routes sinueuses, elle évolue principalement sur les 3e, 4e et 5e rapports. Le moteur est alors volontaire et les reprises honnêtes, néanmoins, le manque de frein moteur oblige à utiliser le frein plus que d’habitude pour décélérer. Heureusement, le simple disque avant est efficace et ralentit bien la bête, sans affecter la trajectoire et il suffit d’utiliser le frein arrière pour placer la moto en courbe.

Les pneus mixtes Dunlop Trailmax offrent une adhérence et une traction sans faille, sur route comme en chemin dur et mettent le pilote en confiance. On peut sans crainte adopter un rythme soutenu et se faire plaisir.

En tout-terrain, le Scrambler Honda se débrouille bien tant qu’on reste sur des chemins faciles au revêtement compact, grâce à sa roue avant de 19 pouces, son guidon relevé, ses pneus mixtes, ses débattements de suspension et son poids bien contenu. Mais sa garde au sol est insuffisante pour adopter une conduite engagée en hors route. Dans cet environnement, la SCL500 aurait besoin d’un sabot moteur pour préserver son échappement, la garde au sol étant quand même réduite par rapport à celle d’une aventurière pure et dure.

Sur voie rapide et sur autoroute, la Honda n’est pas vraiment dans son élément. Son moteur permet certes de soutenir une vitesse de croisière élevée, mais ce dernier est lent à monter en régime et les deux derniers rapports sont un peu anémiques. Ils fonctionnent à la façon d’une surmultipliée afin d’abaisser le régime moteur et la consommation. Et comme le twin vibre passablement dans le haut de la bande de régimes, ça devient vite fatigant. De plus, le manque de protection taxe le pilote sur de longues distances dans cet environnement.

Confortable en solo, grâce à ses suspensions bien calibrées quoique basiques, qui fonctionnent globalement bien, la SCL500 l’est moins en duo. En effet, les suspensions sont alors trop souples, ce qui nuit au confort et altère le comportement routier de la Honda jusque là sans reproche. Réserver le duo à de petites sorties urbaines ou à des escapades champêtres de courte durée.

Un bilan positif

La SCL500 est une moto homogène que les néophytes n’auront pas de difficulté à prendre en main. Sur le marché canadien, sa compétition se limite à quelques machines — en dehors de ses sœurs de la gamme 500 — dont la Husqvarna 401 Svartpilen, la Yamaha MT-03, la KTM 390 Duke ou la Royal Enfield Scram 411 nettement moins puissante (24 ch).

C’est une moto équilibrée au look néo-rétro sympathique, parfaite pour aller au boulot la semaine et s’évader en campagne le week-end, avec de petites incartades en sentier (facile). Son terrain de prédilection est la ville et les routes secondaires. En revanche, elle n’est pas trop à l’aise sur les voies rapides et demande à s’en évader à la moindre occasion.

Au Canada, la SCL 500 2023 est disponible dans un coloris unique — vert laurier mat métallisé — d’inspiration militaire, qui n’est pas le plus chatoyant, c’est le moins que l’on puisse dire. On regrette que Honda Canada n’ait pas osé l’orange ou le bleu caraïbes, voire le noir mat, offerts dans d’autres pays. Ou encore le chrome du C72 original. Ça aurait été superbe ! Pour ce qui est du prix, il s’établit à 9 100 $ (transport, préparation, livraison inclus). Presque abordable donc.

FICHE TECHNIQUE

INFORMATIONS GÉNÉRALES

  • Poids en ordre de marche : 192 kg
  • Hauteur de selle : 790 mm
  • Capacité essence :  12 L
  • Consommation : 3,8 L/100 km
  • Autonomie : 315 km
  • Prix : 9 100 $ (transport, préparation, livraison inclus)
  • Coloris : Vert laurier mat métallisé

MOTEUR

  • Moteur : Bicylindre parallèle quatre temps, calé à 180°, à refroidissement liquide, DACT, 4 soupapes par cylindre
  • Puissance : 46,6 à 8 500 tr/min
  • Couple : 32 lb-pi à 6 250 tr/min
  • Cylindrée : 471 cm3
  • Alésage x course : 67 x 66,8 mm
  • Rapport volumétrique : 10,7:1
  • Alimentation : injection électronique PGM-FI ; corps de papillon de 34 mm
  • Transmission : 6 rapports
  • Entraînement : par chaîne

PARTIE CYCLE

  • Cadre : treillis tubulaire en acier
  • Suspension : fourche télescopique, tubes de 41 mm, non réglable. Débattement de 150 mm ; Double amortisseur de 45 mm de diamètre, réglables en précontrainte du ressort (5 positions). Débattement de 145 mm ;
  • Empattement : 1 485 mm
  • Chasse/Déport : 27°/108 mm
  • Freins : Deux disques de 296 mm avec étriers double piston. Arrière : Disque de 240 mm, ABS de série ;
  • Pneus : Dunlop Trailmax
    110/80-19 à l’avant
    15070-17 à l’arrière

VERDICT RAPIDE

ON AIME BIEN

  • La facilité de prise en main ;
  • La consommation ;
  • L’absence d’électronique ;
  • Le poids raisonnable.

ON AIME MOINS

  • Le look ;
  • L’absence de compte-tours ;
  • L’absence de réglages des suspensions ;
  • L’absence de prise USB ;
  • Le duo ;
  • Le choix limité de coloris.

ÉQUIPEMENT DU PILOTE

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