« Éditos

On n'arrête pas de rouler parce qu'on devient vieux, on devient vieux parce qu'on arrête de rouler!

Sur l’asphalte noir de mes errances, je griffonne inlassablement les pages blanches du livre de ma vie. Un roman dont je suis le héros et que j’écris en «live», au fil des kilomètres, sans plan ni carte. Je roule sans autre but que de me faire plaisir et de me rendre au bout du chemin avec le sourire aux lèvres. J’avance à vive allure sur une route déserte, sans savoir où elle me mènera, mais je fais confiance à ma bonne étoile. Elle me guide depuis mon enfance et ne m’a jamais trahi jusqu’à présent.

Chaque fois que je me retrouve seul, anonyme dans la foule, je profite de cet instant au maximum en me disant que parfois «Il vaut mieux être seul que mal accompagné». Et là, je ne parle pas de ma vie amoureuse. Je suis un homme comblé à ce niveau. Depuis 35 ans, je partage ma vie avec une femme en or qui a bien du mérite à me supporter. Et qui aurait facilement pu trouver mieux que moi… Non, je parle de ma vie de «clochard céleste», comme disait Jack Kerouac. Dans ces moments de solitude choisie, personne n’est là pour me faire la gueule, me dire quoi faire ou pour m’imposer une direction à suivre. Mais, même si je suis solitaire, c’est souvent de courte durée. En effet, je retrouve immanquablement une foule d’amis lors de mes périgrinations et je m’en fais des nouveaux chaque fois. Ils m’accompagnent un instant, ou toute la vie, sans rien attendre d’autre de moi que de partager un bon moment, un bon repas, une bonne bouteille.

La passion est mon moteur, le plaisir mon carburant, l’amitié ma nourriture spirituelle. Sur la route, comme dans ma vie quotidienne. Alors, quand la vie déraisonne, qu’elle me confronte à la maladie, à l’absence des êtres aimés, à l’éloignement, au spleen, il me suffit de mettre le contact et de répondre à l’appel du large. Je reprends la route pour me perdre ailleurs, me noyer dans l’océan de mes souvenirs passés et futurs. Une excuse parfaite pour retremper ma plume dans l’encre de ma passion.

Là, je reviens d’une semaine de rêve à Barcelone, ponctuée par trois jours de roulage inoubliables sur le magnifique tracé du circuit de Catalunya. Trois jours passés avec une équipe étonnante au sein de laquelle les valeurs humaines sont placées sur un plan d’égalité avec les valeurs professionnelles (service à la clientèle, compétence, expérience, dévouement…). C’est assez rare pour le souligner.

«Une amitié née des affaires vaut mieux qu’une affaire née de l’amitié,» disait David Rockfeller. Ce en quoi j’aurais tendance à être d’accord avec lui. Personnellement, j’espère sincèrement que ce séjour me permettra de tisser des liens d’amitié et de travail durables avec ces passionnés avec lesquels j’ai ressenti une connivence extraordinaire.

Ce voyage a également été l’occasion de faire une rencontre impromptue. En effet, en cherchant mon nom sur la feuille des temps, je suis tombé par hasard sur celui de Philippe, un ami virtuel, membre d’un groupe Facebook auquel j’appartiens aussi. L’occasion de mettre une âme sur un visage et de vivre un moment d’éternité avec lui. Au détour d’une discussion à bâtons rompus, nous nous sommes découvert des atomes crochus. Nous avons partagé nos expériences, comparé nos chronos et échangé nos petits secrets au sujet du tracé, tout en sirotant un café sur le bord de la piste. Philippe est Basque, ce qui ne gâte rien. Techniquement, on est presque «pays»! Le Sud-Ouest (plus particulièrement les Landes et le Pays Basque) c’est ma région d’adoption et de cœur. Et comme Philippe habite à moins de 60 km de chez mes frères, je ne manquerais sûrement pas d’aller trinquer ou manger avec lui lors de mon prochain passage dans la région. On est donc appelé à se revoir.

Je vous l’ai certainement déjà dit — je sais, j’ai tendance à radoter en vieillissant —, mais j’ai besoin de bouger pour me sentir vivant. De voyager, à moto de préférence. Car il n’existe aucune autre mode de locomotion qui me transporte de cette façon. J’ai besoin de routes de rêve, de pistes de course, de panoramas exotiques, de motos mythiques pour apprécier la vie. J’ai besoin de me mettre en danger, ou en déséquilibre, à tout le moins, pour avoir le sentiment que ma vie à un sens et mérite d’être vécue. Mais j’ai aussi besoin de la présence de mes proches et de mes amis pour écrire le livre de ma vie au plus-que-parfait. Et à ce sujet, je dois reconnaître que la vie me gâte. J’ai des amours et des amitiés fidèles; pas des centaines, comme sur Facebook, mais quelques dizaines. Des âmes sœurs, des complices, des confidents. Des gens triés sur le volet et qui m’aident à traverser la vie sans vieillir trop vite.

Comme le dit ma maxime préférée: «On n’arrête pas de rouler parce qu’on devient vieux, on devient vieux parce qu’on arrête de rouler!» Mais, dans cette citation, on pourrait facilement remplacer le verbe «rouler» par le verbe «aimer», sans changer fondamentalement son sens. En ce qui me concerne, les deux verbes sont intimement liés. Et je ferais tout pour ne pas vieillir trop rapidement.

Une réponse à “Recette pour ne pas vieillir”

  1. Michel C.

    Entièrement d’accord avec toi, Didier, tu es choyé par la vie et ton parcours en dit long, mais ce qui est très beau chez toi, c’est que tu le réalise, toi, à quel point tu es gâté. Je suis un peu jaloux des magnifiques et mémorables « rides » que tu peux faire à l’extérieur du pays, ceci sûrement grâce en tout ou en partie à ton travail. En ce qui me concerne, en regard du premier paragraphe de ton commentaire, moi, c’est mon GPS qui me ramène à la maison tellement je pars sans but, ni itinéraire précis sur les belles routes ( lire petites, loin de la circulation lourde ) du Québec. Allez, assez gribouillé, bonne route.

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