À moto, je me protège!
Hier, en allant chercher une Kawasaki Ninja 250R à Toronto avec mon ami Richard, nous avons été surpris du nombre élevé de motocyclistes qui roulaient sans aucune protection, à l’exception de leur casque. Bien que nous n’ayons pas tenu de décompte précis, je dirais que plus de 80 % des motocyclistes que nous avons croisés se baladaient en short, en t-shirt (parfois torse nu) et sans gants. Plusieurs, même, en sandales. Richard me raconta que durant le week-end, il avait croisé un couple en Goldwing et que la passagère, en plus d’être très peu vêtue, était pieds nus. Peut-être cela vous semble-t-il normal — il faisait très chaud me direz-vous —, mais moi ça me surprend.
Contrairement au mythe qui veut que ce soient seulement les propriétaires de customs qui se promènent en bedaine, les motocyclistes que nous avons croisés ainsi dévêtus pilotaient aussi des sportives, des routières — dont de nombreuses Goldwing, comme si l’énorme carénage pouvait protéger les occupants en cas de chute —, des routières-sportives et même des BMW, dont quelques GS (habituellement, les Béhémistes s’équipent de la tête aux pieds. Les temps changent…).
Dernièrement, j’ai eu l’occasion de constater de visu les dommages qu’une chute pouvait causer. J’ai vu les fesses bleuies, — que dis-je, noircies — d’un ami qui est tombé, en ville et a glissé sur la partie la plus charnue de son anatomie. Quand il s’est relevé, son jean et son slip étaient en lambeaux et la peau de ses fesses arrachée. Le jean, tout comme la peau non tannée, offre une piètre résistance à l’abrasion, apparemment… Il a dû se rendre à l’hôpital et subir une opération au cours de laquelle le chirurgien a retiré plus de 600 cc de sang de l’hématome.
Une amie, infirmière à l’urgence de l’hôpital Saint-Luc de Montréal, m’a déjà dit avoir passé des heures à nettoyer les plaies de motocyclistes qui étaient tombés sans protection. À stabiliser les brulures de la peau. À retirer les cailloux et autres débris des chairs sanguinolentes, à la pince, avant qu’il soit possible de soigner, voire d’opérer le patient. J’ose à peine imaginer la douleur que l’on doit ressentir en pareille circonstance.
Depuis l’an dernier, une dizaine d’amis, tous motocyclistes d’expérience, sont tombés, bêtement, sans que ce soit nécessairement leur faute. Et si dans la plupart des cas, ces chutes sont survenues à basse vitesse, les blessures qui en ont résulté étaient tout sauf bénignes. Ce qui m’a convaincu de porter mes équipements de protection en tout temps, et pas seulement quand je fais de la piste ou lors de longs voyages. Désormais, j’ai en permanence ma dorsale sur le dos, des genouillères ainsi qu’un short de protection (coccyx et hanches) sous mes pantalons (habituellement un jean renforcé en kevlar, ou un surpantalons). De toutes façons, j’ai toujours roulé avec un blouson (de cuir, la plupart du temps), des gants et des bottes de moto, quelle que soit la température… Question d’habitude.
Depuis le début de la saison, la SAAQ mène une campagne intitulée «En moto… mieux vaut sauver sa peau!» que je trouve fort à propos. Vous pouvez d’ailleurs consulter le prospectus de cette campagne en ligne, en cliquant ici. Pour une fois que la SAAQ œuvre pour nous, autant le souligner.
Cela dit, je ne cherche pas à jeter l’anathème sur ceux qui roulent en bedaine (chacun est libre de faire ce que bon lui semble, non?), pas plus que je ne leur reprocherais de faire grimper le coût de nos primes d’assurance (d’autres s’en chargeront à coup sûr), mais j’aimerais qu’ils prennent conscience de leur vulnérabilité et des risques de blessures graves qu’ils encourent en ne se protégeant pas adéquatement.
Ainsi, selon le rapport MAIDS* dont les résultats ont été repris dans une étude publiée par l’ACEM (Association des constructeurs européens de motocycles), un équipement, même succinct, limite considérablement les conséquences d’une chute. Les gants réduiraient les risques de blessures de 93% à 97%. Porter une veste ou un blouson offrirait un facteur de protection variant de 70 % (textile) à plus de 92 % (cuir). Même chose pour les pantalons (60% pour un jean classique, ou des pantalons en textile et près de 96 % pour des pantalons en cuir, un jean moto renforcé ou un surpantalons textile avec protections). Enfin, une paire de bottes de moto en cuir, de bonne qualité, offrirait un indice de protection élevé (plus de 90%).
Ces études soulignent également l’importance de bien se protéger les jambes — ce qu’on a tendance à négliger —, car elles sont régulièrement touchées en cas d’accident comme le démontrent les rapports. L’étude préconise aussi le port d’une dorsale pour protéger la colonne vertébrale et d’équipements dotés de coques au niveau des articulations.
L’autre facteur qui ressort de ces études, c’est que la grande majorité des accidents survient en ville, à faible distance de notre domicile et à une vitesse inférieure à 52 km/h. D’où la nécessité de bien s’équiper en ville ou quand on se promène autour de chez soi. Même si le sens commun nous incite à penser le contraire.
Pour le moment, le choix de porter des équipements protecteurs nous incombe. Mais, si nous continuons à négliger cet aspect, les pouvoirs publics pourraient bien décider de légiférer en la matière. Avec tous les excès et toutes les dérives que cela comporte (voir le cas du gilet jaune, en France). C’est une simple question de bon sens.
* MAIDS — Motorcycle Accidents In Depth Study
Études sur la sécurité
Rapport Hurt (États-Unis)
Rapport MAIDS (Europe)
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