Présentation
Les plaisirs les plus simples sont souvent les meilleurs. Et quoi de plus simple que d’enfourcher sa moto pour décrire un énorme triangle routier dans Charlevoix et menant ultimement aux portes de Chicoutimi?
Sur la route des pyramides
Je déconseille ce parcours plutôt exigeant aux débutants, aux vieillards, aux enfants et aux cardiaques à moins de réduire la vitesse d’un bon tiers et d’augmenter la durée proportionnellement. Deux choix s’offrent d’abord pour parvenir à La Malbaie : la 138 (les monts) ou la 362 (le fleuve). Personnellement, j’avoue privilégier la seconde option plus riche en courbes comme en panoramas. Lorsque la montée débutera à la sortie de La Malbaie, vous aurez une impression de déjà vu. C’est en effet une version légèrement diminuée et moins coquette que la première portion du trajet; le fleuve, lui, demeure entier. À un moment, on roule pratiquement à flanc de montagne et la cime des arbres en contrebas dépasse à peine de la ligne du garde-fou. À la façon dont la 138 est dessinée, on a parfois l'impression de survoler la région en avion. Le point de vue sur les gros cargos longeant nonchalamment le littoral, en contrebas, est imprenable. Lorsque je me suis arrêté pour faire une pause (après tout, j’étais parti de Montréal le matin même pour cet article), un gros bruit assourdissant a capté mon attention. Ce n’était pas le gros porte-conteneur rouge que je voyais en bas, mais plutôt un train de marchandises arrivant à toute allure entre le fleuve et la montagne. Vous pourriez pratiquement sauter sur le dessus des wagons tellement ils semblent proches. Après une heure de route, le premier côté fleuve du triangle est terminé; vous êtes à St-Siméon, redescendez sur le plancher des vaches. Selon l’heure, attendez-vous à une recrudescence du trafic dans cette ville, en raison du traversier qui la relie à Rivière-du-Loup, sur la rive-sud du fleuve. Passé à l’est de ce village, vous vous retrouverez pour ainsi dire seul; assurez-vous d’avoir fait le plein de carburant pour ne pas briser votre rythme; il n’y a d’ailleurs qu’un point de ravitaillement à mi-chemin (priez pour qu’il soit ouvert). Il est possible de se prélasser un peu sur le bord du fleuve avant de commencer à suivre le fjord du Saguenay. L'entrée du petit parc est à votre droite, environ 100 mètres après la 170 Ouest, votre prochaine destination.
Vue du fjord à Petit-Saguenay
Retour rapide dans un décor en trois dimensions composé de gros blocs montagneux très à pic où la végétation ne prend que difficilement racine. Plus bas, où nous évoluons, de belles collines donnent du relief à la vallée qui longe les impressionnantes falaises à angles droits. La route est un véritable délice, tournant, virant, changeant d’angle d’attaque, le tout entre les sapins. Elle offre une vue changeante bien qu’ayant un point commun : les montagnes. La rivière qu'on longe offre un bon débit et est idéale pour le kayak en eau vive. Juste qu’au village de Petit-Saguenay, à 50 km de là, c’est un festival de courbes. Je parle ici de courbes à 65 km/h, dans une zone limitée 90 km/h et qui se suivent à une distance de 150 à 200 mètres. Si vous n'avez pas fait le plein à St-Siméon, sachez qu’il y a un poste d’essence à mi-chemin. On a beau longer le Saguenay, on ne fait que le deviner derrière le flanc montagneux. À St-Félix-D’Otis, on retrouve quelques champs sur le plat et on approche enfin d’un premier point de vue sur le Saguenay. Dix minutes plus tard, en descendant entre le roc, vous apercevrez enfin le fjord bordé de monts pratiquement droits comme des murs de granges. Quelques points d’observations ont été prévus le long de la 170 jusqu’à La Baie où vous pourrez jouir en personne de ce panorama de carte postale qu'on voit dans les pubs vantant les mérites de la région. La Baie est une grosse ville instantanée sans banlieue. À ce point du parcours, vous avez parcouru le deuxième côté du triangle (le côté fjord). Selon la vitesse à laquelle vous roulez, vous êtes sur la route depuis environ 1 h 30. Suivez les instructions pour la 170 et vous aboutirez au bout de la piste où les CF-18 prennent leur envol à Bagotville (stationnement pour curieux inclus). Si le cœur vous en dit, vous pourrez visiter un musée aérien extérieur gratuit.
Embouchure du fjord, au niveau de St-Siméon
Revenez sur vos pas et descendez à travers le parc des Grands-Jardins par la route 381. Plane au début, cette route qui se dirige vers Charlevoix offrira des courbes de plus en plus exigeantes. La fatigue commençant à se faire sentir, vous devrez redoubler de prudence, d'autant que l’état du bitume est très moyen. Faites le plein à l’entrée du parc et prévoyez 130 kilomètres de forêts, de lacs et de ruisseaux. J’oubliais : quelques descentes apocalyptiques en « S » débutant à 896 mètres d’altitude et terminant au niveau de la mer... Avez-vous avez vu les douze kilomètres de forêt complètement grise brûlée par un incendie de forêt? Ce trajet par la 381 prend environ 1 h 25 et vient boucler le triangle.
Si vous n'aimez pas ce trajet, de deux choses l'une : vous n'êtes pas motocycliste et vous avez acheté une moto pour avoir l'air cool à la terrasse des cafés de St-Sauveur ou alors vous n'avez pas assez de sang qui circule dans vos veines. Mais comme vous ne correspondez à aucune des deux descriptions, vous allez adorer cette balade.
CARTE INTERACTIVE (Cliquer sur le lien sous la carte pour agrandir celle-ci) |