Coup de cœur!
Publié le 9 septembre 2014
À la fin du mois de juin dernier, mon collègue Patrick Laurin et moi-même avons pris part à un roulage exclusif de quatre jours aux circuits de Brno (République tchèque) et de Pannonia Ring (Hongrie). Une expérience incroyable que nous ne sommes pas prêts d’oublier…
Photos: Renaud Henry (action), Yvan Genestier et Didier Constant (ambiance)
Depuis que j’ai fait la connaissance de l’équipe de First-on-track (FOT), je vais de surprise en surprise. Dans le bon sens du terme. Les deux premiers événements auxquels j’ai pris part avec l’organisation des frères Genestier, au magnifique circuit de Catalunya, en banlieue de Barcelone, en octobre et en mars dernier ont été une révélation pour moi. Même si j’ai été invité à plusieurs lancements de presse prestigieux organisés sur des circuits internationaux de renom (Portimao, Philipp Island, Jerez, Le Mans, Paul Ricard, Laguna Seca, New Jersey Motorsport Park, Barber Motorsport Park, Las Vegas Motor Speedway…) au cours de ma carrière, c’est la première fois que je participais à un roulage de trois jours sur une piste du calibre de Catalunya, dans un environnement hyper professionnel. Que je bénéficiais d’un service VIP tout inclus, sous la supervision de pilotes de la trempe de Sébastien Charpentier et de Jean-Michel Bayle, une de mes idoles de jeunesse! La première fois aussi que je vivais la vie des gens riches et célèbres façon motarde.
À Barcelone, j’ai réalisé l’ampleur des exploits accomplis par les pilotes de Grand Prix et de Superbike et j’ai pu vivre, à mon niveau, une expérience similaire. En HD, en 3D, mais surtout en live! Renforcé par le fait qu’en juin 2013, j’avais assisté au GP de Catalunya avec des amis et observé les meilleurs pilotes du monde en action. J’avais en tête des images très fraîches de Rossi, Marquez, Lorenzo et consorts se tirant la bourre dans la montée du Carroussel, des chutes à répétition à l’entrée du Stadium, des dépassements d’anthologie au bout de la longue ligne droite des stands.
Mais à Catalunya, sur ma Honda CBR1000RR, je n’étais plus un témoin privilégié, mais un acteur. Je pouvais mesurer, grâce au transpondeur embarqué sur ma moto, l’écart de performance qui sépare le motocycliste lambda de ces pilotes. Une leçon d’humilité, en quelque sorte, mais que l’on peut mettre en perspective et relativiser. En effet, même si le matériel qu’ils utilisent est sans commune mesure avec les motos de série que nous pilotons lors de nos roulages, il reste que leur expérience, leur talent hors du commun et leur jeunesse sont pour beaucoup dans les performances qu’ils réalisent course après course, alors qu’ils défient les lois de l’équilibre et de la physique. À moto égale, ils nous colleraient encore des dizaines de secondes au tour, sans forcer, alors que nous serions à l’agonie pour ne pas avoir l’air ridicules.
Après cette expérience, je croyais avoir décroché le Graal, mais c’était avant d’entreprendre ce périple de quatre jours en Europe de l’Est et de découvrir Brno, la deuxième plus grande ville de République tchèque, une cité magique où se mêlent histoire, arts et culture. Douceur de vivre aussi. Un endroit qui a fait tomber tous mes préjugés sur les anciens pays du bloc soviétique. Nous sommes arrivés à Brno après un voyage d’une semaine à moto dans les Alpes, à travers la France, la Suisse, l’Allemagne, l’Autriche. Un séjour inoubliable au cours duquel nous avons vu des paysages sublimes, emprunté des routes de rêve et rencontré des gens chaleureux et merveilleux. À Brno, l’hôtel où nous logeons, le Barcelo Brno Palace, est un 4 étoiles haut de gamme, moderne et luxueux. Pourtant, les prix qu’il pratique en juin sont raisonnables pour son standing.
Là, nous avons bien sûr retrouvé toute l’équipe de First-on-track, à savoir Ludo et Yvan, les deux jumeaux Genestier, Vatea, le préparateur/mécanicien-chef et Kiki, le conducteur du magnifique semi-remorque de l’équipe et assistant-mécano, mais aussi quatre clients VIP réguliers, Pascal accompagné de sa femme Audrey ainsi que Xavier, Jean-Marc et Tristan dont j’ai fait la connaissance à Barcelone. L’occasion de retrouvailles chaleureuses. En effet, dans le groupe, l’ambiance est studieuse en piste, mais très détendue hors de la piste. Il règne un climat de franche camaraderie qui donne envie de revenir. Même si chacun observe les chronos des autres et les compare aux siens, il n’y a ni jalousie ni esprit de compétition. Tout le monde s’entraide et s’évertue à aider les autres à rouler plus vite.
Le circuit Masaryk de Brno est niché en pleine forêt, une vingtaine de kilomètres à l’ouest de Brno, au nord de la commune de Kyvalka. L’aéroport le plus proche est celui de Vienne, en Autriche, une heure et demie plus au Sud. Inaugurée en 1987, cette piste de 5,4 km comporte 14 virages (8 à droite et 6 à gauche). Large de 15 m, elle comporte cinq lignes droites, dont une longue de 636 m en avant des paddocks, mais surtout cinq pifs pafs très techniques.
Le circuit de Brno accueille le GP de la République tchèque chaque année, à la fin du mois d’août et marque le dernier tiers de la saison. Le GP de Brno est l’épreuve qu’il ne faut pas rater pour ceux qui veulent avoir des chances de décrocher le titre. Circuit complet, Brno est rapide et technique à la fois. Il requiert du métier pour aller vite. Il convient en effet d’aligner tous les virages parfaitement pour trouver le rythme et faire un bon chrono. À cette condition seulement, le circuit vous livrera tous ses secrets. On virevolte alors d’un virage à l’autre, comme dans une Danse tchèque. On négocie les chicanes avec maestria et on avale les lignes droites le gaz au fond. La dernière section constituée d’une montée impressionnante suivie d’un gauche aveugle et rapide, puis d’un droit donnant accès à la ligne droite des stands, est particulièrement excitante à négocier. On sort du dernier virage avec un angle dément, le gaz ouvert en grand, les yeux rivés sur le pont qui traverse la piste, au fond, où l’on va se redresser et couper légèrement les gaz pour plonger dans le premier virage, un long droit qui semble ne jamais vouloir finir et où on est penché à l’extrême. En MotoGP, le record du tour de 1:55.527 a été réalisé par Cal Crutchlow en 2013 sur la Yamaha M1 de l’écurie Tech3. Le meilleur tour en course appartient à Dani Pedrosa, avec un temps de 1:56.027. Il l’a enregistré cette année, lors de sa victoire au GP de Brno, la seule course de l’année qui n’a pas été remportée par Marc Marquez.
Quand on arrive au circuit, on est surpris par l’étendue du site. Il est immense. Le paddock et les installations qui devaient certainement figurer parmi les plus modernes au monde lors de l’ouverture de la piste accusent aujourd’hui le poids des ans et devront être rafraîchis bientôt, le circuit ayant renouvelé son entente avec la Dorna pour plusieurs saisons. Pourtant Brno est un véritable bijou. Il offre de nombreuses dénivellations qui rendent le tracé vraiment intéressant. Il comporte plusieurs virages en descente, dont le fameux «Kevin Schwantz Corner» (le virage 10), dans lesquels on arrive en appui, sur les freins. La fourche est complètement comprimée et l’avant cherche à se dérober sous vous. Il compte aussi des montées impressionnantes qui permettent de négocier les virages qui les suivent à pleine vitesse, avec une adhérence maximale. Génial!
À Brno, nous n’avions pas de transpondeurs sur nos machines. Impossible de savoir quels temps nous avons réalisés. En ce qui me concerne, je me sentais vraiment à l’aise. La première journée, je me suis appliqué à apprendre la piste et la seconde, je me suis fait plaisir. Il y a bien un ou deux endroits que je ne maîtrisais pas parfaitement, mais dans l’ensemble je me débrouillais plutôt bien. En fait, j’aurais bien aimé rouler deux jours de plus à Brno, mais il fallait quitter pour aller à Pannonia Ring, pour deux journées sur le tracé hongrois.
De Brno, il faut compter 3h30 pour rejoindre Pannonia Ring en roulant plein sud vers Bratislava, en Slovaquie et Sarvar, en Hongrie, une ville thermale située à une dizaine de kilomètres au sud-ouest du circuit, pas très loin du lac Balaton. Le circuit est perdu en pleine campagne. Il n’y a aucune agglomération à des kilomètres à la ronde, à tel point qu’aucune limite sonore n’y est en vigueur. Vous pouvez faire autant de bruit que vous voulez.
Pannonia Ring est une piste de club haut de gamme conçue par des motards, pour des motards, sur laquelle il fait bon rouler. Un endroit parfait pour s’amuser entre «Gentlement Racers». Les installations sont récentes et de qualité. Bien que le Ring n’accueille pas de séries mondiales, comme la F1, le MotoGP ou le SBK, lesquelles s’arrêtent plutôt au Hungaro Ring lors de leur venue en Hongrie, il propose tous les services que l’on peut demander: deux hôtels en bordure de piste, un restaurant, un centre médical, un immense paddock de 35 000 m2 avec garages fermés, une station d’essence, une boutique où l’on trouve équipements, pièces de rechange et accessoires à des prix concurrentiels, une tour de contrôle qui abrite des salles de conditionnement physique et des salles de réunion. Sans oublier des toilettes et des douches bien entretenues. En un mot, rien ne manque. Le site héberge également une piste de karting avec son propre paddock et un héliport où les pilotes les plus fortunés peuvent se poser à leur guise.
Le tracé de 4,74 km comporte 18 virages (11 droits et 7 gauches) et 5 lignes droites, dont celle des puits, la plus longue, qui mesure 700 m. La largeur de la chaussée varie de 11 à 13 mètres et le revêtement est en bon état. Sans offrir l’expérience de Brno, Pannonia Ring est un très beau circuit, du calibre de Calabogie ou de Tremblant, les dénivellations en moins. En effet, le circuit est irrémédiablement plat, bordé de gazon et offre peu de points de repère. À tel point qu’il est relativement difficile à apprendre. On a l’impression de découvrir les virages à chaque tour.
Le record du tour en Superbike est détenu par le pilote Autrichien Andreas Meklau, en 1:53.9. Le pilote le plus rapide de notre groupe, un pro roulant en SBK, tournait en 02:00.276 et les 20 premiers se tenaient en dessous de 2:10. Sur 83 pilotes, près de 60 tournaient entre 2:10 et 2:30. Le plus lent évoluait en 2:41. Les cinq pilotes de notre groupe, quant à eux, roulaient entre 2:12 et 2:33.
Si tout s’était bien passé pour moi à Brno, j’ai connu quelques problèmes en Hongrie. En effet, en arrivant à notre hôtel à Sarvar, ma moto de route est tombée de sa béquille latérale (elle était mal déployée et la moto était garée légèrement en pente) pour atterrir sur ma jambe gauche sans que je puisse la retenir. Après avoir relevé et stationné correctement ma Suzuki Inazuma, j’ai regardé ma jambe. Elle était mal en point en plus d’être douloureuse. J’avais le mollet et le genou gauches salement amochés. Le lendemain matin, pour la première journée de piste, mon genou était tellement enflé que je n’arrivais pas à fermer le bas de ma combinaison. Et ma jambe ne pliait pas suffisamment pour que je puisse passer les rapports. J’ai donc fait l’impasse sur cette journée, regardant les autres s’amuser avec envie. J’ai fait un détour par le centre médical pour faire inspecter ma jambe par les infirmiers. Il n’y avait ni fracture ni dommage ligamentaire, juste un énorme hématome sur lequel j’ai appliqué glace et chaleur en alternance en plus de prendre un remède de cheval qui m’a permis d’enfiler le cuir le lendemain. Tant que je roulais, je ne ressentais pas trop la douleur, même en posant le genou au sol, mais dès que je rentrais aux puits, c’était l’enfer. Et les antidouleurs et autres anti-inflammatoires n’y faisaient rien.
Malgré ces péripéties je me suis amusé autant que j’ai pu, réalisant un chrono de 2:29.340, le troisième meilleur chrono de notre groupe, en seulement 4 sorties. Le plus rapide était Xavier, le plus âgé d’entre nous (60 ans) en 2:12.967. Yvan, notre prof, enregistra le cinquième meilleur temps de ce roulage en 2:05.290, avec ma moto, ce qui fait que mon nom a figuré en haut du tableau de chronométrage pendant les deux jours. Mince consolation.
Je regrette un peu de ne pas avoir pu rouler les deux jours à Pannonia Ring et de ne pas avoir été en forme. J’aurais bien aimé me bagarrer avec Jean-Marc et Xavier, mais, dans les circonstances, je me considère chanceux dans mon malheur. Même si j’étais mal en point, il n’était pas question de ne pas piloter en Hongrie. Je ne m’étais pas rendu si loin de chez moi pour regarder les autres s’amuser sans moi…
Après avoir quitté nos amis, Patrick et moi avons poursuivi notre périple vers la France en traversant l’Autriche et l’Italie et vécu d’autres belles aventures que je vous raconterais dans un autre article. Mais cette semaine de roulage dans les Pays de l’Est restera un moment fort de ce voyage mémorable. Encore une fois, chapeau Ludo et Yvan! Et merci!
FVP-moto, faites-vous plaisir à moto!
Ce roulage double à Brno et Pannonia Ring était organisé en collaboration par First-on-track et FVP-moto.ch, une organisation suisse dirigée par Florent Picaud et Barbara Schoepfer. FVP dont la devise est «Faites Vous Plaisir» — tout un programme auquel j’adhère sans réserve —, est active dans le domaine depuis plus de 20 ans. Localisée près de Fribourg, FVP est idéalement placée pour rejoindre les différentes pistes d’Europe où elle organise des journées de roulage, la Suisse interdisant les circuits de sports mécaniques sur son territoire.
Comme First-on-track, FVP propose une expérience unique où se mêlent professionnalisme, sécurité sans compromis sur la piste et bonne humeur. Contrairement à certaines compagnies concurrentes en Europe, dont le but premier est avant tout pécuniaire, FVP mise sur le plaisir et le partage et met un point d’honneur à faire passer un excellent moment à ses clients. Florent et Barbara sont tous deux motocyclistes. Ils roulent — et même plutôt bien — en compagnie de leurs clients avec lesquels ils partagent du temps de piste et une certaine fraternité. FVP est plus une confrérie, une communauté d’intérêts, qu’une entreprise commerciale.
En plus de proposer des journées de roulage sur piste, FVP organise des écoles de pilotage permettant aux débutants de s’initier aux plaisirs du pilotage sur piste et aux experts de se perfectionner.
Parallèlement, FVP organise une course d’endurance hors norme, les «500 miles de Magny-Cours» qui est très populaire, aussi bien en Suisse qu’en France.