Cours d’humilité 101 : mieux vaut laisser son ego à la maison
Publié le 10 septembre 2010
Désireux de participer à nos essais de sportives sur piste en toute légalité, notre collaborateur Ugo Levac a décidé de suivre un cours de conduite avancé à l’école de pilotage FAST de Michel Mercier, à Shannonville. Il nous livre ici ses impressions.
Texte : Ugo Levac — Photos : Flair Photo et Pierre Desilets
Je voulais m’inscrire à FAST depuis quelques années, mais j’étais terrorisé à l’idée de rouler sur une piste de course. Pas par peur de la vitesse. En fait, c’est mon orgueil qui me retenait. Et si je n’étais pas capable de mettre en pratique ce qu’on m’enseignerait? Sauf qu’aujourd’hui, je n’ai plus le choix. Si je veux participer aux séances sur piste avec motoplus.ca, je dois obtenir le précieux sésame. Plusieurs circuits l’exigent désormais.
Bien que plusieurs écoles existent, mon choix s’est porté sur l’école de pilotage FAST que dirige Michel Mercier. Elle est établie à Shannonville, en Ontario, depuis maintenant 23 ans. Triple champion canadien en Superbike, Michel a également brillé en courses sur glace, en terre battue et en motocross. Il a remporté 25 titres canadiens dans quatre disciplines différentes en 18 ans de carrière.
Trois niveaux de cours sont proposés. Le niveau 1 couvre les bases du pilotage sur piste. Les niveaux 2 et 3 consistent en une mise en pratique poussée des techniques introduites lors de la phase 1. On y aborde également des techniques de course plus spécifiques.
Ne reculant pas devant la dépense, je me suis inscrit à un cours jumelé du niveau 1 et 2 sur deux jours consécutifs. Les coûts sont de 559 $ par niveau et tout l’équipement est fourni, si vous le désirez. De la moto à la combinaison de cuir une pièce, en passant par les bottes et le casque. Il est possible de prendre le cours avec sa propre moto. Dans ce cas, les coûts s’établissent plutôt à 359 $. En cas de chute, la responsabilité du pilote pour les bris de la moto et/ou des équipements est de 2 000 $. Une assurance facultative de 99 $ réduit la franchise à 399 $ pour la phase 1.
En ce qui a trait aux motos, vous avez le choix entre une Yamaha R6, une Kawasaki EX650R, une Kawasaki 250R, une Kawasaki ZX-6R, une Suzuki GSX-R600 ou une Suzuki SV650. Mon choix s’est porté sur cette dernière.
Les inscriptions se font par Internet et sont faciles et rapides. Comme les cours débutent vers 8 h 15 et que le circuit de Shannonville est situé à 390 kilomètres de Montréal, en bordure de la palpitante autoroute 401, il y a fort à parier que, comme moi, vous arriverez à Belleville, la ville la plus proche du circuit, la veille, afin d’être frais et dispo.
Le grand saut
Le grand jour est finalement arrivé. Debout à l’aube, je suis prêt à 5 h 27. Je suis nerveux, mais en forme, malgré l’heure matinale. J’ai déjeuné et je me rends tranquillement à la piste, laquelle est située à dix kilomètres de mon hôtel. J’arrive sur place 45 minutes avant le début des inscriptions. Il y a déjà une bonne quinzaine de futurs diplômés qui tournent autour des motos de l’école alignées sous le soleil du matin. Plusieurs, comme moi, sont venus avec leur propre moto. On est des vrais motocyclistes, non? Timide à mes heures, je reste en retrait, cherchant à me calmer pendant que des groupes se forment. La testostérone commence à faire son effet. Ça parle fort, ça rit; pour un peu, ils se donneraient des claques dans le dos.
Quand il est question d’essayer des motos, de les décortiquer et de les évaluer, je suis très confiant; plus le temps passe, plus je suis à l’aise dans cet exercice. Je n’ai jamais prétendu que j’étais un grand pilote de circuit routier, mais là, j’ai la nette impression que mon orgueil va être mis à rude épreuve.
Dans ma grande candeur, je m’étais imaginé que j’arriverais, auréolé de ma gloire de journaliste-essayeur, au sein d’un panel de débutants craintifs et que je leur ferais la nique. N’avais-je pas déjà quelques heures en piste à mon actif? Je n’avais pas imaginé un instant que des gars se pointeraient avec des motos de piste dans leur pick-up! Ils sont ainsi une dizaine à pousser leurs montures personnelles pour l’inspection technique. Mais qu’est-ce que je suis venu faire dans cette galère?
Nous montons au quatrième étage de la tour de contrôle où Odette, la femme de Michel Mercier, nous attend pour nous faire signer les renonciations de responsabilité et remplir les fiches de location d’équipement. Trois groupes d’environ 10 étudiants sont constitués en fonction de l’expérience avouée de chacun. Je demande, de manière détournée, à faire partie du groupe avancé. En espérant ne pas avoir à le regretter.
Je m’installe à l’arrière de la salle pour avoir une vue d’ensemble. Michel arrive et nous souhaite la bienvenue. Jusqu’ici, tout va bien! Très tôt, l’accent est mis sur l’apprentissage, évidemment, mais aussi sur la sécurité. D’ailleurs toute la journée, lors de chaque séance, Mercier nous rappellera les consignes de sécurité. On nous donne l’horaire de la journée. Sept séances de 10 minutes en piste entrecoupées chacune d’un débriefing et d’un cours théorique. Nous avons deux sorties en piste le matin, puis une pause de 45 minutes pour manger, et cinq autres séances en après-midi. Je suis un peu surpris d’apprendre que nous ne passerons que 70 minutes en piste au total. Ça m’apparaît alors bien peu. Mais ça, c’était avant de débuter la journée…
Mercier commence par une présentation des notions de sécurité dont le but caché est de dégonfler les égo (pour certains, c’est peine perdue) et un survol de son impressionnante carrière. Il nous explique ensuite les rudiments de la piste. L’exposé me semble interminable. Je suis nerveux et j’ai juste hâte d’en finir. Surtout qu’on reprend tout à la base. C’est comme si le professeur prenait pour acquis que certains n’ont carrément jamais touché à une moto de leur vie. Puis on arrive enfin aux techniques de course. Ajustement de la vitesse en entrée de courbe, point de corde, accélération…
Le gros de la première séance est utilisé pour nous exposer cinq points cruciaux : la vision (regardez où vous voulez aller); le contre-braquage et les trois manières de l’effectuer; la traction; le freinage — Mercier ne nous oblige pas à freiner à deux doigts seulement (les instructeurs le feront), mais il préférerait qu’on le fasse — et enfin, comment utiliser l’espace sur la piste.
Nous descendons au deuxième étage chercher notre équipement. Je craignais de devoir porter une combinaison de cuir et un casque dans lequel 45 autres gars auraient sué comme des cochons. On me tend mon matériel et, ô surprise, le casque Araï et la combinaison Nexo qui me sont attribués semblent carrément neufs. Wow! Ça, c’est une bonne nouvelle. Seuls les gants ont l’air défraîchis.
Nous allons nous asseoir en bas, à l’extérieur, autour de grandes tables à pique-nique. Dieu merci nous sommes à l’abri du soleil. Le groupe est de plus en plus complet. Déjà on peut voir les différentes personnalités émerger. Il y a les jeunes taureaux prêts à défoncer les chronos, les gars plus mûrs qui roulaient fort dans leur temps et viennent pour s’amuser, les vieux sages ici pour apprendre, les femmes qui ajoutent une jolie touche au décor, les faux modestes, et les timides qui observent le cirque avec un air hagard (ça, c’est moi!).
Gentlemen, start your engine!
Il est 10 h 10. Le premier groupe de 10 étudiants, dont je fais partie, est prêt. Un à un, nous nous installons sur les motocyclettes alignées dans les puits. J’enfourche la SV. Trois instructeurs nous prennent en charge et scindent le groupe en trois. Je fais partie de la dernière vague. Nous ne sommes que deux plus l’instructeur. Celui qui m’est assigné est Martin Hamel, un ancien pilote pro du Championnat Superbike Parts Canada.
La petite piste Nelson, dont le revêtement est passablement bosselé, mesure 1,8 kilomètre et compte sept virages. Dès le deuxième virage, l’écart entre moi et le reste du groupe réduit se creuse. Ce n’est pas du tout ce à quoi je m’attendais. J’ai beau forcer, ça va trop vite pour moi, déjà! Heureusement, mon instructeur se retourne à l’occasion et malgré le fait que l’autre étudiant lui colle au train, il ralentit à de multiples occasions pour me laisser gagner du terrain. Ça me donne l’illusion que je travaille bien. Évidemment, le groupe repart de plus belle et l’écart se creuse à nouveau. Pour ajouter à ma confusion, je perds rapidement le compte des rapports. Je passe mon temps à monter et descendre les vitesses, tentant de trouver la bonne. Comme le compteur de vitesse est masqué et que le tachymètre affiche les régimes de 0 à 4 000 tr/min, le reste du compte-tour est également caché par du ruban adhésif, il faut piloter à l’oreille. La sonorité émise par la SV650 équipée d’un échappement Hindle est divine. J’ai adoré cette moto. Pourtant, mes premières 10 minutes en piste furent plutôt catastrophiques.
Après chaque séance en piste, Martin nous prend à part, un par un, pour analyser notre performance, puis nous retournons en classe avec Michel, pour un bloc de théorie. Il fait de plus en plus chaud et j’ingurgite environ un demi-litre d’eau entre chaque sortie sur la SV. Avant de nous renvoyer suer un peu, Mercier nous explique quels sont les bons rapports à adopter en piste. Ah? Tiens! Ce n’est pas trop tôt.
Quelques minutes plus tard, il est temps d’enfourcher les motos à nouveau pour le deuxième segment en piste. Avoir le bon rapport, ça fait toute la différence. Je peux maintenant me concentrer sur mes trajectoires. Je traîne encore un peu la patte, mais c’est moins flagrant. L’instructeur, tout en roulant à fond de train, se retourne et m’indique de la main la trajectoire à suivre. Je le regarde faire et je me dis que j’ai encore des croûtes à manger. Le collègue qui m’avait plus ou moins humilié en exposant ma lenteur, lors de la première sortie, s’envoie dans le décor. Pour lui, la journée est terminée. Clavicule cassée…
Ralentir pour aller plus vite
Nous avons ensuite droit à environ 45 minutes de pause pour dîner. Je me demande ce que l’après-midi me réserve comme humiliation. Le troisième bloc de théorie porte sur le freinage. L’exercice consiste à accélérer à partir d’un point déterminé sur la piste à l’aide d’un petit cône et de s’immobiliser à la dernière minute sur un deuxième cône. Enfin, une activité pour moi! Dès que nous nous immobilisons, les instructeurs commentent notre prestation. Dans mon cas, ce n’est pas très concluant. Je freine beaucoup trop tôt et je dois rouler en touriste jusqu’au cône pour obtenir mon commentaire. La position de mes doigts sur le levier de frein est indigne d’un pilote. Pour garder un maximum de contrôle sur le guidon, il est important d’utiliser les deux doigts situés à l’intérieur de la main. D’une manière toute naturelle, j’opte plutôt pour les trois qui sont à l’extérieur. Difficile d’être plus éloigné de l’idéal. Ma distance de freinage en souffre au début, mais ça rentre rapidement dans l’ordre.
Dépassé par les événements… et quelques pilotes
Je retourne en piste, deux litres d’eau plus tard, pour une séance libre, c’est-à-dire sans instructeur. Nous partions à un intervalle d’environ 150 mètres. Après un tour et demi, je tombe sur un faux point mort. Pendant que les motos passent à côté de moi, je retrouve le bon rapport. Sans instructeur pour les tempérer, les gars y vont à fond. Je n’arrête pas de me retourner pour voir si on va me dépasser à chaque sortie de virage. J’ai particulièrement de la difficulté avec le numéro 5. Je ne parviens pas à évaluer ma vitesse d’approche (même si ça fait au moins 30 fois que je passe là, à ce stade). Je freine de toutes mes forces, bien passé le point où j’aurais dû commencer le virage. C’est assez effrayant et je dois immédiatement coucher la SV qui est déjà rendue trop loin en courbe.
Selon mon instructeur, ma trajectoire n’est pas mauvaise, mais je prends mon virage un peu trop large. Je vais donc tourner plus serré (en freinant préalablement au bon moment). Martin avertit alors un autre pilote qu’il risque de chuter dans le virage numéro 2 s’il continue sur sa lancée. Malgré ces remontrances, le contrevenant tente de se justifier, et finit par n’en faire qu’à sa tête. Son orgueil entraînera finalement sa perte puisque deux séances plus tard, il plantera royalement dans un superbe high-side dans le virage numéro 2!
Cette journée exténuante sera un désastre au niveau des sorties de piste (alors que le lendemain n’en verra aucune). Environ 20 % des élèves iront faire du motocross comme se plait à le dire Mercier qui ne semble pas particulièrement heureux des agissements de certains. Je suis peut-être lent, mais au moins je suis resté debout, moi!
Le cinquième bloc d’instruction est consacré à l’accélération et au déhanchement. Malgré toute la théorie dispensée par l’école, j’y vais de manière plutôt instinctive. J’ai vraiment hâte de sentir mon genou frotter sur le bitume. Je n’arrive d’ailleurs pas à comprendre comment il se fait qu’à aucun moment un de mes genoux n’ait touché. J’ai l’impression d’être penché comme ce n’est pas possible et même en accentuant le mouvement, rien ne touche l’asphalte. Les genoux des autres ont déjà commencé à frotter si je me fie à ce qui se raconte dans les puits. Mon instructeur me demande de sortir le corps un peu plus et de ne pas entrer en virage de manière si serrée. Faudrait savoir… Trop large, trop serré…
C’est le moment de ressortir pour l’avant-dernière séance. Comme je suis — encore — le moins rapide de mon groupe, j’ai droit à un instructeur pour moi tout seul. C’est gênant. Mais libéré du poids des autres pilotes, je me sens plus à mon aise et mon style devient plus coulé, ce qui autorise enfin une vitesse décente. Nous rattrapons d’ailleurs assez rapidement un groupe plus lent (incroyable, mais vrai).
Recommandations et remise des diplômes
À mesure que les pilotes sortent des puits, nous sommes invités à tour de rôle à aller nous changer pour ensuite rejoindre Mercier dans la grande salle du quatrième étage de la tour. Pendant que nous attendons que tout le monde soit présent, les instructeurs distribuent les feuilles de temps (chacune des motos est munie d’un transpondeur). J’attends la mienne avec impatience. Je n’ai qu’un réel objectif : battre l’ami de mon patron, Guy, qui est venu faire ce cours il y a environ un mois. La mâchoire me décroche à la lecture des chiffres. Mon meilleur temps est carrément trois secondes plus lent que celui de Guy. La honte! À ce stade, je n’ai pas l’intention d’en parler à Didier Constant et encore moins à Guy! Je pâlis intérieurement en entendant les temps de certains pilotes qui sont carrément 10 secondes plus rapides que les miens.
Nous avons droit à un petit laïus de Michel Mercier sur les progrès que nous avons accomplis et sur notre avenir. Il passe en revue ses nombreux commanditaires et remercie un à un les différents membres de son équipe. Il cède alors la parole à ses trois instructeurs. Martin est le premier à prendre la parole. Chaque journée de cours, les instructeurs décernent une plaque « Top rider » au pilote de leur groupe ayant le plus progressé. Lorsque j’ai entendu Martin dire : « il était sur une SV »… mon cœur s’est emballé. Eh oui, j’ai obtenu cette plaque avec la date et le niveau du cours gravés, avec, tout en haut, la mention « Top rider » bien en vue. Je me suis levé comme un gamin et j’ai sautillé jusqu’à l’avant pour la saisir et la lever bien haut dans les airs. Il ne faut jamais cesser de croire. Lorsque les trois plaques furent distribuées, nous avons obtenu, un à un, sous les applaudissements de nos pairs, notre certificat FAST niveau 1. Plusieurs sont restés pour fraterniser. Je me suis sauvé en douce, affamé, épuisé, satisfait, mais sachant qu’il me restait encore le niveau 2 à vaincre le lendemain.
FAST, niveau 2 : on remet le couvert!
Encore courbaturé, je me suis présenté avec moins d’appréhension que la veille à cette deuxième étape de cours. Le soleil était tout aussi impitoyable. Était-ce la fatigue? En tout cas, le vent était absent. Ce matin, pas de séance théorique pour débuter la journée. Mercier nous invite, après de brèves salutations, à nous réunir sur la piste. On va vraiment la parcourir à pied, sous ce soleil de plomb?
À chacun des sept virages, nous nous arrêtons pour une analyse de la courbe en question. Point de corde, position sur la moto, angle, vitesse d’approche, point de sortie, freinage, tout y passe. Afin de rendre l’abstrait plus tangible, Mercier sort son arme secrète; un drapeau jaune qu’il agite dans les airs. Aussitôt le son d’une R6 se fait entendre dans les puits. Elle s’élance, suivie d’une ZX-6R et d’une autre R6. Les instructeurs font alors exactement ce qui nous a été expliqué par Mercier. Lequel commente : « Regardez! Regardez bien la position des jambes. Attention! Là. Voyez-vous? Il a arqué juste avant… » Par deux fois, chacune des trois motos concrétise la théorie. La scène a quelque chose de surréel. Mais la formule géniale. Malgré tout, j’ai beaucoup de difficulté à me concentrer. Le soleil cogne trop fort. Et une phrase de Mercier sur trois ne se rend pas à mon cerveau.
Ugo au pays des « papys »
À l’ombre, j’attends mon tour avant de me présenter en piste. Cette fois-ci, j’ai demandé à ce qu’on me place dans le groupe numéro trois, le moins rapide. Plus rien à prouver! Mes nouveaux compagnons aux cheveux grisonnants sont plutôt détendus. J’aime leur attitude empreinte de sagesse.
L’inscription aux différents niveaux de FAST se fait de manière indépendante et il est possible de changer de moto pour le niveau 2. Je me retrouve donc sur une GSX-R600. Même si la GSX-R600 monte plus rapidement en régime, je l’ai trouvée moins agréable que la SV650, en raison de son manque de caractère moteur.
La deuxième journée respecte le modèle FAST : théorie, piste, retour avec l’instructeur. Comme une grande partie de la théorie a été couverte la veille, les cours sont plutôt des remises à plat des enseignements. Avec l’introduction de quelques nouvelles notions à l’occasion. Rien de révolutionnaire. On se concentre vraiment à mettre en pratique, à un degré plus poussé ce qu’on a appris la veille.
À la troisième sortie, je crois que je vais rendre l’âme. Mes jambes tremblent et ont de la peine à me supporter. Je ne dois pas avoir l’air en forme, car plusieurs gars me demandent si je vais bien. Je termine cette séance en roulant à 60 kilomètres à l’heure, à tout rompre.
Fatigué, mais heureux!
Je suis crevé, et je le laisse savoir au groupe lors du débriefing. « Ne vous gênez pas pour me dépasser; je vais me tasser! » De moins en moins concentré, j’ai même oublié de rentrer aux puits lorsqu’on me présenta le drapeau à damiers.
Il reste encore 30 minutes de piste à faire. Si je m’écoutais, j’arrêterais sur-le-champ. Le plaisir semble s’être évaporé sous l’effet de la chaleur. La douleur se fait plus intense. Un petit tour sur la GSX-R remédia cependant à ma déprime. J’ai continué à avoir mal tout au long de la cinquième séance, mais le plaisir de rouler fort (pour moi) est revenu, surtout que Karl Daigle, mon instructeur du jour, me montrait les trajectoires. Moi, ça m’aide de le suivre.
Lors de cet avant-dernier bloc, nous devions démontrer à notre instructeur que nous avions bien assimilé le concept du « trailbraking » — une technique qui consiste à prolonger le freinage jusqu’au point de corde en relâchant progressivement la pression sur le levier — dans le virage numéro 2. Je suis confiant, car c’est mon virage préféré. Tour après tour j’arrive au bout de la ligne droite à 160-170 km/h, je négocie le premier virage à haute vitesse, je rétrograde d’un rapport, puis d’un deuxième. Alors que je déclenche mon freinage, je sors le genou droit et je pousse la moto en angle en visant le point de corde. Parfait! Je suis fier de moi. Lors du débriefing, mon instructeur m’avoue qu’il ne m’a malheureusement pas remarqué. Quoi? Comment ça? Ça arrive parfois me confie-t-il! Mais il fallait que ça tombe sur moi, dans mon meilleur virage. Compte rendu final de mon instructeur; mon style est parfait. Il me reste seulement à ajouter de la vitesse.
Lorsque les feuilles de temps sont arrivées, j’ai croisé les doigts très forts. Le verdict final du transpondeur est tombé : j’avais amélioré mon temps de la veille de plus de quatre secondes. Cool! Et j’avais dépassé le temps de référence de Guy.
Avant que je me lance dans cette saga, mon patron m’a fait remarquer que le but était d’apprendre, pas d’établir un record de piste. L’attitude mentale est pratiquement aussi importante que la technique. Il a entièrement raison et j’ai appris. Énormément.
Il me reste encore beaucoup à apprendre et à accomplir. En premier lieu, réussir à user mes sliders sur le bitume — c’est fait maintenant, depuis notre comparatif hypersport, à Calabogie.
Un petit conseil en terminant : si vous décidez de suivre un cours de pilotage, que ce soit avec FAST ou une autre école, pensez à laisser votre égo à la maison. Quand on se concentre sur son égo, on oublie parfois d’apprendre et, surtout, on risque de se le faire réduire en miettes.
L’AVIS DE GUY « MONONC » PARROT
Phase I — Cours « Exécutif »
Pour les plus vieux
C’est le patron qui, subtilement, m’avait suggéré d’aller me perfectionner chez FAST, ne serait-ce que pour me refaire une éducation en piste.
J’y suis allé sans trop savoir à quoi m’attendre : est-ce que ça serait comme à l’auto-école, avec des cônes parsemés dans un stationnement? Ou plutôt semblable à une journée de roulage sur piste à Deux-Montagnes? J’étais allé au circuit de l’Autodrome Saint-Eustache, il y a plusieurs années, avec ma Concours 1987, mais depuis, je n’avais pas remis les roues sur un circuit.
Mon expérience à Shannonville s’est avérée une très belle expérience. J’étais sans aucun doute le plus vieux de mon groupe de douze apprentis (il me reste environ 1200 jours à faire avant la retraite, ça vous donne une idée). Nous avons été répartis en quatre groupes de trois, sous la responsabilité d’un instructeur qui nous observait à tour de rôle, pendant un tour de piste. Au bout de 5 tours, débreffage de groupe d’abord, puis individuel ensuite.
Le cours Phase I Exécutif est destiné aux gens plus âgés, qui sont moins agressifs et ne cherchent pas à découvrir les limites de leur moto ou de leurs pneus. Qui veulent seulement devenir de meilleurs pilotes sur route et améliorer leur technique de pilotage. Ça me semblait idéal, parce que pour moi, faire de la moto, c’est partir en exploration, voir des paysages, admirer des architectures et sentir l’air frais dans mes poumons, contrairement au Boss, éternel pilote de chasse dans l’âme, qui n’est heureux que quand il accumule les kilomètres, sur des routes secondaires sinueuses, à vive allure.
À ma grande surprise, j’ai rencontré quelques motocyclistes qui ne connaissaient pas la technique du contre-braquage, autant chez les femmes que chez les hommes, lors de ce cours. Preuve irréfutable qu’il a toujours son utilité. Pour ceux qui sont un peu plus aguerris, il permet de se défouler et d’explorer des conditions de roulage illégales sur la voie publique, avec des accélérations sans contrainte et des pointes de vitesse qui ne dépendent que de notre courage.
De retour à Montréal, je me suis demandé ce que j’avais tiré de ce cours. Je connaissais la technique du contre-braquage, l’utilisation judicieuse des freins et du frein moteur et plusieurs des techniques qui nous ont été enseignées. J’ai eu un doute à la conclusion du cours, quand mon instructeur attitré, Andrew Nelson lui-même, a résumé mes performances en deux mots : no problem! De deux choses l’une : soit il s’en foutait complètement et me faisait un compliment de circonstance, soit mon niveau était bon. Mais, dans un cas comme dans l’autre, ça ne m’aidait pas trop à cerner ma conduite. Je me suis senti un peu mal à l’aise parce que ce n’est pas avec ces deux petits mots que je pouvais apprendre à changer mes habitudes et améliorer mes performances.
D’ailleurs, le Boss n’avait pas ressenti de ma part un enthousiasme débordant à mon retour. Mais en me demandant si j’avais apprécié le plaisir de rouler en piste, il m’a permis de réaliser que je m’étais amusé réellement. Sans contraintes, sous la supervision des instructeurs et la bienveillance des ambulanciers. Quelle liberté que de pouvoir rouler à fond de train sans craindre la police ou un chien qui se déciderait à traverser la rue. Sans être obligé de fouiller l’horizon à la recherche d’un automobiliste trop occupé à parler au téléphone portable pour voir un train approcher, encore moins une moto. Le pur plaisir de rouler en piste, d’explorer ses limites, en toute sécurité.
Un mois plus tard, j’étais donc de retour à Shannonville pour améliorer mes techniques et m’amuser. J’ai gardé la petite Suzuki SV 650 que j’avais découverte lors de la Phase I, parce que j’aime beaucoup sa souplesse et sa maniabilité, même si les GSX-R et ZX-6 ont l’avantage en accélération (théoriquement).
Il est intéressant de noter qu’il existe parfois des contradictions entre certaines techniques enseignées par Michel Mercier durant le cours théorique et les commentaires émis par les instructeurs, durant la pratique.
Ainsi, Michel laisse beaucoup de place à l’individualité — chacun doit conduire à l’intérieur de sa propre zone de confort —, alors que les instructeurs incitent les pilotes à élargir ladite zone de confort afin d’améliorer leurs temps en piste.
Avec l’âge, j’ai appris à faire la part des choses et à faire le tri dans les conseils qu’on me donne, en me servant de ma propre expérience. Le cas échéant, les deux niveaux de connaissances s’amalgament pour former un bon pilote, qui sais comment et quand sortir de sa zone de confort.
La journée Phase II sert de complément à celle de Phase I et je la recommande vivement à tous ceux qui sont rendus à repousser un peu leurs limites.
En passant, j’ai amélioré mon meilleur temps de la première journée (1:17) de deux secondes (1:15). Mission accomplie! Et là, je me suis franchement amusé. Sans retenue. L’année prochaine, je pense que je vais me payer deux ou trois journées de roulage sur piste avec le Boss et Ugo. Juste pour « moucher » le jeune! 😉
TARIFS
- Cours niveaux 1, 2 ou 3
- Instruction seulement – 359,00 $
- Tout compris (avec moto et équipements) – 559,00 $
Pour plus d’information, consultez le site de FAST: www.fastridingschool.com