Ce qui explique en partie sa vulnérabilité
Publié le 18 mars 2025
Les objets sont perçus grâce à leur conspicuité, c’est-à-dire leur propriété à attirer l’attention des regards dans leur direction. Le volume, la couleur, la saillance et le contraste avec l’arrière-plan qu’il occupe déterminent les chances d’un objet d’être vu et perçu.

Les études accidentologiques sont unanimes sur le fait que la faible conspicuité dégagée par la mince silhouette de l’ensemble moto-pilote constitue la cause principale de son implication dans les collisions.
Non seulement cette mince silhouette n’est pas facilement vue, mais il est fréquent qu’une fois vue, elle ne soit pas automatiquement enregistrée dans le processus de perception des autres usagers de la route.
Et même quand l’autre usager voit et perçoit cette mince silhouette, le cerveau de l’observateur manque encore d’information pour déduire une vitesse précise de rapprochement, surtout si elle se trouve dans l’axe de vision centrale.
Cette incapacité des autres usagers de la route à détecter une moto et sa vélocité est liée à une chaîne de faiblesses cognitives. La rareté des expériences vécues en lien avec ce type de situations expliquerait en partie cette carence de détectabilité. La science confirme que les objets familiers sont plus facilement encodés par le cerveau.
L’obligation de rouler avec le phare allumé en tout temps pour les motocyclistes a diminué considérablement la fréquence des collisions. Certaines études avancent une diminution de l’ordre de 30 %. Quand les automobiles ont été soumises à la même réglementation, cette diminution s’est estompée.
Les automobilistes possédant aussi une expérience motocycliste sont moins impliqués dans les collisions impliquant une moto de type «vu, mais pas perçu». Ce constat pourrait exposer un effet pervers de l’expérience de conduite accumulée par les automobilistes. Avec le temps, ces derniers développeraient d’une façon inconsciente une stratégie de prise d’information rapide, minimisant la recherche visuelle d’une moto dont la présence est plus rare. Ils cherchent donc une auto et non une moto.
Le phare allumé en tout temps sur les motos ne règle pas le problème de la perception de la vitesse de rapprochement. Une modulation dont la fréquence serait proportionnelle à la vitesse serait possiblement efficace, mais aurait de la difficulté à être acceptée légalement.
Le Japon, qui a connu un accroissement important de sa circulation routière à partir du milieu des années 1960, a instauré une loi obligeant les poids lourds à être munis de trois feux au-dessus de la cabine. La séquence d’allumage de ces feux correspondait à la vitesse du camion. Le feu droit allumé correspondait à une vitesse inférieure à 40 km/h, celui de gauche à une vitesse comprise entre 40 et 60 km/h, et celui du milieu à une vitesse supérieure à 60 km/h. Cette réglementation a été appliquée de 1967 à 2001, le temps pour qu’une nouvelle génération de pilotes se familiarise au concept de vitesse de rapprochement.
Au début des années 1980, un accessoire faisant scintiller le phare avant d’une moto a été interdit au Québec à la demande des forces policières. Il est désormais permis et fait partie des recommandations de la SAAQ. Il doit répondre à la norme de 240 cycles à la minute avec une tolérance de plus ou moins 40 cycles. Cette fréquence de 4 Hertz fait partie des ondes thêta (3 à 8 Hz) qui faciliterait l’accès à la mémoire à court terme.