Des freins à l’innovation
Publié le 23 avril 2024
L’aspect légal et la réglementation déjà en vigueur ralentissent la mise en application des innovations techniques. Les spécialistes du domaine considèrent que ces freins à l’innovation équivalent à un impôt sur les profits de 2,5 % pour les compagnies et ralentissent le rythme de développement de 5,4 %.
Pour les manufacturiers, les équipementiers et les distributeurs, le risque d’être poursuivis reste omniprésent, surtout dans le champ de la sécurité. Une erreur de conception, un défaut de fabrication ou une performance jugée inefficace de l’innovation sont tous des sources possibles de poursuites judiciaires de la part des clients déçus et des victimes.
Ce phénomène a pris des proportions gigantesques au milieu des années 1970. Entre 1974 et 1985, le nombre de cas de ce type de litige s’est accru de 758 % aux États-Unis. Les compensations monétaires allouées aux victimes ont triplé entraînant la faillite de plusieurs compagnies. D’autres ont préféré cesser leurs opérations ne pouvant plus trouver d’assureur.
Une décision de la Cour Suprême des États-Unis en 1986 illustre bien la complexité de la situation. Un motocycliste circulant entre 140 et 150 km/h au guidon d’une Honda GL 1000 a perdu la vie après avoir percuté un muret de ciment. La partie demanderesse a démontré que la cause de l’accident était due à un accessoire ajouté qui limitait le mouvement du guidon. Cet accessoire, un bouclier protecteur protégeant le tableau de bord et de fabrication allemande, avait été installé par le propriétaire précédent. Le jugement explique que Honda aurait dû savoir qu’un tel accessoire pourrait un jour être développé et installé sur sa moto et donc devenait en partie responsable.
Une compagnie peut aussi être poursuivie par des victimes attestant que si leurs motos avaient été munies d’un système de sécurité équipant déjà d’autres modèles, l’accident ne serait pas survenu ou que leurs blessures auraient été moins graves.
Au Québec, le régime public d’assurance sans égard à la responsabilité fait qu’il n’est pas possible pour une victime d’entreprendre des poursuites judiciaires de ce genre.
Les règlements en vigueur en circulation routière interdisent quelques fois l’utilisation de nouvelles technologies pourtant efficaces. Pendant longtemps, le Code de la route au Québec spécifiait que les freins avant et arrière d’une moto devaient être opérés par deux systèmes indépendants. Au terme de cet article, la Moto Guzzi 850 Le Mans (photo) a circulé illégalement dans la province. Ce n’est qu’à la suite d’un rapport du coroner que l’article 246 a été modifié de façon à permettre un système de freinage combiné.
Au Québec, un modulateur pour moto vendu comme accessoire faisant scintiller le phare avant est désormais légal au Québec. Il est même recommandé par la SAAQ. Il a longtemps été interdit.