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Une aventurière faite pour voyager !

Photos © Didier Constant, Claude Privée, Suzuki

Cet été, j’ai eu l’occasion de passer deux semaines en compagnie d’une Suzuki V-Strom DL800 Touring accessoirisée par Suzuki Canada. Un essai que j’attendais depuis l’été 2023, après avoir brièvement pris contact avec une DL800 DE que j’ai adorée, dans l’ensemble. Je dis dans l’ensemble, car je l’avais trouvée un peu haute à mon goût et je n’aimais pas le fait qu’elle soit équipée de pneus avec chambres à air. En effet, pour moi, il est inconcevable d’acheter une moto avec ce type de jantes en 2025. Je ne fais pas assez de hors route pour que cette option se justifie. D’autant qu’au cours des trois dernières saisons, j’ai eu trois crevaisons avec des jantes Tube type. Avec tous les inconvénients que ça représente.

Donc, quand Suzuki m’a proposé d’aller chercher la V-Strom DL800 Touring à Belleville, en Ontario, et de la ramener à Montréal, je n’ai pas hésité un instant. J’ai réservé un billet de train pour la perle de la Baie de Quinte, le mardi suivant, et vogue la galère!

Une aventurière qui a un penchant pour la route

Appelée SE en Europe, la DL800 de base et la DE partagent le même moteur parallèle de 776 cm3 développant 84,3 ch à 8500 tr/min, pour un couple de 55 lb-pi à 6800 tr/min. Elles ont aussi le même cadre et une allure très similaire. Ce qui différencie la DL800, ce sont ses suspensions simplifiées, au débattement réduit à 150 mm aux deux extrémités (200 mm à l’avant et 220 mm à l’arrière sur la DE), sa roue avant de 19 pouces (21 pouces sur la DE), sa bulle haute et large, son guidon au cintre revu, son porte-bagages, sa selle confort, son angle de colonne ouvert à seulement 26°, sa chasse augmentée à 124 mm et son empattement réduit à 1515 mm. Mais, le changement le plus notable, selon moi — et le plus bénéfique —, c’est l’adoption de jantes tubeless à sept branches, en fonte d’aluminium, chaussées de pneus Dunlop D614 à vocation routière. Sinon, au premier coup d’œil, on reconnaît immédiatement la signature visuelle de la DL800 et ses origines. 

Le bicylindre vertical à 270° de la DL800 est identique à celui que l’on retrouve sur la DL800 DE, mais aussi sur les GSX-8S, GSX-8R et GSX-8T/TT. Même si ce n’est pas le plus puissant de sa catégorie, c’est un moteur vif et coupleux que j’aime beaucoup en raison de son caractère. Il intègre le système d’arbre d’équilibrage Suzuki Cross Balancer, à deux balanciers à 90° par rapport au vilebrequin. Ce dispositif contrôle efficacement les vibrations, en plus de garder le moteur compact et léger. Il est secondé par un embrayage antidribble assisté baptisé Suzuki Clutch Assist System (SCAS), une boîte à 6 rapports avec un quickshifter bidirectionnel et une électronique simple. L’arsenal des aides au pilotage comprend un accélérateur électronique Ride by Wire pilotant trois modes A, B et C (du plus radical au plus permissif), un antipatinage débrayable et ajustable sur trois niveaux ainsi qu’un ABS ajustable sur 2 crans. Basique, mais efficace et largement suffisant pour mes besoins.

En ce qui concerne le châssis, il s’agit du même cadre mixte tubulaire, avec des berceaux interrompus, sur lequel est fixée la boucle arrière, que celui de la DL800DE.

Au Canada, la DL800 de base est secondé par une version Touring équipée de valises latérales. Pour cet essai, Suzuki l’avait munie d’un top case en aluminium noir, avec son support, de protections tubulaires, d’un sabot moteur, de pare-mains et de phares antibrouillards. De mon côté, j’avais installé certains accessoires adaptables très pratiques, comme un support de téléphone Quad Lock, un écran Carpuride W702 Pro, un sac de réservoir SW-Motech Pro Micro WP et un déflecteur réglable GIVI S180 Shield +. De quoi la transformer en véritable voyageuse au long cours.

Moins haute que la DE (la selle passe de 855 mm à 825 mm), la DL800 Touring offre une position de conduite légèrement différente. Plus relaxe. Le guidon plus bas de 13 mm est avancé de 23 mm, tandis que les repose-pieds sont reculés de 13 mm et rehaussés de 7 mm. La flexion des jambes est raisonnable et le haut du corps est légèrement plus basculé vers l’avant pour un meilleur contrôle de la direction.

Le cockpit de la DL800, avec son écran TFT couleur de 5 pouces, est familier (c’est le même que sur la DE) et je retrouve rapidement mes repères à son guidon.

En quittant le concessionnaire, je m’arrête à un lave-auto à la main, à la sortie de Belleville, pour nettoyer la moto qui a passé plusieurs semaines dans le garage et est couverte de poussière. Il fait un temps magnifique en cette fin de juillet. Il est 14 heures et j’ai l’après-midi pour faire les quelque 375 kilomètres qui me séparent de la maison. Pas de stress.

Pour rentrer à Montréal sans m’endormir, je décide d’emprunter l’autoroute 401 jusqu’à Kingston, où je fais une pause café. J’en profite également pour resserrer les rétroviseurs de la Suzuki qui n’arrêtent pas de se dévisser en roulant. Puis, je suis la route 2, l’ancienne voie reliant Montréal à Toronto, qui traverse les Mille-Îles entre Gananoque et Cornwall, avant de rejoindre la 401 au niveau de Lancaster. Un petit détour bucolique qui est toujours agréable à faire.

Le chemin du retour me permet de vérifier le potentiel de la Suzuki sur voies rapides. À une vitesse stabilisée aux alentours de 100 km/h, le bicylindre ronronne et produit peu de vibrations. De légers fourmillements se font sentir dans les repose-pieds, entre 6 500 et 7 000 tr/min, mais, en sixième, ce régime nous fait circuler à des vitesses qui excèdent la limite. On n’y évolue donc que très rarement. 

La position de conduite est très confortable, mais, à vitesse élevée, on ressent quelques remous sur le haut du casque. Ce n’est pas un problème insurmontable. Une fois de retour à la maison, je corrigerai la situation en installant mon déflecteur réglable GIVI S180 Shield +. Une fois cette modification complétée, la Suzuki retrouve toute sa superbe et protège adéquatement son pilote.

La selle moelleuse est confortable et les suspensions, bien que basiques, font du bon boulot. On peut envisager de longues sorties au guidon de la DL800, sans problème, même lourdement chargé. La tenue de route est impeccable sur autoroute. Le train avant inspire confiance.

Au cours des deux semaines qui suivent, la DL 800 Touring devient mon principal mode de transport. Je l’utilise pour mes sorties en villes et pour mes escapades champêtres. 

En ville, la Suzuki est évidente à maitriser grâce à sa maniabilité, à son rayon de braquage court et à son moteur coupleux. On peut rouler sur un filet de gaz sur les rapports intermédiaires afin de respecter les limites draconiennes et il suffit de tourner la poignée pour s’extraire du trafic, le cas échéant. Cependant, avec ses valises et ses protections, la moto est assez large, ce qui complique les manœuvres urbaines et l’interfile. Ce n’est rien de rédhibitoire, d’autant plus que je vais rarement en ville.

Sur les routes secondaires, la DL800 Touring est dans son élément. Même chargée, c’est une moto que je prends plaisir à piloter, aussi bien à un rythme sénatorial que sportif. La moto est saine. Son châssis intègre ne bouge pas d’un poil et les suspensions sont bien calibrées pour mon poids de 80 kg (178 lbs). Sur les petites routes de Lanaudière, des Laurentides ou de Montérégie, je retrouve le caractère moteur qui m’avait séduit sur la DE et sur les GSX-S8. Il est bien rempli à mi-régime et se montre très volontaire aux vitesses légales. Pour dépasser, il suffit d’accélérer et de descendre un rapport, au besoin, pour se propulser en avant de la circulation. Dans les grandes courbes rapides, la partie cycle stable et précise garantit des trajectoires imperturbables. Et, dans les esses et les pifs pafs, la moto change de direction rapidement. Un peu plus lentement que la GSX-S8R, par exemple, mais avec la même aisance et la même maestria. 

Dans cet environnement, quand on roule sur le couple et qu’on enroule, la DL800 est à son meilleur. Elle danse, elle virevolte d’un virage à l’autre et se montre toujours enjouée. Le train avant inspire confiance et autorise des coups de folie, à l’occasion. Même les pneus Dunlop D614 se tirent pas trop mal d’affaire dans les circonstances. Tant que la chaussée reste sèche, car ils sont moyens sur le mouillé.

Puis, dans les sections roulantes, en mode tourisme, c’est son confort qui lui permet de se distinguer. Bien calé dans la selle moelleuse, on enfile les kilomètres avec calme et volupté. Les journées de 500 kilomètres et plus s’avalent comme une simple formalité. Les suspensions sont bien calibrées et lissent la route. En duo, l’amortissement reste tout à fait convenable pour peu que l’on ajuste le monoamortisseur correctement. La fourche est efficace et offre un amortissement correct.

En fait, au cours de cet essai, le plus gros problème que j’ai eu, ce fut de rapporter la moto chez Moto Repentigny. J’étais tellement en symbiose avec elle, que je l’aurais bien gardée pour le restant de l’été.

Un véritable coup de cœur

Équipée à mon goût, la Suzuki V-Strom DL800 Touring s’est révélée être une compagne de voyage exquise. En fait, elle a été mon coup de cœur de cette saison. J’avais bien aimé la DE lors de ma brève prise en main, en 2023, mais sa hauteur de selle élevée et ses jantes dotées de pneus à chambres à air m’avaient refroidi. Ces deux options étaient inacceptables pour moi, car je conduis peu en hors route. 

La DL800 Touring est exactement la moto que j’achèterais, si j’avais suffisamment d’économies pour me le permettre. Une monture bien équipée, simple, efficace et apte à voyager au long cours, en solo comme en duo, offerte à un prix très correct comparativement à la concurrence. J’aime son allure d’aventurière sobre, son moteur coupleux et vif, son pare-prise haut et large, et son équipement pléthorique. 

Avec sa roue avant de 19 pouces et ses suspensions au débattement réduit par rapport à la DE, elle démontre de bonnes aptitudes routières, malgré ses pneus moyens. Il suffirait de les remplacer après quelques mois d’utilisation, le temps de mettre la moto à sa main, par des gommes plus performantes (Bridgestone AT41, Continental ContiRoadAttack 4 ou TKC 70, Dunlop TrailMax Raid ou Meridian, Metzeler Karoo Street ou Tourance Next, Michelin Anakee 3 ou Adventure, Mitas Enduro Trail ADV 2 ou Terra Force-R, Pirelli Scorpion Trail III ou Scorpion Rally STR…) pour alors obtenir un comportement routier excellent en toutes situations.

Avec tout son équipement optionnel, la DL800 prend un peu de poids et son prix augmente, mais elle reste malgré tout facile à vivre au quotidien et demeure abordable compte tenu de son agrément. C’est sûrement l’une des motos les plus polyvalentes du segment et l’une des plus équilibrées. Personnellement, je valide!

Fiche technique

INFORMATIONS GÉNÉRALES

  • Poids tous pleins faits : 223 kg (sans les accessoires)
  • Hauteur de selle : 825 mm
  • Capacité essence : 20 L
  • Consommation : 5,2 l/100 km
  • Autonomie : 384 km
  • Durée de l’essai : 1150 km
  • Coloris : gris métallisé, noir mat métallisé, rouge lustré
  • Prix : à partir de 14 995 $ (sans les accessoires)

MOTEUR

  • Moteur : Bicylindre en ligne, 4 temps, refroidissement liquide, distribution par double arbre à cames en tête, calage à 270°, 4 soupapes par cylindre, Euro 5;
  • Cylindrée : 776 cm3;
  • Puissance : 84,3 ch à 8500 tr/min;
  • Couple : 55 lb-pi à 6800 tr/min;
  • Alésage x course : 84 x 70 mm
  • Rapport volumétrique : 11,5:1
  • Alimentation : injection électronique
  • Transmission : six rapports
  • Entraînement : par chaîne

PARTIE CYCLE

  • Cadre tubulaire en acier, sous-cadre treillis en tubes d’acier;
  • Suspension avant : fourche inversée Showa SFF-BP, réglable en précontrainte du ressort. Débattement 150 mm;
  • Suspension arrière : monoamortisseur Showa, réglable en précontrainte et en détente. Débattement 150 mm;
  • Empattement : 1515 mm
  • Chasse x déport : 26° x 124 mm
  • Frein avant : double disque de 310 mm, étriers Nissin à montage radial, étriers 4 pistons. ABS ajustable sur 2 niveaux;
  • Frein arrière : simple disque de 260 mm, étrier Nissin simple piston, ABS ajustable sur 2 niveaux;
  • Roues : Jantes en aluminium à 7 bâtons, 19 pouces à l’avant et 17 pouces à l’arrière.
  • Pneus Dunlop D614;
  • Pneus Avant 110/80R19 (tubeless)
  • Pneus Arrière 150/70R17 (tubeless);

VERDICT RAPIDE

J’ai aimé

  • Caractère moteur — couple élevé;
  • Peu de vibrations;
  • Freins puissants;
  • Train avant précis;
  • Suspensions souples, mais efficaces;
  • Hauteur de selle raisonnable;
  • Pneus tubeless;
  • Jantes forgées;
  • Peu d’électronique;
  • Guidon moins large.

J’ai moins aimé

  • Bulle ne protégeant pas suffisamment;
  • Turbulences et bruit causés par la bulle de carénage;
  • Pas de régulateur de vitesse;
  • Pas de prise 12 Volts;
  • Pneus Dunlop moyens;
  • Valises latérales trop hautes.

ÉQUIPEMENT DU PILOTE

ACCESSOIRES SUZUKI INSTALLÉS SUR LA MOTO

  • Pare-mains;
  • Support de top case;
  • Top case en aluminium noir;
  • Valises latérales noires;
  • Protections tubulaires;
  • Feux antibrouillards;
  • Sabot moteur.

ACCESSOIRES ADAPTABLES

Vidéoclips