Le temps de la maturité
Publié le 5 juin 2024
Notre collègue Costa Mouzouris a eu l’occasion d’essayer la dernière mouture de la KTM 390 Duke en Espagne. Il revient pour nous sur son expérience.
Texte : Costa Mouzouris — Tradaptation : Didier Constant — Photos : KTM
Depuis son lancement, la 390 Duke est devenue la moto la plus vendue de KTM, dépassant les ventes de tous les autres modèles de la marque. Outre le fait qu’elle soit très performante dans sa catégorie, il y a une autre raison pour expliquer cette performance : sur les marchés où les 125 dominent, elle est considérée comme une grosse moto. C’est pour cette raison qu’elle a bénéficié de quelques changements pour 2024, avec une série d’améliorations et de technologies que l’on trouve normalement sur les motos de plus grosse cylindrée. Comme nous l’avons découvert au guidon de la 390 Duke sur les routes de montagne de la région d’Almeria, en Espagne, la moto a également grandi.
Trois générations
La KTM Duke fête cette année son 30e anniversaire. La 390 Duke n’est pas si vieille, puisqu’elle a été lancée en 2013. Cette première génération de 390 a été suivie en 2017 par la deuxième génération redessinée, qui est restée pratiquement inchangée jusqu’à l’année dernière. Cette année, nous avons droit à une nouvelle 390 Duke entièrement nouvelle — à 90 % selon son fabricant. Bien que la géométrie du nouveau cadre soit presque la même qu’auparavant (l’angle d’inclinaison de la fourche passe de 25 à 24 degrés), elle a été conçue pour accroître la stabilité. L’élément le plus révélateur de ce nouveau cadre est l’emplacement de l’amortisseur : il est désormais décalé, ayant été déplacé du centre du cadre vers la droite. Ce changement redistribue les charges de la suspension sur différentes parties du cadre et du bras oscillant, ce qui améliore la rigidité en torsion de ces deux éléments. Le bras oscillant en treillis externe est plus rigide qu’auparavant, il comporte désormais des renforts massifs et est incurvé du côté de l’amortisseur. Un nouveau sous-châssis en aluminium moulé sous pression remplace l’ancien treillis en acier et a été conçu pour abaisser la selle de 830 mm à 820 mm ; une selle basse optionnelle abaisse ce chiffre à 800 mm. L’empattement reste inchangé à 1 357 mm.
Malgré sa cylindrée inférieure à 400 cc (de justesse), la 390 Duke est équipée d’une suspension WP Apex réglable. La fourche à gros tubes de 43 mm est réglable en compression et en détente, séparément entre les jambes de fourche, avec cinq clics de réglage chacune. L’amortisseur est réglable en précontrainte du ressort et en détente ; ce dernier réglage peut être effectué de manière pratique à l’aide de la clé de contact, dont l’extrémité est munie d’une lame plate. Les réglages de l’amortissement ont été calibrés pour faire une différence notable à chaque clic. Un autre changement qui a amélioré la compliance de la suspension est la réduction du poids non suspendu grâce à de nouvelles roues plus légères, qui pèsent 4,3 kg de moins qu’auparavant. Des pneus radiaux Michelin Power 6 sont montés sur ces roues.
Nouveau mono
La 390 Duke est équipée d’un tout nouveau monocylindre à refroidissement liquide, plus léger, dont la course a été allongée de 4 mm, à 64 mm (l’alésage reste à 89 mm), ce qui porte la cylindrée de 373 cc à 399 cc. Comme sur le modèle précédent, l’injection est assurée par Bosch. L’augmentation de la cylindrée porte la puissance du moteur à 45 chevaux et 28,8 lb-pi de couple, contre 43 chevaux et 27,3 lb-pi. L’allongement de la course donne l’impression que le moteur est plus puissant que ne le suggèrent ces chiffres, car la répartition du couple est désormais plus large. Comme la moto est disponible sur différents marchés, elle doit faire face à une multitude de climats différents ; par conséquent, les capteurs de température du moteur ont été déplacés de manière à ce que le moteur fonctionne plus efficacement, en se réchauffant plus rapidement pour les climats froids, mais en fonctionnant moins vite pour les climats plus chauds. Le moteur est équipé d’une nouvelle boîte de vitesses à six rapports qui utilise un tambour de changement de vitesse redessiné pour des passages de rapports plus souples, en particulier en quatrième et cinquième vitesse. Le nouveau moteur est conforme à la norme Euro 5.
Un design et des caractéristiques matures
Plusieurs éléments stylistiques font de la 390 Duke une moto plus aboutie : le bras oscillant et l’amortisseur déporté, la partie arrière courte montée sur le nouveau cadre en aluminium, l’échappement abrégé et placé sous le cadre, et la nouvelle nacelle de phare qui, heureusement pour certains, n’est pas l’élément polarisant, semblable à un insecte, utilisé sur les nouvelles 990 Duke et 1390 Super Duke. Même l’emplacement du disque de frein avant a été déplacé du côté gauche de la roue vers le côté droit, pour donner à la moto un aspect plus musclé lorsqu’elle est appuyée sur la béquille latérale. Le réservoir de carburant, de forme nouvelle, est maintenant plus grand de 1,5 litre, soit 15 litres, et KTM affirme qu’il peut vous permettre de parcourir jusqu’à 400 km avant de tomber à sec.
La 390 emprunte son tableau de bord TFT de 5 pouces aux 990 et 1390, et ses menus sont faciles à parcourir. Les modes Street et Rain sont de série, de véritables modes de conduite qui modifient la cartographie de l’accélérateur et la sensibilité de l’antipatinage, et il existe également un mode Track, bien qu’il ne fasse que simplifier l’affichage du tableau de bord, en mettant l’accent sur le tachymètre, la vitesse et l’indicateur de position de la boîte de vitesses. Les clignotants à annulation automatique sont également de série, ce qui n’est pas fréquent dans cette catégorie de cylindrée.
KTM propose en option un module de connectivité pour coupler votre téléphone à la moto et permettre la navigation virage par virage, ainsi que la possibilité de répondre aux appels téléphoniques (avec un casque équipé d’un système de communication Bluetooth), via l’application KTMconnect. Un quickshifter bidirectionnel est également disponible, et nos motos d’essai en étaient équipées.
L’antipatinage à détection d’inclinaison est de série, tout comme l’ABS, qui comprend un mode Supermoto coupant l’intervention sur la roue arrière. La moto dispose même d’un chronomètre et d’un contrôle de départ, ce dernier limitant le régime moteur à 7 000 tr/min avec l’accélérateur grand ouvert. Cette fonction sera certainement très utile si la moto est utilisée en compétition. Et si vous pilotez la 390, elle dispose également d’un limiteur de vitesse réglable dans les stands, qui a en fait une fonction plus pratique sur la route : il peut être réglé pour maintenir la vitesse à un niveau inférieur ou égal à une limite de vitesse prédéterminée afin d’éviter de se faire verbaliser.
La 390 à l’épreuve
Il y a quelque chose d’extrêmement gratifiant à piloter une moto légère qui ne vous submerge pas d’une puissance folle. Sur la route, la 390 Duke s’est avérée une compagne incroyablement maniable et stable pour affronter les routes étroites et sinueuses d’Andalousie, surtout après avoir ajusté la suspension à mon poids de 100 kg (à pleine vitesse, je dois ajouter). J’ai ajouté un cran de précontrainte du ressort (à l’aide de la clé fournie), et deux clics d’amortissement en détente (toujours à l’aide de la clé). Comme l’affirme KTM, chaque clic sur l’amortisseur fait une différence notable dans le comportement de la suspension, réduisant un léger flottement dans les virages à une stabilité à toute épreuve en seulement deux clics. La sensation du train avant inspirait confiance, et la moto se dirigeait aussi rapidement et précisément que je pouvais donner des impulsions au guidon.
Bien que la puissance de la 390 ne soit pas écrasante, la moto est capable d’un rythme très rapide, tant que votre pied droit reste actif sur le levier de vitesses pour maintenir le régime à un niveau élevé. Cette tâche a été facilitée par le quickshifter bidirectionnel optionnel, qui fonctionne très bien et n’augmente pas trop l’effort à fournir sur le levier. Monter et descendre les rapports de la boîte de vitesses pour maintenir le régime entre environ 7 500 tr/min et la ligne rouge de 10 000 tr/min de la moto est très amusant, et le moteur émet une très belle sonorité à vitesse élevée, générant une bonne quantité de bruit d’admission. Lorsque nous avons atteint un tronçon d’autoroute, l’ouvreur de KTM a accéléré le rythme et j’ai vu 175 km/h au compteur, ce qui est très respectable vu mon gabarit. Les freins Bybre ralentissent efficacement la moto, même si la course du levier est assez longue et que le frein avant s’est un peu évanoui après une série de virages serrés particulièrement longs.
La souplesse des suspensions est bien meilleure que ce que l’on peut attendre d’une petite moto, ce qui lui permet de rester bien en place à vitesse élevée. Elle était un peu dure sur les bosses, mais sa plage de réglage aurait probablement amélioré la situation si je l’avais assouplie. Bien que la 390 Duke soit de petite cylindrée, il s’agit néanmoins d’une moto de taille normale et l’ergonomie convient à mon gabarit d’un mètre quatre-vingt-dix sans que je me sente à l’étroit. La selle, par contre, est ferme et je me suis mis à me tortiller d’un côté à l’autre après environ une heure de selle.
Le bilan
La KTM 390 Duke n’a pas beaucoup de concurrence dans sa catégorie, mais s’en est une de haute facture. Il y a la BMW G310R à 5 999 $, la Kawasaki Z400 à 6 699 $ et la Yamaha MT-03 à 6 599 $. Quelques-unes de ces motos sont des bicylindres, ce qui peut faire paraître chère la monocylindre autrichienne, dont le prix de départ est de 6 595 $. Mais ce qui la distingue de ses concurrentes, c’est sa longue liste d’équipements de série, notamment ses suspensions sophistiquées et son électronique de pointe. Les coûts d’exploitation devraient également être faibles, avec des intervalles d’entretien fixés par l’usine à 10 000 km et des intervalles de réglage des soupapes à 20 000 km. La moto est également assortie d’une garantie de deux ans, qui n’est surpassée que par la BMW. Si l’on tient compte de tous ces éléments, cette petite KTM semble plus grande qu’elle ne l’est en réalité et constitue une bonne affaire…