Éloge de la simplicité
Publié le 30 mai 2021
En 2021, la Yamaha MT-07 progresse en douceur. Il s’agit d’une évolution, pas d’une révolution. En fait, son plus grand changement est son look affiné marqué par son phare avant controversé qui lui confère une nouvelle identité. Pour le reste, Yamaha a procédé par touches subtiles. On ne change pas radicalement une machine gagnante. À moins d’aimer le risque.
Photos © Didier Constant, Patrick Laurin, Yamaha
Depuis sa sortie en 2015, sous l’appellation FZ-07, la Yamaha MT-07 est un best-seller mondial. En Europe, il s’en est vendu plus de 125 000 unités, majoritairement auprès des jeunes de moins de 35 ans, des femmes et des jeunes permis. Aux États-Unis, pays des gros cubes et des customs, Yamaha en a commercialisé environ 25 000 unités durant la même période. Principalement dans les tranches d’âge allant de 25 à 55 ans. Chez nos voisins du Sud, près de50 % des propriétaires de MT-07 totalisent moins de cinq ans d’expérience de conduite. Les autres en accumulent plus ou moins 20 ans. Le succès est également au rendez-vous au Canada, mais ici, il est impossible de savoir combien d’unités ont été écoulées en 7 ans, le Conseil de l’industrie de la motocyclette et du cyclomoteur (CIMC), l’organisme qui regroupe les principaux constructeurs et importateurs établis au pays, interdisant à ses membres de publier leurs chiffres de vente par modèle.
Néanmoins, selon un porte-parole de Yamaha Canada, le succès de la MT-07 ne se dément pas. Année après année, elle se vend comme des petits pains chauds et initie des milliers de motocyclistes à la conduite moto, en plus de faire le bonheur de nombreux pilotes expérimentés qui aiment sa simplicité, son gabarit à taille humaine, ses performances globales enthousiasmantes et son prix raisonnable.
Concurrente des Aprilia Tuono 660, Honda CB650R, Kawasaki Z650, Suzuki SV650 et Triumph Trident, la Yamaha MT-07 avait connu une première évolution en 2018, mais l’implémentation de la norme Euro 5 au début de l’année a forcé Yamaha à la remettre au goût du jour. La firme d’Iwata City en a profité pour lui faire bénéficier des mêmes codes esthétiques que les autres membres de la famille MT, à savoir la MT-03 et la MT-09 qui a elle aussi évolué cette année.
Des changements mineurs
Comme je le disais en introduction, le changement le plus visible apporté à la MT-07 est l’adoption d’un bloc optique avant clivant qui recueille plus de critiques que d’éloges. Sur les réseaux sociaux et les forums, on en parle autant que du nez de Cléopâtre dans l’antiquité, même si on ne peut rien y changer. Personnellement, je prends rarement part aux débats sur les goûts et les couleurs, je ne commencerais donc pas maintenant. Mais, qu’on aime ou non le nouveau faciès de la MT-07, on va finir par s’y faire — pas le choix — et se concentrer sur ce qui fédère. De toute façon, quand on s’installe à son bord, le look disparaît au profit du plaisir de conduite. Et c’est ce qui compte.
Le phare, comme les autres items de l’éclairage d’ailleurs, est à DEL et éclaire très bien. Rassurant quand on circule de nuit. Les gros clignotants orange disgracieux du modèle précédent ont fait place à de magnifiques indicateurs modernes à diodes électroluminescentes dotés d’une lentille translucide. Les prises d’air peintes, de chaque côté du réservoir, sont magnifiquement intégrées ce qui renforce l’impression de qualité que dégage la moto.
Le collecteur du nouvel échappement 2 en 1 est rapproché de l’orifice de l’échappement pour une expulsion et une combustion plus efficaces des gaz. L’échappement et son catalyseur massif, bruts de décoffrage, font un peu tache dans le portrait. Particulièrement sur les photos d’action avec beaucoup d’angle.
Pour le reste, la finition est de bonne facture et le coup d’œil flatteur. Visuellement, la MT-07 remodelée attire les regards.
Moteur et partie-cycle sont repris du modèle précédent avec très peu de changements. Sur le bicylindre parallèle CP2, Yamaha a redessiné les conduits d’admission d’air et optimisé les réglages de l’injection. À l’intérieur du bloc, on trouve de nouveaux sièges de soupape du côté de l’échappement, lesquels améliorent la fiabilité du moteur, et des angles de coupe revus pour les engrenages de la boîte de vitesse pour une meilleure sensation lors des changements de rapports.
L’équipement est quasiment identique, à l’exception du nouveau compteur à cristaux liquides de grande taille offrant la possibilité d’accéder à l’affichage via des boutons sur le commodo de gauche. Il est clair, lumineux et présente les informations essentielles (affichage numérique de la vitesse, au centre de l’écran, compte-tours à barre-graphe au-dessus, jauge à essence, rapport engagé), les autres informations (odomètre, partiels, température de l’air, température du moteur, consommation) défilant au bas de l’écran, au centre, via le sélecteur de menus.
Au niveau du châssis, la MT-07 reçoit un guidon tubulaire plus large de 32 mm, relevé de 12 millimètres et avancé de 10 millimètres vers le pilote, ce qui bonifie quelque peu la position de conduite. La selle qui est fine à l’arcade culmine à 805 mm, ce qui permet aux petits gabarits de poser les pieds au sol facilement à l’arrêt sans pour autant pénaliser les pilotes de plus de 1,80 m, qui ne se sentent pas trop à l’étroit à son bord.
Pour ce qui est du freinage, Yamaha a abandonné les disques à pétales de 282 mm au profit de disques de 298 mm de conception classique. Les étriers sont toujours à montage axial, mais ils font montre d’un mordant et d’une modularité n’appelant aucune critique. L’ABS est offert de série en raison de la réglementation européenne qui l’exige.
La monte pneumatique a été bonifiée. La MT-07 est en effet chaussée de Michelin Road 5, des pneus sport-tourisme très efficaces, spécialement sur chaussée mouillée.
Enfin, les suspensions sont inchangées. À l’avant, la Yamaha dispose d’une fourche télescopique non réglable, à tubes de 41 mm, tandis qu’à l’arrière elle reprend un monoamortisseur ajustable en précontrainte du ressort et détente.
La géométrie de direction est plutôt vive, avec un empattement de 1 400 mm et des valeurs de chasse et déport dignes d’une sportive (24,5°/90 mm). Voilà qui complète les présentations d’usage.
Au quotidien
À l’instar des modèles précédents, la MT-07 est une moto facile à maîtriser. Fine, légère et maniable, elle offre une position de conduite classique pour un roadster. Le buste est légèrement penché vers l’avant, sans trop d’appui sur les poignets, les bras sont détendus et les jambes raisonnablement repliées. La hauteur d’assise raisonnable la rend accessible au plus grand nombre et est rassurante pour les néophytes.
La prise en main est naturelle et instinctive. Dès les premiers tours de roue, on se sent immédiatement en terrain familier. Pas intimidante pour un rond, la MT-07 invite à la balade, sportive de préférence.
Le tableau de bord est facile à consulter, même s’il est à la verticale du menton du pilote, lequel doit pencher un peu la tête pour lire ses informations en roulant. Cette position basse et avancée vers le pilote complique l’utilisation d’une sacoche de réservoir. À titre d’exemple, même si la bride GIVI Tanklock est compatible avec la MT-07, je ne peux pas installer mon sac GIVI XS3219 Tanklock par manque de place à l’avant. Même l’utilisation d’un sac magnétique est compliquée en raison des éléments en plastique sur le réservoir. Il faut se rabattre sur un modèle antédiluvien à sangles. Dommage !
À l’arrière, difficile aussi de fixer des bagages sur la selle passager qui est courte. À moins d’installer un porte-paquet optionnel. J’arrive néanmoins à poser mon sac de selle GIVI ST607 grâce à ses sangles ajustables, mais, du coup, je ne peux plus emmener de passager. Il faut choisir entre équipement et compagnie… Un choix cornélien !
De toute façon, le duo n’est pas la tasse de thé de la Yamaha. À utiliser en dépannage seulement. Et sur de courtes distances. Le confort de la selle est acceptable, mais la position réservée au passager est spartiate. Sans parler du confort de la suspension arrière qui se dégrade avec le surplus de charge. Par ailleurs, à part la sangle localisée entre les deux parties de la selle, le passager n’a pas de poignée à laquelle se retenir en roulant. À l’accélération, il décolle virtuellement vers l’arrière, à moins d’enserrer le pilote à la taille et au freinage il vient embrasser l’arrière de son casque.
En solo, la MT-07 laisse ses qualités s’exprimer pleinement. Le moteur est vivant et dispose d’un couple important et d’une bonne allonge, tirant rapidement et sans problème jusqu’à la zone rouge qui débute à 10 000 tr/min. Étirer les rapports au-delà n’apporte rien, la puissance s’essoufflant rapidement. Par ailleurs, le twin vertical est prompt à faire lever la roue avant, même si vous n’êtes pas un expert en wheelies. Relativement souple, il reprend sans broncher dès 3 000 tr/min, même sur le dernier rapport. Il est très bien rempli à mi-régime et brille particulièrement entre 5 000 et 9 000 tr/min.
À 130 km/h en sixième, le bicylindre ronronne à 5 300 tr/min, soit en deçà du régime de couple maxi, mais juste dans la plage où les vibrations sont les plus notables, soit entre 5 000 et 7 000 tr/min. On les ressent surtout dans les poignées, moins dans les repose-pieds. Mais, dans l’ensemble, elles ne sont pas vraiment gênantes.
La sonorité de l’échappement est ronde et relativement douce. On entend un léger bruit d’induction qui n’est pas désagréable. Dans l’ensemble, les bruits mécaniques sont bien maîtrisés.
La sensation au levier d’embrayage est douce et les rapports de la boîte six passent facilement et avec précision, même à la volée. Nul besoin d’un Quickshifter pour s’amuser avec la MT-07. L’étagement de la boîte est classique. Les trois premiers rapports sont plutôt courts, favorisant l’accélération et les reprises, alors que les trois derniers sont allongés, pour une vitesse maxi plus élevée. Sur les autoroutes du Québec, à 100 km/, on se surprend parfois à évoluer en quatrième ou en cinquième sans que cela ne dérange. Sur voie fermée à la circulation (circuit), la Yamaha dépasse largement les 200 km/h.
En ville, la MT-07 brille par son étroitesse et sa vivacité. Grâce à son large guidon tubulaire relevé, elle offre une vue imprenable sur la route et on peut se faufiler dans la circulation sans problème. Le moteur est réactif à souhait, facilitant la conduite urbaine.
Sur routes secondaires, le guidon large facilite la mise sur l’angle et les changements de direction. Grâce à ses valeurs de géométrie sportives, la MT-07 est un jouet dans le sinueux. Les suspensions sont bien calibrées et se montrent efficaces sur revêtement impeccable. Sur chaussée dégradée, elles sont un poil fermes et ont tendance à sautiller légèrement.
Vive et précise dans les courbes serrées comme dans les enchaînements, la Yamaha conserve sa trajectoire dans les grands virages rapides. Elle permet d’adopter un bon rythme et les repose-pieds ne rechignent pas à caresser le bitume du bout de leurs ergots. Sans jamais se déstabiliser.
Cette tenue de route et cette sportivité au niveau de la conduite sont renforcées par l’excellence des pneus Michelin Road 5 au profil progressif qui offrent une adhérence et une motricité surprenantes. Même sur chaussée humide. Rien à voir avec les très moyens Bridgestone BT023 qui chaussaient le modèle précédent. Le train avant est rassurant sur l’angle et incite le pilote à explorer les limites de sa moto et les siennes, sans risque majeur.
Sur voie rapide, l’absence de carénage peut constituer un handicap à haute vitesse. La pression du vent sur le casque et le torse du pilote devient très élevée au-delà de 130 km/h et a tendance à le transformer en voile humaine. Cependant, ce flux d’air est exempt de turbulences. Heureusement, au Québec, la vitesse autorisée sur autoroute est limitée à 100 km/h…
Le freinage est efficace, bien qu’il fasse appel à des éléments basiques. La puissance de freinage est tout à fait satisfaisante, même si le mordant initial n’est pas stupéfiant (ce que les néophytes apprécieront), mais une fois dépassée la phase d’amorce, la puissance et la modularité sont au rendez-vous. Le levier est réglable, ce qui est apprécié. L’ensemble est homogène et l’ABS vous protège en cas d’imprévu.
Au niveau de l’équipement, le catalogue d’accessoires de Yamaha propose de nombreuses options pour la MT-07, dont un petit pare-brise, une selle tourisme, un porte-bagages, des poignées chauffantes, des protège-moteur, un support de GPS, une prise USB, des fixations de sacoches latérales et différents bagages souples (sac polochon, sacoches de réservoir, valises latérales imperméables, sacs à dos). De quoi équiper votre MT-07 à votre goût.
Verdict
La MT-07 est une moto aussi performante qu’elle est attachante. Facile à prendre en main, agile et maniable, simple sans être simpliste et totalement dénuée d’électronique — ce qui aurait tendance à me la faire aimer de facto —, la Yamaha démontre qu’il n’est nul besoin de développer plus de 200 chevaux pour séduire les motocyclistes expérimentés, tout comme les néophytes. Une polyvalence qui explique qu’elle se vende si bien en Amérique du Nord et en Europe.
Au niveau du tarif, la MT-07 se détaille 8 799 $, ce qui en fait la deuxième moins cher de sa classe derrière la Kawasaki Z650 (8 499 $), mais devant les Suzuki SV650A (9 000 $), Triumph Trident (9 095 $), Honda CB650R (9 999 $) et Aprilia Tuono 660 (10 499 $). Compte tenu de ses prestations, elle est très bien positionnée et constitue la meilleure affaire du moment. En plus d’être une des motos les plus performantes et plaisantes à piloter du groupe. Pour moi, la MT-07 est coup de cœur depuis déjà 7 ans.
La Yamaha MT-07 est proposée en trois coloris : bleu Yamaha Racing, pour les puristes, gris tempête fluo pour les esthètes et noir techno pour les autres.
Pour de plus amples informations, visitez le site de Yamaha Canada »
FICHE TECHNIQUE
INFORMATIONS GÉNÉRALES
- Poids tous pleins faits : 184 kg
- Hauteur de selle : 805 mm
- Capacité essence : 14 L
- • Consommation : 5,0 L/100 km
- • Autonomie : 280 km
- • Durée de l’essai : 520 km
- Prix : 8 799 $
- Coloris : Bleu Yamaha Racing — Gris Tempête fluo — Noir techno
MOTEUR
- Moteur : bicylindre parallèle CP2, DACT, 4 soup./cylindre, refroidissement liquide
- Puissance : 73,4 ch à 8 750 tr/min
- Couple : 50 lb-pi à 6 500 tr/min
- Cylindrée : 689 cc
- Alésage x course : 80 x 68,6 mm
- Rapport volumétrique : 11,5:1
- Alimentation : injection à deux corps Mikuni de 38 mm
- Transmission : 6 rapports
- Entraînement : par chaîne
PARTIE CYCLE
- Suspension : fourche télescopique non réglable, tubes de 41 mm ; monoamortisseur ajustable en précontrainte du ressort et détente
- Empattement : 1 400 mm
- Chasse/Déport : 24,5°/90 mm
- Freins : 2 disques de 298 mm et étriers quatre pistons Nissin à l’avant ; simple disque de 245 mm avec étrier simple piston Nissin à l’arrière. ABS ;
- Pneus : Michelin Road 5 2 CT+
120/70ZR17 à l’avant
180/55ZR17 à l’arrière
VERDICT RAPIDE
ON AIME BIEN
- La facilité de prise en main
- L’absence d’électronique
- Le moteur coupleux et puissant
- Le freinage amélioré
- Les Michelin Road 5 2 CT+
ON AIME MOINS
- Le manque de protection
- Les vibrations à mi-régime
- La suspension un peu ferme sur chaussée dégradée
- Le design du phare avant
- L’écran ACL placé bas. Difficile d’installer un sac de réservoir.
ÉQUIPEMENT DU PILOTE
- Casque Shoei RF-1400 Prologue TC-11 mat
- Blouson Dainese HF D1
- Jeans Kevlar Dainese D1 EVO
- Gants Dainese Pelle 72
- Bottes ICON Tarmac WP
- Vêtements thermiques Forcefield Base Layer Tech 2