Maturité et polyvalence
Publié le 31 août 2018
Invité au dévoilement des nouvelles Tracer 900/Tracer 900 GT, dans la région de Toronto, j'ai eu l'occasion de découvrir les deux versions de la routière sportive de Yamaha. La FJ-09 est morte ! Vive la Tracer 900 !
Photos : Ben Quinn, Didier Constant, Claude Privée, Yamaha
Au guidon de la Tracer 900 GT, je suis l’ouvreur de Yamaha et mes trois collègues ontariens de loin. Comme la cadence est un peu lente à mon goût, je me laisse distancer pour remonter sur eux à mon rythme et profiter des belles routes sinueuses de la région des stations de ski de Hockley Valley et de Mansfield, près des villages de Caledon et de Terra Nova, au Nord-Ouest de Toronto. Un endroit pittoresque où l’on trouve des routes de montagne sinueuses. Nous avons même droit à quelques lacets, version miniature de ceux des Alpes. Pas question de me laisser gâcher mon plaisir dans un tel environnement.
Tracer 900 et Tracer 900 GT : même combat !
La Tracer 900 est la remplaçante de la FJ-09. Elle hérite de l’appellation européenne Tracer (MTT09). Il était temps, car plus les modèles s’ajoutaient, plus la confusion s’installait entre les dénominations nord-américaines et européennes de la gamme MT. La situation devenait délicate à gérer pour Yamaha qui a décidé d’uniformiser la désignation de ses modèles.
Lors de la sortie de la FJ-09, en 2015, j’avais été séduit par la routière sportive trois cylindres de Yamaha. Même si elle n’était pas exempte de défauts (suspension moyenne, bulle de carénage perfectible, tenue de cap critiquable à haute vitesse), elle s’avérait une moto polyvalente et performante, très agréable à piloter en conduite sportive ou en mode tourisme.
La nouvelle mouture poursuit dans la même veine tout en se peaufinant. Elle subit au passage un affinement de sa ligne. Plus mince de 100 mm (c’est beaucoup), la Tracer devient un outil pour se faufiler entre les files de voitures. Son guidon est plus étroit de 16,5 mm et reçoit des protège-mains redessinés et de nouveaux rétroviseurs.
Les selles pilote et passager sont reprofilées et bénéficient d’un rembourrage multi-densité plus épais et d’un nouveau recouvrement texturé. L’assise du pilote se règle toujours en deux hauteurs (850/865 mm) légèrement plus élevées que sur la FJ-09 originale (+ 5 mm). Du coup, si vous avez les jambes courtes, poser les deux pieds fermement au sol devient encore plus ardu. Derrière, le passager apprécie les poignées de maintien révisées et les nouveaux repose-pieds.
La boucle de cadre arrière a également été modifiée. Elle intègre désormais des supports de valises intégrés qui allègent la ligne de la Tracer quand on l’utilise sans les sacoches accessoires.
Le réservoir à essence dispose d’une protection inédite tandis que la bulle de carénage est plus large et affiche un dispositif d’ajustement opérable à une seule main, même en roulant.
Mais la plus grosse modification de la Tracer (en dehors des suspensions entièrement ajustables de la GT) touche le bras oscillant qui a été allongé de 60 mm, ce qui augmente d’autant l’empattement, la chasse et le déport étant inchangés. Un gros plus pour la motricité et la tenue de cap de la Yamaha.
Une partie cycle bonifiée
Plus tôt dans la saison, j’ai eu l’occasion de piloter une Tracer 900 pendant deux semaines. Je ne suis donc pas en terrain inconnu avec la GT. Car il s’agit essentiellement de la même moto, à l’exception des suspensions Kayaba entièrement réglables et de quelques menus détails. Rien ne démarque vraiment les deux Tracer au niveau dynamique.
Comme je l’ai mentionné en début d’article, la Yamaha est haute et les petits gabarits ne sont pas à la fête. Même en réglant la selle au plus bas, je pose difficilement les pieds à plat au sol. En revanche, en roulant, je dispose d’une position de conduite confortable, dos droit, bras légèrement fléchis et pas trop écartés, grâce au guidon raccourci. De plus, j’ai amplement de place pour mes jambes qui sont correctement dépliées, malgré les repose-pieds haut perchés.
Si la Tracer est toujours vive, l’allongement du bras oscillant favorise la tenue de route. La moto gagne en stabilité et est moins nerveuse qu’auparavant, particulièrement sur chaussée dégradée. Cependant, elle reste très agile. Ainsi, dans les virages serrés à rayon décroissant, elle fait preuve d’une grande précision et d’une vivacité étonnante. Même chose dans les grandes courbes rapides où elle reste bien plantée et précise.
Sur les petites routes bosselées autour de Caledon, les suspensions Kayaba sont mises à contribution. La nouvelle fourche inversée de 41 mm permet un ajustement complet de la compression, de la détente et de la précontrainte, tandis qu’à l’arrière le monoamortisseur ne dispose d’aucun ajustement de la compression, ce qui est une omission flagrante. Les réglages d’origine de la suspension de la GT sont fermes, mais pas raides. Ils permettent d’exploiter au mieux le débattement de la fourche (137 mm) et du monoamortisseur (142 mm). La fourche ne s’enfonce pas exagérément lors de freinages appuyés. À ce sujet, les freins offrent une puissance élevée et un mordant important. Ils incluent une fonction antibloquante qui se révèle transparente à l’usage et très efficace. Et on peut maintenir le freinage jusqu’à la corde sans déstabiliser la machine.
Même si la partie cycle des Tracer est vivante, elle est moins nerveuse que celle de la FJ-09. Le train avant est léger — on le sent à l’accélération sur route bosselée —, mais il ne se désunit pas. Difficile pour la Yamaha de renier ses origines de roadster crapuleux.
Le seul reproche que l’on pourrait adresser au châssis, c’est le choix de la monte pneumatique d’origine. Les Dunlop D222 ne sont pas à la hauteur de la Tracer qui mériterait des gommes plus sportives — Bridgestone Battlax T31, ContiRoad Attack 3, Michelin Road 5, Metzeler Sportex M7 RR, Pirelli Angel GT — lesquelles lui permettraient d’exprimer pleinement son potentiel.
Dans la circulation intense de la 401 et de la 407, la Tracer GT se faufile avec aisance. Même chose en ville. Un vrai scalpel !
Trois cylindres fougueux
Le cœur de la nouvelle Tracer reste le fameux tricylindre CP3 Crossplane de 847 cc, lancé en 2014, sur la FZ-09 (MT-09) qui crache 115 ch à 10 000 tr/min pour un couple respectable de 64,3 lb-pi à 8 500 tr/min. Il est inchangé depuis la dernière génération et est toujours géré par un accélérateur Ride-by-wire et trois modes de conduite (le mode A reste assez brutal — privilégiez le mode standard).
Vivant et rempli à tous les régimes, il est souple et reprend sans broncher dès 3 000 tr/min. Il offre des accélérations franches et vigoureuses et ne rechigne pas à tirer au-delà de 9 000 tr/min. Quand on ouvre les gaz en grand, les chevaux arrivent au galop. Le plaisir commence alors. Sur la version GT, il est secondé par une boîte à 6 rapports dotée d’un accélérateur électronique (Quickshifter) monodirectionnel (il ne fonctionne qu’à la montée des rapports) que j’ai trouvé un peu brut à l’usage. De plus, il ne laisse pas suffisamment entendre les microcoupures à l’allumage, ce qui est un peu dommage.
Ce qui distingue ce moulin, c’est sa flexibilité. Autant il sait se montrer doux en usage relax, autant il s’éveille et vous met le sourire aux lèvres quand vous l’exploitez dans sa bande de plaisir. Il se montre alors explosif, enivrant. La sonorité de l’échappement court, placé à la verticale des oreilles est sublime. Elle participe au plaisir qu’on éprouve à piloter la Tracer en mode sportif.
Quand on cravache le CP3, la consommation dépasse facilement les 6,0 L/100 km, ce qui fait chuter l’autonomie sous les 300 kilomètres. Mais, si on adopte une conduite plus coulée et qu’on sélectionne le mode de conduite standard, la consommation se stabilise aux alentours de 5,1 L/100 km pour une autonomie d’environ 350 km. Quand l’indicateur de réserve se met à clignoter, on dispose d’approximativement 40 km avant la panne sèche.
Confort et protection
Le réglage du pare-brise est simple et direct. Il suffit de pincer le dispositif d’une main et de faire glisser le pare-brise vers le haut ou le bas. Même à grande vitesse, le dispositif de réglage s’opère facilement. L’écran de série offre une protection adéquate contre les éléments, sans plus. Dans sa position la plus basse, il dirige le flux d’air à la base de mon casque, faisant légèrement vibrer ma visière entrouverte (il fait près de 38° dehors). En position haute, l’air est dirigé sur le dessus de mon casque et au niveau des oreilles. Du coup, ça bourdonne. Cependant, une bulle haute est proposée en option. À essayer !
Pour ce qui est des poignées chauffantes de la GT, la température élevée, lors de ce lancement, ne m’a pas encouragé à les essayer. Mais je ne vois aucune raison pour qu’elles ne fonctionnent pas correctement.
La selle est bien rembourrée et se montre plutôt confortable. Cependant, elle est large et a conservé sa forme rectangulaire, ce qui ne favorise pas les déplacements latéraux en conduite sportive. Il faut rester centré. Et piloter à l’ancienne.
La maturité en exergue
La Tracer 900 est l’interprétation de la routière sportive moderne, une moto qui met l’accent sur la polyvalence et l’équilibre. Moins puissante que la BMW S1000XR, la Ducati Multistrada 1200 ou la KTM SuperDuke 1290 GT auxquelles elle rend plusieurs dizaines de centimètres cubes, elle offre en contrepartie une facilité de prise en main et une agilité surprenante.
Ce n’est peut-être pas la Sport-GT parfaite, mais elle s’en approche diablement. Surtout dans le cas de la GT qui propose de série des équipements indispensables au voyageur pressé ou sportif (tableau de bord TFT, régulateur de vitesse, poignées chauffantes, suspensions entièrement ajustables, Quickshifter, valises). La Yamaha redéfinit le tourisme sportif en combinant efficacité et performance à un niveau d’excellence rarement atteint.
La Tracer 900 est d’ores et déjà disponible chez votre concessionnaire Yamaha, en tant que modèle 2018. Comme elle est arrivée tard dans la saison, il n’y aura pas de millésime 2019 du modèle de base au Canada. Elle est offerte en noir mat/anthracite à 11 999 $. Quant à la Tracer 900 GT, il s’agit d’un modèle 2019. Elle est proposée en deux coloris : noir/argent avec accents bleus ou gris/blanc avec accents rouges (celui que je préfère), au tarif de 14 599 $. À ce prix-là et compte tenu des options qu’il intègre, c’est le modèle pour lequel j’opterais. C’est la moto idéale pour voyager rapidement, en solo ou en couple, en ayant la capacité de s’amuser quand les routes le permettent. La routière sportive légère par excellence. Une moto performante qui transporte votre corps et votre âme avec style et confort.
FICHE TECHNIQUE
INFORMATIONS GÉNÉRALES
- Poids tous pleins faits : 214 kg (Tracer) — 227 kg (Tracer GT)
- Hauteur de selle : 850/865 mm
- Capacité essence : 18 L
- Consommation : 5,1 L/100 km
- Autonomie : environ 350 km
- Durée de l’essai : 575 km (Tracer) + 300 km (Tracer GT)
- Coloris : Noir mat/Anthracite (Tracer) — Noir/argent avec accents bleus ou gris/blanc avec accents rouges (Tracer GT)
- Prix : 11 999 $ (Tracer) — 14 599 $ (Tracer GT)
MOTEUR
- Moteur : Trois cylindres en ligne, 4— temps, DACT, refroidi au liquide, 4 soupapes par cylindre
- Puissance : 115 ch à 10 000 tr/min
- Couple : 64,3 lb-pi à 8 500 tr/min
- Cylindrée : 847 cc
- Alésage x course : 78 x 59,1 mm
- Rapport volumétrique : 11,5 : 1
- Alimentation : Injection électronique Mikuni à corps de 41 mm
- Transmission : six rapports
- Entraînement : par chaîne
PARTIE-CYCLE
- Suspension : fourche télescopique inversée Kayaba, diam 41 mm, réglable en précontrainte et en détente (entièrement réglable sur la Tracer GT) ; amortisseur Monocross Kayaba réglable en précontrainte et en détente.
- Empattement : 1 500 mm
- Chasse/Déport : 24 degrés/100 mm
- Freins : 2 disques de 298 mm avec étriers 4 pistons à fixation radiale à l’avant ; simple disque de 245 mm avec étrier simple piston à l’arrière. ABS de série
- Pneus : Dunlop Sportmax D222
120/70ZR17 à l’avant
180/55ZR17 à l’arrière
VERDICT RAPIDE
ON AIME BIEN
- La polyvalence accrue
- Le caractère fun renforcé
- La tenue de route bonifiée
- L’équipement GT
ON AIME MOINS
- Le Quickshifter basique
- Les valises étroites (ne peuvent contenir un casque)
- La monte pneumatique d’origine
Ce qui change sur la Tracer 900
- Rétroviseurs
- Bulle de carénage plus large
- Dispositif d’ajustement de la bulle à une main
- Guidon plus étroit
- Protège-mains redessinés
- Protection du réservoir à essence
- Selle redessinée plus mœlleuse
- Poignées de maintien passager
- Boucle de cadre arrière
- Supports de valises intégrés
- Repose-pieds passager
- Bras oscillant allongé de 60 mm
- Empattement allongé de 60 mm
- Largeur hors-tout réduite de 100 mm
Les plus de la version GT
- Tableau de bord à écran TFT multifonction
- Régulateur de vitesse
- Poignées chauffantes
- Béquille centrale
- Suspensions entièrement ajustables
- Quickshifter
- 2 valises latérales de 22 litres
Principaux accessoires optionnels
- Top-case
- Porte-bagages
- Protecteur de chaîne
- Selle touring chauffante
- Protecteurs de cadre
- Bulle rallongée
- Sacoche de réservoir touring
- Feux antibrouillard PIAA à DEL
Équipement du pilote
- Casque Shoei GT-Air Decade TC-1
- Blouson Furygan Track
- Gants Furygan Fit-R 2
- Jean Kevlar Dainese D1 EVO
- Bottes Forma Air3 Outdry
- Système de communication Sena 30 K
- Sous-vêtement Moto-Skiveez