Un Z qui veut dire Kawa !
Publié le 13 décembre 2016
Notre collègue français Zef Enault, rédacteur en chef de l’excellent site Fast&Lucky, a participé au lancement de la Kawasaki Z 650. Voici ses impressions au terme de sa prise de contact avec la nouvelle Kawasaki.
Par Zef Enault — Photos Kawasaki
Ballerine
Entre la Palma del Condado et Berrocal, à l’est de Séville, les hasards du relief ont donné naissance à une route incroyable. Elle court sur une vingtaine de kilomètres, aucun de ses virages ne se referme, elle est toute en grandes enfilades, presque sans ligne droite. On n’y croise personne. Le genre de sensations qui nourrissent autant le corps que l’esprit. Ils fusionnent, en acte, concentrés, arqués en quête de plaisir. Rentrer large, viser l’intérieur du virage, accélérer aussi tôt et fort que possible. Butiner chaque molécule de ce nectar inconnu de la science, le plaisir partagé avec une moto.
La Kawa Z 650, toute légère, tourbillonne, s’enroule. Elle picore chaque courbe. Il doit bien y avoir une limite. J’essaie de repousser la prise des freins, augmenter un peu le rythme. L’hiver français m’aura probablement rouillé. Chaque fois, j’ai l’impression d’avoir été trop timoré. Ou m’est-elle supérieure ? Faut pas exagérer, une moto à moins de 8 000 $, une petite machine pour débutant, ça doit pouvoir défaillir ! Optimiste, dans une grande courbe à la visibilité parfaite, je descends un rapport et me lance. Un coup de reins, un appui sur le repose-pieds, un haut-le-cœur. Je freine légèrement de l’arrière par réflexe. Une fois de plus, j’ai été lâche. En revanche, dès le milieu de courbe, j’accélère franco. Là, ça fait le malin, 68 chevaux à dresser, pas trop de risque de high side.
Partie cycle parfaite ? Presque. Parfois, quand l’audace m’a concédé un angle digne de ce nom, je sens la fourche souffrir, par petits rebondissements. Peut-être est-ce arrivé deux ou trois fois… Il est tentant de comparer la Z 650 à l’ER-6, elles ont quasi le même moteur. Mais considérons que les deux éléments essentiels d’une moto soient le moteur et le cadre, et qu’on change l’un de ces deux éléments, alors on obtient une nouvelle moto. Moins spectaculaire qu’un moteur, le cadre reste le corps de la bête. La Z a un cadre nouveau, inédit, conçu pour elle. J’affirme donc que c’est une nouvelle moto. D’autant que ce cadre pèse 10 kg de moins que celui de l’ER-6 ! Et le bras oscillant, nouveau aussi, s’est allégé de 2,7 kg. Il actionne maintenant l’amortisseur, positionné de manière classique, par une biellette. La fourche reste identique à l’ER-6. Ces modifications profondes peuvent laisser froid, j’estime moi qu’une partie cycle a autant d’importance qu’un moteur
Celle de la Z 650 bluffe, par son équilibre, sa facilité, ses capacités à rouler vite. Plus vite que l’ER-6. Plus loin, après cette route dingue, frugalement nommée HU-4103, les lignes droites se sont succédées, chiantes malgré l’agréable chaleur du soleil andalou. La Z y a prouvé son confort de selle et le naturel de sa position de conduite. Elles sont assez rares les motos amusantes et confortables. Les suspensions réagissent quand même sèchement sur les défauts de la route. De bonnes suspensions coûtent cher, les motos de moins de 14 000 $ en possèdent rarement. J’ai peu roulé en ville, suffisamment pour apprécier la maniabilité et la faible hauteur de selle (790 mm). La progressivité du freinage aussi (l’ABS à l’arrière se déclenche un peu vite), de même que celle du nouvel embrayage dont le mécanisme, identique à celui de la Versys 1000, réduit l’effort au levier. Il a également un effet antidribble quand il reçoit trop de pression au rétrogradage.
Après le bonheur de la petite attaque, où la partie cycle se met en valeur, il y a celui du quotidien, où le moteur compte beaucoup plus. Le bicylindre vertical a peu changé. Euro4 friendly, sa puissance a baissé de quatre chevaux par rapport à l’ER-6. Ses 68 chevaux sont aussi plus ronds, plus souples, moins pétillants à hauts régimes. Nouveaux arbres à cames, nouvelle injection, nouvel échappement, carters redessinés pour réduire un peu la largeur du moteur… À rouler tous les jours, la Z veille avec plus de complaisance aux petites tâches habituelles, les démarrages aux feux rouges, les dépassements au dernier moment, les évitements, tout ça. Elle est moins amusante que l’ER-6 dans les tours, qui avait un effet un peu deux-temps, qui s’éveillait dans le haut du compte-tours. Le caractère de la Z montre plus de linéarité, de coffre à mi-régimes. Mais quelques vibrations sont toujours sensibles à mi-régimes, dans les repose-pieds (malgré la garniture d’épais caoutchoucs) et le réservoir.
En gros, sa nouvelle partie cycle est plus amusante et facile, son moteur est plus docile et un peu moins fun. Mais il ne cogne plus sous 3 000 tr/min, et ça, c’est vachement appréciable au quotidien. La Z 650 a hérité de la même boîte de vitesses et la même transmission finale que l’ER-6, qui gagnerait peut-être un peu à être raccourci. Genre une ou deux dents de plus à la couronne de 46. La Z peine à atteindre 200 km/h compteur à fond, mais on s’en fout. Une transmission finale plus courte ne l’emmènerait qu’à 180 km/h en sixième, mais elle serait plus sympa sur les rapports intermédiaires.
Au Canada, la Z650 sera offerte en versions standard (7 499 $) et ABS (7 899 $) en blanc et en noir. Elle fera son apparition dans les salles d’exposition des concessionnaires Kawasaki dès le printemps.
FICHE TECHNIQUE
INFORMATIONS GÉNÉRALES
- Poids tous pleins faits : 187 kg
- Hauteur de selle : 790 mm
- Capacité essence : 15 L
- Consommation : 5,4 L/100 km
- Autonomie : environ 275 km
- Durée de l’essai : 300 km
- Prix : 7 499 $ — 7 899 $ (ABS)
- Coloris : blanc, noir, champagne
MOTEUR
- Moteur : bicylindre parallèle, DACT, 4 soup./cylindre, refroidissement liquide
- Puissance : 68 ch à 8 000 tr/min
- Couple : 49 lb-pi à 6 500 tr/min
- Cylindrée : 649 cc
- Alésage x course : 83 x 60 mm
- Rapport volumétrique : 10,8 : 1
- Alimentation : injection à deux corps de 36 mm
- Transmission : 6 rapports
- Entraînement : par chaîne
PARTIE CYCLE
- Suspension : fourche télescopique, tubes de 41 mm dépourvue de réglages ; monoamortisseur horizontal Back-Link actionné par une biellette, ajustable en précontrainte du ressort
- Empattement : 1 410 mm
- Chasse/Déport : 24°/110 mm
- Freins : 2 disques à pétales de 300 mm et étriers Nissin double -piston à l’avant ; simple disque de 220 mm avec étrier Nissin simple piston à l’arrière.
- Pneus : Dunlop Sportmax D214
120/70ZR17 à l’avant
160/60ZR17 à l’arrière
La technique
Moteur : l’architecture du bicylindre reste la même que celle de l’ER-6. Les corps et paramètres d’injection, la boîte à air, les arbres à cames, la ligne d’échappement diffèrent. La fonderie des carters d’embrayage et d’allumage ont aussi changé, comme celle de la culasse, pour affiner la moto.
Cadre : conçu à partir du même logiciel propre à Kawasaki qui a permis le développement de la H2, il utilise des tubes d’acier soudés, en moins grand nombre que celui de l’ER-6. D’où la baisse de poids. La section des tubes a aussi été réduite. Le type d’acier est le même que celui utilisé sur le cadre de l’ER-6. Les soudures sont faites à la main. La répartition des masses est différente par rapport à l’ER-6, avec un peu plus de poids sur l’avant. L’angle de colonne a été refermé d’un degré.
L’ancêtre
La Kawasaki Z 650 a existé, il y a 40 ans. C’était un quatre cylindres en ligne, déjà considéré comme une petite cylindrée face à la 900 puis la 1000. Elle a été utilisée en Coupe Kawa une année seulement, en 1979. Elle a été produite de 1976 à 1983. Son moteur sortait 64 ch.