L’attente valait le coup !
Publié le 8 septembre 2016
Après avoir espéré sa venue pendant des années, nous avons enfin l’occasion d’essayer la Suzuki GSX-S1000, le gros roadster sportif Suzuki dérivé de la GSX-R 1000 et sa demi-sœur carénée baptisée GSX-S1000F. J’ai passé une semaine en compagnie de chacune d’elles, question de voir ce qui les départageait.
Photos © Didier Constant et Suzuki
Gran Turismo ou roadster sportif?
Selon que vous choisissez la GSX-S1000 ou la version F entièrement carénée, la Suzuki dévoile sa double personnalité. GT ou roadster sportif hyperactif ? Personnellement, je dois avouer que j’ai un faible pour le roadster qui correspond parfaitement à l’image que je me fais d’une moto passion. Une GSX-S750 survitaminée. Un look dénudé un poil rebelle, un moteur qui pulse et une partie cycle de sportive. Tout ça pour seulement 12 299 $.
Même si la formule n’est pas nouvelle, elle fonctionne parfaitement et elle me plait bien. De plus, si on compare la Suzuki à la Honda CB1000R et la Kawasaki Z1000, elle n’a pas à rougir se montrant aussi équipée et moderne que les deux autres nippones tout en étant plus performante. À contrario, la GSX-S1000 apparait moins extrême que les Européennes — Aprilia Tuono 1100 R, BMW S1000R, KTM Super Duke R 1290 — ou que la Yamaha FZ-10 qui interprètent toutes une autre partition et affichent un prix nettement plus élevé.
Quant à la version F, sa véritable cible est la Kawasaki Ninja 1000. C’est sa seule concurrente directe. Sa cousine germaine serait-on tenté de dire. Et même si elle est identique au roadster, l’ajout d’un carénage complet la calme un peu. Il ajoute du poids sur le train avant, ce qui bonifie sa stabilité sans trop nuire à sa maniabilité. La GSX-S1000F protège également mieux le pilote des éléments et lui permet de rouler plus longtemps, sans fatigue excessive.
Une base commune, deux motos
Les deux versions utilisent la même partie cycle — système de freinage, suspensions, cadre — et le même moteur. Le châssis tout en alu affiche de larges longerons disposant d’ouïes pour les conduits d’admission de la boîte à air. Il a été dessiné spécifiquement pour la GSX-S. Il est rattaché à un bras oscillant également en alu, inspiré de celui des GSX-R actuelles, lequel actionne un mono-amortisseur Kayaba réglable en détente et précontrainte. À l’avant la suspension est confiée à une fourche inversée Kayaba de 43 mm réglable dans tous les sens. Les jantes aluminium à 6 bâtons sont chaussées de pneus sportifs Dunlop Sportmax D214 au profil arrondi qui garantit une bonne progressivité dans les transitions et la jante arrière reçoit un pneu de 190 de large, digne d’une super sportive.
Le moteur est le 4 cylindres en ligne DACT à 16 soupapes de la Suzuki GSX-R 1000 millésime 2005. Ce bloc compact à course longue développe 145,5 ch à 10 000 tr/min pour un couple de 78,2 lb-pi à 9 500 tr/min et présente un rapport volumétrique élevé de 12.2 :1 qui requiert l’usage de super sans-plomb.
Le moteur des GSX-S est doté d’un antipatinage réglable sur 3 niveaux que l’on peut désactiver au besoin. Ce système effectuerait 250 mesures par seconde et agit sur le temps d’allumage. Il se règle via le bouton « Mode » placé sur le commodo gauche. L’antipatinage est bien pensé. Il est peu intrusif sur le mode 1, relativement transparent sur le mode 2 (le voyant clignote souvent sur le tableau de bord, mais on ne ressent pas trop son intervention), mais se montre assez intrusif sur le mode 3.
Au niveau de l’équipement, tout est identique, hormis le carénage. Feux à DEL, guidon Renthal Fatbar à section variable, rétroviseurs montés sur le guidon, tableau de bord ACL rétroéclairé (que l’on retrouve aussi sur la SV650) qui fournit une foule d’informations pratiques (vitesse, régime moteur, heure, totalisateurs kilométriques partiels, odomètre, jauge à essence, distance à parcourir avant la panne sèche, rapport engagé, mode d’antipatinage sélectionné, consommation instantanée, moyenne, autonomie…). Tout ce qu’il faut pour assurer votre plaisir et votre confort.
Pour ce qui est des coloris, les deux GSX-S sont proposées en bleu MotoGP (mon préféré), en rouge et noir ou en gris mat. Elles se détaillent 12 299 $ pour le roadster et 12 999 $ pour la version F.
Le verdict de la route
Pour évaluer ces nouvelles Suzuki, j’ai organisé deux balades distinctes dans Lanaudière et la Mauricie, une en solo pour la GSX-S1000 et une en groupe restreint pour la GSX-S1000F qui était accompagnée pour l’occasion d’une BMW S1000XR et d’une KTM 1290 Super Duke GT d’essai.
Les deux belles d’Hamamatsu affichent la même position de conduite décontractée et le même plaisir. Le pilote a le buste légèrement penché vers l’avant, avec un appui réduit sur les poignets grâce au large guidon Renthal, les coudes écartés, les pieds relevés en raison des repose-pieds haut perchés et les jambes fléchies, comme sur une sportive. La selle est étroite au niveau du réservoir, mais large à l’assise. Son rembourrage est modéré et ferme, pourtant le confort qu’elle propose est correct, même pour de longues sorties.
Au niveau de la protection, le saute-vent minimaliste qui équipe le roadster fait son boulot correctement jusqu’à 140 km/h, mais au-delà, il rend les armes. Le pilote ressent alors la pression du vent sur le buste, les épaules et la tête et doit baisser le rythme s’il veut profiter de la balade. Cependant, il ne ressent ni turbulence ni bruit rédhibitoire. Sur la F, le carénage protège mieux et permet d’adopter une cadence élevée en tout confort. La bulle détourne l’air au-dessus des épaules du pilote et autour de son casque.
Au guidon de ces Suzuki, on est surpris par la douceur du moteur qui n’est gâchée que par la rudesse de la réponse de l’accélérateur électronique à bas régime. Il est en effet difficile de garder le gaz constant quand on roule entre 2 000 et 3 000 tr/min. À la remise des gaz, on ressent des à-coups prononcés. Sinon, le 4 cylindres en ligne est souple et reprend sur un filet de gaz, en bas de 2 000 tr/min, sans rechigner, dès 70 km/h en sixième. Il possède un coffre appréciable à bas régime, avec une belle sensation de couple. Il est assez rond à bas et mi-régimes et moins violent que certains quatre cylindres sportifs modernes, plus linéaire. Pourtant, il distille des accélérations franches et musclées, particulièrement au-dessus de 7 000 tr/min et tire sans mollir jusqu’à la zone rouge qui débute à 11 500 tr/min. Pour information, le rupteur s’enclenche à 12 500 tr/min, c’est-à-dire bien au-delà de la zone fatidique. Le bloc d’Hamamatsu a conservé la fougue du moteur de la GSX-R1000 K5, son coffre aux régimes intermédiaires et son allonge remarquable. Dans cette bande de régimes, on ressent quelques vibrations parasites dans le guidon, la selle et le repose-pieds. Quant au contrôle de motricité, il se montre intuitif, efficace et facile à ajuster en roulant.
L’échappement de type 4-2-1 des Suzuki émet une sonorité flatteuse, riche, particulièrement lors des envolées rageuses du 4-en ligne. Elle est soulignée par les bruits d’admission de la boîte à air logée derrière la colonne de direction. Un échappement Yoshimura est proposé en option pour les mélomanes.
Sur les petites routes bosselées de notre verte campagne, la suspension des GSX-S demande à être parfaitement ajustée pour offrir un comportement acceptable. Dans ce genre d’environnement, la Suzuki est ferme, rebondit, se crispe. Le train avant devient alors raide et nerveux. Pour rouler vite dans ces conditions, il faut être prêt à se battre, bouger sur la selle, se lever sur les repose-pieds et ne pas serrer le guidon trop fort au risque d’induire des mouvements non désirés de la direction. En un mot, la GSX-S n’aime pas les chaussées défoncées, ni l’improvisation. Son terrain de jeu ce sont les belles routes aux larges courbes rapides et au revêtement en bon état. Là, elle brille, avalant les virages à vive allure avec une précision incroyable. Elle conserve sa trajectoire sans bouger d’un poil, faisant montre d’une grande rigueur de châssis. Dans les virages serrés, elle affiche une bonne agilité et se balance d’un angle à l’autre facilement pour une moto de son gabarit, d’une simple poussée sur le large guidon tubulaire.
Doté d’un côté très joueur, la GSX-S dispose d’une boîte de vitesse précise mais qui rechigne à monter les rapports à la volée. En revanche, elle bénéficie d’un système de freinage efficace. Il est constitué d’un double disque de 310 mm pincé par des étriers Brembo radiaux à 4 pistons à l’avant. À l’arrière, un simple disque de 250 mm avec un étrier simple piston se charge de ralentir la bête. La GSX-S adopte également un système ABS Bosch (non déconnectable) transparent et efficace. Le freinage est puissant, modulable et infatigable. Même après des heures d’arsouille. L’ABS est un poil sensible, mais réagit globalement bien.
Au niveau de la consommation de carburant, la Suzuki engloutit 6,6 litres aux 100 km ce qui lui donne une autonomie d’environ 258 km avec son réservoir de 17 litres, réserve incluse.
Avec un poids contenu de 209 kg tous pleins faits (214 kg pour la F), la Suzuki est facile à prendre en main et se manie aisément. Menée par un pilote de bon niveau, sur une route qui lui convient, elle pourra donner du fil à retordre à certaines sportives pures et dures. Et, bien réglée, particulièrement au niveau des suspensions, elle saura se tirer d’affaire avec brio sur circuit en raison de son équilibre général, mais surtout de son châssis intègre.
Roadster ou GT ? À vous de choisir !
En nous offrant deux motos très proches, tant en termes de performances dynamiques que d’allure, mais aussi de prix, Suzuki flatte les deux hémisphères de notre cerveau. Si nous laissons notre passion s’exprimer, nous opterons certainement pour la GSX-S1000. Plus délinquante, c’est une vraie moto d’égoïste. Une machine que l’on choisit plus pour se faire plaisir en tout temps, sans compromis que pour sa polyvalence. À l’inverse, si notre côté rationnel l’emporte, alors la GSX-S1000F recevra un satisfécit. Elle offre exactement les mêmes performances, avec plus d’aspects pratiques et un surplus de confort, autant en solo qu’en duo. La F s’avère une bonne voyageuse que l’on peut équiper de bagages souples afin d’en faire une GT. C’est une moto polyvalente qui ne rogne ni sur les performances ni sur le plaisir de pilotage que l’on éprouve à son guidon. La Suzuki GSX-S1000 est une moto homogène et performante. Sans être la plus puissante ni la plus avancée techniquement parlant, elle offre un équilibre bluffant et une facilité de conduite étonnante. Et en plus, c’est la moins chère de son créneau. Alors, qu’attendez-vous pour rendre visite à votre concessionnaire Suzuki ?
FICHE TECHNIQUE
INFORMATIONS GÉNÉRALES
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MOTEUR
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PARTIE-CYCLE
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VERDICT RAPIDE
ON AIME BIEN
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ON AIME MOINS
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L’avis des autres essayeurs
Une GT comme je les aime
Lors de ma trop courte prise de contact avec cette moto, je fus grandement impressionné par les performances générales, le confort du poste de pilotage et par la polyvalence de la machine. Un voyage au loin ? Une séance de défoulement du dimanche matin ? Un tour à la crèmerie ? Elle sera partante et d’agréable compagnie en toute occasion.
Les performances du moteur 4 cylindres de 1000 cc sont à couper le souffle. Il reprend tôt dans les tours et ne s’essouffle pas. Seules les suspensions réglables en tout sens semblent un peu sèches. À leur défense, je dois mentionner que je n’ai pas pris le temps de les mettre au point correctement. La mythique route 347 (qui n’a plus de mythique que son revêtement torturé) m’en a donné pour mon argent! J’aurais aimé avoir plus de temps pour jouer du tournevis sur les ajustements et refaire quelques passages.
La qualité de finition de la moto est excellente. J’ai mentionné le confort de la moto, mais je dois ajouter que du haut de mes 1,88 m mes vieux genoux ont un peu souffert. Les repose-pieds sont haut placés pour moi. En revanche, la position du guidon fait qu’il tombe de façon naturelle dans nos mains. Notre torse est suffisamment penché vers l’avant sans mettre trop de poids sur les poignets.
Dans cette catégorie de moto et de prix, la GSX-S1000 est une gagnante à coup sûr !
— Richard Turenne
L’équilibre entre sport et confort
Ayant eu l’occasion d’essayer sa sœur sans carénage, j’avais déjà une bonne idée de ce qui m’attendait. Et contrairement à Richard, j’ai passé pas mal de temps à son guidon. Personnellement, l’ergonomie proposée me va comme un gant. La position de conduite que je qualifierais de semi-sportive tout en étant reposante grâce à une selle confortable et des suspensions qui remplissent bien leur rôle, même si je les trouvais quelque peu molles, bien qu’elles soient efficaces.
Côté moteur, il est vivant et performant tout en chantant une belle mélodie à partir des mi-régimes. La sélection des vitesses se passe toujours en douceur. Les freins sont puissants et facilement dosables.
Mesurant 1,77 m, j’ai trouvé la protection offerte par la bulle non réglable tout juste passable. Par contre, je n’ai ressenti aucune turbulence. Une excellente routière sportive !
— Alain Paquin