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La Supermotarde aboutie!

Texte : Costa Mouzouris– Photos : MV Agusta

Au risque de débiter un cliché, MV Agusta est une entreprise familiale de petite taille évoluant dans un domaine dominé par d’énormes conglomérats multinationaux. Ainsi, en 2009, l’entreprise ne comptait que trois modèles à son catalogue. Trois sportives mythiques représentant le savoir-faire italien en la matière. Mais MV Agusta est en mode croissance. Elle a porté sa gamme à 11 modèles en 2012 et cinq nouveautés sont attendues pour 2014. La première dévoilée étant la F3 800, présentée plus tôt cette année et la récente Rivale 800, que j’ai découverte à Vence, en France.

La Rivale 800 est nouvelle du phare avant au feu arrière. Ce n’est donc pas juste une Brutale déguisée à l’aide d’une carrosserie différente, mais bien une moto inédite. Elle a été pensée en 2008, et sa réalisation a débuté il y a environ deux ans . Comme c’est le cas pour les autres produits de la gamme MV, la Rivale est sublime, quel que soit angle sous lequel on l’observe.

D’inspiration supermotard, elle affiche quelques éléments de design intéressants, quoiqu’involontaires, que son concepteur en chef Adrian Morton avoue n’avoir remarqués qu’après avoir examiné des photos de la moto. Ainsi, l’arrière de la moto ressemble, selon lui, à un oiseau stylisé à la manière Art-Déco. Mais, si on la regarde à partir de l’arrière, on voit un serpent la bouche grande ouverte.

Hyper vive et maniable, la Rivale se pilote du regard.

Hyper vive et maniable, la Rivale se pilote du regard.

Certains autres détails, plus discrets ceux-là, révèlent comment le design et la conception sont abordés différemment chez MV Agusta par rapport à ce que l’on note chez d’autres constructeurs. Au sommet du minuscule capot de selle argenté, on remarque un panneau en plastique qui, une fois enlevé, révèle un point de fixation pour de futurs accessoires, comme un petit porte-bagages ou un système de montage pour le coffre arrière. L’éclairage de la plaque d’immatriculation est confié à une originale ampoule à DEL qui ressemble à une lampe de lecture.

Le seul détail un peu exagéré, à mon avis, est l’utilisation de clignotants angulaires montés sur le garde-boue arrière, de chaque côté du support de la plaque d’immatriculation. Si vous trouvez que ce garde-boue arrière est trop présent, MV propose un ensemble garde-boue/support de plaque de remplacement moins tape-à-l’œil, avec des clignotants plus classiques.

Les rétroviseurs repliables, montés en bout de guidon, ne sont pas originaux. Ducati a utilisé de tels rétroviseurs sur l’Hypermotard, il y a déjà quelques années. Et les similitudes visuelles entre les deux motos ne s’arrêtent pas là. Pourtant, il suffit de démarrer la Rivale pour constater qu’elle n’a rien en commun avec la supermotarde de Borgo Panigale. Par ailleurs, la sonorité rauque qui s’échappe des trois tuyaux d’échappement vous rappelle que vous êtes aux commandes d’une tricylindre de Varèse.

Magnifiquement réalisée, la Rivale est une réussite esthétique.

Magnifiquement réalisée, la Rivale est une réussite esthétique.

Au cœur de la Rivale, on trouve le nouveau trois cylindres en ligne, refroidi au liquide, de 798 cc, qui a été introduit sur la Brutale 800, plus tôt cette année. Comme dans les autres triples de MV Agusta, son vilebrequin tourne à contresens (vers la droite quand on regarde la moto à partir de la gauche ), ce qui pour effet de favoriser la maniabilité et la vivacité lors des enchaînements de virages. La Rivale utilise le même réglage moteur que sur la Brutale 800, revendiquant 125 ch à 12000 tr/min et 62 lb-pi de couple à 8600 tr/min (en comparaison, la F3 800 développe 148 chevaux pour 65 lb-pi de couple).

La Rivale utilise un châssis qui est similaire à celui des autres tricylindres italiens, avec un cadre treillis en acier dont la partie arrière en fonte d’aluminium englobe le pivot du bras oscillant. La moto possède une géométrie de direction légèrement différente de celle de la Brutale. Elle affiche un empattement plus long de 30 mm ( 1410 mm), une chasse de 23,5 degrés et un déport de 105 mm. La suspension, quant à elle, reprend un débattement plus long .

Habituellement, lors des lancements de presse, les trajets sont choisis de façon à nous familiariser progressivement avec la moto. On commence par des routes larges et plutôt rectilignes, relativement rapides (il faut bien faire connaissance avec la machine et prendre confiance), pour continuer avec des routes plus sinueuses et plus étroites, une fois l’échauffement terminé. Mais, comme je vous l’ai expliqué plus tôt, chez MV Agusta, on fait les choses différemment.

Sur de telles routes, la Rivale est la moto idéale. Presque parfaite.

Sur de telles routes, la Rivale est la moto idéale. Presque parfaite.

Après avoir tourné à droite à l’entrée de l’hôtel, nous nous sommes retrouvés sur des routes en lacets, à fond de train, négociant les épingles à un rythme que je pourrais qualifier de très agressif. Apparemment, les préliminaires ne sont pas une spécialité italienne…

La position de conduite est légèrement penchée sur l’avant, un peu comme sur l’Hypermotard de première génération, avant que Ducati ne déplace l’arrière haut perché. Cette position invite à adopter un rythme agressif et la Rivale répond aux impulsions sur le guidon avec précision et équilibre. L’effort de direction est léger et la Rivale reste neutre dans les virages. Elle est étonnamment stable et exempte de mouvements au niveau de la colonne de direction, contrairement à la majorité des motos dénudées, à large guidon tubulaire.

Comme sur les modèles précédents, MV Agusta utilise un accélérateur électronique Ride-by-Wire. Critiqué sur les F4, F3 et Brutale pour sa réponse brusque et difficile à moduler, cet accélérateur électronique est considéré comme le Talon d’Achille des MV. Les pilotes d’essai de la marque ont accumulé plus de 250 000 km au guidon de la Rivale, durant sa phase de mise au point, et leurs efforts semblent avoir porté fruit. On le ressent immédiatement, dès les premiers tours de roue.

La réponse à l’accélérateur est très linéaire et facile à gérer, même dans le plus agressif des modes de conduite prédéfinis. Il y a quatre modes en tout, soit «Pluie», «Normal», «Sport» et «Custom». Comparativement aux MV que j’ai conduites récemment, leur sélection est plus intuitive et leurs caractéristiques plus distinctes. Tout ce que vous ayez à faire est d’appuyer sur le bouton du démarreur lorsque le moteur est en marche pour faire défiler les différents modes, lesquels apparaissent sur ​​l’écran numérique du tableau de bord. Arrêtez-vous sur celui que vous souhaitez sélectionner et le tour est joué. La moto va sélectionner ce mode sans qu’il faille appuyer sur un autre bouton, tirer l’embrayage ou fermer l’accélérateur.

La MV est magnifique dans sa robe rouge/argent.

La MV est magnifique dans sa robe rouge/argent.

L’électronique comporte également huit niveaux de contrôle d’antipatinage, que l’on sélectionne facilement grâce à un interrupteur à bascule monté sur le commodo de gauche. La seule option dont on déplore l’absence est un système de freinage ABS .

Le moteur a une bande de puissance très étendue. Particulièrement souple, il accélère sans broncher dès 50 km/h sur le dernier rapport. La plage de puissance est si large que vous ne pouvez pas vraiment sélectionner un mauvais rapport. Il suffit de déterminer à quelle vitesse vous voulez sortir des virages et choisir le rapport approprié. Sélectionnez un rapport élevé pour une accélération plus progressive, ou restez sur un rapport inférieur pour une accélération fulgurante, en laissant le moteur crier dans les tours. J’ai essayé à une ou deux reprises d’accélérer fort, jusqu’au limiteur de régime, mais le tricylindre a continué à tirer jusqu’à ce que le prochain virage arrive, et ils arrivent vite sur la Côte d’Azur. L’antipatinage était réglé sur le quatrième des huit niveaux et je n’ai jamais ressenti la nécessité de modifier ce réglage.

Les vibrations du moteur sont minimes. À vitesse normale , elles sont presque imperceptibles. C’est seulement dans les régimes supérieurs que vous sentirez quelques bourdonnements discrets.

L’effort au levier d’embrayage est léger, même si le premier rapport est long et qu’il est nécessaire de faire glisser l’embrayage au démarrage. La transmission fonctionne correctement. Le passage des rapports s’effectue en douceur et avec précision, bien que le sélecteur soit court. Par ailleurs, le shifter électronique permet de monter les rapports sans couper les gaz ni utiliser l’embrayage. Il fonctionne mieux à haut régime, la poignée des gaz ouverte en grand, que lors de moyennes ou faibles accélérations. Dans ces cas particuliers, le passage des rapports est plus un peu saccadé. Au rythme élevé auquel nous roulions, je l’ai utilisé tout le temps, sauf lors de la traversée des villes.

Le comportement routier de la Rivale sur les petites routes de la Côte d'Azur est irréprochable. Il permet une conduite sportive en toute sécurité.

Le comportement routier de la Rivale sur les petites routes de la Côte d’Azur est irréprochable. Il permet une conduite sportive en toute sécurité.

J’ai testé chaque mode de conduite, à l’exception du mode «Custom» (personnalisé) pour finalement sélectionner le mode sport la plupart du temps, ce que je ne ferais sur les autres MV en raison de la réponse brusque de leur accélérateur électronique. Si vous possédez une MV Agusta récente, ne vous inquiétez pas pour autant. Les ingénieurs de MV Agusta nous ont dit qu’ils allaient appliquer ce qu’ils ont appris lors de la mise au point de la Rivale sur les autres modèles. Des cartographies modifiées seront offertes pour les dernières nées de la firme. Les propriétaires de motos MV Agusta peuvent savoir quelle mise à jour logicielle est offerte pour leur machine sur le site de MV Agusta. Si votre moto n’a pas été chez le concessionnaire avant la date de sortie de la dernière mise à jour, tout ce que vous avez à faire est dde lui rendre visite et de brancher votre moto sur son ordinateur afin de télécharger la dernière version de cartographie proposée. Et ce, tout à fait gratuitement. Les gens de MV travaillent également sur un système où les propriétaires seront en mesure de mettre à jour le logiciel de l’unité de contrôle électronique en ligne, depuis leur domicile.

La suspension est l’un des facteurs qui devraient permettre à la Rivale de plaire à un large éventail de pilotes. Contrairement aux roadsters sportifs, la Rivale n’est pas équipée d’une suspension Supersport rigide, bien qu’elle soit plus sophistiquée que celle que l’on trouve sur la nouvelle Yamaha FZ-09 et qu’elle comporte une large gamme de réglages. À l’avant, la Rivale dispose d’une fourche inversée Marzocchi à poteaux de 43 mm de diamètre tandis qu’un monoamortisseur Sachs se charge d’amortir l’arrière.

Au début, j’ai trouvé la suspension arrière trop molle, spécialement au niveau de la détente. La moto se dandinait lors des enfilades de virages. Je voulais la durcir à l’occasion d’une séance photo, mais, à ma grande déception, je n’ai pas trouvé d’outils pour le faire, sous la selle. Heureusement, l’un des photographes avait un multioutil avec lequel j’ai pu durcir la vis de réglage de la détente de trois quarts de tour, à l’arrière.

Sur ma moto, j’ai rencontré un petit problème avec accélérateur qui avait tendance à coller légèrement. C’était un problème d’ajustement qu’un des mécaniciens a réglé en quelques secondes.

Les rétroviseurs rabattables ont très bien fonctionné, offrant une vue arrière non obstruée. Si vous ne les aimez pas , vous pouvez commander un jeu de miroirs montés de manière classique, mais avec ceux-ci, tout ce que vous verrez, se sont vos coudes. C’est du moins ce que nous a dit un des techniciens.

Les rétroviseurs repliables, en bout de guidon, rappellent ceux de la Ducati Hypermotard.

Les rétroviseurs repliables, en bout de guidon, rappellent ceux de la Ducati Hypermotard.

CONCLUSION

MV Agusta semble vouloir rester un constructeur de produits exclusifs, à faible volume. Et la Rivale 800 est assurément une moto haut de gamme, comme en témoigne son prix de 16 995 $.

Selon Castiglioni, la marque se vend maintenant aussi bien qu’Aprilia en Europe et la demande est en augmentation. Je n’ai aucun doute que les ventes de M Agusta vont poursuivre leur tendance à la hausse. Les motos de la marque s’améliorent à chaque lancement et ils figurent désormais parmi les meilleures machines du marché. Le seul facteur limitant leur croissance, particulièrement en Amérique du Nord, est un réseau de distribution limité. Les statistiques présentées lors de la présentation technique ont révélé que l’augmentation des ventes était directement imputable aux pays européens où le réseau de distribution a été élargi. Une tendance à promouvoir au Canada.

Il était rafraîchissant de voir à quel point les employés de MV Agusta étaient fiers de leurs produits lors de cette présentation, de sentir la passion qui les animait. Castiglioni estime que la Rivale 800 est un modèle aussi important pour l’entreprise que la F4 l’a été lorsqu’elle a été lancée. Je pense que c’est la meilleure MV Agusta produite à ce jour. J’ai hâte de découvrir comment les autres modèles 2014 se comporteront…

Fiche technique

INFORMATIONS GÉNÉRALES

  • Poids à sec : 178 kg
  • Hauteur de selle : 881 mm
  • Capacité essence : 12,9 L
  • Consommation : N.C.
  • Autonomie : N.C.
  • Durée de l’essai: N.C.
  • Prix : 16 995 $

MOTEUR

  • Moteur : Tricylindre en ligne, quatre temps, refroidi au liquide, DACT, 4 soupapes par cylindre
  • Puissance : 125 ch à 12 000 tr/min
  • Couple : 62 lb-pi à 8 600 tr/min
  • Cylindrée : 798 cc
  • Alésage x course :79 x 54,3 mm
  • Rapport volumétrique: 13,3:1
  • Alimentation : injection électronique
  • Transmission : six rapports
  • Entraînement : par chaîne

PARTIE-CYCLE

  • Suspension : fourche inversée, tubes de 43 mm réglable en détente, en compression et en précontrainte du ressort; mono-amortisseur réglable en détente, en compression et en précontrainte du ressort
  • Empattement : 1 410 mm
  • Chasse/Déport : 23,5 degrés/105 mm
  • Freins : 2 disques de 320 mm et étriers 4 pistons radiaux à l’avant; simple disque de 240 mm avec étrier double piston à l’arrière.
  • Pneus : Pirelli Diablo Rosso II
    120/70-17 à l’avant
    180/55-17 à l’arrière
Rivale-300-1

Les trois sorties d'échappement de la Rivale sont tout simplement sublimes.

Les trois sorties d’échappement de la Rivale sont tout simplement sublimes.

Verdict rapide

ON AIME BIEN

  • Le Ride-by-Wire enfin maitrisé
  • Le caractère explosif du tricylindre
  • La partie cycle équilibrée
  • Les suspensions parfaitement calibrées

ON AIME MOINS

  • Le prix élevé
  • L’autonomie réduite
  • La selle haut perchée