La passion nous garde éternellement jeunes !
Publié le 8 janvier 2020
S’il y a un fil conducteur qui me relie à mes amis les plus proches, mais aussi à vous qui me suivez sur Motoplus.ca depuis maintenant 12 ans, c’est l’amour de la moto. Cette passion qui frise la folie parfois et me fait crier de bonheur dans mon casque ou chanter à tue-tête en roulant. Sans raison ! Par pur plaisir. Ça doit vous arriver aussi, non ?
Photos © Didier Constant, Olivier Choquette
Dans mon cas, cette passion est un héritage familial qui me vient de mon père et de mon grand-père. C’est un legs parfois lourd à assumer. Un bonheur autant qu’une malédiction. Surtout quand elle est associée au besoin irrépressible de bouger, de changer d’horizon. « Rester c’est exister : mais voyager c’est vivre » affirme Gustave Nadaud. Une maxime qui guide mon existence depuis mon plus jeune âge. J’ai besoin de bouger. D’aller voir ailleurs si j’y suis. C’est viscéral. Le but premier de la moto est de partir, de s’évader. Par la route, par les chemins de traverse ou les sentiers n’a pas d’importance pour autant qu’on voyage. C’est peut-être pour cette raison que j’aime tant la moto. Ainsi, quand je reste trop longtemps sans rouler — les longs mois d’hiver sont sinistres au Québec —, mon cerveau réclame sa dose d’adrénaline.
La moto permet à l’homme de s’accomplir. De nourrir son âme. De combler un besoin viscéral. Certains appellent ça la liberté, d’autres l’indépendance, d’autres encore l’accomplissement de soi. Pour moi, il s’agit de la vie, tout simplement.
À moto, ta survie dépend de ton intelligence, de ton expérience de conduite, de tes aptitudes, de ta capacité d’anticipation et d’adaptation. Chaque motard développe un rapport fusionnel avec sa machine. Il fait corps avec elle. C’est un outil qu’il contrôle, non l’inverse. En ce sens, l’électronique et la moto sont antinomiques. Tout dispositif qui transfère le contrôle du pilote à la machine tue l’essence même de ce sport. La vulnérabilité et le frisson que me fait ressentir la moto me donnent l’impression d’exister pleinement. Si votre but ultime est d’être protégé de tout et de vous-même, abandonnez la moto et mettez-vous à l’automobile. Ou à la pêche à la ligne.
Je me demande parfois s’il est plus judicieux d’investir 1000 $ dans un cours de formation avancée ou dans un gilet airbag? Personnellement, j’opterais pour la première option. Car les enseignements que je tirerais de cette formation me serviront toute ma vie.
La moto constitue l’une de mes plus grandes joies. Il m’arrive parfois d’avoir froid ou d’avoir mal à moto — au dos, au cul, aux poignets —, mais jamais de m’ennuyer ou de regretter de rouler, malgré les conditions parfois exécrables. Pour certains, l’enthousiasme diminue lorsqu’ils n’ont pas un guidon entre les mains. Pas moi. J’ai toujours un guidon dans ma tête. Je rêve régulièrement de moto et quand je ne pense pas à un voyage que je veux entreprendre ou à une course à laquelle je veux participer, je regarde des films de moto, un documentaire sur le Tourist Trophy de l’Île de Man ou un ancien Grand-Prix.
La passion de la moto est l’une des plus fortes que l’on peut ressentir. Certains psychologues affirment même que la moto serait le traitement idéal pour guérir leurs patients si ceux-ci pouvaient piloter. Des résultats qui sont corroborés par l’étude de l’institut Semel pour les neurosciences et le comportement humain de UCLA (University of California Los Angeles) qui démontre que faire de la moto rend heureux. Il suffit de regarder le vidéoclip montrant le retour de Wayne Rainey au guidon d’une moto, après 26 ans d’absence et un handicap très lourd. De voir son regard, d’écouter les trémolos dans sa voix pour comprendre qu’il est pleinement heureux. Et cette passion touche tous ceux qui s’en approchent. Quel que soit leur âge ou leur condition sociale.
Contrairement aux humains, la passion n’a pas d’âge. Elle ne vieillit pas et ne prend pas de rides. Près de 50 ans après mes premiers émois en Solex, elle est toujours aussi intense. Et elle me garde jeune, dans la tête en tout cas, car mon corps, lui, ne suit pas toujours le rythme. Pour rester jeune, il faut rouler. Comme le prétend l’adage, « On n’arrête pas de faire de la moto parce qu’on devient vieux, on devient vieux parce qu’on arrête de faire de la moto ! »
Le défi à moto est de raviver nos sensations en occultant notre expérience au profit de la vivacité, de l’intensité et de la virginité des premiers émois qu’elle a fait naître en nous. Il faut « retrouver une attitude “d’enfant” ou de “convalescent” », comme disait Baudelaire. Renouer avec la magie et vivre chaque sortie à moto comme si c’était la première. Sinon on succombe rapidement au syndrome « Been there! Done that ! » qui conduit immanquablement au blasement, au désenchantement, à l’indifférence et à l’insensibilité.
Le principal problème de l’homme c’est le temps ou plutôt le manque de temps. L’amour, l’argent, la réussite, le succès ne sont que des distractions qui lui font oublier la mort en lui donnant un faux sentiment d’invicibilité. Alors, pour honorer cette nouvelle année qui débute, je choisis de me donner le temps. De faire de la moto, bien sûr — je compte bien rajouter un autre 50 000 km à mon compteur personnel —, mais aussi de profiter pleinement de mon petit-fils né en septembre dernier. De ma femme. De ma famille et de mes amis. De vous. D’aimer la vie et de la célébrer. Comme disait Albert Camus : « Je ne connais qu’un devoir, c’est celui d’aimer ».