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Rien n’est impossible pour peu qu’on se donne la peine d'essayer

Photos : Didier Constant, Bruno Laurent, Bernard Devau, Andrew Northcott, et DR

Vous avez bien lu! Pour cette course unique, je partagerai le guidon d’une Honda RC30 avec Miguel Duhamel, le quintuple vainqueur des 200 Miles de Daytona. Un rêve fou qui devient réalité.

Il y a sûrement des milliers de coureurs pros ou amateurs plus talentueux que je le suis qui mériteraient cet honneur, mais aucun d’entre eux ne l’a souhaité plus fort que moi. Aucun n’a échafaudé ce projet dingue avec tant de passion. Aucun ne s’est donné les moyens de le réaliser. Aucun n’y a cru autant que j’y ai cru. Et si certains pensent que c’est donner de la confiture aux cochons, sachez que j’aime la confiture!

En laissant un message à Miguel lui demandant de me contacter, fin janvier,  je doute qu’il le fasse. Nous ne nous sommes pas parlé depuis les Coupes Moto Légende, à Dijon, en 2011, où nous nous étions croisés par hasard, dans les stands. Il accompagnait Yvon invité par les organisateurs. On avait alors échangé quelques souvenirs et banalités puis je l’avais laissé à ses fans, poursuivant ma visite du paddock. Quand il me rappelle, plusieurs jours plus tard, je suis très surpris, absorbé dans mon quotidien. Au point où je bafouille quelques mots inintelligibles avant d’arriver à lui exposer mon plan dans le détail. Alors que je m’attends à des questions, voire à des objections de sa part, il manifeste beaucoup d’intérêt pour mon projet. « Ça me tente vraiment, » me répond-il d’un ton enjoué qui révèle son enthousiasme. « J’adore le Paul Ricard. C’est un de mes circuits préférés. Ça va être sympa d’y retourner ensemble. » En une semaine, nous nous mettons d’accord sur les termes de notre collaboration, chacun mettant un peu d’eau dans son vin. Pas d’exigence de star. Pas de caprice. Un échange franc et passionné. Nous désirons tous les deux que le projet aboutisse.

Le but de notre participation au BOC n’est pas de faire un podium — même si j’ai bien l’intention de donner le meilleur de moi-même afin de ne pas être une gêne pour Miguel —, mais plutôt de donner vie à une utopie. De réaliser un exploit dont je pourrai me vanter auprès de mes petits-enfants si un jour j’en ai. Pour le moment, c’est mal barré, je vous l’accorde, mais sait-on jamais.

Yvon Duhamel au circuit Paul Ricard pour les Bol d'Or 1988. À 48 ans, il s'alignait au départ de cette course prestigieuse en compagnie de ses fils Miguel et Mario.

Yvon Duhamel au circuit Paul Ricard pour les Bol d’Or 1988. À 48 ans, il s’alignait au départ de cette course prestigieuse en compagnie de ses fils Miguel et Mario.

Le Bol d’Or, Miguel et moi, c’est une vieille histoire. En 1988, j’étais un journaliste débutant, passionné d’endurance. Pourtant, malgré ma notoriété naissante, j’avais réussi à convaincre Yvon Duhamel, mon idole de jeunesse avec Barry Sheene et Jarno Saarinen, de disputer le Bol d’Or en compagnie de ses fils Miguel et Mario. Une primeur dans le sport moto : c’était la première fois qu’un équipage père/fils prenait le départ d’une course d’endurance. Malgré tous les commentaires négatifs que j’avais reçus à l’époque — « Yvon Duhamel c’est une légende, il va t’envoyer promener! »; « Ça ne marchera jamais ton projet! »; « Abandonne avant de te rendre ridicule! » — Yvon avait accepté avec enthousiasme et le projet s’était réalisé. Nous nous sommes qualifiés septième, meilleur équipage privé, et avons terminé en septième position juste derrière les équipes d’usine et les ténors de la spécialité. Cette course a par la suite lancé la carrière internationale de Miguel, qui allait devenir la légende qu’on connait aujourd’hui, et celle de Mario.

Et je ne vous raconte pas toutes les péripéties et embûches rencontrées en chemin pour réunir le budget (énorme, pour une seule course), trouver une équipe technique de haut niveau et une Honda RC30 kitée capable de rivaliser avec les motos officielles. En 1988, la Honda RC30 était la moto de l’heure mais elle était rare comme d’la marde de Pape. Imaginez ce qu’il a fallu déployer de ruses et d’efforts pour en obtenir une et mettre la main sur un kit d’endurance performant. Sans l’aide de Honda France, d’Ipone et de Michelin, nous n’y serions jamais parvenus.

« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait » a écrit Marc Twain. Une citation qui résume parfaitement ma vie en fait. Car, à l’origine,  j’étais destiné à mener une existence bien rangée de fonctionnaire — j’étais professeur des écoles, en France — et à me rendre tranquillement jusqu’à la retraite en gravissant les échelons de la profession un à un, sans faire de bruit, sans créer de vagues. Mais c’était mal me connaitre…

Miguel au guidon de la Honda RVF d'endurance lors du Bol d'Or 1989

Miguel au guidon de la Honda RVF d’endurance lors du Bol d’Or 1989

Arrivé au Québec au début des années 80, j’ai commencé à travailler dans l’industrie moto et, au hasard d’une rencontre avec Jean-Pierre Belmonte, l’ancien rédacteur en chef de Moto Journal — l’original, le vrai, celui qui a nourri la passion de dizaines de milliers de motocyclistes au Québec, pas le succédané qu’il est devenu — j’ai débuté une carrière de journaliste moto que je poursuis encore avec ferveur. Depuis, je me réveille chaque matin avec l’impression de vivre un rêve éveillé.

Du 15 au 17 septembre prochain, Miguel et moi serons donc au Paul Ricard pour prendre part au Bol d’Or Classic sur une Honda RC30 de l’équipe DCT Racing Team — DCT pour « Dreams Come True » : les rêves se réalisent (!) — préparée par Top Moto, important concessionnaire Honda à Tarbes, dans les Hautes-Pyrénées. Sous la direction de son propriétaire Philippe Puyo, Top Moto a pris part à de nombreux Bol d’Or et 24 Heures du Mans sur Honda RC30, RC45, VTR1000, SP2 et plus récemment CBR1000RR. First On Track, la structure des frères Genestier spécialiste des stages de pilotage sur les plus beaux circuits de MotoGP d’Europe, se chargera du soutien technique. D’ici les prochains mois, d’autres commanditaires viendront se joindre à cette aventure. Et des milliers de fans dont vous ferez partie, j’espère.

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Ce projet fou vise aussi un autre objectif, plus altruiste, plus généreux : récolter des fonds pour l’organisation humanitaire Riders for Health. Créé par Barry et Andrea Coleman en collaboration avec Randy Mamola à la fin des années 80, cet organisme fournit des motos et des ambulances aux médecins de brousse afin qu’ils puissent délivrer des soins médicaux de première urgence aux populations rurales d’Afrique subsaharienne (Kenya, Lesotho, Libéria, Malawi, Nigéria, Gambie, Zambie, Zimbabwe). Dorna, le promoteur du MotoGP, soutient Riders for Health et ses fondateurs, anciens pilotes professionnels, en organisant plusieurs activités en sa faveur à l’occasion de divers Grands Prix. Yamaha Europe, Dainese, Ducati, Allianz et de nombreuses autres firmes du domaine motocycliste aident également cette bonne action.

Au cours des prochains mois, je vous informerai de toutes les actions que nous allons mener pour Riders for Health et de l’avancement de notre projet. Plusieurs événements seront également organisés afin que vous puissiez nous rencontrer et venir discuter avec nous. J’espère que nous pourrons compter sur votre soutien moral, mais aussi sur votre générosité.

Parallèlement à la course, notre équipe, en collaboration avec le cinéaste Olivier Wagner, réalisera un documentaire sur cette folle aventure que vous pourrez vivre comme si vous en faisiez partie.

« Fais de ta vie un rêve, et d’un rêve une réalité », disait Antoine de Saint-Exupéry. Venez vivre ce rêve avec nous. « Soyons réalistes. Exigeons l’impossible! »*

* Ernesto Che Guevara

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BIOGRAPHIE MIGUEL DUHAMEL

  • Date de naissance : 26 mai 1968
  • Lieu de naissance : LaSalle, Québec
  • Âge : 47 ans
  • Nationalité : Canadien
  • Domicile : Las Vegas, Nevada, États-Unis
  • Taille : 1,68 m
  • Numéro fétiche : 17 (celui de son père Yvon)
200 Miles de Daytona 2006

200 Miles de Daytona 2006

 PALMARÈS

  • Débute en vitesse en 1986/1987, au Canada, dans la Coupe Yamaha RZ350.
  • 7e du Bol d’Or 1988 avec son père Yvon et son frère Mario dans l’équipe Honda/Winners/Ipone
  • 5 saisons en endurance mondiale (89-92) avec Honda France, le SERT et Kawasaki France
  • 1 titre mondial en endurance avec Kawasaki France en 1992
  • 5 victoires aux 200 Miles de Daytona (1991, 1996, 1999, 2003, 2005)
  • Champion Superbike AMA en 1995
  • 5 titres de champion Supersport AMA (1991, 1993, 1995, 1996, 1997)
  • 2 titres de champion Formula Xtreme AMA (2004-2005)
  • Recordman des victoires en AMA, toutes classes confondues
  • Recordman des victoires en Supersport AMA avec 28
  • Deuxième pilote ayant remporté le plus grand nombre de victoires en Superbike (32) de l’histoire de l’AMA, derrière Mat Mladin (72)
  • 1 saison en Grand Prix 500 en 1992 avec Yamaha Sonauto /Classement : 12e — Meilleur résultat : 5e au Brésil
  • 1 course en MotoGP, à Laguna Seca en 2007
  • 1 victoire dans le Championnat du monde FIM e-Power & TTXGP, au Mans, en 2012

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