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VOYAGES  

VOYAGE EN SCOOTER AU QUÉBEC
Vacances buisonnières

Plus j’essaie de motos, plus je suis convaincu que ce n'est pas la monture qui fait l'aventure et que n’importe quel deux roues motorisé peut s'avérer une merveilleuse machine à voyager. À condition d'adapter son itinéraire en conséquence. L’été dernier, ma femme et moi avons entrepris un voyage de 3000 kilomètres en 10 jours au guidon de nos scooters, un Yamaha Vino 125 2004 pour elle et une Vespa PX 150 2005 pour moi.

Textes et photos: Didier Constant / Voir le diaporama
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
   

Pour être francs, nous n'en étions pas à notre première expérience du genre. En 2005, nous avions entrepris un périple de quatre jours en scooter, par l'ancienne route 2, qui relie Toronto à Montréal en suivant le Saint-Laurent. Au total, 1000 kilomètres de petites routes secondaires, avec un séjour dans le parc provincial Sandbanks, près de Belleville et une croisière dans les Mille-Îles. La belle vie, quoi!

Cette fois-ci, nous avons choisi un itinéraire que nous connaissons bien : Tadoussac/Les Escoumins par la Rive-Nord du Saint-Laurent, traversier pour Rivière-du-Loup et retour par la Rive-Sud, avec un crochet par Québec et la Montérégie. En effet, en raison de la faible autonomie de nos machines (110 km environ), nous avons sélectionné un parcours avec lequel nous n'aurions pas de surprises au niveau du ravitaillement. Et, ce qui ne gâche rien, c'est une superbe balade!

Quand on voyage en scooter, il est primordial de ne pas se surcharger, sous peine de devoir sortir les voiles... Sous la selle du Vino, nous avons logé tous les objets auxquels nous devions accéder souvent ou rapidement (lunettes de soleil, combinaisons de pluie, cadenas, appareil photo, carte routière, téléphone cellulaire, lampe frontale, trousse de premiers soins et tendeurs de rechange). Puis nous avons séparé tous nos effets personnels dans des sacs étanches individuels (Zip Lock) que nous avons rangés dans un sac de marin également étanche, installé sur le porte-bagage du PX à l'aide de tendeurs.

Le matin du 21 août, nous sommes prêts! Nos montures sont chargées et nous avons enfilé nos combinaisons de pluie. Il fait à peine 17 degrés Celsius et le ciel est menaçant. À 9 h 30, nous quittons Montréal par la route 138. On est lundi. La circulation est légère et on a tout le temps devant nous. Nous arrivons à Trois-Rivières vers 13 h, juste à temps pour le dîner. Notre moyenne se maintient à 50 km/h. Ce qui semble vouloir être la norme sur ce genre de route où la vitesse est limitée à 90 km/h et où on traverse un village toutes les 10 minutes. Notre consommation de carburant oscille autour de 3,9 L/100. À ce chapitre, le deux temps (PX 150) n’est pas plus gourmand que le quatre temps (Vino 125). Et les deux atteignent la même vitesse de pointe (105 km/h). Pas mal!

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Port-au-Persil L'église de Tadoussac

Après avoir avalé un sandwich au cholestérol accompagné de frites reconstituées, nous nous élançons le cœur léger vers Baie-Saint-Paul, où nous avons élu de passer la nuit. Il nous reste environ 250 km à parcourir et nous avons tout l’après-midi pour les faire. Pas de stress! Le soleil est sorti et le thermomètre grimpe lentement, mais sûrement. Après une pause à Donnacona, pour boire un peu d’eau et nous vider la vessie, nous traversons Québec en toute hâte pour rejoindre Sainte-Anne en milieu d’après-midi. Nous n’éprouvons aucune fatigue, ni douleur. Le confort de nos scooters est surprenant. Et le rythme auquel nous roulons est très agréable. À peine moins vite qu’en moto (si vous respectez les limitations de vitesse). Nous avons vraiment l’impression d’être en vacances.

Le chemin entre Sainte-Anne et Baie-Saint-Paul est magique en cette journée d’été. Les Caps sont illuminés par le soleil de fin d’après-midi. La route est presque déserte. Dans les montées, nos scooters tirent un peu la langue, surtout la Vespa, mais ils se rendent au sommet sans problème. Dans les descentes, ils atteignent des vitesses vertigineuses (près de 120 km/h), à la limite du surrégime et du serrage. Comme nous ne voulons pas mettre un terme à une si belle balade, nous faisons un détour par Port-au-Persil (avec visite obligatoire de la poterie) et par le Massif de la Petite-Rivière-Saint-François. Quelle vue! En faisant le plein à la sortie du village, je m’aperçois que le niveau d’huile de la Vespa est bas. J’en profite pour faire l’appoint. J’ai atteint 1500 km au compteur et c’est la première fois que j’en rajoute. Pas trop gourmand en huile le PX. Je m’attendais à pire. Par contre, les vibrations ont desserré quelques boulons, ainsi que les rétroviseurs. Heureusement, je traîne toujours une trousse à outils complète dans mon coffre!

Nous arrivons à Baie-Saint-Paul vers 18 heures après avoir parcouru près de 400 km en un peu plus de huit heures, en comptant cinq arrêts carburant et une pause repas. Notre moyenne se maintient donc à 50 km/h. On n’échappe pas à notre cadence naturelle. Même si, parfois, on se dépêche tranquillement… Pour nous remettre de notre périple et profiter un peu de la vie, nous réservons une superbe chambre à la Maison Otis, une auberge luxueuse en plein cœur de Baie-Saint-Paul, qui offre également une table gastronomique réputée et des soins de santé variés.

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Excursion aux baleines Le Gibard, une institution de Tadoussac

Durant les quelques jours que nous avons passés à Baie-Saint-Paul, nous avons sillonné la région de Charlevoix et du parc des Grands Jardins dans tous les sens sur nos fidèles destriers. Personnellement, j’aime les scooters, presque autant que les motos. Peut-être parce que c’est le premier véhicule à moteur que j’ai conduit lorsque j’ai eu 14 ans et grâce auquel ma passion des deux roues s’est développée. J’éprouve toujours un plaisir intense, mêlé de nostalgie, quand j’en enfourche un. Ça me rappelle les vacances d’été de mon enfance, en Vendée. Et les balades que je faisais avec mes frères sur l’Île de Noirmoutiers. C’était le temps de la découverte de la liberté et de l’indépendance. Et puis, le côté pratique des scooters est indéniable. Ils se prêtent à tous vos caprices facilement. Sans contrainte. Il suffit d’enfiler un casque, de ranger ses affaires dans le coffre et le tour est joué. Pas compliqué! On peut se balader en bord de mer, lunettes de soleil vissées sur le bout du nez, sans stress, ni soucis. Ou se promener en duo, décontractés!

Après cinq jours de quasi-farniente, il est temps de mettre le cap sur la Côte-Nord. Nous prenons la route 362 qui passe par les Éboulements et suit le fleuve jusqu’à La Malbaie où nous faisons un arrêt à la crêperie Le Passe-Temps. Vers 13 h, nous arrivons à Baie-Sainte-Catherine. La température chuta soudainement de plusieurs degrés, au point qu’il a fallu sortir un chandail quand nous avons pris le traversier pour Tadoussac. Le microclimat qui règne dans l'estuaire du fjord me surprendra toujours.

Tadoussac attire des milliers de touristes des quatre coins de la planète, venus observer les baleines dans un cadre naturel spectaculaire. Si les auberges et hôtels y sont légion, nombre de visiteurs, dont nous sommes, élisent domicile à l’Hôtel Tadoussac. Véritable icône de la région, l’établissement est reconnaissable entre tous. Avec sa façade d'un blanc lumineux, sa mansarde rouge ajourée de lucarnes et sa coupole qui chapeaute la cour du bâtiment, l'Hôtel Tadoussac évoque par ses couleurs maritimes un immense phare érigé à quelques brasses d'une splendide plage sablonneuse. De la terrasse, l'horizon n'est que verdure, foins salés, voiles, bateaux, écume et baleines lointaines.

Pendant plusieurs jours, nous explorons la côte de Manicouagan, jusqu’à Forestville. Nous en avons profité pour visiter le Centre d’interprétation et d’observation du Cap-de-Bon-Désir, à la sortie de Grandes-Bergeronnes. Par une journée couverte où le thermomètre peinait à dépasser les 15 degrés. Le vent venu du fleuve nous glaçait les os, malgré nos combinaisons de pluie. Au bout de deux heures, transis de froid, las d’écouter les explications des biologistes du centre et déçus de ne pas avoir vu de baleines, nous sommes partis nous réchauffer aux Escoumins, à une dizaine de kilomètres à l’est. Nous avons trouvé refuge à la Chocolaterie belge, qui fait aussi office de boulangerie et de restaurant, où nous avons noyé notre déception dans un grand bol de chocolat chaud accompagné de délicieuses viennoiseries.

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Deux bolides sur les dunes de Tadoussac Séance de Taï-chi aux Escoumins

Le lendemain, avant de traverser vers l’autre rive, nous avons effectué une boucle par le Lac Saint-Jean, via la 172 qui rejoint Chicoutimi. Cette route panoramique et sinueuse qui longe la Rive-Nord du fjord est superbe à moto, mais féérique en scooter. À 100 km/h, on peut encore admirer le splendide paysage qui s’offre à nous et profiter de la route sinueuse qui suit le tracé tortueux du Saguenay, ce qui n’est plus le cas à des vitesses plus élevées. Nous avons fait halte à Ste-Rose-du-Nord pour le lunch. Un petit village magnifique, avec son quai qui donne sur le fjord. La vue à partir du parc, à l’entrée du village, vaut à elle seule le détour. Arrivés à Chicoutimi, nous avons fait demi-tour, mais par la 170, la route qui suit l’autre rive du Saguenay. Nous aboutissons à Saint-Siméon après avoir fait une pause à l'Anse-St-Jean et au village du Petit-Saguenay. Mais le soleil commençait à flirter avec la ligne d’horizon. Il était temps de rejoindre le bateau.

Le traversier qui relie Saint-Siméon à Rivière-du-Loup est opéré par une compagnie privée. Et les prix qu’elle pratique sont pour le moins prohibitifs. Pour deux scooters et deux passagers, il faut compter environ 80 $ la traversée (elle dure une heure et quart). Après voir débarqué, nous traversons la ville en direction ouest et nous prenons la 132 jusqu’à Saint-André-de-Kamouraska. Une charmante bourgade située à équidistance de Rivière-du-Loup et Kamouraska. Blottie sur la Rive-Sud du Saint-Laurent, elle abrite quelques auberges sympathiques, dont La Solaillerie où nous nous installons pour la nuit. Cette maison centenaire a été rénovée avec soin et goût par ses propriétaires. Elle est accueillante, chic et tranquille. Si vous décidez d'y séjourner, je vous recommande de prendre au moins un repas au restaurant de l'auberge. La table qui met à l’honneur les spécialités régionales (poissons fumés et fruits de mer marinés, fromages locaux, pain et gâteaux de la boulangerie Niemand de Kamouraska) est l'une des meilleures du Québec : fine, originale et surprenante.

Le lendemain, après avoir entamé la journée par un petit-déjeuner copieux et raffiné, nous piquons vers Québec pour y passer une partie de la journée. Et jouer les touristes. Quoi! Y a pas de mal à ça… Même si je visite Québec plusieurs fois par année, je ne peux m’empêcher de m’y sentir l’âme d’un touriste. Je ne sais pas si c’est par mimétisme ou simplement parce que la vieille ville m’incite à la flânerie, mais je m’y sens toujours en vacances. J’y ai mes habitudes aussi (le restaurant le Cochon Dingue, sur le boulevard Champlain et quelques boutiques que nous n’avons pas à Montréal). L’avantage de circuler en scooter dans les rues du Vieux-Québec (cette partie de la ville est interdite aux motos), c’est qu’on passe quasiment inaperçu, en plus de se faufiler aisément. Cette fois-ci, nous n’avons reçu aucune contravention pour stationnement illégal, alors qu’à moto, c’est systématique.

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Décor western à St-Luc-sur-Richelieu Pompe à essence désaffectée à St-Armand

Vers 14 h, nous quittons la Capitale provinciale par le pont Pierre-Laporte et nous bifurquons rapidement vers la 132 en le quittant. La portion de la 132 entre Québec et Nicolet est vraiment splendide. Elle serpente entre le fleuve et les champs, coupe de petits villages colorés et fleuris et vous fait découvrir un panorama magnifique qui tranche avec celui plus monotone qu’on a de l’autoroute 20. Après Sorel, nous nous dirigeons vers le sud par la 133, puis la 137 et la 139. Notre parcours effectue une boucle qui passe par Cowansville, Dunham, Frelighsburg, Pigeon Hill, Iberville et Longueuil, sans que nous ayons à embarquer sur l’autoroute. Nous traversons le pont Victoria tard en soirée et rentrons à Montréal par le Canal Lachine.

Depuis notre départ, nous avons maintenu une vitesse de croisière de 100-105 km/h et une moyenne honorable de 50 km/h. En nous faisant très rarement dépasser sur les routes secondaires. Preuve que notre choix de monture n’était pas si saugrenu que ça. Au chapitre du confort, nous avons été plus choyés que sur une custom ou une sportive. Loin de regretter notre décision, ce voyage nous a confirmé ce que nous savions déjà. À savoir qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une Gold Wing ou une K1200LT pour faire le tour du monde. Quand on tient compte des limites de vitesse en vigueur dans la plupart des pays industrialisés, rouler en petite cylindrée n’est pas un handicap. Bien au contraire. L’été prochain, nous avons l’intention de partir un mois et de faire le tour de la France en scooter. Par les routes départementales et nationales. À un rythme tranquille, en prenant le temps de musarder à la terrasse des petits cafés de bord de route et de découvrir les villages bucoliques que nous traverserons. Ce qui ne nous empêche pas de rouler à moto le reste de l’année. L’un n’empêche pas l’autre. Après tout, le plaisir ne réside-t-il pas dans la diversité des expériences?


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