Jérôme Coste (casque bleu) était présent aux Coupes Moto Légendes, à Dijon, en mai dernier. À droite, le motocycliste debout, accôté sur sa moto, n'est nul autre que Didier Coste, le père de Jérôme et le propriétaire de la Norton que ce dernier pilote. Il porte un Ruby Shibuya.
J'ai découvert la marque française Ruby à l'occasion de mon voyage aux Coupes Moto Légendes, en mai dernier. Passionné d’équipement moto, je m'intéresse à tout ce qui touche à ce domaine et plus particulièrement aux casques. Je les aime. Je les collectionne. Tous: intégraux, ouverts, modulables, anciens. Je ne fais pas de distinction. Juste avant ma visite à Dijon, j'avais acheté un Davida Classic, un couvre-chef antique qui est une réplique des «bols» que les coureurs du Continental Circus portaient dans les années 50-60. Malheureusement, il n'est pas homologué et, en dehors de l'utiliser pour des photos, pas question de le porter sur la route, même si ça me démange souvent. Dans ma recherche d'un modèle ouvert que je pourrais porter avec des lunettes de style aviateur et qui aurait de la gueule, je suis tombé sur un Jet Classic de Davida, que je porte depuis et que j'adore, mais j'ai surtout découvert le Pavillon de Ruby. Une merveille hors de prix qui possède une classe incroyable. La Ferrari des couvre-chefs rétros!
En fait, ce casque ne devrait pas exister. Je m'explique. D'un point de vue purement commercial, c'est une hérésie. À une époque où les manufacturiers cherchent à réduire leurs coûts au maximum, parfois au détriment de la qualité, où les distributeurs se livrent une guerre de prix féroce et où le consommateur moyen dépense très peu pour sa protection, commercialiser un Jet qui se détaille près de 800 $ US relève de la gageure. Seul un passionné pourrait se risquer dans une telle aventure. Et encore! C'est pourtant ce qu'a fait Jérôme Coste, un designer parisien qui a travaillé plusieurs années pour JT Racing (équipements de motocross), en Californie. Je vous ferais grâce de son parcours professionnel — c'est pour ainsi dire accessoire —, il suffit de retenir qu'il se déclare lui-même passionné de casques... et de motos pour comprendre sa motivation.
L'envie de créer un casque qu'il serait fier de porter, beau, technique et de grande qualité, le tracassait depuis plusieurs années. En 2001, en feuilletant le magazine japonais Street Biker, il est séduit par l'accoutrement des bosozoku* de Tokyo. Lequel est un savant mélange de modernisme, de culture de la rue et de style rétro. Étant lui-même amateur de motos anciennes (il a participé aux Coupes Moto Légendes au guidon d'une Norton ES2 1935), de beaux objets et de design, il décide alors de créer le Pavillon, un casque Jet superlatif qui combine look classique et technologies de pointe.
Après trois années de travail acharné, le logo Ruby et la signature visuelle de la marque sont mis au point, en même temps que sont tracées les grandes lignes qui vont guider le développement des produits Ruby, lesquels incluent également des foulards de soie (bandanas) assortis aux casques de la marque. En octobre 2006, Jean-Étienne Prach, un conseiller expert en management, qui collabore avec plusieurs multinationales, se joint aux Ateliers Ruby. Jérôme et Jean-Étienne se sont rencontrés 10 ans auparavant, autour du skateboard. Ils vont désormais assurer ensemble la croissance artistique et commerciale de la compagnie.
Le Pavillon voit le jour en 2007. Réalisé en fibre de carbone, un matériaux très technique choisi pour sa légèreté et sa résistance, il synthétise tout le savoir-faire de la marque. Qui ne fait aucune concession sur la qualité. L'intérieur réalisé en cuir d'agneau Nappa de couleur bordeaux est superbe. Il reçoit un traitement antimicrobien et anti-odeur. Des mousses de trois densités différentes sont utilisées pour assurer un ajustement et un confort parfaits. L'épine dorsale qui rappelle les heaumes des chevaliers lui confère une allure immédiatement reconnaissable. En un mot, le Pavillon est une œuvre d'art.
Le plus gros défi pour Ruby fut de trouver une usine spécialisée dans le travail de la fibre de carbone qui serait prête à garantir un contrôle de la qualité sans faille. C'est en Chine que Jérôme Coste et son équipe ont trouvé la perle rare. Il s'agit d'une entreprise locale qui sous-traite déjà avec de grosses firmes (Boeing, Simpson, Bell USA, Specialized...) et possède donc une certaine expérience dans le domaine de la moto. Au terme d'une collaboration étroite entre Ruby et l'usine, la compagnie est parvenue à produire un casque qui ne fait aucun compromis financier, artistique ou technique. Un produit d'exception qui fait honneur à la tradition de l'industrie française du luxe. Un objet de désir.
Le Pavillon se décline en huit graphiques distincts. Six portent le nom de rues ou de quartiers de Paris (St-Honoré, St-Germain, Pigalle, Trocadéro, Concorde, Grenelle), un est nommé Shibuya en hommage à un arrondissement de Tokyo et un autre, le HNT, est produit en série limitée, à 333 exemplaires. Par ailleurs, en vous rendant sur le site Ruby Costume, vous pouvez créer votre propre casque Ruby, lequel vous sera livré cinq semaines plus tard, dans son écrin rouge, une magnifique boîte en carton tapissée de mousse, destinée à protéger votre bijou.
D'inspiration rétro, mais de conception moderne, le Pavillon est à la fois classique et intemporel. C'est un produit rare et de qualité que l'on a envie de toucher, de sentir, de porter, mais surtout de posséder. Un authentique objet de convoitise. Il sera suivi, dans quelques semaines, d'un casque avec écran nommé Belvédère, puis d'un intégral. Jérôme prévoit également lancer un blouson de cuir, un masque et toute une gamme d'accessoires exclusifs.
Voir de jeunes passionnés développer un produit haut de gamme comme le Ruby Pavillon et prendre le pari osé de la qualité est rafraîchissant en ces temps d'uniformisation et de mondialisation à tout crin. La prise de risque est un élément indissociable du succès. Souhaitons à Jérôme et à son équipe de devenir les «Louis Vuitton» de la moto... Ils ont déjà fait un bon pas dans cette direction.
* (un bosozoku est un membre d'un gang motocycliste japonais, habituellement jeune, adepte de modifications extrêmes, souvent de mauvais goût et presque toujours illégales, qui élève la conduite dangereuse en ville au niveau d'un art de vivre. Les bosozoku sont souvent représentés dans les mangas.) |
