J’ai toujours considéré les motocyclettes asiatiques fabriquées hors du Japon avec un certain dédain. Il faut dire que les motos provenant des constructeurs coréens et chinois — puisque ce sont d'eux dont nous parlons — ont longtemps souffert d’un contrôle de la qualité que l’on peut questionner et de problèmes de fiabilité. Mais ça, c’était avant de découvrir la nouvelle Hyosung GT650R 2010.
Même si Hyosung est un constructeur coréen de taille relativement modeste (le site web de la compagnie faisait état de 354 employés en février 2009), il fabrique des motos depuis plus de 30 ans, notamment des Suzuki, sous licence, pour le marché sud-coréen.
Alors, ce n’est peut-être pas une coïncidence que sous la carrosserie d’allure sportive de la GT650R on décèle une ressemblance avec la Suzuki SV650 de précédente génération – les deux motos sont motorisées par un V-Twin ouvert à 90 degrés refroidi au liquide. Mais avec son moteur provenant de ses tables à dessin, un cadre et un style digne de n’importe quelle machine sortant des usines du Japon, la Hyosung n’est pas une copie de la Suzuki.
Et en dépit de mes réserves, la Hyosung se mesure honorablement à ces dernières grâce sa qualité de construction équivalente ainsi qu'à son assemblage et sa finition. Les soudures sont beaucoup plus propres que sur les Hyosung d’il y a quelques années et les panneaux de carénage sont bien ajustés. Il faut cependant admettre que la finition de la peinture n’est pas à la hauteur des standards établis par les Japonais et a cette texture de peau d’orange à certains endroits.
Autrement, la GT650R est une monture très stylée avec certaines caractéristiques techniques surclassant même celles de la SV comme une fourche inversée. Je l’ai trouvée spécifiquement attrayante dans la livrée blanche, noire et bleue de notre moto d’essai.
Le moteur à injection de la GT650 développerait une puissance maximum de 79 chevaux, une annonce que je trouve légèrement optimiste, mais probablement pas si éloignée de la réalité. Il développe un gros coup de puissance dans les régimes bas et moyen suivi d’un punch senti une fois que l’aiguille du tachymètre passe les 8 000 tr/min. Hyosung annonce un couple maximum de 49 lb-pi (à 7 250 tr/min) et ça, ça sonne assez juste.
Bref, c’est un très bon moteur de moyenne cylindrée, facilement comparable aux autres bicylindres de cubage égal provenant de la compétition japonaise.
L’injection est bien calibrée dans l'ensemble; le moulin démarre sans accro et tourne de manière égale alors que la réponse à l’accélérateur est douce. Le seul bémol dans la cartographie d’injection est un à-coup occasionnel de la chaîne lors des départs, par contre ce n’est arrivé qu’à la suite d’une sortie sur l'autoroute et seulement deux ou trois fois durant la journée d’essai. La moto n’a jamais calé à cause de cela faisant de ce défaut une nuisance minime.
La GT650R s’est montrée économique à la pompe, avec une consommation moyenne d’environ 4,4 L/100 km réalisée lors de différents types de parcours. Cela donne à la moto une autonomie de 380 kilomètres, laquelle se montrera pratique lors des plus longues randonnées.
Le moteur fonctionne doucement jusqu’aux vitesses d’autoroute ou un peu plus, mais laissez le moteur tourner passé le cap des 8 000 tr/min (vous savez, là où le plaisir commence vraiment), et il s’agite avec vigueur, les vibrations se rendant aux mains, aux pieds et à la selle.
Au moins pendant que vos extrémités fourmillent lors de ses passages à haute vitesse, vos oreilles seront choyées par un grognement rauque; la GT650R produit une délicieuse note d’échappement du ralenti jusqu’à sa zone rouge de 10 500 tr/min.
La boite de vitesse à six rapports semble un peu rugueuse (cela peut être attribué au faible kilométrage de la moto alors que nous en avons pris livraison avec à peine 500 kilomètres sur l’odomètre). La course du levier d’embrayage est courte et précise.
Contrairement au cadre de la SV650 fait d’aluminium, celui que la GT650R utilise l’acier ce qui contribue au poids à sec plutôt généreux de 200 kg. On le remarque surtout lorsque l’on relève la moto de sa béquille latérale, parce qu’une fois en mouvement, elle démontre le comportement d’une machine beaucoup plus légère.
Elle n’affiche pas les manières d’une standard poids-plume, mais est agile et stable à vitesse élevée. Son cadre rigide contribue à assurer la stabilité. Aucune combinaison de bosses, de jeu d’accélération et de direction n’est arrivée à produire ne serait-ce que le plus minime indice d’instabilité.
La suspension est confiée à une fourche inversée de 41 mm, ajustable en compression et en détente et un monoamortisseur arrière réglable en détente et précontrainte.
La fourche était un peu molle pour attaquer les routes en lacets des canyons (je blague, ce qui ressemble le plus à un canyon dans les environs de Montréal, c’est la route qui coupe le Mont Royal en deux), mais la GT s’est montrée confortable lors des balades urbaines. L’amortisseur arrière était plus ferme, mais pas au point d’être rude sur les bosses soudaines ou les joints d’expansion usés des autoroutes, que le Québec possède en abondance.
Dans leur configuration d’origine, les ajustements des suspensions font un bon travail pour les sorties en ville. Il suffit de raffermir la détente de quelques clicks à l’avant et à l’arrière pour négocier les routes sinueuses des Laurentides en toute tranquillité.
Un rythme très agressif, comme une journée sur la piste, par exemple, demandera éventuellement un ajustement plus ferme. Si ce n'est pas possible, il faudra alors baisser la cadence. Les pneus radiaux d’origine, des Bridgestone BT056, seraient alors à la hauteur de la tâche alors qu’ils proposent une excellente adhérence sur la route.
Le gabarit de la GT650R semble généreux parce qu’une fois en selle la moto est large dans sa portion médiane et son réservoir bulbeux de 17 litres est considérablement présent dans l’habitacle.
Comparativement à sa soeur dénudée, la GT650, la R se distingue par son style sportif. Avec ce look vient malheureusement une position assise supersportive. La GT650R aurait pu être une moto polyvalente, mais ses designers ont apparemment senti qu’une position de conduite extrême était d’une certaine manière vitale et ont placé les bracelets trop en avant et les repose-pieds inutilement hauts et reculés. Ils sont ajustables, mais seulement plus hauts encore ou vers l’arrière. Par chance, il existe une solution facile de remédier au problème. Il suffit d'enlever les supports ajustables et les remonter dans la même position que sur la standard GT650, c'est-à-dire plus en avant à défaut d'être plus bas.
Les platines ajustables sont faites d’aluminium plat avec des trous taraudés. Il serait facile à un propriétaire ingénieux de percer et tarauder d'autres trous afin de positionner les repose-pieds là où bon lui semble.
Malgré l’ergonomie de sportive mieux adaptée à un jeune de 20 ans svelte et flexible qu'à un pilote de mon âge et de mon gabarit, la selle large et plate offre un bon support et est plutôt confortable, même après une longue journée en selle.
En réalité, la position de conduite est bonne, même sur l'autoroute, à un rythme élevé, alors que le flot d’air soulevait mon torse juste assez pour enlever du poids de mes bras. Ici, aussi, le carénage a démontré son utilité en limitant ledit flot d’air au casque et aux épaules, laissant le torse et l’abdomen à l'abri du vent.
L’espace réservé au passager est caractérisé par une position haut perchée, mais confortable. La portion arrière de la selle est et il bénéficie de poignées de maintien faciles à rejoindre. Cependant, les repose-pieds sont placés trop haut et nuisent un peu au confort. Finalement, caché sous la selle du passager, se trouve un large espace de rangement où pilote et passager peuvent transporter du relaxant musculaire pour soulager ces articulations vieillissantes.
À 7 895$, la GT650R est 800 $ moins cher de la Kawasaki Ninja 650R et près de 1 500 $ plus économique que la Suzuki SV650SA. Néanmoins, la SV offre l’ABS de série et autant Suzuki que Kawasaki possèdent un réseau de concessionnaires établi de longue date.
Mais en se basant uniquement sur ses performances et son rapport valeur/prix, il n’y a pas de raison de mettre la Hyosung de côté. De plus, elle est appuyée par une garantie illimitée de deux ans comparativement à une seule année pour la compétition japonaise – au cas où vous douteriez encore de la fiabilité des machines coréennes.
En passant, si vos articulations deviennent moins flexibles avec le temps, comme c'est mon cas, vous pourriez probablement considérer l’achat de la version standard — la GT650 — avec une ergonomie plus tendre pour les cas gériatriques. Et, ce qui ne gâte rien, son prix de vente de 7 295 $ en fait presque une aubaine. |