La CBF 1000 et moi, c'est une histoire d'amour qui dure depuis son lancement européen, en 2006. À l'époque déjà, cette routière sur base de CBR1000RR me semblait un choix logique. En effet, elle me permet d'assouvir deux passions antinomiques, à savoir mon goût prononcé pour les sportives — même si mon corps me dit fréquemment que ce type de machine n'est plus de mon âge —, et ma propension aux voyages au long cours.
En 2008, j'ai passé un été complet en compagnie de la CBF1000 originale avec laquelle j'ai parcouru près de 10 000 kilomètres sur toutes sortes de routes. J'ai même effectué un voyage magique dans la Drôme, en France, au guidon d'un modèle européen blanc (magnifique!). Deux semaines idylliques à sillonner les routes en lacets des Alpes et les petites départementales du Morvan ou de la Vallée de la Loire, à une cadence enivrante. Elle avait alors avalé sans broncher 4 500 km de routes sinueuses, chargée comme une mule. Là, j'avais découvert son caractère volontaire et sa formidable adaptabilité.
Une allure passe-partout
La routière sportive de Honda n'est pas une moto pour laquelle vous succombez au premier coup d'œil. Non pas qu'elle possède un physique ingrat. Bien au contraire. Mais elle n'attire pas forcément l'attention, surtout quand elle est entourée de sportives pures et dures ou de roadsters délinquants. La CBF c'est plutôt le genre BCBG. Bien sous tout rapport, mais pas canaille pour un rond. Il s'agit d'une moto au look somme toute banal — un peu passe-partout, dirons-nous —, mais qui séduit à l'usage. Et qui vous donne l'impression d'être meilleur pilote que vous le pensiez. Ce n'est pas non plus une machine dont la lecture de la fiche technique vous donnera des frissons. En ce qui a trait à ses caractéristiques, elle est en retrait par rapport à ses sœurs, la CBR 1000RR et la CB 1000R. En revanche, en utilisation quotidienne, elle fait la preuve de son talent et de sa polyvalence, s'avérant une compagne idéale en toute circonstance.
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Chargée comme une mule, la CBF1000 a été une compagne parfaite sous tous rapports
lors du voyage dans la Drôme que j'ai effectué à son guidon, l'an dernier. |
Évolutions en douceur
Quand Honda a annoncé, à la fin de la saison dernière, qu'elle procédait à une refonte de sa routière sportive, j'ai eu un petit pincement au cœur. Peur aussi que dans cette mutation, la CBF1000 ne perde son âme. C'est donc avec une petite appréhension que je me suis rendu au lancement des modèles 2010 de Honda Canada à Savannah. Mais mes craintes n'étaient pas fondées et après quelques heures au guidon de la nouvelle CBF, je me suis retrouvé en terrain connu avec, en prime, la découverte de caractéristiques inédites pratiques et bienvenues.
Esthétiquement, la nouvelle CBF 1000F est reconnaissable à son nouveau carénage dont les côtés descendent plus bas pour envelopper le radiateur et à sa bulle inédite réglable manuellement en quatre positions. Son coloris orange brûlé, qui est le seul offert au Canada, lui permet également de se distinguer de la masse. Elle reçoit un nouveau cadre massif en aluminium noir mat, plus léger de 5 kg et plus rigide, selon Honda. La nouvelle fourche télescopique à tubes plongeurs de 41 mm est désormais ajustable en précontrainte, tandis que le monoamortisseur reçoit un ajustement de la détente. La selle s'ajuste en trois hauteurs, 780, 795 et 810 mm afin de répondre aux besoins d'un plus grand nombre de pilotes. La capacité du réservoir à essence passe à 20 litres, pour une autonomie accrue.
Le quatre cylindres en ligne que l'on disait trop linéaire a été l'objet d'améliorations qui lui permettent de renforcer son couple et d'accroitre sa puissance de 98 à 106 chevaux, tout en réduisant sa consommation. L'échappement 4-en-1, dont l'allure n'est pas sans rappeler celle de la légendaire Honda CB400 Four SS, allège la ligne de la routière sportive de Honda. La CBF 1000F conserve son système de freinage combiné ABS en équipement de série.
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| Sur le circuit de Roebling Road, au revêtement parfait, la CBF1000F s'est révélée plus performante que je l'avais anticipé. |
Un couteau suisse sur deux roues
Forte de ces changements, la CBF 1000F s'encanaille et affiche un caractère plus trempé que son aïeule à qui on reprochait d'être trop sage, trop policée. Si son carénage enveloppant lui donne un air plus contemporain, les véritables améliorations se situent au niveau du châssis qui profite largement de l'adoption de suspensions de meilleure qualité, dotées de réglages supplémentaires et d'un cadre alu plus léger et plus rigide. Cette partie cycle bonifiée permet d'augmenter la cadence sensiblement, sans mettre en péril la précision de guidage, ni la stabilité exemplaire de cette GT à l'ADN sportif.
Lors du lancement en Géorgie, j'ai eu l'occasion de piloter la CBF 1000F sur le circuit de Roebling Road en même temps que la VFR 1200F, la CBF 600S et la CB 1000R. Malgré une monte pneumatique inadaptée au circuit — des Bridgestone Battlax 57 à vocation sport-tourisme — la CBF s'est révélée performante et rassurante. C'est d'ailleurs la monture avec laquelle je me suis senti d'emblée le plus à l'aise sur cette piste et avec laquelle j'ai tourné mes meilleurs temps. Jamais vicieuse, toujours disponible, elle permet de se faire plaisir sans arrière-pensée. Même si les repose-pieds frottent abondamment à l'attaque, sur piste en tout cas, elle flirte avec des angles d'inclinaison impressionnants pour une routière. J'imagine ce qu'elle pourrait faire avec des pneus plus adaptés au circuit et des ajustements de suspensions plus fermes…
Au niveau de ses prestations routières — il ne faudrait pas oublier que la route et plus particulièrement le tourisme rapide constituent sa mission première — là encore, la CBF 1000F séduit. En Géorgie, j'ai eu le temps de faire plusieurs balades vers Tybee Island, une station balnéaire située au sud-est de Savannah, et vers Roebling Road. À l'aise dans la circulation urbaine où elle fait preuve d'une agilité impressionnante pour son gabarit et où la souplesse de son moteur coupleux permet d'évoluer facilement dans la circulation dense, sans jouer exagérément de la boîte de vitesses, elle se montre également à sa place sur les autoroutes rectilignes du sud et sur les routes secondaires.
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| Avec son nouveau cadre alu et son carénage revampé, la CBF1000F séduit. |
Son quatre en ligne est l'un des meilleurs du genre. Souple, coupleux et puissant à la fois, il est rempli à tous les régimes, prend rapidement ses tours et répond immédiatement à la moindre sollicitation des gaz, sans broncher, ni hoqueter. Sa souplesse est telle qu'on pourrait sans problème démarrer en sixième en faisant légèrement cirer l'embrayage. Ce moulin permet de reprendre en sixième dès 4 000 tr/min, sans cogner et de bénéficier d'une vivacité étonnante sur les premiers rapports. Dès 6 000 tr/min, la CBF vous tire les bras et procure des sensations inédites sur une GT de son calibre. On a l'impression d'être aux commandes d'un roadster sportif. En fait, on tombe rapidement sous le charme de ce moteur qui est tout sauf fade ou anémique. Il est secondé par une boîte de vitesses bien étagée, précise — le passage des rapports à la volée se fait sans à-coups ni hésitations — et extrêmement onctueuse. Qui plus est, le quatre cylindres est un vrai chameau. Il affiche une consommation moyenne de 5,9 L/100 km après presque 6 500 kilomètres parcourus. Étonnant, compte tenu de la vitesse moyenne enregistrée durant ce laps de temps.
Le confort à l'honneur
Habituellement, les routières sportives (CBF1000, Bandit 1250S, FZ-1) font le grand écart pour combiner performances sportives et confort routier. Dans le cas de la Honda, elle réussit presque le mariage parfait. On l'a vu plus tôt, la CBF 1000F est capable de jouer les pistardes au besoin et de briller sur les petites routes sinueuses. Ce qui ne l'empêche pas de se révéler une extraordinaire machine à avaler les bornes. À ce propos, notre collaborateur Patrick Laurin vient tout juste d'effectuer un périple de 3 700 km en quatre jours, dont une étape marathon de 1 700 km en 20 heures lui donnant accès au club select de l’« Iron Butt Association ». Depuis son retour, il ne tarit pas d'éloges au sujet de la polyvalence et du confort de la Honda.
Grâce à sa selle échancrée et à sa nouvelle bulle réglables en hauteur, la CBF 1000F convient à des pilotes de différentes morphologies. Le guidon tubulaire légèrement relevé et les repose-pieds placés bas procurent une position de conduite droite, à peine basculée vers l'avant, qui s'avère d'autant plus agréable que le carénage offre une protection vraiment efficace. Selon ses préférences personnelles, chaque pilote qui essaie la Honda parvient à trouver un réglage de la bulle qui lui convient. La selle est suffisamment large pour assurer une assise confortable et son rembourrage est moelleux, sans être mou. Là encore, on atteint le compromis idéal.
Les vibrations sont bien contrôlées dans l'ensemble — on en ressent quelques-unes au niveau des pieds lors des fortes accélérations, mais très peu au niveau des poignets et des cuisses —, et elles ne constituent pas un handicap. Les suspensions se révèlent souples et bien calibrées pour une conduite solo. En duo, il suffit de durcir un peu les ajustements pour conserver une douceur de roulement de haut niveau. Le passager est également bien assis. Il est bien protégé des éléments et dispose de deux poignées de maintien latérales.
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Le confort de la CBF1000F surprend et séduit. Au point que notre collaborateur
Patrick Laurin l'a choisie pour effectuer un périple de 3 700 km en 4 jours. |
Le freinage assisté C-ABS est très efficace dans l'ensemble, mais la sensation au levier, dans la phase initiale de freinage, est un peu molle. Elle se durcit au fur et à mesure que l'on tire sur le levier. L'étrier arrière simple piston est relativement dur à actionner et il faut peser fort sur la pédale pour sentir son action. Il conserve le système CBS et agit donc sur les étriers avant.
Au chapitre des accessoires pratiques, notons la présence de deux béquilles, une latérale et une centrale — c'est devenu assez rare pour qu'on le mentionne —, d'espace de rangement sous la selle passager pour ranger une chaîne, un cadenas en U ou de menus objets, ainsi que des ergots forts pratiques et judicieusement placés pour arrimer des bagages sur la portion arrière de la selle.
L'éloge de la polyvalence
Châssis facile et rigoureux, suspensions réglables et efficaces, moteur souple et performant, protection en hausse, confort royal pour une routière sportive; la nouvelle CBF 1000F possède des arguments de poids pour séduire les motocyclistes qui aiment voyager loin et longtemps, mais ne veulent pas sacrifier le plaisir de piloter. Quel que soit le type de routes que vous empruntez, elle s'adapte et se révèle polyvalente à souhait, vous laissant chaque fois un large sourire sur le visage à la fin de la balade. Si on ajoute un look contemporain et un rapport qualité/prix favorable, il devient alors difficile de critiquer la Honda.
Après deux mois en sa compagnie, nous avons déjà parcouru 6 700 km à son guidon. Et le mois de juillet n'est pas encore terminé… Nous saisissons chaque occasion que nous avons de partir à l'aventure à ses commandes, quitte à les créer, au besoin. Car la CBF 1000F est l'une de ces motos que l'on prend plaisir à conduire jusqu'à plus soif, ce qui est tout un éloge à son équilibre et à sa polyvalence. |
