Nous commencions déjà à renvoyer nos motos d'essai à long terme chez leurs propriétaires légitimes et à préparer la saison prochaine quand, au début du mois d'octobre, nous avons reçu un courriel du responsable du service presse de BMW nous avisant que la F800R qui venait d'être confirmée comme modèle 2010 était disponible pour une brève prise de contact. Quand je dis brève — c'était pour une semaine — c'est que la mauvaise température s'est mise de la partie dès l'arrivée de la petite BMW dans nos locaux. Et nous n'avons eu droit qu'à une courte période d'éclaircie pour faire un essai digne de ce nom et quelques photos d'action. Une situation d'autant plus frustrante que chaque sortie nous dévoilait une moto joueuse et attachante. Du genre de celles qui vous donnent envie de partir à l'aventure sans avis, ni but. Juste pour le plaisir de la chose.
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La F800R est magnifique, particulièrement dans sa robe orange. Elle est aussi offerte
en blanc alpin et en blanc aluminium mat métallique. |
Le jeu des sept erreurs
La F800R est ni plus ni moins une F800S/ST débarrassée de son carénage. La partie cycle et le moteur, sont donc connus et ne subissent pas de changement majeur. Le twin vertical de 87 ch à 8 000 tr/min gagne deux chevaux par rapport aux autres F800. Principalement en raison d'un échappement redessiné et dont le pot catalytique n'est plus disposé dans le silencieux, mais dans une chambre intermédiaire. L'injection a été révisée afin d'offrir une réponse plus douce et plus progressive, alors que les 4e, 5e et 6e rapports de la boîte de vitesse ont été rapprochés dans le but de renforcer l'accélération. La démultiplication finale a été raccourcie pour faciliter la réponse du moteur à tous les régimes. Enfin, la courroie a été abandonnée au profit d'une chaîne.
La partie cycle subit également des changements mineurs, pour des raisons de réduction des coûts de production, principalement. Ainsi, le monobras fait place à un bras oscillant double ce qui a permis de rallonger la moto sans affecter la rigidité du châssis. L'empattement s'établit à 1 520 mm contre 1 466 mm pour la S. La F800R y gagne en motricité et en stabilité, sans réellement perdre de sa vivacité, ni de sa maniabilité. Elle conserve les jantes « Speed » de la S et bénéficie d'un système d'ABS optimisé, grâce à l'adoption d'un nouveau capteur de pression.
Au niveau de l'équipement, la F800R hérite de nouveaux commodos. Comme les K1300, elle reçoit des clignotants à commande unique et un inverseur code/phare très pratique. Les poignées chauffantes sont livrées en équipement de série et une foule d'options, dont le génial ordinateur de bord, peuvent être installées à la commande. Le futur propriétaire peut également choisir entre trois selles de hauteurs différentes : la selle standard (800 mm), la selle basse (775 mm) et la selle haute (825 mm). Sans frais supplémentaires.
Sinon, le tableau de bord, emprunté à la GS, affiche un compte-tour à fond blanc surmonté d'un cadran de vitesse ovale à chiffres orange sur fond noir pas toujours très lisible. À sa droite, on retrouve, sur notre modèle d'essai en tout cas, l'ordinateur de bord optionnel mentionné plus haut, qui affiche une foule d'informations pratiques, dont un indicateur de rapport engagé qu'on aimerait retrouver en équipement standard sur la plupart des motos. Le double optique de phare procure un éclairage puissant dont le faisceau relativement large porte loin.
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Hyperagile, la F800R a un penchant prononcé pour les courbes. |
Place aux jeunes!
Destinée à répondre aux besoins variés d'une clientèle plus jeune et plus urbaine, la F800R impressionne d'entrée de jeu par sa ligne agressive, sexy. Laquelle est appuyée par un moteur punché, pour un « petit » twin vertical, et un châssis vif autant qu'efficace. En fait, elle a tout pour séduire les néophytes, sans décevoir les plus expérimentés d'entre nous. À ce chapitre, il faut reconnaître que la cure de rajeunissement de la gamme entreprise par le constructeur bavarois est d'une ampleur colossale. Il suffit d'observer les machines introduites sur le marché depuis cinq ans pour constater que celles-ci se démarquent nettement des modèles historiques de la marque à l'hélice. Les F800S/ST, F650GS, F800GS, tout comme les motos de la série G, voire la S1000RR, s'adressent toutes à une clientèle plus branchée et élevée aux standards nippons. Même les récentes K1300 entrent dans cette catégorie quand on les compare à leurs ancêtres à moteur à quatre cylindres. On note une nette rupture avec l'image traditionnelle de la marque symbolisée par les modèles R à moteur Boxer. Lesquels continuent cependant leur route avec un succès qui ne se dément pas. En réalité, le lien entre les différentes séries de la gamme BMW c'est le souci de l'efficacité démontré par le constructeur munichois et son intérêt pour le développement technologique.
Pour en revenir à notre machine d'essai, elle était équipée d'un ensemble d'options assez complet, d'une valeur totale de 1 840 $, qui incluait le système ABS, le tableau de bord avec l'indicateur de pression des pneus, le système d'alarme, la bulle sport et les clignotants blancs. Avec un poids à sec, hors options, de 177 kg — 199 kg avec les pleins, soit dix kilos de moins que la F800ST —, la F800R fait montre d'une facilité de prise en main déroutante. Un vrai vélo. Il faut dire que le guidon tubulaire large et relevé contribue largement à ce trait de caractère. La direction est vive et légère et la « R » s'avère être un jouet dans le trafic urbain et sur les petites routes. Elle est parfaite en ville, même si son champ d'action ne se limite pas à cet environnement.
La position de conduite est typée roadster. Dos droit, légèrement penché vers l'avant. Grâce au guidon tubulaire large et relevé, l'appui sur les poignets est minime. Et, dès qu'on roule, il est réduit par la pression de l'air sur le haut du corps. Avec la selle standard (800 mm), on est assis dans la moto, le bas du dos en appui contre le bourrelet de la selle. Parfaitement calé. Mes jambes étaient un poil repliées, bien que ce ne fut pas réellement gênant. Cependant, si j'achetais une F800R, je prendrais la selle haute pour plus d'aisance.
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Petite pause bucolique pour une photo de circonstance. |
Un moteur au caractère aguicheur
Malgré sa puissance modeste de 87 ch, la F800R est une véritable moto-jouet qui donne envie de s'amuser à son guidon. Pleine de peps, elle fait preuve d'un agrément de conduite étonnant. Elle est remarquablement douce et son moteur livre une puissance linéaire, facile à contrôler. Dès les bas régimes, le twin dégage une sonorité caverneuse qui va en s'amplifiant au fur et à mesure que l'on grimpe dans les tours. Il fait preuve d'une faible inertie et monte rapidement en régime, appuyé par une injection douce et précise, qui n'affiche ni hésitations, ni à-coups. Souple, il reprend sur un filet de gaz à partir de 2 000 tr/min, sans toussoter. Le bicylindre Rotax de 798 cc développé spécifiquement pour la série F800 est coupleux. En fait, le gros de son couple et de sa puissance est disponible à mi-régime. Faisant preuve d'une légère mollesse entre 4 000 et 5 000 tr/min, il se réveille pleinement passé ce cap pour devenir aguicheur entre 6 000 tr/min et la zone rouge qui débute à 8 500 tr/min. Les accélérations sont fortes et les reprises franches. Pas de problème pour dépasser rapidement, en sixième, sur l'autoroute, pas plus qu'en ville d'ailleurs où la « R » brille par son aisance. Et se plait à se jouer du trafic en restant dans la partie grasse de sa bande de puissance, sur les rapports intermédiaires.
Dans les conditions normales de conduite, on n’a pas à recourir sans cesse à la boîte de vitesse à six rapports. Laquelle est exempte de reproches. L'effort requis au sélecteur de vitesse est faible et les rapports se verrouillent parfaitement, sans hésitation. On ne retrouve ni faux point mort, ni décrochage involontaire sur cette boîte. Comparativement à ses sœurs, la F800R tire court. La première est assez longue et demande un certain doigté pour décoller en douceur. Il faut faire glisser un peu l'embrayage et accélérer progressivement, en douceur. Le rapprochement des trois derniers rapports procure une accélération vive, sans pour autant que le moteur tourne trop vite à sa vitesse de croisière normale, puisqu'il ronronne à 4 500 tr/min à 110 km/h sur le dernier rapport. Grâce au système de contrebalancier unique à BMW, le bicylindre calé à 360 degrés est exempt de vibrations à la plupart des régimes. On les ressent un peu plus au-delà de 150 km/h en sixième, à un régime qui se situe aux alentours de 6 000 tr/min. Sur voie ouverte, nous avons atteint 223 km/h au compteur à 9 000 tr/min, juste avant que le rupteur n'entre en action.
Sans atteindre les régimes stratosphériques des multicylindres japonais de moyenne cylindrée, lesquels se montrent nettement moins coupleux et plus pointus que lui, le twin parallèle BMW permet de s'amuser pleinement. Surtout sur les routes secondaires sinueuses où l'on reste volontairement sur un rapport inférieur pour profiter d'un surcroît de frein moteur au freinage et de toute la puissance à la remise des gaz, en sortie de courbe. Dans ces conditions, la F800R est un vrai jouet.
Le réservoir, qui affiche une contenance de 16 litres, permet néanmoins de parcourir une distance raisonnable entre deux pleins. En ce qui a trait à la consommation, le twin se montre toujours peu gourmand, bien que sa consommation soit légèrement plus élevée que sur la ST ou la GS (il faut dire qu'il affichait 1 700 km au compteur quand nous l'avons récupéré et qu'il n'était pas encore rodé). Durant cet essai de près de 1 500 km, mené à une cadence soutenue, nous avons enregistré une consommation moyenne de 5,2 L/100 km, pour une autonomie d'environ 308 km.
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Facile à inscrire en virage, la F800R est une véritable moto-jouet. |
Un châssis à la hauteur de la vocation de la « R »
Bien qu'elle reprenne le cadre aluminium de la F800S/ST, la F800R semble plus compacte et plus vive. Joueuse, facétieuse même, elle affiche une réelle capacité à prendre de l'angle. Très saine, sa direction fait preuve de rigueur et de précision. La F800R ne se fait pas prier pour plonger à la corde. Une simple poussée sur le large guidon tubulaire suffit à l'inscrire en virage, sans effort. Qui plus est, sa garde au sol est amplement suffisante et permet d'explorer les limites du châssis sur les routes sinueuses. La fourche télescopique à tubes plongeurs de 43 mm de diamètre n'offre aucun ajustement. Pourtant, elle s'acquitte parfaitement de sa tâche. L'amortisseur arrière, très accessible, peut être ajusté rapidement et à la main, en précontrainte du ressort et détente, grâce à des molettes judicieusement placées. Performantes en utilisation sportive, les suspensions se montrent également confortables, procurant une douceur de roulement incroyable au pilote et à son passager. À deux occasions, nous avons roulé à deux sur la F800R, laquelle devait supporter une charge de près de 500 livres, dans les rues défoncées de Montréal. Dans ces conditions, la F800R nous a surpris par la souplesse et l'efficacité de ses suspensions.
La partie cycle saine et intègre de la F800R incite à explorer ses limites sur les routes secondaires. Sans être aussi rigide que celui d'une sportive pure et dure, le châssis de la petite Béhème nous a impressionnés sur les routes de montagne des Laurentides et de Lanaudière pourtant en mauvais état. Il fait preuve d'une bonne vivacité et d'une stabilité difficile à prendre en défaut. D'autant plus qu'un amortisseur de direction situé sous le té de fourche inférieur se charge de contrôler les mouvements intempestifs de la direction. La machine se place facilement sur l'angle et se montre vive et précise dans les virages serrés. Avec son poids contrôlé, elle négocie les enchaînements avec aisance, faisant preuve d'une bonne maniabilité. Dans les courbes rapides, elle suit sa trajectoire sans dévier d'un poil, ni osciller de la croupe. Stable et rassurante.
Sur voie rapide, le petit saute-vent optionnel soulage la pression de l'air du buste, mais la tête du pilote est exposée au vent. Cependant, il s'agit d'un flux dépourvu de turbulences. Et à une allure raisonnable, c'est-à-dire inférieure à 150 km/h, la pression du vent reste tout à fait supportable. Par contre, sous la pluie, les pieds sont immédiatement détrempés, comme nous avons pu le vérifier à plusieurs occasions durant cet essai. Et le haut du corps aussi. De toute façon, si c'est la protection ultime qu'on cherche, on n'arrête pas son choix sur un roadster. On préfèrera une routière sportive ou une GT, comme la F800ST, par exemple, pour rester dans la même famille de motos. Le confort offert par la selle est satisfaisant et permet d'envisager des sorties de plus de 500 km d'une traite sans difficulté.
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La bête dans son plus simple appareil. |
Le freinage ABS de la BMW est vraiment efficace. En fait, il faut doser la pression sur le levier avant avec précaution si on ne veut pas s'exploser les parties intimes sur le faux réservoir à essence qui abrite le filtre à air, le boîtier électronique et la batterie (le réservoir de 16 litres de capacité est situé sous la selle). Le mordant des freins est exceptionnel et ferait pâlir de jalousie certaines sportives. Un doigt suffit pour obtenir toute la puissance de freinage du système intégral. Facile à moduler, une fois qu'on a saisi son mode opératoire, il ne se déclenche pas à tout propos. Il vous libère donc l'esprit et vous permet de vous concentrer sur votre conduite. Vous savez à tout moment qu'il sera là, disponible et efficace, en cas de besoin.
Le comportement intègre de la F800R est renforcé par une monte pneumatique performante. Dans le cas de notre machine de test, elle était chaussée de radiaux Metzeler Sportec Z3 (120/70 ZR 17 à l’avant; 180/55 ZR 17 à l’arrière), un pneu à gomme tendre, à vocation sportive. Hyperadhérant sur chaussée sèche, même sur l'angle, ce pneu procure une précision de guidage étonnante à l'avant, sans alourdir la direction, et une traction à toute épreuve. Il monte rapidement en température et inspire pleinement confiance au pilote. Au point où l’équipementier allemand le recommande même pour des journées d'essais libres, sur piste. Sur revêtement mouillé, son dessin de semelle particulier permet de bien évacuer l'eau et de conserver une adhérence optimale dans les circonstances.
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Une version Chris Pfeiffer Special Edition sera également proposée aux amateurs. |
La meilleure de la série F?
Personnellement, j'ai été séduit par la F800R. Encore plus que par la ST, qui m'avait pourtant bluffé lorsque je l'avais découverte, en 2006, lors de la présentation du modèle, en Afrique du Sud. Le roadster reprend toutes les qualités dynamiques de la ST et ajoute une pointe de piquant à la recette. Facile à prendre en main, pratique, polyvalente et éminemment joueuse, la F800R synthétise toutes les qualités de ses sœurs. Parfaitement adaptée à sa vocation, la F800R se distingue par l'agrément étonnant de son twin (souplesse, couple, consommation), la rigueur de son châssis et sa polyvalence élevée, pour une standard. Et, ce qui ne gâte rien, elle bénéficie d'une plastique agréable et d'un prix bien étudié. Offerte en trois coloris, (orange, blanc alpin, blanc aluminium mat métallique) la F800R se détaille 9 990 $ en version de base, moins de 12 000 $ bien équipée. Un modèle Chris Pfeiffer Special Edition, aux couleurs de l'écurie BMW Motorsport et autographié par le fameux cascadeur qui défend les couleurs de BMW dans les championnats mondial et européen de stunt est également proposé en quantités limitées, au prix de 11 340$. |