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ESSAIS   FICHE TECHNIQUE

ESSAI BMW K1300GT 2009
9 octobre 2009

Plus loin, plus vite, plus longtemps
Remplaçant la K1200GT au sommet de la gamme routière de BMW, la nouvelle K1300GT nous lance une invitation au voyage et à l'aventure. Nous l'avons prise au mot et nous l'avons menée sur les plus belles routes de la Province pour un périple de près de 7 000 kilomètres en trois semaines…

Texte : Didier Constant - Photos : Didier Constant, Nathalie Renaud et Denis Vayer
 
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INFORMATIONS GÉNÉRALES
  • Poids à sec : 255 kg
  • Hauteur de selle : 820/840 mm
    (800 mm avec selle basse optionnelle)
  • Capacité essence : 24 L
  • Consommation : 5,5 L/100 km
  • Autonomie : 437 km
  • Durée de l'essai: 7 500 km
  • Prix de base: 21 825 $
  • Prix telle qu'essayée: 24 675 $

MOTEUR

  • Moteur : 4-cylindres en ligne incliné à 55 degrés, 4-temps, double arbre à cames en tête, refroidi par eau, 4 soupapes par cylindre
  • Puissance : 160 ch à 9 000 tr/min
  • Couple : 99 lb-pi à 8 000 tr/min
  • Cylindrée : 1 293 cc
  • Alésage x course : 80 x 64,3 mm
  • Rapport volumétrique: 13:1
  • Alimentation : injection électronique
  • Transmission : six rapports
  • Entraînement : par cardan

PARTIE-CYCLE

  • Suspension : Duolever à double bras avec simple amortisseur; Paralever monobras avec amortisseur arrière simple, ajustable en précontrainte et détente. Réglage électronique en option (ESA II)
  • Empattement : 1 571 mm
  • Chasse/déport : 29,4 degrés/112 mm
  • Freins : deux disques avant de 320 mm avec étriers à 4 pistons; simple disque arrière de 294 mm avec étrier à 2 pistons; ABS Intégral Sport
  • Pneus : Metzeler Roadtec Z6
    120/70ZR17 à l’avant;
    180/55ZR17 à l’arrière.
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La GT sur les dunes de Tadoussac.

VERDICT RAPIDE
ON AIME BIEN
  • l'efficacité et l'homogénéité de la partie cycle
  • le confort routier
  • les assistances au pilotage
  • le coffre du moteur

ON AIME MOINS

  • la béquille latérale trop courte
  • la selle manquant d'ergonomie
  • le système de fermeture des valises récalcitrant
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Peu gourmande, la GT parcourt plus de 400 km sur un plein. Pas mal, non?

L’AVIS DES AUTRES ESSAYEURS

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La vie est injuste. Doublement injuste, même. D'abord, parce que vous devez vous contenter d’une seule moto (deux si vous êtes chanceux), alors que j’en chevauche une quinzaine — toutes neuves — par saison. Ensuite, parce que le patron se garde la K1300GT pendant plus d’un mois pendant que je me contente d’une de nos motos en essai à long terme que je connais par cœur. Juste pour m'écoeurer encore plus, cet être machiavélique m’a laissé faire une cinquantaine de kilomètres à son guidon. Le Diable en personne! Il n'empêche que la GT est divine, elle. Son moteur a gardé le rugissement de V8 de NASCAR en furie de sa devancière, alors que la partie cycle affiche une touche de maniabilité inédite. Hyper complète avec un ordinateur de bord qui donne une foule d'informations pratiques; pour un peu, il suggérait le niveau de crème solaire à mettre. BMW a enfin décidé de laisser tomber les clignotants à trois boutons pour un modèle classique qui fonctionne très bien, ma foi. Le pare-brise ajustable électronique est efficace et ne créé pas de turbulences. C’est un mystère pour moi; pourquoi BMW est-il le seul constructeur à vraiment savoir comment faire un pare-brise adéquat? Le freinage est à l’image de celui de ses sœurs « S » et « R » c’est-à-dire ultrapuissant. Le levier d’embrayage demande un effort trop élevé; dans le trafic, c’est pénible. Même si le modèle est pratiquement nouveau, il serait bien que le constructeur s’attarde à lui donner un visage beaucoup plus dynamique qui mettrait mieux le potentiel dont est capable la K1300GT en valeur.

Ugo Levac

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À l'ouest de Baie-Ste-Catherine.

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La GT aime les virages. Serrés, larges, lents, rapides. Tous les virages.

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La K1300GT devant le phare de La Martre.

 
 
 
 
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Il pleut abondamment. Depuis la sortie de Sainte-Anne-des-Monts. Ça fait bientôt deux heures que je «roule sur des œufs». En faisant attention de ne pas déraper sur les bandes blanches, lors des manœuvres de dépassement. Je freine en douceur. Progressivement. En essayant d'anticiper la réaction des automobilistes. La pluie fine et dense dépose des millions de gouttelettes sur ma visière embuée que je passe mon temps à essuyer du revers du gant. Difficile de distinguer le panorama dans ces conditions. Le paysage est gris foncé, uniforme et triste. Lugubre, presque. La route qui longe l'océan, à flanc de collines, dessine un long ruban noir et luisant qui se perd dans la grisaille ambiante que seuls les phares et les feux arrière des voitures parviennent à illuminer. Pourtant, il ne me viendrait pas à l'esprit de me plaindre. D'abord, parce que depuis notre départ de Montréal, il y a 15 jours, le beau temps nous a accompagnés à chaque instant de ce voyage mémorable. Ensuite, parce que malgré la pluie, je suis bien. L'humidité est palpable. Elle nous enveloppe, mais ne nous transperce pas. Grâce à nos vêtements chauds et étanches. Mais aussi grâce aux poignées et à la selle chauffantes. De plus, le carénage de la K1300GT avec son pare-brise à ajustement électrique offre une bonne protection. À Matane, nous avons hésité un bref instant à continuer. Midi approchait. Une bonne occasion pour arrêter, manger et nous réchauffer. «Et si on allait jusqu'à Sainte-Flavie? demanda ma femme. C'est à moins d'une heure de route et la soupe de poisson que nous y avons mangée, la semaine dernière, était délicieuse!» Nous avons donc poursuivi notre route. À bonne allure. En nous frayant un chemin à travers les gouttes. Au fur et à mesure que nous approchions de notre but, la pluie diminuait d'intensité. Jusqu'à cesser complètement à Métis. Nous sommes arrivés au restaurant juste avant l'heure de grande affluence du samedi midi. Un peu fourbus et transis, malgré tout. Mais ça valait le coup. Car la soupe de poisson était vraiment délicieuse.

Un signe du destin
En fait, ce voyage a bien failli ne jamais avoir lieu. Pas avec la Béhème, en tout cas. Car, le matin de notre départ, alors que nous étions fin prêts, que nos bagages étaient rangés dans les sacoches et sur le porte-paquet, la GT a refusé de démarrer. Obstinément. J'ai inséré la clef dans le contact, comme d'habitude, mais rien ne s’est passé. Pas le moindre signe de vie. Pas le moindre bruit synonyme d'espoir. Le moteur restait aphone. Et le tableau de bord sans vie. Après avoir essayé sans succès de survolter la batterie, je me suis résolu à appeler le service de dépannage de BMW. La veille, j'avais laissé les deux motos d'essai de longue durée du magazine à Ugo et Claude, deux collaborateurs proches, afin qu'ils puissent les rouler un peu en mon absence. Si j'avais su, j’en aurais gardé une, j'aurais transféré mes bagages d'une moto à l'autre et j'aurais abandonné la BMW dans le garage, question de ne pas perdre de temps. Au lieu de ça, j'ai dû attendre que le concessionnaire inspecte la moto et installe une batterie neuve. Et partir à la hâte, vers 13 h, afin de rejoindre Sainte-Flavie, où nous avions rendez-vous avant la fin de l'après-midi. Rétrospectivement, je ne le regrette pas le moins du monde. C'est comme si la BMW avait cherché à mettre ma confiance en elle à l'épreuve. Un signe du destin, en quelque sorte.

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Petit détour sur l'Île d'Orléans, pour le plaisir.

La semaine précédant ce voyage, j'avais mis la GT à ma main. Pour être sûr que la position de conduite me conviendrait parfaitement. J'ai descendu le guidon au plus bas, remonté légèrement le sélecteur de vitesse qui était ajusté trop bas et réglé la selle à la position la plus haute afin d'avoir plus de dégagement pour les jambes et pouvoir basculer le haut de mon corps un peu plus vers l'avant. Une petite sortie sportive à Saint-Donat m'a permis de valider les ajustements avant le départ. Ainsi réglée, la GT affichait une position un poil plus sportive. Je pouvais piloter le dos moins droit, les bras moins tendus et les jambes plus dépliées. J'étais prêt à affronter les routes sinueuses à vive allure et avec la bonne posture.

Depuis le lancement de la K1200GT, en 2005, j'ai eu l'occasion de l'essayer à trois reprises. Et, chaque fois, j'ai été surpris par son équilibre et son efficacité. À l’époque de sa sortie, elle a redéfini la classe des motos de grand tourisme. Jamais avant elle une GT n'avait déployé autant d'arguments pour séduire. Et fait étalage d'autant de peps. En gagnant 136 cc supplémentaires et huit chevaux, elle renforce son caractère et fait plus que jamais figure de sportive équipée de sacoches. Dans sa transformation, la K1300GT s'est également débarrassée de certains des défauts de jeunesse de sa devancière. Ainsi, la cartographie de l'injection a été révisée afin de corriger les hésitations de la version précédente. Ce qui bénéficie au moteur 2009, plus puissant, plus coupleux et plus vif. Le 4-cylindres explosif développe dorénavant 160 chevaux à 9 500 tr/min et un couple impressionnant de 99 lb-pi à 8 000 tr/min. Pas mal pour une grosse routière. Non? De plus, il délivre près de 80 % de son couple avant 3 500 tr/min, ce qui évite de devoir jouer indûment avec la boîte de vitesse dans le trafic. L'embrayage a été adouci et la boîte, autrefois rugueuse, est maintenant douce. Elle a perdu son claquement agaçant sur les premiers rapports. Et le jeu dans le rouage d'entraînement, qui donnait des à-coups désagréables à basse vitesse, est maintenant chose du passé.

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Photo souvenir devant le Rocher Percé. Incontournable!.

La partie cycle est également plus affûtée, comme sur la « S » ou la « R » et la « GT » bénéficie d'une foule d'accessoires de haute technologie et d'assistances au pilotage (ABS partiellement intégral, suspensions électroniques ESA II, cardan lubrifié à vie, fourche à parallélogramme en alu coulé, position de conduite ajustable, régulateur de vitesse – j'adore, ça devrait être obligatoire sur toutes les motos de route –, indicateur d’usure des plaquettes de frein, indicateur de pression des pneus…). La liste est vraiment impressionnante. Pour un peu, on se croirait aux commandes d'un avion de ligne. Pourtant, malgré cette débauche de moyens technologiques, la K1300GT reste une moto de « roule toujours ». C'est-à-dire qu'elle vous permet de profiter de la route et de rester en contact avec votre environnement en ne vous isolant pas trop et en vous permettant de déguster votre plaisir jusqu'à la dernière goutte… de pluie!

Une authentique routière au long cours
S'il est vrai qu'on peut se faire une idée à peu près juste d'une nouvelle moto après seulement quelques centaines de kilomètres, on ne peut vraiment la connaître qu'en vivant avec elle au quotidien. Et, dans le cas d'une GT de la trempe de cette Béhème, ça signifie faire un long voyage à son guidon. Dans les conditions de la vraie vie. Avec armes et bagages. Et un passager. Car la K1300GT est faite pour rouler loin, mais aussi en duo. C'est même dans ces conditions qu'elle prend tout son sens. En particulier, quand vient le temps de valider l'efficacité de la fameuse suspension électronique ESA de deuxième génération. Durant ce voyage de 7 000 kilomètres, qui nous a mené de Montréal à Kamouraska, puis de Kamouraska à St-Sauveur, pour ensuite faire le tour de la Gaspésie et de Charlevoix, nous avons rencontré une multitude de conditions météorologiques (vents forts, pluie, canicule, temps frais…) et de routes aux configurations variées et aux revêtements divers, lesquels allaient de bons en Gaspésie et dans Charlevoix, à pourris autour de Montréal et de Québec. À aucun moment, la « GT » ne nous a déçus. Réglée la plupart du temps en mode confort, pour une charge maximale (deux personnes plus leurs bagages), la suspension ESA II s'est avérée géniale, gommant les irrégularités de la chaussée et procurant un confort royal. Avec la possibilité de changer de mode (confort, normal ou sport) en roulant, selon les conditions rencontrées. Pour être franc, je n'ai jamais eu l'impression d'être aux commandes d'une moto de 288 kg tous pleins faits, tellement la « GT » semblait agile et maniable. Même dans la circulation urbaine. Il n'y a qu'à l'arrêt que les choses se gâtaient un peu. En effet, la béquille latérale est un poil courte et il suffit que la surface sur laquelle elle repose ne soit pas plane ou que la chaussée soit légèrement en pente pour que la moto penche exagérément lorsqu'on la gare. Et, quand il s'agit de la redresser, je peux vous affirmer que vous ressentez chaque kilo que vous devez relever.

Les valises m'ont également causé des maux de tête. Elles sont logeables et bien conçues, s'installent et se démontent de la moto en un tour de main et sont étanches, comme nous avons pu le vérifier. Par contre, j’ai eu dû me battre avec leur système d’ouverture tout au long de cet essai. Bien que je sois habitué au kit de bagages de BMW qui est commun à plusieurs motos de la gamme. Je connais leur mécanisme sur le bout des doigts. Mais là, allez savoir pourquoi, elles se sont montré très récalcitrantes. Quand je n'avais besoin de rien dans les sacoches, elles s’ouvraient facilement. À tout coup. Par contre, il suffisait qu’il se mette à pleuvoir et que je veuille enfiler mon habit de pluie rangé dans l’une d’elles pour que, soudainement, elle refuse de s’ouvrir. Plus j'étais mouillé, plus le mécanisme résistait. Et j'avais beau insulter la « GT » en Allemand – je le parle un peu, assez pour connaître les jurons courants – impossible d’ouvrir ladite valise. Quand, après de longues minutes d’essais infructueux, j'entendais le « cloc » libérateur, la pluie cessait d’un seul coup et le soleil se mettait à briller de nouveau. Et je n’exagère pas. La situation s’est répétée plusieurs fois. Vraiment frustrant! Mais bon! Revenons à nos moutons et reprenons notre route.

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Le quai à Lac-des-Seize-Îles, dans les Laurentides, est un de nos spots photo favoris.

Bien protégé derrière la bulle ajustable électriquement, on roule en paix. Visière de casque entrouverte. Sans turbulence, ni bruit excessif. En appréciant chaque instant de la balade. La protection qu'elle procure est bonne, bien qu’elle soit légèrement en retrait par rapport à celle de la RT qui reste un modèle du genre (une bulle haute est offerte en option). Le carénage large et enveloppant protège bien des intempéries, tandis que la selle réglable en hauteur (de 820 à 840 mm) s’adapte à un grand nombre de gabarits. Cependant, elle est inconfortable dans sa partie avant et on finit par ressentir rapidement des douleurs derrière les cuisses. Quand la K1300GT a été présentée, au début de l'année, je pensais que BMW aurait modifié la selle, puisqu'elle avait été critiquée dans le passé. Mais j'ai eu la déception de découvrir qu'elle avait survécu à la métamorphose. Afin d’être plus à l’aise, je portais des shorts de cycliste sous mes pantalons de route. Ce qui me permettait de parcourir plus de 500 km avant de commencer à ressentir des douleurs. Sans ces shorts, je maudissais le concepteur de la selle au bout de 200 ou 300 km, selon les conditions de route. Le passager, quant à lui, bénéficie d'un traitement princier. Le confort de son siège est inattaquable. Le grand luxe. Moelleux et amortissement sont au rendez-vous. Et il dispose de poignées latérales de maintien pratiques et bien disposées.

Conçue pour tailler la route dans les meilleures conditions possible, la « GT » propose une longue liste d'équipements de tourisme. Durant ce périple, j'ai particulièrement apprécié les poignées et la selle chauffantes. Surtout quand la fraîcheur matinale vous enveloppe, ou à la tombée de la nuit, quand vous ne savez plus si c'est le froid qui vous glace les os, ou la peur du noir. Ou encore quand les vents forts, restes de l'ouragan Bill, viennent balayer la côte gaspésienne, vous obligeant à rouler penché pour être capable d’avancer en ligne droite. La selle possède deux commandes de réglage de chaleur indépendantes, une pour le pilote et l'autre pour le passager. Et elles s'ajustent à deux niveaux d'intensité. Grâce à la prise accessoire de douze volts installée sur notre moto d’essai, j'ai pu brancher ma veste électrique et m'assurer d'être toujours au chaud, quelles que soient les conditions rencontrées. Enfin, l'ordinateur de bord permet, entre autres choses, de contrôler la consommation de carburant et l'autonomie ou encore la pression des pneus. Quand je vous disais que la « GT » c'était le grand luxe.

Plus on roule, plus on devient accro
Le moteur participe, lui aussi, au confort de la grosse routière allemande. Doux et exempt de vibrations, il fait étalage d'un couple impressionnant grâce auquel on peut s'extraire de la circulation urbaine en un coup d'accélérateur ou doubler rapidement sans devoir rétrograder. Le gros quatre cylindres en ligne reprend sur un filet de gaz, dès 2 000 tr/min, sans brouter, ni cogner. Tout en rondeur. Sur route rapide, on évolue à des vitesses élevées, régulateur de vitesse enclenché. À 130 km/h, le moteur ronronne à seulement 4 600 tours, en sixième. Sans vibrer. Preuve de sa douceur extrême et de son coffre impressionnant. Et si on doit s'échapper rapidement, une simple rotation du poignet droit suffit à vous propulser en avant, comme un boulet projeté de la bouche d'un canon. Lors de la traversée des villages, il suffit de rester calé sur le dernier rapport et de se laisser tirer par le couple. Pas besoin de rétrograder. Les reprises sont excellentes et le moteur possède une telle réserve de puissance qu'on peut accélérer très fort, à partir de n'importe quel régime, quel que soit le rapport engagé. Cette douceur est également appréciée par le passager qui n’est pas secoué à la moindre occasion. Et qui peut laisser son esprit vagabonder ou regarder le paysage, selon son humeur.

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Pause sur la 138, à l'ouest de Baie-Ste-Catherine.

Même si son poids et sa stature impressionnent et peuvent rebuter les moins aguerris d'entre nous, la GT n’est pas une moto contraignante, loin de là. En fait, elle est plus facile à prendre en main que sa fiche technique le laisse supposer. La K1300GT n'est pas une citadine exemplaire. En ville, elle est handicapée par son gabarit. Avec elle, difficile de slalomer entre les voitures en raison de sa largeur hors tout importante. Par contre, elle brille presque partout ailleurs. Impériale sur autoroute, ou sur route rapide, la K1300GT est une authentique routière sportive. Son poids s'évanouit sitôt qu'elle est en mouvement. La partie cycle se montre alors en adéquation avec le moteur. Rigide et rigoureuse, elle procure une stabilité irréprochable et une tenue de route impériale. Rien ne semble pouvoir la déséquilibrer, ni la faire dévier de sa trajectoire. Pas même les trous, ni les bosses de la chaussée qui sont pourtant légion sur nos routes. Impossible à prendre en défaut à vitesse modérée, la « GT » affiche une vivacité surprenante à un rythme plus sportif, compte tenu de son gabarit et de sa vocation tourisme. En fait, elle cache un tempérament fougueux derrière une apparence sobre, voire un brin bourgeoise. Un caractère rebelle tempéré par un système d'antipatinage efficace, combiné à un freinage ABS Integral couplé, transparent et performant. Et diablement performant.

Sur les routes secondaires sinueuses, la « GT » se tire bien d'affaire. Étonnamment agile pour une grosse routière sportive, elle affiche un penchant marqué pour les virages. Quel que soit leur rayon. Quelle que soit leur configuration. Elle se place sur l'angle d'une bonne poussée sur le guidon. Et penche avec plaisir. Dans les virages serrés et les enchaînements, elle fait preuve d'une bonne vivacité, mais se montre tout de même physique à emmener. Beaucoup plus qu'une sportive de classe ouverte, par exemple. Dans ce genre d'environnement, la BMW demande une implication de la part de son pilote. Pas de place à l'improvisation. Il faut faire corps avec la machine, être attentif et prévoir ses trajectoires.

Lors de la traversée du parc de la Gaspésie, je suis tombé sur une section de virages rapides à grand rayon qui se succédaient pendant plusieurs dizaines de kilomètres. Là, la K1300GT s'est révélée immédiatement à l'aise. J'ai senti tout de suite que c'était le genre de route qu'elle aimait. J'ai donné une petite claque sur le genou de ma femme pour l'avertir qu'on allait passer aux choses sérieuses et enclencher le mode sportif. C'était le matin. Il était tôt. Trop tôt pour les touristes. Seuls quelques pêcheurs sportifs taquinaient le poisson dans la rivière Cascapédia. La route était quasiment déserte, le revêtement parfait, la température fraîche, mais clémente. Pas de risque de pluie en perspective. J'ai accéléré la cadence et profité de la magie de cet environnement. La Béhème suivait le rythme sans broncher. Son moteur chantait dans les tours. Avec une sonorité rauque. Son train avant admirablement planté faisait preuve d'une efficacité redoutable. Il encaissait sans sourciller les entrées de virages sur les freins et ne s'enfonçait pas d'un poil. Grâce à son châssis rigoureux et stable, la « GT » ne bougeait pas. Une fois posée sur l'angle, elle conservait sa trajectoire, imperturbable. Un vrai rail. Je passais d'un virage à l'autre presque sans utiliser la boîte. En contrôlant ma vitesse avec l'accélérateur. Je donnais un petit coup de frein pour placer la moto sur la trajectoire et j'ouvrais les gaz en grand en sortie de courbe pour me propulser vers le prochain virage. On aurait dit une danse rituelle. À laquelle le pilote et le passager prenaient part à l’unisson avec la machine. J'avais le sentiment de vraiment faire corps avec la moto. Le genre de sensation qui nous rappelle pourquoi on aime tant ce sport. Un moment magique qui a duré un bon quart d'heure. Le nirvana façon moto. Puis la route est devenue un peu plus rectiligne. J'ai alors adopté un rythme de croisière plus raisonnable et j'ai repris ma traversée du parc, en mode balade.

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Ferme de l'Ane du Saint-Laurent, à Port-au-Persil.

Quand vous faites un long voyage, dans une région que vous connaissez mal, l’approvisionnement en carburant peut devenir un souci. Et, de nombreuses motos n’offrent pas une autonomie suffisante pour garantir la paix d'esprit du pilote. Ce qui n’est pas le cas de la K1300GT. Durant ce périple, elle a maintenu une consommation moyenne surprenante de 5,5 L/100 km. Le gros quatre cylindres se montre donc peu gourmand au vu de ses performances, même quand on le sollicite. Avec son réservoir d’une capacité de 24 litres, la BMW dispose donc d’une autonomie de 437 km. Ce qui permet de rouler longtemps sans devoir s’arrêter à tout bout de champ pour faire le plein.

Toute bonne chose a une fin
Arrivés à Rivière-du-Loup, sous un soleil radieux, nous avions oublié la pluie du matin. Soudain, l'idée de prendre le traversier nous a semblé saugrenue. Surtout qu'à 67 $ le passage pour une moto et deux passagers, le prix est franchement prohibitif. En plus, nous n'avions rendez-vous à Baie-Saint-Paul que le lendemain en après-midi. Rien ne pressait donc. Après avoir fait une halte pour ravitailler et nous désaltérer, nous avons repris la route 132 et longé le Saint-Laurent. En direction de Montmagny, où nous passerions la nuit. Le soleil flirtait avec le Fleuve. La route prenait des reflets dorés et se perdait dans le paysage, à l'horizon. La « GT » semblait flotter sur un coussin d'air. Elle s'enfonçait sans bruit dans la tiédeur de cette fin d'après-midi d'été. J’aurais roulé des heures dans ces conditions, mais il fit bientôt sombre. Et il fallait arrêter, trouver un hôtel et penser à manger. Je réalisais alors que nous mettions fin à une étape de nos vacances. En sachant que le lendemain, nous en recommencerions une autre. Aussi merveilleuse. En sachant aussi que la Béhème serait là. Fidèle au rendez-vous. Prête à nous faire vivre d'autres aventures. J'espérais seulement que la batterie ne nous lâcherait pas cette fois-ci…


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