Confortable, polyvalente et facile à prendre en mains, la Transalp a toujours favorisé la facilité d'utilisation et le plaisir de conduite. Dans sa livrée actuelle, que j'ai eu l'occasion d'essayer lors de mon voyage au Luxembourg et en Bourgogne, à la mi-mai, elle s'intègre parfaitement dans le concept d'aventure que Honda tente de développer avec ses nouvelles Varadero et CBF1000.
Il a coulé tellement d'eau sous les ponts depuis ma dernière prise de contact avec la Transalp originale — la seule offerte au Canada — que je vous ferais grâce des multiples métamorphoses que le modèle a subies en 20 ans d'évolution. Tout juste vous dirais-je que le millésime 2008, qui a été profondément modifié, est désormais propulsé par un V-Twin de 680 cc à huit soupapes emprunté à la Honda Deauville, sa cousine routière. Ce bicylindre en V à 52°, à DACT et refroidissement liquide, développe 60 ch à 7 750 tr/min et propose un couple de 44 lb-pi à 5 500 tr/min. Il est secondé par une boîte à 5 rapports et une transmission finale à chaîne. Ce moulin est logé dans un cadre simple berceau dédoublé en tube d'acier tout à fait classique, mais efficace. À l'avant, la fourche télescopique de 41 mm qui affiche un grand débattement de 177 mm guide une roue de 19 pouces à rayons (au lieu de 21 sur le modèle précédent) qui l'éloigne un peu plus de ses racines tout terrain et en fait une aventurière à vocation plus routière, une tendance qui se généralise dans ce créneau. Comme sur beaucoup de Honda modernes, le freinage combiné ABS-CBS est proposé, en option dans ce cas-ci.
La facilité en exergue
Haute sur pattes, élancée et très élégante, la nouvelle Transalp séduit par des lignes très réussies. Fabriquée en Espagne, à l'usine Montesa qui appartient désormais à Honda, la XL700V s'attaque directement aux Kawasaki Versys et Suzuki DL650. Une mission dont elle s'acquitte avec brio en misant sur la grande douceur de son moteur et une facilité de prise en main étonnante. Pourtant, la Transalp reste exclusive et les pilotes de gabarit moyen ou petit éprouveront quelques difficultés à son guidon en raison d'une selle haute qui culmine à 841 mm. Ils devront prendre appui sur un seul pied et manqueront d'équilibre quand le sol ne sera pas pafaitement plat. Une selle plus basse de 20 mm est proposée en option. Malgré ses 219 kg tous pleins faits (modèle ABS), la Transalp, dont la répartition des masses est presque idéale, renvoie une grande impression de légèreté.
La position de conduite est relaxante, bras écartés en raison du large guidon tubulaire, dos droit, jambes détendues et genoux bien calés dans le creux du réservoir particulièrement fin à sa base. Le buste à peine penché vers l'avant, le pilote n'a quasiment pas de poids sur les poignets et peut initier les changements de direction d'une simple poussée sur le guidon. La selle est relativement étroite et ferme, mais elle offre un confort surprenant. J'ai pu parcourir 2 100 km en tout confort, sans ressentir la moindre douleur aux fessiers. La section arrière est accueillante et permet à un passager d'entrevoir de longues sorties sans problème.
L'ergonomie des commandes (bien sûr réglables) s'avère excellente, le tableau de bord est complet et le large porte-paquet, doté d'ergots d'ancrage, permet de transporter quelques bagages arrimés à l'aide de tendeurs ou d'une araignée. Des valises et un coffre arrière sont néanmoins proposés en option. Si j'avais une petite critique à formuler, je me plaindrais du fait qu'il est très difficile d'utiliser un sac de réservoir magnétique sur la Transalp, exception faite des modèles très petits. En effet, la partie métallique du réservoir est très étroite (les aimants arrivent au niveau du carénage en plastique) et sa forme est tourmentée.
Pour le reste, rien à signaler... À vitesse réduite, la maniabilité est excellente et on peut effectuer des demi-tours dans un mouchoir de poche. Les transitions gauches droites gauches, fréquentes en Europe en raison des nombreux ronds-points, se négocient d'instinct, d'une légère pression sur le guidon.
Rat des villes et rat des champs... mais avec l'esprit vagabond !
En ville, la Transalp est un vrai charme à piloter. Agile, elle se faufile dans la circulation urbaine avec aisance. Le moteur qui cogne un peu en bas de 2 000 tr/min se réveille dès 3 500 tr/min et offre des accélérations honnêtes. On se promène alors sur les rapports intermédiaires, sans chercher à exploiter les hauts régimes. La puissance est linéaire et le couple adéquat dans cet environnement où la XL700V se sent à l'aise. Petit bémol : à ces régimes, les vibrations sont notables, sans êtres rédhibitoires cependant.
Sur route, secondaire et tortueuse de préférence — c'est plus drôle — la Transalp impressionne par son agilité et la facilité avec laquelle elle s'incline. Elle adore les virages — larges ou serrés — et elle flirte avec des angles d'inclinaison importants, sans forcer. Sa partie cycle inspire confiance et permet d'adopter une conduite soutenue, même lorsque le revêtement est inégal. Grâce à ses suspensions à grand débattement bien calibrées, elle absorbe les irrégularités de la route sans broncher.
Très équilibrée, la partie cycle de la Transalp surprend non seulement par sa facilité et son agilité, mais aussi par une efficacité et une rigueur qui ne sont pas toujours communes sur ce type de machine. Sur les petites routes des Ardennes luxembourgeoises et sur celles sinueuses du Morvan, la petite Honda virevolte d'un virage à l'autre tout en restant parfaitement stable. Intègre, le châssis autorise des vitesses de passage en courbes élevées sans que la moto soit déstabilisée. Il encourage l'improvisation et pardonne les erreurs. On peut poursuivre les freinages sur l'angle sans que la Transalp cherche à se relever subrepticement. À ce chapitre, les freins ABS-CBS sont puissants, progressifs et modulables à la fois. Dans la phase initiale du freinage, l'effort requis au levier est important, au point que l'on pense que les freins manquent de mordant, mais la rétroaction est meilleure dans la phase finale. Le mordant est maximal quand on utilise le levier et la pédale de frein simultanément. Le système combiné de Honda est, à ce jour, le plus efficace qu'il m'ait été donné de tester. Cependant, en usage sportif, il baisse un peu la garde, sur la Transalp en tout cas.
Sur autoroute, la Transalp étonne par sa volonté à maintenir un rythme élevé à des régimes raisonnables (5 500 tr/min à 130 km/h et 7 000 tr/min à 160 km/h) tout en proposant un confort appréciable. La bulle du carénage offre une protection décente et le flux d'air arrive sur le dessus du casque. La tête du pilote n'est pas trop secouée et celui-ci peut soutenir une vitesse de croisière de 140-160 km/h sans crainte (si ce n'est celle des radars...). Les vibrations notées aux régimes intermédiaires sont toujours présentes, mais elles n'augmentent pas de façon importante. Le bicylindre Honda n'est pas un foudre de guerre, mais il se défend bien compte tenu de sa cylindrée et de son orientation aventurière. Les accélérations et les reprises sont généralement bonnes, mais quand même un peu «molles» en dessous de 4 500 tr/min. Pour dépasser de façon sécuritaire, spécialement sur les petites routes, il est préférable de descendre un rapport. En duo et avec des bagages, le phénomène s'amplifie. Très linéaire, le twin Honda offre une crête de puissance aux alentours de 5 000 tr/min (la zone rouge débute à 8 000 tr/min) et se stabilise ensuite. Il n'arrache pas les bras, et ce n'est pas là sa vocation. Mais il peut vous aider à faire le tour du monde sans fatigue. La boîte de vitesses douce et précise permet de bien exploiter la douceur du moulin de la Transalp. Elle favorise une conduite sans à-coups. La démultiplication finale est bonne et correspond à ce qu'on attend d'une moyenne cylindrée conçue pour le tourisme.
Au niveau de la consommation, la Transalp fait bien, sans être un chameau pour autant. Durant les 2 100 km de cet essai, elle a enregistré une consommation moyenne de 5,63 L/100 km. Avec son réservoir de 17,5 litres, elle peut donc parcourir près de 310 km avant de tomber en panne sèche, ce qui est tout à fait raisonnable dans les circonstances.
Une aventurière polyvalente
Cette dernière incarnation de la Transalp est aboutie. Avec son look moderne, son moteur souple et relativement puissant, sa partie cycle intègre, elle offre en bonus une injection bien calibrée et un système de freinage ABS-CBS (optionnel) très apprécié. Facile à piloter, elle s'acquitte bien de sa tâche en toute circonstance. On lui reprochera cependant de favoriser l'efficience au détriment du caractère — mais c'est un reproche que l'on adresse à presque toutes les Honda — et de manquer de peps en utilisation extrême. Assurément plus routière qu'aventurière, elle permet cependant de s'éloigner, à l'occasion, des routes asphaltées et d'explorer de nouveaux horizons. Il s'agit d'une excellente moto, sans véritable défaut, si ce n'est celui d'être trop consensuelle. Par rapport à ses concurrentes directes (BMW 650 GS, Ducati Multistrada 620, Kawasaki Versys 650, Suzuki V-Strom DL 650), elle n'a pas à rougir, bien au contraire, et elle pourrait tenir la dragée haute à plusieurs d'entre elles. La probabilité de sa venue prochaine au Canada (2009 ou 2010) est élevée. J'en ai même vue une, cachée, dans la remorque de Honda Canada lors du lancement des Varadero et CBF1000...
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