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ESSAIS   FICHE TECHNIQUE

LANCEMENT DE PRESSE MULTISTRADA 1200S TOURING 2010
15 mars 2010

Stradavarius pour mélodie en tout sol
En rupture complète avec son aïeule, la nouvelle Multistrada essaie de jouer dans la cour de la BMW R 1200 GS, la référence du créneau du tourisme aventure, tout en faisant un clin d’œil à la récente KTM 990 SMT. Portrait de l’aventurière à la sauce bolognaise… pimentée!

Par Costa Mouzouris — Photos : Agence Milagro et Ducati
 
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INFORMATIONS GÉNÉRALES
  • Poids à sec : 192 kg
  • Hauteur de selle : 850 mm
  • Capacité essence : 20 L
  • Consommation : non mesurée
  • Autonomie : non mesurée
  • Prix : 17 495 $/20 995 $ (1200S)

MOTEUR

  • Moteur : bicylindre en L, Testastretta 11 degrés, 4-temps, refroidi au liquide, 4 soupapes par cylindre à commande desmodromique
  • Puissance : 150 ch à 9 250 tr/min
  • Couple : 87,57 lb-pi à 7 500 tr/min
  • Cylindrée : 1 198 cc
  • Alésage x course : 106 x 97,9 mm
  • Rapport volumétrique: 11,5:1
  • Alimentation : injection électronique Mikuni
  • Transmission : six rapports
  • Entraînement : par chaîne

PARTIE-CYCLE

  • Suspension : fourche inversée Öhlins de 48 mm à cartouche et mono-amortisseur Öhlins TTX à réglage électronique de la précontrainte, de la compression et de la détente
  • Empattement : 1 530 mm
  • Chasse/Déport : 25 degrés/101 mm
  • Freins : Deux disques de 320 mm et étriers radiaux Brembo à quatre pistons à l’avant ; simple disque de 245 mm avec étrier double piston à l’arrière. ABS débrayable de série sur les S.
  • Pneus : Pirelli Scorpion Trail
    120/70 ZR 17 à l’avant;
    190/55 ZR 17 à l’arrière
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DES MODES À LA MODE
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Modes de conduite 101

Sur la Multistrada 1200, Ducati a recours à des systèmes électroniques complexes qui permettent de sélectionner quatre modes de conduite distincts (Sport, Touring, Urbain et Enduro). Accélérateur électronique (Fly-by-wire), bande de puissance ajustable et antipatinage à huit niveaux d’ajustement se combinent pour modifier le comportement de la moto selon les conditions et l’environnement.

Les ingénieurs sont parvenus à simplifier l’interface entre ces systèmes électroniques et le pilote pour une plus grande facilité d’utilisation.

Un simple bouton fait office de sélecteur de modes. Il suffit de le pousser à répétition pour faire défiler les modes et de le garder appuyé pendant trois secondes pour le sélectionner. Les modes de conduite peuvent être changés à la volée et dans ce cas, il s’agit de couper les gaz pour confirmer la sélection. Sur le modèle S, des servomoteurs ajustent la suspension selon le mode choisi, en quelques secondes.

Le plus gros avantage du système de gestion électronique de la conduite de Ducati réside dans le fait que les ajustements par défaut effectués à l’usine peuvent être remplacés par des réglages personnels, offrant ainsi un niveau de personnalisation extrême. Contrairement au système ESA de BMW qui propose des paramètres fixes, celui de Ducati autorise des choix individuels d’amortissement (en compression à l’avant et à l’arrière et en détente) ainsi que de la précontrainte du ressort de l’amortisseur. Ces réglages peuvent être sauvegardés dans chaque mode de conduite. Si vous vous égarez dans les ajustements et rendez la moto inconduisible, vous pouvez revenir au réglage par défaut à tout moment. Lequel fonctionne parfaitement.

Vous pouvez également modifier la courbe de puissance et l’antipatinage dans chaque mode. Par exemple, vous pourriez décider d’avoir accès à la puissance maximale dans tous les modes et de régler le DTC au minimum, voire le désactiver, ce que je vous déconseillerais.

Deux interrupteurs à bascule sont utilisés pour ces opérations. Afin de garder l’instrumentation au guidon aussi peu encombrée que possible, certaines commandes font double office — le bouton d’annulation des clignotants sert aussi de sélecteur de mode quand les clignotants ne sont pas utilisés, et sur la 1200S, le démarreur actionne les poignées chauffantes.

Les modes sélectionnés et les données de l’ordinateur de bord sont affichés sur un écran à cristaux liquides circulaire situé à la droite de l’écran principal qui affiche les informations usuelles, comme le compte-tour, la vitesse, l’indicateur de rapport engagé et le niveau d’essence.

Voici le détail des réglages par défaut pour un pilote seul. Les modes peuvent être ajustés en fonction de la charge. L’antipatinage comporte huit niveaux d’ajustement, le niveau 1 étant le moins intrusif et le 8 le plus contraignant. Les réglages de suspensions ne s’appliquent que sur les modèles S.

SPORT: 150 ch avec courbe de puissance agressive; DTC : niveau 4; amortissement ferme, précontrainte réglée à moyen.

TOURING: 150 ch avec courbe de puissance progressive; DTC : niveau 5; amortissement souple, précontrainte réglée à moyen.

URBAIN: 100 ch avec courbe de puissance progressive; DTC : niveau 6; amortissement très souple, précontrainte réglée à minimum pour abaisser la hauteur de selle.

ENDURO: 100 ch avec courbe de puissance progressive; DTC : niveau 2; amortissement souple, précontrainte réglée à maximum pour une meilleure garde au sol.

CASCADE À LANZAROTE
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Cascade à Lanzarote

Tout se déroulait à merveille. Je célébrais mon anniversaire dans les magnifiques îles Canaries en pilotant une nouvelle moto des plus affûtées. Les routes étaient superbes et les paysages époustouflants.

Ces facteurs peuvent amener un pilote à baisser sa concentration. L’observation de la côte, qui est magnifique dans cette contrée, peut le conduire à manquer un virage. L’atmosphère détendue de Lanzarote et son soleil réconfortant peut le bercer dans une torpeur dangereuse, affaiblissant ses réflexes, lesquels, nous le savons tous, doivent être aiguisés lorsque l’on conduit.

Mais, dans le cas présent, aucun de ces facteurs ne peut expliquer ma mésaventure. En fait, aucun facteur extérieur n’a été cause de l’accident malencontreux qui a froissé mon égo et meurtri mon corps. Au cours des huit dernières années, c’est seulement la seconde fois que je chute lors d’un lancement de presse. La première fois, il s’agissait d’une chute à basse vitesse, sur circuit, aux commandes d’une Kawasaki ZX-10R qui n’a subi que des dommages cosmétiques mineurs. Lesquels ne méritent même pas d’être mentionnés.

Mais cette fois-ci, cet accident résulte d’un manque total de jugement, qualité qui m’a pourtant toujours bien servi jusqu’à maintenant.

Peut-être ceci est-il attribuable à l’excellent comportement de la Multistrada sur laquelle je me sentais tellement en confiance. Je roulais à vive allure sur une route de graviers, à seulement quatre kilomètres de notre hôtel. La moto semblait être dans son élément sur ces chemins non pavés, dérapant avec grâce dans les virages et flottant au-dessus des bosses; j’étais dans un état de grâce.

Mais cela n’allait pas durer. Et j’augmentais la cadence en négociant une longue ligne droite qui m’invitait à me dépasser. Sur cette route inconnue, j’aurais dû faire preuve de prudence, conduire plus lentement, mais il était trop tard pour changer le cours des événements. Quand j’ai vu cette crevasse d’un pied de profondeur, aussi large qu’une voiture, en travers du chemin, je savais que j’étais dans le trouble. À la vitesse à laquelle je roulais — et que je ne mentionnerais pas ici de peur de m’accabler encore plus —, il était évident que la chute serait brutale et douloureuse. J’ai eu beau faire pour essayer de me protéger, elle fut douloureuse et spectaculaire. Inutile de dire que j’allais établir un record personnel. Que ce crash serait mémorable.

La pauvre Multistrada s’écrasa violemment sur le rebord opposé de la crevasse pour s’envoler dans les airs comme une navette spatiale. Elle resta droite, verticale, pendant son envolée et, pendant une fraction de seconde, je me suis dit que j’allais m’en sortir. Puis une voix intérieure me glissa à l’oreille : « Eh mec! Tu déconnes! T’es dans la merde pas à peu près! »

La moto retomba lourdement sur ses roues, s’écrasa au sol et m’éjecta comme un taureau enragé, bourré de stéroïdes, le ferait avec un cow-boy portant un Stetson qui oserait le chevaucher.

L’infortunée Ducati et moi commençâmes à glisser et à rebondir sur le sol rocailleux pendant une éternité, sur une distance de plus de 100 mètres. Je me faisais ravager le corps par des roches de la taille d’une balle de baseball. Quand enfin nous nous arrêtâmes, je me relevais d’un bond, sous l’effet de l’adrénaline, cherchant à remettre la moto sur ses roues, comme si le fait de la laisser au sol l’abimait davantage. Lui causerait plus de dommages que ceux que je venais de lui infliger.

Malgré le fait que je ne fus pas épargné — les hématomes noirs, bleus et mauves témoignent de ma malchance —, j’ai été épargné de blessures plus graves et de coupures profondes grâce à mon ensemble textile Joe Rocket Alter Ego et à mes bottes Meteor. Les pantalons sont déchirés, comme si j’avais glissé sur une râpe à fromage, mais ma peau est restée intacte. Si j’avais porté des jeans, j’aurais assurément fait connaissance avec les docteurs et les infirmières de Lanzarote.

La Multistrada s’en est nettement moins bien sortie que moi. Le cadre tordu, cassé, le moteur fendu, laissant s’échapper tous ses fluides. Elle n’était plus que l’ombre d’elle-même. De la formidable machine qu’elle quelques instants plus tôt.

J’ai lu son éloge funèbre sur place et j’ai baissé la tête en signe de respect — et de honte.

Photos ci-dessous:
Hell For Leather et Costa Mouzouris

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Il est ironique que Ducati ait choisi Lanzarote pour le lancement de la nouvelle Multistrada 1200, dont le nom signifie littéralement multiroutes en italien. En effet, Lanzarote, la plus orientale des îles Canaries, est un ilot volcanique de 60 kilomètres de long sur 25 kilomètres de large. Si l’endroit propose des paysages sublimes, il n’offre pas une grande variété de routes à explorer, et encore moins des routes incitant aux voyages au long cours. Ce qui ne signifie pas que Lanzarote est dépourvu d’attraits — motocyclistes — pour autant…

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Les Multistrada 1200 S et S Touring posent devant une fumerolle.

Présentée en 2003, la Multistrada originelle était propulsée par un bicylindre en L de 992 cc refroidi à l’air. Sa cylindrée grimpa à 1 078 cc en 2006. La dernière Strada, quant à elle, reçoit un tout nouveau twin de 1 198 cc refroidi au liquide appelé Testastretta 11°. Ce nouveau bloc est dérivé du moulin à tête étroite (Testastretta) de la Superbike. Quant à la dénomination 11° elle qualifie le laps de temps durant lequel les soupapes d’admission et d’échappement sont ouvertes simultanément, exprimé en degrés de rotation du vilebrequin. Ce chevauchement se fait désormais sur onze degrés comparativement à 41 sur l’ancien Testastretta. Ce qui, selon Ducati, adoucit le comportement du moteur et améliore la consommation de carburant tout en réduisant les émissions d’hydrocarbure d’environ 65 % et celles de dioxyde de carbone de 15 %.

L’inconvénient de ce choix technique est de réduire la puissance. Cependant, malgré une perte de près de 20 chevaux comparativement à la 1198, la Multistrada 1200 crache encore 150 bourrins, ce qui est un record de la catégorie et la place au niveau de certains Superbikes ou roadsters d’un litre. Elle affiche également un couple supérieur à celui de la 1198 en bas de 6 800 tr/min.

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Sur route sinueuse, la Multistrada 1200 S se régale. Elle est dans son environnement.

Parmi ses autres caractéristiques haut de gamme, notons le système d’antipatinage DTC (Ducati Traction Control) de Ducati — pour gérer la transmission de la puissance au sol — et l’embrayage à glissement limité, qui réduit le sautillement de la roue arrière lors de violentes décélérations ou au rétrogradage.

Le moteur est alimenté en air frais par un « nez » pas vraiment esthétique qui donne à la Multistrada un air de tapir sur deux roues, mais qui remplit parfaitement sa mission. Ces larges « narines » dirigent également l’air vers le radiateur d’huile.

Afin de limiter les visites chez votre concessionnaire, l’intervalle d’ajustement des soupapes a été porté à 24 000 km sur le nouveau Testastretta 11° (il était de 12 000 km auparavant).

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Légère et maniable, mais aussi efficace et confortable, la Multistrada 1200 S pourrait bien être la Ducati la plus désirable de la gamme. Et la plus polyvalente.

Le cadre treillis tubulaire en acier est complété par des platines latérales en aluminium forgé sur lesquelles vient se visser le massif monobras oscillant en aluminium. La boucle arrière du cadre, elle aussi en treillis d'acier, se compose de deux alliages différents, son extrémité faisant appel à une structure en polymère moulée d'une seule pièce. Selon Ducati, la rigidité du cadre serait augmentée de 19 % en torsion.

La firme de Borgo Panigale clame que la Multistrada 1200 regroupe quatre motos en une : une sportive, une routière, une citadine et une moto de tout terrain. Et cette polyvalence extrême est obtenue grâce à l’électronique. La 1200 bénéficie en effet de quatre modes de conduite appelés Sport, Touring, Urbain et Enduro. Sélectionner un ou l’autre de ces modes (voir l’encadré « Des modes à la mode ») permet de changer le comportement de la machine afin qu’il s’adapte aux conditions routières. Et après avoir passé une journée au guidon de la Multistrada 1200S Touring, je peux vous assurer que Ducati ne ment pas à ce sujet. Ça marche vraiment!

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La Multistrada 1200S Touring est la plus intéressante des trois modèles proposés.

Le premier indice de l’omniprésence de l’électronique sur la nouvelle 1200 est l’absence de contact. La clef électronique (qui comprend une languette métallique rétractable pour ouvrir le réservoir à essence ou la selle) reste dans votre poche et active la moto quand vous vous trouvez dans un rayon de deux mètres de celle-ci. On initialise le tableau de bord en abaissant une fois le bouton rouge, on le relève et on appuie sur le démarreur qui se trouve sous le capot. Dans l’éventualité où vous perdriez la clef, vous pourrez néanmoins démarrer la moto grâce à un code secret (NIP) que vous êtes seul à connaître.

Trois versions de la Multistrada sont proposées : le modèle de base, qui se détaille 17 495 $, ainsi que les deux modèles S, la Sport et la Touring, qui valent 20 995 $.

Le modèle de base est idéal pour les traditionalistes qui veulent ajuster leurs suspensions manuellement ou pour les économes.

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Malgré l'omniprésence de l'électronique, Ducati est parvenu à garder le poste de pilotage relativement dégagé.

La Sport se reconnaît à son nez et une foule de pièces en fibres de carbone, mais j’imagine mal quelqu’un choisir la Sport au détriment de la Touring. Cette dernière fait l’impasse sur les pièces exotiques au profit de valises de 58 litres de capacité, de poignées chauffantes et d’une béquille centrale. Tous les modèles disposent de deux prises de courant accessoires et du DTC. L’ABS est offert de série sur la S et est proposé en option (à 1 000 $) sur le modèle de base.

Ce dernier utilise une fourche inversée Marzocchi à tubes plongeurs de 50 mm de diamètre et un amortisseur Sachs entièrement ajustables. Les S sont équipées de suspensions Öhlins ajustables électroniquement.

La position de conduite est détendue et droite, avec les repose-pieds placés directement dans l’axe de vos hanches, amplement de dégagement pour les jambes et un large guidon tubulaire facile offrant un bon effet de levier. La première fois que je me suis assis sur la Multistrada, mon corps est resté surpris. Instinctivement, je m’attendais à souffrir le martyre — crampes aux bras, douleurs aux poignets et dans le cou ou fessier endolori. En réalité, rien de tout ça ne se produisit tellement la Multistrada est confortable, autant que n’importe qu’elle routière sportive ou GT que j’ai eu l’occasion de conduire. Une révélation!

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Sur les routes secondaires sinueuses, la Ducati est un vrai charme à conduire à la limite.

La selle en deux sections est plate et large, tandis que la section passager (qui abrite un espace de rangement de trois litres) est complétée par des poignées latérales de maintien qui le garde en place lorsque la moto accélère soudainement. La selle culmine à 850 mm, ce qui est relativement élevé pour la moyenne des pilotes, et un siège plus bas de 25 mm est offert en option.

Le carénage solidaire du cadre possède un pare-brise ajustable à la main sur une distance de 60 mm en hauteur. Il se bloque en position grâce à deux boutons de réglage faciles d’accès à l’aide de la main gauche. Le carénage offre une bonne protection contre les éléments, particulièrement le vent, et dirige le flot d’air au niveau des épaules. Les mains restent abritées derrière les protège-mains qui incluent également des clignotants à diodes électroluminescents. Placés au-dessus du guidon, les rétroviseurs sont tout à fait utilisables, ce qui est une nouveauté sur une Ducati.

Nous avons débuté notre balade en mode Touring, dans lequel les suspensions étaient réglées pour un confort maximal et l’antipatinage sur le cinquième des huit ajustements.

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Bien qu'elle ne soit pas une vraie moto de hors route, la Ducati se défend sur
les chemins de gravier compactés.

Une fois en mouvement, j’ai connu la deuxième révélation de ce lancement. La suspension de la Multistrada est moelleuse, efficace et totalement surprenante pour une Ducati. Bien que les routes de Lanzarote soient parfaitement pavées, nous avons néanmoins rencontré des sections d’asphalte défoncées typiques du Québec. Dans cet environnement familier, la Strada m’a estomaqué, avalant les trous et les bosses sans sourciller. Au point où je me suis demandé si j’étais bien au guidon d’une moto de Bologne.

Même si la suspension était en mode Touring, la moto négociait les grands virages rapides avec assurance, sans bouger d’un poil. La route sinueuse qui traverse le décor de lave solidifiée du Parc national Timanfaya offrait un beau défi à la Ducati dont le comportement était solide, avec une direction neutre et une stabilité à toute épreuve.

À 217 kg à sec, la Multistrada pèse 12 kg de moins que la BMW R 1200 GS et 11 kg de moins que la Triumph Tiger. Grâce à son poids placé bas et à l’étroitesse de sa section médiane, elle donne l’impression d’être encore plus légère que ça.

Alors que nous nous dirigions vers le nord, par la route panoramique de Lanzarote, dans un décor surréel sculpté par les volcans, je suis passé en mode Sport et j’ai immédiatement senti le surplus de puissance du moteur et de fermeté des suspensions. La machine sortait des virages avec la puissance d’un Superbike. Et suffisamment de couple à mi-régime pour envoyer la roue avant dans les airs d’un coup d’accélérateur. La poussée se fait sentir dès 2 500 tr/min et se poursuit progressivement jusqu’à la zone rouge qui débute à 10 500 tr/min. La livrée de puissance est douce, solide et abondante — très abondante même.

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Pause repas dans un restaurant de poissons et de crustacés de Lanzarote.

La suspension affermie du mode Sport transforme la Multistrada en une moto sportive au comportement affûté dont l’agilité est similaire à celle d’un roadster. La seule chose qui distingue cette machine d’une sportive dénudée est sa haute taille qui résulte du débattement important des suspensions (170 mm). Cette stature ralentit la moto dans les virages serrés et la fait plonger exagérément lors de freinages appuyés — un compromis réalisé au profit du confort.

Pour mettre les choses au clair, la Multistrada n’est pas une moto de hors route et avec sa roue avant de 17 pouces, elle ne sera pas aussi à l’aise en sentiers que certaines autres motos double-usage. Quiconque rêve d’excursions hors route, dans des sentiers étroits et techniques devrait considérer une autre monture. Même si elle peut se tirer d’affaire sur des chemins de gravier tassés, c’est sur le bitume qu’elle s’exprime pleinement.

Nous avons terminé la journée sur un chemin de terre battue où le mode Enduro s’est révélé parfait. La suspension absorbait parfaitement les bosses et, avec les pneus d’origine Pirelli Scorpion Trail – un pneu bigomme double-usage – la moto affichait la même facilité de conduite et la même précision que sur route. Le DTC était réglé au deuxième degré, afin de ne pas nuire à la conduite, mais si vous voulez faire des travers d’anthologie, vous pouvez le désactiver, tout comme l’ABS. Dans ce mode, la puissance est limitée à 100 ch, cependant, elle est suffisante pour se mettre dans le trouble — et là, je parle par expérience (je vous invite à lire l’encadré « Cascade à Lanzarote »).

Comparer la Multistrada à d’autres motos est une tâche délicate, car Ducati a établi de nouveaux standards en ce qui a trait à la polyvalence. Grâce à l’électronique. Avec sa suspension ajustable dans tous les sens et son moteur hautement configurable, la Multistrada peut s’adapter à toutes les conditions de conduite. Elle fait autant tourner les têtes que la nouvelle VFR, la GS ou bien la Streetfighter. Elle est indéniablement classée comme une moto de luxe, donc ceux qui cherchent une moto dans la gamme de prix d’une Suzuki V-Strom seront déçus. En raison de sa roue avant de 17 pouces, elle se montre plus sportive que ses consœurs aventurières, bien qu’elle ne rechigne pas à aller salir ses pneus dans les sentiers. Qui ne manquent pas ici.

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À plus de 20 000 $ le bout, ça fait cher la balade. Mais le prix serait justifié selon Costa.

Si je devais choisir entre les trois modèles proposés, j’opterais pour la Multistrada 1200S Touring — il faut vraiment faire l’expérience des différents modes de conduite (qui incluent les ajustements de suspension) pour apprécier la grande flexibilité de cette moto — et j’ôterais ses valises pour me retrouver aux commandes d’une Sport, donc plus agile et agressive. Je n’aurais aucune difficulté à traverser le pays avec mon équipement de camping, en dévorant les routes secondaires sinueuses, en jouant les hooligans en ville, en participant à une journée d’essai libre pour finir par une excursion hors route. Tout ça avec la même moto, et durant le même voyage.

Le seul reproche que j’adresserais à Ducati est de ne pas avoir doté la Multistrada de commandes réglables (guidon, repose-pieds et selle). Même si la moto me convient parfaitement (je mesure 1,80 m et je pèse 95 kg), je suis persuadé que des pilotes de morphologie différentes aimeraient pouvoir la personnaliser.

Ducati a énormément investi dans cette moto, la soumettant à un programme d’essai intensif de deux ans, avant sa sortie (110 modèles de pré-production ont été construits pour ces évaluations, alors que la norme est de 80 unités) et a incorporé toutes les aides au pilotage imaginables dans une même moto. Et je dois reconnaître que ce travail a porté fruit.


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