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5380 km en Honda Africa Twin 1100 Adventure Sports DCT

Photos : Didier Constant, Patrick Laurin, François Pacou, Izoard Photo, Tam Tam Photo, Griffe Photos, Honda, RST

À l’occasion de ce périple, j’ai suivi un itinéraire qui fait la part belle au réseau routier français, lequel est très varié et plutôt sinueux. J’ai accumulé environ 3 000 km de routes de montagne, 1 200 km de routes de campagne, 1 000 km d’autoroute, 150 km de sentiers et 30 km en ville. En trois semaines, j’ai négocié des milliers de virages, des centaines de lacets de montagne, des dizaines de cols mythiques et j’ai contemplé des panoramas à couper le souffle… tout simplement génial ! Un vrai voyage de rêve, l’un des plus beaux que j’ai fait ces dernières années.

Pour ceux qui ne le sauraient pas, l’Africa Twin et moi, nous partageons une longue histoire commune. Nous avons parcouru une bonne partie de l’Europe et l’Amérique du nord ensemble. Depuis son lancement canadien sur l’île de Vancouver en avril 2016, j’ai totalisé près de 20 000 kilomètres en Africa Twin, sans jamais en posséder une. Il faut dire que durant l’été 2017, j’ai réalisé un essai de 8500 km au guidon de deux modèles, un standard et un équipé de la boîte robotisée DCT à double embrayage. Ça aide à se sentir en terrain connu !

Vocation plus routière

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L’Adventure Sports adopte tous les attributs de la voyageuse au long cours moderne : look de baroudeuse, repose-pieds tout-terrain, tableau de bord révisé, accélérateur Ride-by-wire, trois modes de conduite, antipatinage à sept niveaux, nouveau design d’échappement et batterie lithium-ion. Dans la mutation, son équipement s’hummérise et comprend des protections tubulaires d’allure virile (en option) et un sabot moteur en alu. La carrosserie a également été renforcée afin de résister aux morsures de la piste. La Honda adopte un réservoir de 24,8 litres, une bulle haute réglable, des jantes tubeless, une suspension à grand débattement (230 mm à l’avant et 220 mm à l’arrière) et un porte-paquet en aluminium. Sans oublier, une prise 12 V, une prise USB et des poignées chauffantes de série. Difficile de faire mieux !

De plus, la selle est davantage rembourrée et son assise culmine à 850 mm (position haute à 870 mm) — les petits gabarits en seront pour leurs frais. Le guidon a été rehaussé pour être plus facilement atteignable en position debout.

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L’éclairage double optique à DEL inclut des « feux de virages » qui éclairent l’intérieur de la courbe quand on prend de l’angle. Vraiment pratique la nuit.

L’Africa Twin perd 5 kilos. La version Adventure Sports DCT fait quant à elle osciller la balance à 253 kg tous pleins faits. Sans les bagages optionnels.

Moteur volontaire

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La Honda est propulsée par un nouveau bicylindre en ligne de 1100 cc calé à 270°, conforme aux normes Euro5. Il développe une puissance somme toute modeste de 101 ch pour un couple de 78 lb-pi, soit une hausse respective de 7 % et 6 %. L’augmentation de cylindrée (1 084 cc au lieu de 998 cc) résulte d’un allongement de la course de 75,1 à 81,5 mm, l’alésage étant inchangé à 92 mm.

Mais le bicylindre a été remanié pour parvenir à ces chiffres : culasse redessinée, corps d’injection plus larges, nouvelles cartographies d’injection, calage de distribution revue, valve disposée dans le collecteur d’échappement pour des performances en hausse.

L’Africa Twin Adventure Sports reçoit par ailleurs une boîte à air optimisée qui améliore la réponse à mi-régimes et un arbre d’équilibrage plus léger.

 Partie cycle optimisée

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Ce moteur revu et corrigé est logé dans un nouveau cadre plus léger de 1,8 kg avec une boucle arrière en aluminium boulonnée, à l’inverse de l’ancien modèle dont la boucle en acier était soudée. Le nouveau bras oscillant en aluminium est inspiré de celui de la CRF450R de cross et est plus léger. Il assure une motricité accrue. Par ailleurs, il distille de meilleures sensations au pilote.

La géométrie de direction est inchangée (chasse de 27°, déport de 113 mm), tout comme l’empattement (1 575 mm). Freinage et roues demeurent identiques au précédent millésime. La garde au sol plafonne à 250 mm, ce qui permet à la Honda de conserver ses prétentions en tout-terrain.

Mon modèle d’essai dispose de suspensions Showa à ajustement manuel qui se composent d’une fourche inversée de 45 mm de diamètre, entièrement réglable et d’un monoamortisseur Pro-Link à réservoir séparé, réglable en précontrainte et détente. L’Adventure Sports peut être équipée en option de suspensions électroniques Showa EERA (Electronically Equipped Ride Adjustement) réglables selon quatre modes par défaut (Soft, Mid, Hard et Off-Road), mais aussi par le biais d’un mode « User » paramétrable.

Électronique revisitée

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Au niveau de l’électronique, Honda a peaufiné son aventurière : le fonctionnement du contrôle de couple, du freinage ABS en virage, du cabrage et du délestage sont gérés par une centrale inertielle IMU Bosch MM7.10 à 6 axes. L’Africa Twin dispose désormais de six modes de conduite — quatre prédéfinis (Urban, Touring, Off-Road, Gravel) et deux paramétrables (User 1 et User 2) —, permettant d’intervenir sur les différents réglages indépendamment. Le régulateur de vitesse fait partie de l’équipement de série. Le nouveau tableau de bord à écran TFT tactile de 6,5 pouces avec connectivité Bluetooth et fonction Apple CarPlay est désormais offert en standard. Sa luminosité s’adapte en fonction de l’éclairage extérieur.

 Encore plus rallye

Afin de renforcer son positionnement sur le marché et se mesurer aux BMW et KTM, Honda a optimisé l’allure tout-terrain de l’Africa Twin Adventure Sports : bulle haute pour une meilleure protection, guidon relevé pour un meilleur contrôle de la machine, particulièrement en hors route, hauteur de selle réglable de 850 à 870 mm, largeur de selle réduite de 40 mm pour bien poser les pieds au sol… Honda n’a rien négligé.

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En route !

Jeudi 3 septembre, 10 heures du matin. J’arrive enfin au siège social de Honda France, en banlieue parisienne, après un vol court, facile et confortable, grâce au COVID. L’avion était aux deux tiers vide, tout comme l’aéroport et les formalités douanières ont été d’une facilité et d’une rapidité déconcertantes.

Dehors, le soleil est rendez-vous et le mercure indique 23 °C. L’Africa Twin 1100 Adventure Sports DCT m’attend sagement. Elle a fière allure avec son ensemble de bagages en alu. Une vraie aventurière ! Dans sa robe tricolore bleue/blanc/rouge qui rappelle le coloris de la Honda XRV650 originale, victorieuse au Paris-Dakar, elle est tout simplement sublime !

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En voyage, je n’aime pas intervenir sans cesse sur les réglages de ma machine. L’arsenal électronique de l’Africa Twin est pléthorique, certes, mais les paramètres de réglage sont tellement nombreux qu’on peut facilement s’y perdre. De plus, l’électronique est loin d’être intuitive. Elle est même plutôt déroutante. Malgré l’écran tactile de la Honda, son interface est la plus compliquée que j’ai utilisée à ce jour. Il suffit d’observer la multitude de boutons et commutateurs présents sur le commodo gauche pour se rendre compte de la complexité de réglage des menus.

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Je choisis d’ajuster l’Africa Twin en mode « User 1 » en configurant les paramètres avec soin (ABS actif, puissance maxi, frein moteur et antipatinage médians et antiwheelie minimal). Je peaufine ensuite les réglages de la suspension en fonction de la charge que je transporte. Une fois que la moto est à mon goût, je prends la route pour Orléans où je vais passer deux jours en famille. Je ne toucherais plus aux réglages du voyage, sauf les rares fois où je devrais emprunter des chemins non pavés, auquel cas j’opterais pour le mode « Off-Road ».

Pour ce qui est de la boîte DCT, j’utilise principalement le mode « S1 », plus sportif et je force le passage des rapports manuellement quand les conditions le justifient.

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Dès que j’enfourche l’Africa Twin, je me retrouve en terrain connu. La moto est haute et fine, son poids haut perché. Cette étroitesse incite à se faufiler dans la circulation parisienne — puisque c’est permis, j’en profite —, mais il faut prendre garde à la largeur des valises que l’on a tendance à oublier. Le pare-brise est réglé en position haute, mais les turbulences et le bruit qu’il génère sont trop importants. Je m’arrête sur le bas-côté de la route après quelques centaines de mètres et je le mets en position basse. C’est tout de suite plus efficace et agréable. Sans être parfait pour autant.

Régulateur de vitesse calé sur 140 km/h, j’avale les 120 km d’autoroute me séparant de ma destination en mode zombie. Mon esprit vagabonde — ça doit être la fatigue du voyage — tandis que je contemple le paysage familier et monotone. Les champs de blé de la Beauce défilent au ralenti. Même les éoliennes implantées en bordure d’autoroute entre Allainville, et Artenay semblent arrêtées. En fait, une sur deux l’est.

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Grâce à la prise USB incluse dans le côté droit du cockpit et à mon support de téléphone SP Connect, mon iPhone s’installe facilement, à portée du regard et s’active automatiquement via la fonction Apple CarPlay ce qui me permet d’afficher Waze sur l’écran de la moto, afin d’éviter les aléas de la route.

Le gros bicylindre ronronne comme un gros chat couché sur le canapé du salon. Aucune vibration, aucun bruit mécanique suspect ou inattendu. En plus, le silence qui règne sur l’autoroute déserte est saisissant.

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Tout serait parfait si la selle ne se révélait pas si ferme. J’ai parcouru à peine 100 km et j’ai déjà mal au cul. Et il m’en reste encore plus de 5 200 à faire. Ce n’est pas gagné !

J’arrive enfin à Orléans. Un peu décalqué par le voyage et le décalage horaire. Je dépose mes bagages à l’hôtel et je vais rendre visite à mon neveu qui est chez ma sœur, où une partie de mon équipement m’attend, dont mon casque Bell MX-9 Adventure, mon ensemble RST Pro Series Adventure-X et mes bottes Forma Air 3 OutDry que je laisse en France le reste de l’année. Ça me permet de voyager léger.

L'Africa Twin Adventure Sports sur les rives de la Loire, à Orléans

L’Africa Twin Adventure Sports sur les rives de la Loire, à Orléans

Là, j’ai l’occasion de me balader en ville et de découvrir une autre facette du caractère de la Honda. Débarrassée de ses bagages, elle est plus légère — mais aussi plus haute de selle — et très fine. Elle se faufile dans la circulation urbaine avec facilité, grâce à ses roues fines qui favorisent l’agilité. Elle est stable, relativement maniable malgré son poids élevé et son empattement long. Son rayon de braquage important la handicape dans les manœuvres serrées et lors des demi-tours.

Le moteur est souple — il reprend sans broncher dès 1 500 tr/min —, mais aussi coupleux et suffisamment puissant pour s’extraire du trafic d’une simple rotation de l’accélérateur. Avec la boîte DCT en mode « S1 », la moto rétrograde sans que le régime descende trop bas et que le moteur cogne.

La hauteur de selle est pénalisante en ville, où l’on doit s’arrêter souvent et poser le pied au sol fréquemment. Cependant, à la longue, je finis par m’y habituer.

Salut les frangins !

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Après deux jours d’acclimatation, je décide de rallier Dax, dans le sud-ouest de la France, pour rendre visite à quelques amis, au Pays basque, mais surtout à mes deux frères que je n’ai pas vus depuis deux ans. Trois jours de détente et de partage fraternel bienvenus.

J’opte pour le chemin le plus long et le plus intéressant, par les routes secondaires de la Sologne, du Berry, du Limousin, du Périgord et des Landes. 660 km de routes sinueuses et vallonnées qui traversent de magnifiques régions.

La moto est chargée à bloc. Les valises et le top case contiennent aisément mon barda que je transfère dans ma chambre le soir venu. Mes affaires sont réparties dans cinq grands sacs étanches. Précaution superflue étant donné que je bénéficierai de trois semaines de soleil et de températures oscillant entre 24 et 30 °C. Je n’affronterai la pluie qu’une dizaine d’heures au total, sur le chemin du retour. Mais ça, je ne le savais pas avant mon départ.

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Une fois la moto chargée et les suspensions réglées, la hauteur de selle s’affaisse légèrement et je peux alors poser les pieds au sol plus facilement. À aucun moment durant ce périple je n’éprouverai de problème avec le maniement de la Honda, pas même lors de manœuvres à basse vitesse, malgré son gabarit imposant et sa lourde charge.

Au fil des kilomètres, mon postérieur se tanne et l’inconfort de la selle s’estompe. À l’occasion de ce voyage, j’ai complété trois grosses journées de roulage (680 km, 1 000 km, 945 km) sans souffrir outre mesure. Moins en tout cas que mon ami Patrick qui m’accompagne sur sa Kawasaki Z750S 2005.

Le confort de la Honda est correct et la protection offerte par le carénage adéquate. On est assis haut, on voit loin, la position de conduite est détendue. Parfait pour rouler longtemps.

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Entre Limoges et Mont-de-Marsan, via Périgueux et Bergerac, la route serpente, virevolte dans un décor accidenté. Le bitume est impeccable et, grâce à Waze, je peux rouler à un bon rythme. Les suspensions sont bien réglées et font admirablement leur boulot. Dans cet environnement, la partie cycle est intègre et permet d’attaquer à loisir. La fourche plonge un peu, mais c’est typique des aventurières à grand débattement. Rien d’anormal donc. L’Africa twin est stable, tient bien le cap et passe d’un virage à l’autre avec une relative aisance. Une roue avant de 19 pouces chaussée de pneus plus orientés route lui procureraient une vivacité plus grande et une agilité accrue, tout en renforçant la confiance du pilote dans le train avant. Mais, dans les circonstances, c’est bien et je peux imprimer un rythme enthousiaste à la balade. Le freinage, quant à lui, est puissant et endurant.

Le moteur n’est pas en reste. Malgré ses modestes 101 ch et son couple de 78 lb-pi, le twin vertical est vivant. Il offre suffisamment de caractère pour s’amuser et assez de puissance pour avaler les routes rapides sans problème. Il est coupleux, linéaire et tire franchement entre 4 000 et 8 000 tr/min. Relativement souple, il se réveille à 1 500 tr/min (en bas de ce régime, il a tendance à brouter sur les rapports intermédiaires et supérieurs). Il offre de bonnes reprises sur toute la bande de puissance. La sonorité de l’échappement est vraiment agréable, particulièrement lors des montées en régime. Riche, sec, avec des pétarades sensuelles au rétrogradage.

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Quand j’arrive à Dax, en soirée, au terme d’une journée de neuf heures de route, je suis en bonne forme. Assez pour aller souper chez mon frère Marc qui habite à 500 m à peine de l’hôtel où je réside. Une soirée magique entre frangins — Gilles nous y rejoint à l’apéro — qui me permet de faire connaissance avec Séverine, la nouvelle compagne de Marc.

À l’assaut des chemins escarpés des Pyrénées

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Le lendemain, mes frères sont au travail. Je saisis l’occasion pour aller vadrouiller au Pays basque par des routes que je connais sur le bout des pneus, question de me dégourdir les jantes. Une escapade sportive qui part de Dax pour rejoindre Peyrehorade, Salies-de-Béarn, Saint-Palais et Saint-Jean-Pied-de-Port — halte incontournable sur la route du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle — où j’arrête pour le déjeuner. Après m’être rempli la panse, je passe côté espagnol, par la N-121 pour rallier Saint-Sébastien, sur la cote basque espagnole, à une vingtaine de kilomètres au sud de Saint-Jean-de-Luz que je rejoins par la route de la Corniche. Cette route qui longe le littoral basque entre le bleu de la mer Cantabrique et le vert luxuriant des montagnes offre des points de vue uniques (Hondarribia, Hendaye, Ciboure, Bidart, Biarritz). Avec ses hautes falaises découpées, ses criques, ses landes à bruyères, ses bosquets, ses espaces agricoles, la corniche offre un vaste domaine naturel préservé sur la côte basque française. Après une halte à Saint-Jean-de-Luz où je joue aux touristes, je poursuis mon chemin jusqu’à Biarritz et enfin Dax où j’arrive en fin d’après-midi.

Le deuxième jour de mon escapade landaise, j’ai rendez-vous avec mon ami François qui habite Ahetze, un village pittoresque et charmant situé à quelques kilomètres de la côte basque, à l’intérieur des terres. Nous sommes rejoints au café par Pierry, un de ses amis qui organise des voyages dans l’Himalaya, au guidon de Royal-Enfield.

Un moment d'éternité sur les routes Pyrénéennes avec Pierry et François

Un moment d’éternité sur les routes Pyrénéennes avec Pierry et François

Pour l’occasion, Pierry nous a concocté un itinéraire passant par Saint-Pée-sur-Nivelle, Espelette puis Dantxainea, en Espagne. De là, nous poursuivons notre chemin vers Erratzu et le col d’Ispéguy (672 m d’altitude) par la NA-2600, une route de montagne très sinueuse du Pays basque espagnol, pour finalement rejoindre Saint-Étienne-de-Baïgorry où nous arrêtons déjeuner.

Après un délicieux repas basque, notre guide décide d’errer des deux côtés de la frontière par les sentes étroites et les chemins de bergers. Une escapade hors route d’une petite centaine de kilomètres qui traverse des panoramas de rêve, au sommet des Pyrénées. Un moment magique !

En em^pruntant les sentiers de bergers, nous avons découverts la magnifiques panoramas des Pyrénées

En empruntant les sentiers de bergers, nous avons découvert les magnifiques panoramas des Pyrénées

Dans ces sentiers étroits, secs et rocailleux, la Honda est dans un environnement qui correspond théoriquement à sa vocation première. Cependant, elle est handicapée par son poids élevé, par ses pneus mixtes Metzeler Karoo Street au profil trop routier et par sa boîte DCT. Elle manque de grip sur les cailloux et elle est difficile à emmener dans les sections techniques, à basse vitesse. Pour négocier ces chemins avec aplomb, il faut avoir un bon niveau en TT, ce qui n’est pas mon cas. Je suis plus à l’aise dans les parties plus roulantes, debout sur le repose-pieds et sur sol compacté. Dans ces conditions, la Honda est stable et ne se désunit pas. Rigoureuse, elle permet d’accéder à des panoramas autrement hors de portée de nos yeux.

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Notre escapade tout-terrain prend fin sur la route départementale D933, au sud de Saint-Jean-Pied-de-Port d’où je rentre à Dax en passant par Bayonne. Là, j’emprunte l’autoroute pour une cinquantaine de kilomètres afin de rejoindre la famille pour le souper. Même si je n’ai jamais vécu dans la région, je m’y sens chez moi. C’est un coin étonnant, délimité par l’Atlantique et les Pyrénées, où il fait bon vivre. En plus, on y bouffe bien.

Direction les Alpes

Toute bonne chose a une fin et je dois quitter Dax après trois magnifiques, mais trop brèves journées pour rallier Bourg-Saint-Maurice, en Savoie. Un trajet d’environ 1 000 km que je dois faire dans la journée. Dans cette bourgade accueillante, au pied de l’Aiguille des Glaciers (3 816 m) et de l’Aiguille rouge (3 226 m), j’ai réservé un superbe hôtel pour trois nuits, afin de découvrir la région. Au menu, Mont-Blanc, barrage de Roselend, Vallée de la Tarentaise, Vallée de la Maurienne, Trois Vallées, Parc de la Vanoise, Tignes, Val d’Isère, sans oublier les cols de l’Iseran (2 764 m), du Petit-Saint-Bernard (2188 m) et le Cormet de Roselend (1 967 m).

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Vue sur le lac et le barrage de Roselend

La Savoie est féérique, et pas seulement pour les motards. Si, comme moi, vous êtes un skieur invétéré, vous la trouverez sublime en toute saison. Un vrai ravissement. Ses routes sont sinueuses, élevées, bien entretenues, et ses cols sont parmi les plus hauts d’Europe. Ils offrent une vue panoramique sur les Alpes françaises, mais aussi italiennes et suisses.

Dans cet environnement idyllique, l’Africa Twin est aux nues. Elle est efficace dans les sorties sportives, pour une aventurière, aussi bien sur les routes qui mènent aux stations de ski de la région (Les Arcs, Méribel, Courchevel, Les Menuires, Val Thorens, Tignes, Val d’Isère) que sur celles de la vallée, entre Alberville et Bourg-Saint-Maurice. Là, sa tenue de route impériale, la rigueur de son train avant et la pêche de son moteur lui permettent de briller. À l’accélération, elle impressionne par la vigueur de son moteur entre 4 000 et 6 500 tr/min. C’est en effet à mi-régimes qu’elle se révèle. La sonorité de l’échappement est envoûtante. Ses pétarades enchantent quand on coupe les gaz ou qu’on rétrograde. Et son freinage efficace permet d’attaquer les descentes en toute confiance. À la façon d’un descendeur du Tour de France.

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Dans la montée pour le col d’izoard

Dans les cols, elle se démarque par la souplesse de son moteur et sa maniabilité. Il suffit alors de passer les vitesses manuellement, à l’aide des palettes, pour être sur le bon régime en tout temps, sans laisser la machine prendre la main. En fait, si la boîte DCT est efficace dans 95 % des situations que l’on rencontre au quotidien, là, elle montre ses limites. Dans les lacets de montagne serrés que l’on négocie en première, très lentement ou lors de manœuvres à basse vitesse, sur des terrains où la motricité n’est pas optimale, la gestion de la traction réclame du doigté. Dans ces situations où l’on a habituellement recours à l’embrayage et au frein arrière pour gérer l’équilibre et l’adhérence, le DCT est parfois dépassé. En effet, quand le moteur n’est pas en charge, la transmission se désengage brièvement, créant une instabilité pouvant mener à la chute.

Sinon, lors de cet essai, j’ai pu mesurer les progrès accomplis par le DCT depuis l’avènement des centrales inertielles IMU à six axes qui prennent en compte l’inclinaison de la moto. En 10 ans, le système s’est énormément raffiné. Il est génial pour les personnes que les transmissions mécaniques classiques rebutent ou qui ne peuvent pas les utiliser en raison de divers problèmes, parfois physiques. En plus, le système DCT est intelligent. Il analyse et mémorise la conduite du pilote et s’y adapte en permanence, modifiant le comportement des divers modes automatiques en fonction de celui-ci.

Avec Pascal, lui aussi en Africa Twin, au col d'Izoard

Avec Pascal, lui aussi en Africa Twin, au col d’Izoard

Après la Savoie, je me dirige dans les Alpes du Sud où j’ai réservé un luxueux chalet à Pra-Loup, à côté de Barcelonnette, pour la semaine. Je profite de mon séjour dans ce coin paradisiaque pour inviter quelques amis motards — Olivier, Christophe et Pascal — à venir rouler avec moi. Ensemble, nous écumons les magnifiques routes de la région et les nombreux cols de l’Ubaye — la Bonette (2 802 m), la Cayolle (2 326 m), Allos (2 250 m), Vars (2 109 m), Larche (1 991 m), Pontis (1 301 m) — ainsi que ceux du Briançonnais, plus au nord — Galibier (2 642 m), Izoard (2 360 m), Mont Cenis (2 083 m), Lautaret (2 057 m), Montgenèvre (1 850 m).

Là encore, l’Africa Twin 1100 Adventure Sports DCT me surprend par son efficacité et sa polyvalence. Sans être parfaite partout, elle se tire très bien d’affaire dans tous les domaines, soit sur routes sinueuses, sur routes de montage, sur voies rapides ou en hors route facile.

De plus, avec sa consommation raisonnable de 5,5 L/100 , la Honda procure une autonomie moyenne de 450 km, ce qui évite de faire le plein à tout bout de champ et vous donne accès à des endroits reculés où les stations d’essence sont souvent rares.

Avec Olivier et sa Moto Guzzi  V7 Stone

Avec Olivier et sa Moto Guzzi V7 Stone

En résumé

Aujourd’hui, les motos de type aventure dominent le hit-parade des ventes en nous faisant la promesse qu’elles peuvent nous faire traverser les déserts, défricher des sentiers dans la jungle équatoriale et grimper les montagnes les plus escarpées — tout cela malgré le fait que nous soyons de parfaits poireaux en hors route et que nous n’ayons même jamais roulé dans un chemin de gravier de notre vie. Dans le cas de la Honda Africa Twin 1100 Adventure Sports DCT, elle crée l’illusion grâce à son énorme pouvoir d’évocation. L’esprit Dakar est là, bien vivant. À son guidon, on se prend pour un aventurier et on est prêt à traverser l’Afrique en solitaire, sans assistance. Tout ça, c’est dans nos rêves, bien sûr !

Réponse de Honda aux BMW R1200GS et autres KTM 1290 Adventure, la Honda Africa Twin Adventure Sports est prête à se mesurer aux meilleures aventurières du marché.

Avec Christophe au col de la Cayolle

Avec Christophe au col de la Cayolle

Selon moi, Honda aurait tout à gagner à renforcer davantage son positionnement routier. Il suffirait d’abaisser un peu sa hauteur d’assise pour la rendre accessible à un plus large éventail de pilotes, de lui offrir une selle plus confortable et de la doter d’une roue avant de 19 pouces chaussée de gommes routières (l’Africa Twin 1100 de base est parfaite pour les enduristes qui veulent absolument une roue de 21 pouces). Ainsi transformée, la Honda pourrait faire jeu égal avec la GS, d’autant que son prix (20 999 $ en version DCT) est inférieur à équipement égal. De plus, sa finition, son électronique et sa partie cycle n’ont rien à envier à celles de la BMW.

Durant ce périple de rêve, la Honda Africa Twin 1100 Adventure Sports DCT s’est révélée être une excellente compagne d’aventure. Attachante, polyvalente et performante. Et plus je passais de temps à son guidon, plus je l’appréciais. Au point d’avoir du mal à m’en séparer. Ne vous étonnez donc pas si je la recommande chaudement…

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FICHE TECHNIQUE

20YM Africa Twin Adventure Sports Tricolor

INFORMATIONS GÉNÉRALES

  • Poids tous pleins faits (ABS/DCT) : 250 kg
  • Hauteur de selle : 850 à 870 mm
  • Capacité essence : 24,8 litres
  • Consommation : 5,50 L/100 km
  • Autonomie : 450 km
  • Durée de l’essai : 5 380 km
  • Prix : 19 999 $ (Noir métallique) — 20 999 $ (Tricolore) sans bagages

MOTEUR

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  • Bicylindre en ligne Unicam à 270°, 8 soupapes, refroidissement liquide
  • Cylindrée : 1 084 cc
  • Alésage x course : 92,0 mm x 81,5 mm
  • Puissance : 100 ch à 7 500 tr/min
  • Couple : 78 lb-pi à 6 250 tr/min
  • Rapport volumétrique : 10,1:1
  • Alimentation : Injection électronique PGM-FI ; corps de papillon de 46 mm
  • Transmission : Boîte robotisée DCT à 6 rapports avec quatre modes route et TT
  • Entraînement : par chaîne

PARTIE CYCLE

20YM Africa Twin Adventure Sports Tricolor

  • Cadre double berceau acier
  • Suspension : Fourche inversée Showa de 45 mm de ø entièrement réglable. Débattement : 230 mm. Monoamortisseur Showa Pro-Link à réservoir séparé réglable en précontrainte et détente. Débattement : 220 mm. Système EERA (Electronically Equipped Ride Adjustement) offert en option.
  • Empattement : 1 575 mm
  • Chasse x déport : 27,50° x 113 mm
  • Freins : double disque avant de 310 mm étriers 4 pistons, simple disque arrière de 256 mm étrier un piston. ABS deux canaux débrayable sur la roue arrière. Modes route et hors route.
  • Jantes à rayons en aluminium, type tubeless
  • Pneus : Metzeler Karoo Street
    Av. 90/90-R21
    Ar. 150/70-18

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VERDICT RAPIDE

ON AIME BIEN

  • Le moteur
  • La partie cycle affûtée
  • La qualité des suspensions
  • L’ensemble de bagages de qualité
  • L’efficacité de l’électronique
  • Les jantes tubeless

ON AIME MOINS

  • Le poids élevé
  • La selle dure
  • La hauteur de selle importante
  • La complexité de réglage de l’électronique
  • La bulle de carénage perfectible

Équipement du pilote

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Galerie

2 réponses à “Essai longue durée”

  1. Patrick L

    Un de mes plus beaux voyages moi aussi l’ami !

    L’Africa Twin est bien, surtout pour narguer les amis en leur envoyant la mains droite (j’ai un cruise control), lors de longues distances sur l’autoroute… Ah, ah, ah !

    C’est une bonne moto pour les plus grands que moi. De mon côté j’ai pris un malin plaisir à te voir rusher dans les manœuvres à l’arrêt où très serrer à la station d’essence.. Hi, hi, hi !

    En tout cas tout un beau voyage.
    Et note que je n’ai jamais eu besoin d’aide pour déplacer ma petite moto… Lol !

    À refaire l’an prochain !

    Pat

    Répondre
  2. Dominique

    Bonjour,

    J’ai finalement franchi le pas cette année avec la version Adventure Sport manuelle et n quick shifter. 🙂

    Côté confort de selle, je vous rejoins! Avez-vous essayé avec le « Tall » siege?
    Je me demande si cela peut améliorer le confort. Je dois faire 10 000kms cet été!

    Mais pour le reste… toute une machine.

    Dom

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