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Le petit roadster germano-indien fait son cinéma

Photos : Didier Constant, Kevin Wing, Jon Beck, Jörg Künstle, Markus Jahn, BMW Motorrad

Comme au ciné

Décor : les collines d’Hollywood par une belle matinée ensoleillée de décembre.

La température est fraîche, mais agréable. Je roule en direction ouest, sur Mulholland Drive, route bien connue des cinéphiles. Dans mes rétros, le panneau HOLLYWOOD qui surplombe la ville depuis le mont Lee éblouit la Cité des Anges de sa blancheur glamour. C’est magique ! Un vrai paysage de carte postale.

Au-dessus de notre tête, un hélicoptère du LAPD (Los Angeles Police Department) décrit des cercles concentriques dans un bourdonnement assourdissant, comme dans un mauvais polar, présence pesante, anxiogène même que l’on subit jour et nuit où que l’on soit dans la ville.

Dans un tel décor, des images de films ayant Los Angeles comme personnage principal se mélangent. Mulholland Drive de David Lynch, Chinatown de Roman Polanski, Sunset Boulevard de Billy Wilder, L.A. Confidential de Curtis Hanson, The Big Sleep de Howard Hawk ou Mulholland Falls de Lee Tamahori pour n’en citer que quelques-uns.

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À l’assaut des canyons

Notre ouvreur, un ancien policier à moto, nous guide dans le trafic intense, une tâche à la hauteur de la démesure de la mégapole californienne qui abrite une population de plus de 18 millions d’habitants. Se déplacer dans la grande agglomération de Los Angeles est un véritable casse-tête. Même si la circulation interfile est légale en Californie (c’est le seul endroit en Amérique du Nord où elle le soit), notre guide hésite à se faufiler. Nous devons lui tordre le bras pour qu’il s’exécute quoique timidement. Pourtant la G310R est experte dans l’art de slalomer entre les autos. C’est même un exercice dans lequel elle excelle grâce à sa grande agilité et à sa maniabilité bluffante.

Après de longues minutes à zigzaguer dans cette marée automobile, nous empruntons l’autoroute pendant une dizaine de kilomètres afin de rejoindre Woodland Hills. Dans cet environnement pour lequel elle n’a pas été spécifiquement conçue, la G310R se débrouille plutôt bien. À 7 000 tr/min sur le dernier rapport, elle maintient une vitesse de 110 km/h et peut cruiser entre 120 et 140 km/h sans forcer. Son monocylindre incliné vers l’arrière dont la culasse est tournée à 180 degrés (le système d’admission est localisé à l’avant) vibre passablement au-delà de ce régime. Notable mais pas rédhibitoire. On ressent les vibrations surtout à la jonction du réservoir et de la selle, moins dans les repose-pieds ou le guidon. L’arbre d’équilibrage qui tourne devant le vilebrequin fait quand même bien son boulot.

Malgré sa protection minimale, le roadster BMW est agréable à piloter sur les voies rapides, confortable presque. Il faut dire qu’on ne roule pas assez vite pour ressentir la pression de l’air. Ni les turbulences d’ailleurs. L’aérodynamique de la BMW est plutôt réussie. Et la selle basse qui culmine à 785 mm du sol se montre accueillante et confortable.

Puis nous quittons l’autoroute pour suivre Mulholland Highway, une route mythique créée en 1924 pour relier Los Angeles à la Route 1, en bordure du Pacifique, qui mène à San Francisco. Sinueuse à souhait, cette route serpente dans les collines et les canyons de Santa Monica, traversant le parc Malibu Creek. Là, la G310R s’exprime pleinement, bien servie par un moteur vivant, mais surtout par une partie cycle saine et vive. En plus de ressembler visuellement à la S1000R, la G310R partage avec elle le même héritage génétique et le même goût pour les escapades délinquantes.

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La BMW G310R en action sur le Mulholland Highway

La facilité au menu

Facile d’accès, grâce à selle basse et à son réservoir étroit au niveau des cuisses, le petit roadster BMW n’est pas intimidant. D’autant qu’il affiche un poids contenu. Il convient parfaitement aux petits gabarits et peut être équipé d’une selle basse (760 mm) ou confort (815 mm), selon vos préférences. La position de conduite est typique des roadsters — dos droit, bras légèrement tendus, jambes à peine fléchies — parfaitement adaptée aux pilotes de taille normale comme à ceux qui présentent un handicap vertical. Même les échalas arrivent à caser leur grande carcasse sur la BMW.

Le monocylindre vertical 4-temps de 313 cc possède une culasse à quatre soupapes et double arbre à cames en tête. Refroidi au liquide, il affiche un rapport volumétrique de 10,6:1 qui lui permet de fonctionner à l’essence ordinaire et d’être facilement utilisable dans la plupart des pays du monde. En termes de performances, il développe une puissance de 34 ch à 9 500 tr/min et un couple de 21 lb-pi à 7 500 tr/min. Comparativement à sa cousine indienne, la KTM Duke 390, c’est 10 chevaux et 5 lb-pi de couple de moins pour un poids en ordre de marche de 158,5 kg, supérieur de quelques kilos. Ces chiffres la placent au niveau de la Honda CB300F avec ses 30 ch à 8 500 tr/min et son couple de 20 lb-pi à 7 250 tr/min pour 157,8 kg tout pleins faits. Pourtant, le bloc BMW semble plus puissant que celui de la Honda et aussi vivant que celui de la KTM. L’accélérateur classique à câble procure un contrôle précis des gaz, exempt de trou ou d’hésitation. La puissance est délivrée de façon linéaire et douce à partir de 4 000 tr/min. Par la suite, le mono tire sans à-coups jusqu’à la zone rouge qui débute à 10 000 tr/min et se montre très joueur, bien secondé par un embrayage antidribble doux, précis et une boîte à six vitesses onctueuse qui accepte le passage des rapports à la volée.

Sur la G310R, pas d’électronique, pas de modes de conduite, pas de quickshifter. Que des solutions simples et éprouvées. Pourtant, à aucun moment durant cette balade très sportive je n’ai eu l’impression de manquer de jus. Il faut dire que la BMW possède une partie cycle affûtée qui s’articule autour d’un cadre treillis tubulaire en acier rigide à la géométrie joueuse (empattement court de 1 374 mm, chasse de 25,1 degrés, déport de 102,3 mm). La suspension est assurée par une fourche inversée Kayaba de 41 mm de diamètre, dépourvue de réglages et un monoamortisseur non ajustable relié directement à un long bras oscillant en aluminium qui contribue à sa stabilité.

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Le plaisir ne se mesure pas en centimètres cubes

Après une trentaine de kilomètres parcourus à une vitesse soutenue, nous arrivons au Rock Store, un ancien poste de diligence reconverti en station-essence situé à la sortie du village de Cornell. Ce bâtiment en roches volcaniques est le point de rendez-vous de centaines de motocyclistes, spécialement le week-end. Je profite de l’occasion pour faire une pause et avaler un café accompagné de quelques pâtisseries.

Lors de cet arrêt, je parviens à m’entretenir avec Edgar Heinrich, chef du département de design de BMW Motorrad qui a fait le voyage depuis Munich à la seule fin de nous accompagner. « Même si elle est fabriquée en Inde par TVS Motor Company, la G310R est conçue par BMW Motorrad, en Allemagne, avec le souci de la qualité et la rigueur qui font notre réputation. Il s’agit d’une moto très importante pour nous. À moyen terme, la G310R pourrait à elle seule totaliser autant de ventes sur le marché mondial que le reste de la gamme BMW, tous modèles confondus. Notre prévoyons commercialiser 200 000 motos d’ici 2020, en partie grâce à cette machine. Elle va nous permettre de renforcer notre présence sur certains marchés émergents, dont l’Inde et le Brésil, pour ne citer que les deux plus importants. C’est pour cette raison que nous avons inauguré une usine de production au Brésil, en octobre dernier, où seront entre autres produites les G310R destinées au marché local brésilien. »

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Le Rock Store, sur Mulholland Highway

En quittant le Rock Store, nous sillonnons les canyons avoisinants par des routes de rêve : route 23, Old Topanga Canyon Road, Las Virgenes Road et The Snake. Cette section particulièrement sinueuse de Mulholland Highway mesure seulement trois kilomètres de long. Au fil des ans, elle est devenue le lieu de rendez-vous des pilotes sportifs de Los Angeles. Rendu célèbre par Steve McQueen et ses amis qui le parcouraient à vive allure sur leur Triumph, dans les années 60, The Snake doit aujourd’hui sa réputation à YouTube. En effet, si vous tapez les mots « motorcycle crashes », « Edwards Corner » ou « The Snake » dans la fenêtre de recherche du célèbre site de vidéoclips, vous serez témoins des exploits involontaires de motocyclistes qui se vautrent de toutes les façons possibles et inimaginables. Pour gagner du temps, vous pouvez visiter la chaîne de RNickeyMouse qui s’est spécialisée dans la production de ces vidéos extrêmes.

Là, nous nous livrons à une longue séance de photo, la seconde de la journée, qui met en exergue la facilité de prise en main du roadster BMW. Ultramaniable et agile, la G310R effectue des demis tours dans un mouchoir de poche. Dans les virages serrés, dont certains se referment, elle penche facilement tout en gardant un comportement neutre et prévisible. Absolument stable, elle négocie les grandes courbes et les passages rapides en tenant le cap, imperturbable. Extrêmement compacte, la nouvelle G310R est un véritable jouet. Ses suspensions bien amorties sont adaptées à la conduite dans les canyons où elle se balance d’un virage à l’autre avec aisance et précision. Un vrai régal.

Le freinage qui est assuré par des composants ByBre (By Brembo), comme sur la KTM Duke 390, est relativement efficace. À l’avant, on retrouve un simple disque de 300 mm et un étrier radial à quatre pistons conçu par Brembo et manufacturé en Inde par ByBre, alors qu’à l’arrière le simple disque de 240 mm est pincé par un étrier simple piston de même origine. La sensation au levier est ferme et la puissance de freinage demeure intacte en usage intensif. Un système ABS BMW Motorrad est livré de série. Celui-ci se montre transparent et ne nuit pas au plaisir de conduite, bien qu’il se déclenche un peu tôt à mon goût.

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Seule ombre au tableau, les pneus. En effet, les Michelin Pilot Street de première monte n’offrent pas une motricité de premier plan. À plusieurs reprises lors de cette balade et plus spécialement lors de la séance de photo, j’ai expérimenté des petites glissades du pneu arrière, mais aussi de l’avant. Selon un représentant de BMW que j’ai interrogé au restaurant, le midi, différentes montes pneumatiques seront proposées selon les marchés : Michelin Pilot Street, Metzeler M5 Interact (comme sur la KTM Duke 390) ou Bridgestone.

Après nous être amusés comme des mômes à la Ronde, nous poursuivons notre chemin par la route 23 et la Encinal Canyon Road qui débouchent sur la route 1 où nous faisons un arrêt au Sunset Restaurant de Malibu Beach, en bordure du Pacifique. Là, j’ai une fois de plus le loisir de m’entretenir avec Heinrich : « La G310R vise trois clientèles cibles : les marchés émergents dont la classe moyenne plus riche, peut désormais s’offrir ce genre de motos, les jeunes et les femmes des marchés occidentaux à la recherche d’une moto simple, basse de selle et abordable, mais aussi les motocyclistes expérimentés qui veulent revenir à des motos moins puissantes, moins sophistiquées et plus faciles à piloter. Pour navetter ou se balader en mode relax, sans pression. C’est la raison de ce lancement international. Nous sommes convaincus que la G310R saura plaire à ces trois clientèles et répondre à leurs besoins spécifiques. »

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Notre groupe fait une pause au Sunset Restaurant

Personnellement, nul besoin de me convaincre du bien-fondé de cette démarche. Fervent défenseur des motos de petites cylindrées (je possède trois motos de route, dont deux de moins de 400 cc), je pense que la puissance n’est pas la mesure étalon du plaisir que l’on éprouve à moto. En fait, je préfère de loin une moto développant une puissance moyenne, mais dotée d’une partie cycle affûtée que l’inverse. Surtout si elle freine bien et est bien chaussée. Et, sur ce plan, la G310 s’avère réussie, avec un petit bémol pour les pneus.

Le retour s’effectue par le Pacifique Coast Highway qui longe l’océan et traverse les villes mythiques de Malibu Beach et de Santa Monica d’où nous rejoignons Beverly Hills, Bel-Air et Hollywood par Sunset Boulevard et Coldwater Canyon Drive. Un parcours à travers des quartiers iconiques de Los Angeles qui me ramène encore une fois aux films hollywoodiens. Musique, littérature et cinéma sont mes principales sources d’inspiration. Ma nourriture intellectuelle. Ainsi que ma réserve sensorielle et mémorielle.

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En route pour la gloire !

Très similaire à la KTM Duke 390 (les fiches des deux roadsters sont presque identiques) elle aussi conçue en Europe, mais réalisée en Inde, la BMW G310R est une réussite à tous points de vue. Mais en dehors de sa facilité de prise en main, de sa légèreté, de sa maniabilité et de sa performance étonnante, c’est sa capacité à récompenser son pilote dans les situations extrêmes, là où on l’attend à priori le moins, qui constitue sa principale qualité.

Du néophyte au pilote expérimenté, tout le monde trouvera son bonheur au guidon de la BMW. Mais, ce qui devrait lui permettre de s’imposer sur le marché globalisé, c’est son prix canon. Au Canada, elle sera proposée à 5 250 $, soit 250 $ de plus que la Honda CB300F sans ABS, mais 550 $ de moins que la KTM Duke 390 pourvue des mêmes équipements. Offerte en trois coloris, noir cosmique, bleu Strato métallique ou tricolore blanc/bleu/rouge (moyennant un supplément de 75,00 $), la G310R propose une liste réduite d’accessoires, mais aucun ensemble d’options comme c’est souvent le cas avec les motos du constructeur allemand. Il s’agit donc vraiment d’une aubaine, d’autant que les prestations qu’elle offre sont de haut niveau et ses performances solides.

Malgré son prix attractif et son origine asiatique, la G310 est une BMW de plein droit. Une moto de prestige dotée d’une qualité de finition irréprochable. Si vous en voulez une, sachez qu’elle fera son apparition chez les concessionnaires de la marque en mai/juin 2017. Commencez à mettre votre argent de côté, elle en vaut la peine.

FICHE TECHNIQUE

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La BMW G310R joue les stars sur le toit de l’hôtel Mama Shelter qui nous accueillait pour ce lancement.

INFORMATIONS GÉNÉRALES

  • Poids à vide : 158,5 kg
  • Hauteur de selle : 785 mm
  • Capacité essence : 11 L
  • Consommation : non mesurée
  • Autonomie : non mesurée
  • Durée de l’essai : 260 km
  • Prix : 5 250 $
  • Coloris : noir cosmique, bleu Strato métallique, tricolore blanc/bleu/rouge (+75,00 $)

MOTEUR

  • Moteur : Monocylindre vertical 4 temps, double ACT et 4 soupapes, refroidi par eau
  • Puissance : 34 ch à 9 500 tr/min
  • Couple : 21 lb-pi à 7 500 tr/min
  • Cylindrée : 313 cc
  • Alésage x course : 80 x 62 mm
  • Rapport volumétrique : 10,6:1
  • Alimentation : injection électronique à corps de 42 mm
  • Transmission : six rapports
  • Entraînement : par chaîne

PARTIE-CYCLE

  • Suspension : fourche inversée KYB, ø 41 mm dépourvue de réglages. Monoamortisseur KYB non ajustable
  • Empattement : 1 374 mm
  • Chasse/Déport : 25,1 degrés/102,3 mm
  • Freins : 1 disque de 300 mm et étrier radial ByBre à 4 pistons ; simple disque de 240 mm avec étrier ByBre  simple piston. ABS BMW Motorrad
  • Pneus : Michelin Pilot Street
    110/70 – 17 à l’avant ;
    150/60 – 17 à l’arrière.

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VERDICT RAPIDE

ON AIME BIEN

  • Le look à la S1000R
  • Le châssis intègre
  • La facilité de prise en main
  • Les performances globales du mono

ON AIME MOINS

  • Les vibrations notables à partir de 7 000 tr/min
  • L’ABS qui se déclenche un peu trop rapidement
  • Les Michelin Pilot Street

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Options

  • Selle basse (760 mm)
  • Selle confort (815 mm)
  • Support de bagages
  • Top case 29 litres avec plaque de support
  • Top case 30 litres
  • Béquille centrale
  • Clignotants DEL
  • Prise accessoire 12 Volts
  • Poignées chauffantes

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GALERIE

2 réponses à “Essai BMW G310R 2017”

  1. Marc Thomas

    Bonsoir Didier,
    J’ai bien hâte de lire votre compte-rendu sur l’essai de la G 310 GS!!! Quand pensez-vous pouvoir l’essayer maintenant qu’elle est disponible chez les concessionnaires BMW de la province?

    Je pense avoir trouvé ma future Dual!!! ;o)

    Bonne soirée et au plaisir de vous lire.

    Marc

    Répondre
    • Didier Constant

      Bonjour Marc,
      Je viens de récupérer la G310GS. Je l’ai en essai pour deux semaines. L’article suivra quelques jours plus tard. À la mi-août, si tout se déroule comme prévu.
      Cordialement.

      Répondre

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