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Le petit roadster qui fait Crac! Boum! Hue!

Photos : © Pierre Desilets, Didier Constant et KTM (Mitterbauer H., Romero S., Schedl R. et Mandl H.)

Les motos de petites cylindrées ont la côte cette année et la plupart des constructeurs présentent une ou deux machines dans ce créneau (Honda CBR300R et CB300F, Kawasaki Ninja 300, Suzuki Inazuma 250 et TU250, Yamaha R3). KTM ne fait pas exception à la règle et, en plus de la sportive RC390 qui a affolé la toile cet hiver, la compagnie autrichienne offre la Duke 390 qui reprend le même groupe propulseur et les mêmes freins. Cette machine est présente sur le marché européen depuis l’an dernier, en compagnie des Duke 125 et 200 avec lesquelles elle partage certains éléments mécaniques, dont le très joli cadre treillis en acier.

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Les grands se sentiront à l’étroit sur la Duke 390. Ils auront les genoux coincés par le réservoir à essence et ne pourront pas vraiment se déplacer sur la selle. Quant aux petits, ils pourront enfin poser les deux pieds à terre.

 Un roadster de qualité

Comme la sportive, la Duke est conçue à Mattighofen, mais est fabriquée en Inde, par le géant Bajaj, actionnaire de KTM à 47 %. Le constructeur indien produit toutes les petites cylindrées de KTM pour le marché global à son usine de Pune, dans l’état du Maharasahtra.

Visuellement, la Duke 390 ne fait pas mentir son héritage. Ses lignes sont dans la plus pure tradition des roadsters de Mattighofen. On reconnait le coup de crayon de Kiska, la firme de design travaillant pour KTM. La Duke 390 affiche un bon niveau de finition et n’est pas à court de technologie. Il ne s’agit pas d’une moto basique destinée à répondre aux seuls besoins des marchés émergents, mais d’une moto moderne et sophistiquée, comme l’indique son prix de vente de 5 495 $.

Le monocylindre 4-temps de 373,2 cc qui la propulse est de type super carré, ce qui signifie que son alésage (89 mm) est supérieur à sa course (60 mm). Le piston est donc animé d’une vitesse linéaire moindre qu’un moteur à longue course et peut atteindre des régimes plus élevés (9 500 tr/min dans le cas présent, ce qui est élevé pour un mono), et donc développer une puissance supérieure à cylindrée égale. Cette caractéristique permet d’obtenir un haut rendement, notamment avec les moteurs de compétition. Le mono des 390 affiche son héritage sportif. Il dispose d’une chemise en Nikasil, d’un piston forgé en aluminium, d’un double arbre à cames en tête et de basculeurs traités au carbone dur, gage de longévité et de résistance accrue. Il est alimenté par un système d’injection électronique Bosch EFI à corps de 46 mm. Le moulin KTM est puissant. Il développe 44 ch à 9 500 tr/min pour un couple de 26 lb-pi à 7 250 tr/min. Le pot d’échappement, qui s’inspire de celui de la RC, est localisé bas, sous le moteur afin d’abaisser le centre de gravité. Il émet une sonorité riche et flatteuse qui renforce son aura sportive.

Très complet et relativement lisible, le tableau de bord indique la vitesse, le régime moteur, le rapport engagé, la consommation moyenne et la distance restante avant la panne sèche. Il intègre aussi une lumière de régime (shift light) programmable, une horloge, deux trips, une jauge à essence et un indicateur de température moteur.

Très complet et relativement lisible, le tableau de bord indique la vitesse, le régime moteur, le rapport engagé, la consommation moyenne et la distance restante avant la panne sèche. Il intègre aussi une lumière de régime (shift light) programmable, une horloge, deux trips, une jauge à essence et un indicateur de température moteur.

Le châssis de la Duke s’articule autour d’un treillis en acier qui mélange tubes ronds et ovales pour une rigidité accrue. Il est différent de celui qui équipe la RC, malgré une allure similaire et est rattaché à un magnifique bras oscillant en aluminium moulé sous pression. Les jantes d’origine chinoise sont élégantes et semblent résistantes. Sur notre modèle d’essai, elles étaient chaussées de pneus Metzeler M5 Interact qui se sont révélés excellents, tant sur circuit que sur route. La suspension est assurée par WP, une filiale de KTM. Elle se compose d’une fourche inversée de 43 mm de diamètre, dépourvue de réglages et d’un monoamortisseur réglable en précharge. Les freins fournis par Bybre, une filiale indienne de Brembo, ressemblent à s’y méprendre à leurs homologues italiens, sans pour autant se montrer aussi efficaces. Ils sont complétés par un système ABS Bosch 9MB à deux canaux débrayable.

En ce qui concerne l’équipement, on applaudit le magnifique tableau de bord numérique complet qui fournit une foule impressionnante d’informations, dont un indicateur de rapport engagé, ce qui est très utile sur une moto destinée aux néophytes, le large guidon tubulaire conique au cintre idéal, le petit espace de rangement sous la selle et les poignées de maintien pour le passager. En revanche, on déplore l’absence de leviers de frein et d’embrayage réglables en éloignement et d’une béquille centrale.

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Même si la Duke n’est pas conçue à l’origine pour évoluer sur un circuit, elle s’y débrouille bien et fait preuve d’aptitudes sportives certaines pour un roadster de petite cylindrée.

À l’aise sur piste et sur route

Mon premier contact avec la Duke 390 s’est effectué à l’Autodrome St-Eustache, une piste parfaite pour une petite cylindrée de ce calibre. Sur ce circuit de 1,8 km comptant 11 courbes au dessin varié, on atteint une vitesse de pointe d’environ 150 km/h avec la Duke, c’est-à-dire relativement proche de la vitesse maxi (174 km/h au compteur) de la KTM.

Quand nous avons sorti la Duke 390 du Sprinter de KTM, je suis resté surpris par son gabarit. L’Autrichienne est plus imposante que je l’imaginais et elle en jette. Esthétiquement, c’est une réussite, surtout dans son coloris blanc/orange/noir qui est sublime. Plus basse de selle que la RC, elle propose une assise qui culmine à 800 mm du sol, ce qui est une bonne nouvelle pour les pilotes de petit gabarit et la rend bien adaptée aux femmes, en particulier. Si les conducteurs de moins de 1,75 m se sentent à l’aise à son guidon, les plus grands s’y trouvent à l’étroit, particulièrement au niveau des jambes. Le réservoir d’essence de 11 litres de capacité qui autorise une autonomie d’un peu plus de 200 km est étroit à sa base, mais large à l’avant. Les genoux des pilotes « normaux » y trouvent naturellement leur place, mais les conducteurs qui ont des grandes canes se cognent les genoux dans l’échancrure supérieure du réservoir qui présente une arête saillante.

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Sur les routes secondaires sinueuses, la Duke 390 brille et fait étalage de son talent, comme sur piste. Elle danse entre les virages et change de rythme au gré de son pilote.

La position de conduite est typique des roadsters, dos droits, bras légèrement fléchis et écartés en raison du large guidon tubulaire qui procure une bonne prise et bon effet de levier.

Même si la Duke n’est pas conçue à l’origine pour évoluer sur un circuit, elle s’y débrouille bien et fait preuve d’aptitudes sportives certaines pour un roadster de petite cylindrée. Sa géométrie de direction plus sage que celle de la RC390 (chasse/déport de 25 °/94 mm contre 23,5 °/88 mm pour la RC) la rend très facile à prendre en main sans être radicale ou nerveuse ni paresseuse pour autant.

La Duke est un vrai jouet sur circuit. Elle s’inscrit en virage d’une simple poussée sur le guidon et se montre précise. Elle ne dévie pas d’un poil de sa trajectoire. Avec son poids à sec de 139 kg, la Duke est à la fois légère et agile. Dans les pifs pafs, elle change d’angle avec aisance et rapidité alors qu’elle se montre stable dans les grands virages, comme le Carroussel (ou le bol) de St-Eustache. Au chapitre de la tenue de route, on n’a pas de vrai reproche à faire à la Duke. Ses suspensions font du bon travail, tout comme ses pneus Metzeler M5 Interact qui procurent une bonne adhérence. La seule limitation, en conduite sportive, vient de la garde au sol, laquelle est inférieure à celle de la RC. Quand on pousse la Duke dans ses retranchements, les repose-pieds se mettent alors à frotter et il faut rendre la main.

Le moteur est combiné à un embrayage à glissement limité et à une boîte de vitesse à six vitesses précise et ultra douce qui accepte sans rechigner le passage des rapports à la volée. Il démontre un couple élevé et une puissance importante pour sa cylindrée. Avec la KTM RC390, c’est la plus puissante de sa catégorie.

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Le freinage qui est assuré par des éléments Bybre est relativement bon. À l’avant, on retrouve un simple disque de 300 mm et un étrier radial à quatre pistons conçu par Brembo et manufacturé en Inde par Bybre, alors qu’à l’arrière le simple disque de 230 mm est pincé par un étrier simple piston de même origine. Un système de freinage ABS Bosch 9MB à deux canaux débrayable est livré de série sur les deux KTM. Celui-ci se montre transparent et ne nuit pas au plaisir de conduite.

En ville, la Duke est un délice à piloter. Elle est bien desservie par son poids plume, un rayon de braquage court qui lui permet de faire des demi-tours sur un dix cennes et une grande agilité. Autant d’atouts qui facilitent sa maniabilité et la rendent idéale pour se faufiler dans la circulation dense. Un vrai vélo. Son moteur coupleux et puissant pour sa cylindrée lui permet de s’extraire du trafic d’un simple coup d’accélérateur. Les reprises sont nettes et les accélérations franches. Cependant, il faut veiller à ne pas prolonger celles-ci au-delà de 9 500 tr/min au risque de voir le rupteur entrer en action.

Sur l’autoroute, la KTM maintient une vitesse de croisière honorable de 120-130 km/h et peut pousser des pointes jusqu’à plus de 170 km/h. À ces vitesses, on ressent quelques vibrations dans le guidon et les repose-pieds, mais rien de rédhibitoire.

Sur les routes secondaires sinueuses, la Duke 390 brille et fait étalage de son talent, comme sur piste. Elle danse entre les virages et change de rythme au gré de son pilote. Ses suspensions dénuées de réglage à l’avant et réglables seulement en précontrainte à l’arrière se montrent efficaces en tout temps et on peut adopter un rythme sportif sans crainte, sinon de voir les points fondre sur son permis. Grâce à leur débattement important de 150 mm, elles absorbent les irrégularités sans broncher et ne maltraitent pas la colonne vertébrale du pilote. Par ailleurs, la fourche ne plonge pas exagérément lors des freinages appuyés, ce qui permet de conserver une bonne tenue de cap.

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Pour prendre plaisir, ce n’est pas la taille qui compte

Plus on roule avec la Duke, plus on prend du plaisir. Comme c’est souvent le cas d’ailleurs avec les motos de petites cylindrées. L’Autrichienne favorise le plaisir à l’état pur et récompense les pilotes qui savent exploiter son potentiel. Elle est la preuve que le plaisir n’est pas proportionnel à la cylindrée ou à la puissance, mais bien à la maîtrise. Au guidon de la Duke, on devient rapidement un meilleur pilote pour peu qu’on fasse preuve d’humilité.

Même si elle est manufacturée en Inde, elle est conçue à Mattighofen et porte dans ses gènes l’ADN sportif de la marque. Et son exigence de qualité. En dépit de l’utilisation de certaines composantes de milieu de gamme, la KTM n’est pas une moto au rabais et sa qualité ne souffre aucune critique. C’est le genre de moto qui ravira autant les débutants que les piottes expérimentés. Aux premiers, elle permettra de s’initier au sport en toute sécurité, leur inspirera confiance et les accompagnera dans leur évolution, aux seconds, elle permettra de s’amuser sans retenue ni arrière-pensée. Ah que j’aimerais avoir 16 ans aujourd’hui!

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FICHE TECHNIQUE

INFORMATIONS GÉNÉRALES

  • Poids à sec : 139 kg
  • Hauteur de selle : 800 mm
  • Capacité essence : 11 L
  • Consommation : non mesurée
  • Autonomie : non mesurée
  • Durée de l’essai : 200 km de route et 7 séances sur piste
  • Prix : 5495 $
  • Coloris : Blanc/Noir/Orange/Gris

MOTEUR

  • Moteur : Monocylindre vertical 4 temps, double ACT et 4 soupapes, refroidi par eau
  • Puissance : 44 ch à 9 500 tr/min
  • Couple : 26 lb-pi à 7 250 tr/min
  • Cylindrée : 373,2 cc
  • Alésage x course : 89 x 60 mm
  • Rapport volumétrique : 12,6:1
  • Alimentation : injection électronique Bosch EFI à corps de 46 mm
  • Transmission : six rapports
  • Entraînement : par chaîne

PARTIE-CYCLE

  • Suspension : fourche inversée WP, ø 43 mm dépourvue de réglages. Monoamortisseur WP réglable en précharge
  • Empattement : 1 367 mm
  • Chasse/Déport : 25 degrés/94 mm
  • Freins : 1 disque de 300 mm et étrier radial Bybre à 4 pistons; simple disque de 230 mm avec étrier Bybre  simple piston. ABS Bosch 9MB à deux canaux débrayable
  • Pneus : Metzeler M5 Interact
    110/70 – 17 à l’avant;
    150/60 – 17 à l’arrière.

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VERDICT RAPIDE

ON AIME BIEN

  • Le look agressif
  • Le côté joueur
  • La facilité de prise en main
  • Les performances

ON AIME MOINS

  • Les vibrations notables à certains régimes
  • Le freinage perfectible

GALERIE 

Vidéoclip