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L’Adventure c’est l’aventure!

Texte:  Costa Mouzouris — Photos: Jon Beck et Kevin Wing

La BMW GS a toujours su capter l’imagination des motocyclistes, depuis ses débuts. Tous ont a l’esprit l’image de cette moto de hors-route improbable taillant son chemin à travers les dunes de l’Afrique du Nord. Ses victoires au Dakar aux mains de pilotes légendaires comme Hubert Auriol et Gaston Rahier ont scellé sa légende et nourri l’imaginaire des baroudeurs et autres pseudo aventuriers à travers le monde. Si bien qu’aujourd’hui, la GS est devenue le meilleur vendeur de la marque bavaroise — plus de 500 000 GS ont été commercialisées en 34 ans — et l’aventurière la plus populaire du marché par une large marge.

Aujourd’hui, il ne viendrait à l’esprit de personne de remettre en doute le fait que la BMW R1200GS est certainement la meilleure moto d’aventure jamais construite. C’est l’initiatrice du genre, la machine qui a lancé la tendance des gros trails au début des années 80, alors qu’une poignée d’enduristes ont décidé de convertir une routière R75/5 en moto de tout-terrain et de prendre part au rallye Paris-Dakar à son guidon. Cette moto hybride a incité BMW à construire la première R80 G/S de rallye et sa déclinaison légale sur route par la suite.

Quant à la R1200GS Adventure, il s’agit de la version suréquipée de la GS. Elle a vu le jour en 2002 et entame, en 2014, sa troisième mutation majeure. J’ai eu la chance de piloter une GSA version 3.0 lors de la récente présentation du modèle dans la région de Sedona, en Arizona.

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L’évolution de l’espèce

La R1200GS Adventure 2014 constitue une refonte totale du modèle précédent. Elle reçoit une nouvelle partie cycle, un moteur inédit à refroidissement liquide et une boîte de vitesse intégrée. Même si le moteur est à 35% refroidi au liquide (la chaleur résiduelle s’évacue en passant à travers les ailettes du Boxer) il est immédiatement reconnaissable par la configuration verticale des conduits d’admission et d’échappement. Ceci améliore non seulement le flux d’air à l’intérieur des cylindres, mais permet surtout d’avoir plus de place pour les jambes, les corps d’injection n’étant plus logés devant vos tibias. Ce changement procure également une plus grande efficacité lorsque l’on traverse des cours d’eau.

Le nouveau Boxer liquide, qui produit 125 chevaux, en gagne donc 15 dans sa mutation et affiche un couple accru de 92 lb-pi, soit 4 de plus que l’ancien. Il reçoit pour l’occasion un vilebrequin plus lourd de 900 grammes qui améliore le couple, ainsi qu’un amortisseur de vibrations au niveau de l’axe de sortie de la transmission afin de minimiser les à-coups engendrés par l’angle plus important du bras oscillant de la GSA qui bénéficie d’un débattement de suspension plus important.

La géométrie de direction est très similaire à celle de la GS, mais la chasse et le déport ont légèrement été altérés en raison de la suspension à plus grand débattement (200 mm de plus en avant et en arrière). La selle grimpe de 40 mm comparativement à celle de la GS pour culminer à 890/910 mm (elle possède deux réglages de hauteur).

Les autres changements incluent un pare-brise plus large et plus haut, des jantes tubeless à rayon, un énorme réservoir à essence de 30 litres de capacité (20 litres sur la GS) et des protections tubulaires. Les poignées chauffantes et l’ABS débrayable sont offerts de série, tout comme les modes de conduite et l’antipatinage ASC (les deux derniers étant optionnels sur la GS). L’alternateur gagne 30 watts et crache désormais 540 watts.

Toutes ces améliorations font grimper le prix de la GSA de base à 21 600$, une augmentation de 2 600$ par rapport à la GS. L’ESA Dynamique est inclus dans l’ensemble Touring proposé à 2 100$ et inclut également un ordinateur de bord plus complet, un support de GPS précâblé, un régulateur de vitesse, des phares antibrouillard et le support de valises Raid. Les pneus double usage à crampons sont offerts sans surcoût.

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Prélude au plaisir

Quand j’ai remarqué que les motos garées devant l’hôtel étaient équipées de pneus à crampons double usage Continental TKC80, je me suis dit que notre balade serait digne d’une moto d’aventure et que j’allais m’amuser. La météo prédisait un ciel dégagé, du soleil et des températures dans les 25° C alors que l’itinéraire de 320 km que nous avait préparé notre guide comptait 50% de sentiers roulants et 50% de routes sinueuses. J’en salivais d’avance.

Toutes les GSA étaient équipées d’un ensemble de bagageries complet, mais nous avions le loisir de les ôter, ce que je fis. Je réglai aussi la selle au plus haut pour avoir plus de dégagement pour mes longues cannes et je ramenai le guidon tubulaire en aluminium plus vers moi en le faisant pivoter dans son support. Nos motos d’essai disposaient également de l’ensemble Touring, avec l’ESA Dynamique. Nous aurions donc la possibilité d’ajuster la suspension en roulant, à la simple pression d’un bouton, selon les conditions de route rencontrées.

Nous avons commencé l’itinéraire par un parcours sur route pavée. J’ai donc activé le mode Road et réglé l’ESA à la position «Normal/Charge légère». Les R1200GS récentes — en gros, les modèles 2010 et ultérieurs — ont un comportement caractéristique. Il s’agit de motos de taille imposante, pourtant, en mouvement, elles paraissent étonnamment légères pour leur gabarit. C’est encore plus notable depuis l’introduction du moteur refroidi au liquide. Ce dernier contribue en effet à abaisser le centre de gravité, ce qui accroît l’agilité de la moto sans affecter sa tenue de route ni sa stabilité.

Le Boxer produit une sonorité caractéristique, mais la différence entre celui de la GS et de l’Adventure est que le dernier ne s’emballe pas aussi rapidement quand on donne des petits coups d’accélérateur en raison de son vilebrequin plus lourd (et dans une certaine mesure, de son alternateur également alourdi).

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L’électronique aux commandes

Sur la GSA, on dispose de trois modes de conduite destinés à la route (Rain, Road et Dynamic) et deux modes tout-terrain (Enduro et Enduro Pro). Chaque mode intègre des réglages prédéterminés pour l’ABS et l’antipatinage ASC lesquels sont censés s’adapter aux conditions de roulage. Les modes peuvent être changés en roulant à l’aide du bouton de mode situé sur le commodo droit. Pour confirmer la sélection en roulant, il suffit de couper les gaz et d’enclencher l’embrayage.

Tous les modes sont immédiatement accessibles, à l’exception du mode «Enduro Pro» qui requiert le branchement d’une clef codée dans le terminal localisé sous la selle. Il est conçu pour être utilisé avec des pneus à crampons et désactive l’ABS à l’arrière afin de permettre des dérives contrôlées de la roue arrière dans le but de diriger la moto. L’ABS et l’antipatinage peuvent être désactivés indépendamment. Lorsque la clef est installée, les réglages sont conservés quand on coupe le moteur. Sinon, les réglages par défaut sont sélectionnés chaque fois que l’on remet le contact.

Taillée pour les sentiers roulants

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Lors du lancement de la R1200GS 2013, en Afrique du Sud, j’avais noté une certaine nervosité de la direction en position debout sur les repose-pieds. Certains journalistes avaient même rapporté avoir été victimes de guidonnages dans des conditions similaires. Pour contrer ce problème, les GS et GSA 2014 sont équipées d’un amortisseur de direction de série. Son action est transparente à basse vitesse et il se montre très efficace en toute circonstance. À aucun moment durant ce lancement je n’ai ressenti de mouvements de la colonne de direction, pas plus en position debout qu’assise.

L’Adventure est plus haute que la GS, pourtant, dans les sections sinueuses, sur route, elle se manie avec l’agilité d’une sportive, surtout lorsque le mode «Dynamic» est engagé et que l’ESA est réglé sur «dur». On a du mal à croire qu’une moto au gabarit d’hippopotame puisse être si facile à piloter; elle change d’angle avec l’aisance d’une sportive de moyenne cylindrée, grâce à son large guidon tubulaire, est imperturbable sur l’angle, offre une garde au sol phénoménale doublée d’une traction bluffante et gomme toutes les imperfections de la chaussée.

Même avec les pneus TKC, j’ai pu maintenir un rythme qui aurait fait rougir un pilote sportif, sur route. Bien qu’ils se montrent neutres sur l’asphalte, ils ralentissent passablement la direction comparativement aux pneus d’origine, plus axés vers une utilisation routière. Ils représentent un bon compromis si vous roulez souvent en hors route, mais ils usent plus rapidement.

Mais, là où la GSA se distingue vraiment en utilisation routière, c’est au niveau du confort. Aucune aventurière ne peut rivaliser avec elle à ce chapitre. En fait, on a l’impression de piloter une RT équipée de suspensions intelligentes à grand débattement (NDLR: le lancement de la RT1200 2014 a eu lieu juste après celui de la GSA, dans la même région). Pour rouler en duo sur les routes défoncées du Québec, je ne vois pas meilleure machine.

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Une fois que nous nous sommes retrouvés en sentiers, la tenue de route s’est améliorée. Équipée de pneus adéquats, l’Adventure est l’une des meilleures motos tout-terrain que je connaisse, dans le bon type de sentiers, on s’entend. Dans le mode «Enduro Pro», avec un réglage de suspension souple, on peut faire déraper l’arrière pour diriger la moto. Et si vous voulez resserrer un virage? Il suffit d’accélérer plus fort.

La GSA est vraiment fluide dans les sentiers rapides et sinueux. Elle offre un comportement qui inspire confiance et permet de rouler à un rythme soutenu sans crainte. Je suis convaincu qu’une grande partie du mérite revient au vilebrequin plus lourd. Toujours est-il que dans de telles conditions, l’Adventure est encore plus facile à contrôler que la GS standard.

Même quand les conditions deviennent plus difficiles, que les chemins sont remplis de rocs et de racines, l’Adventure reste solidement plantée et absorbe les bosses efficacement.

Bien sûr, il ne s’agit pas d’une moto d’enduro et il faut conserver une cadence conservatrice à moins de vouloir passer cul par-dessus tête. Ce qui n’empêche pas la GSA d’être rapide en sentiers. Tout comme les GS précédentes, elle est plus efficace dans les sections difficiles si on a suffisamment de vitesse. Aux alentours de 60 km/h, la BMW est dans sa zone de confort. Elle se pilote alors sans effort. À plus basse vitesse, vous avez l’impression de vous battre avec la machine et de vous faire secouer. À trop haute vitesse, son gabarit la rend difficile à contrôler.

L’Adventure est équipée de jantes à rayon de type «tubeless», c’est-à-dire sans chambre à air. Celles-ci résistent mieux aux chocs en hors route et facilitent les réparations. J’en ai fait l’expérience quand une roche a causé une crevaison dans mon pneu arrière alors que je rentrais à l’hôtel. Un des suiveurs de BMW m’a offert de me passer sa F800GS et de ramener ma GSA à l’hôtel, mais j’ai décliné son offre. J’ai réparé le pneu avec une corde et j’étais de retour sur la route en quelques minutes. L’indicateur de pression des pneus dont ma moto était équipée s’est révélé pratique, m’indiquant immédiatement que j’avais un problème, avant même que je le ressente. J’ai conservé l’ABS et l’antipatinage actif durant toute la balade et je n’ai jamais senti la nécessité de les débrayer.

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L’aventurière ultime

Selon moi, la BMW GS Adventure est l’aventurière de référence, la baroudeuse ultime. Cette dernière est peut-être plus dispendieuse que la GS de base et plus difficile d’accès, ce que déploreront les pilotes «verticalement handicapés», mais quelle moto! Bien que la majorité des propriétaires de GS soient de prétendus aventuriers n’empêche pas l’Adventure d’être une authentique moto de hors route capable de négocier de longues excursions en sentiers roulants. Pour cela, il vous faudra bien entendu adapter votre pilotage et surtout garder à l’esprit que la GSA n’est pas une moto d’enduro, même si elle peut affronter des terrains difficiles.

Le nouveau moteur et la partie cycle renforcée ont largement amélioré la moto, la rendant plus rigide, plus agile et beaucoup plus légère, même si elle n’a perdu que trois kilos par rapport au modèle précédent. La compacité accrue du moteur a également permis d’augmenter la garde au sol.

L’ESA offert en option est un accessoire fabuleux dont je recommande fortement l’achat, même si je regrette que l’on ne puisse l’acquérir que dans un ensemble d’options coûteux. Avec l’ESA, la suspension de la BMW devient l’une des meilleures du marché et transforme la moto du tout au tout. Elle s’ajuste aux conditions de la route en roulant et offre un éventail de réglages supérieur à celui de la suspension standard.

Si je planifiais un voyage à travers le pays en empruntant principalement les chemins de terre, ce qui serait nettement plus intéressant et proposerait un plus grand défi que de suivre les routes pavées, la seule moto que je considèrerais est la BMW GS Adventure. En doutiez-vous encore?

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Informations générales

  • Poids pleins tous faits : 260 kg
  • Hauteur de selle : 890/910 mm
  • Capacité essence : 30 L
  • Consommation : Non mesurée
  • Autonomie : Non mesurée
  • Durée de l’essai: environ 320 km
  • Coloris: Olive mat, bleu Racing métallique mat et blanc Alpin 3
  • Prix : 21 600 $

Moteur

  • Moteur : bicylindre à plat (Boxer), 4-temps, refroidissement air/eau
  • Distribution: DACT, 4 soupapes par cylindre, 1 arbre d’équilibrage
  • Puissance : 125 ch à 7 750 tr/min
  • Couple : 92,18 lb-pi à 6 500 tr/min
  • Cylindrée : 1 170 cc
  • Alésage x course : 101 x 73 mm
  • Rapport volumétrique: 12,5:1
  • Alimentation : Injection électronique
  • Transmission : 6 rapports
  • Entraînement : par cardan

Partie cycle

  • Suspension : fourche Telelever; combiné Paralever EVO. Suspension électronique ESA II en option
  • Empattement : 1 510 mm
  • Chasse/Déport : 24,5°/92,7  mm
  • Freins : 2 disques de 305 mm et étriers 4 pistons radiaux à l’avant; simple disque de 267 mm avec étrier double piston à l’arrière. ABS partiellement intégral débrayable de série
  • Pneus : Continental TKC80 (lancement) Michelin Anakee III (en première monte)
  • 120/70R19 à l’avant
  • 170/60R17 à l’arrière

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Verdict rapide

On aime bien

  • Le look de Hummer sur deux roues
  • Le confort et la protection
  • L’efficacité générale
  • Le pouvoir d’évocation

On aime moins

  • Le gabarit imposant
  • L’omniprésence de l’électronique

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2 réponses à “Essai BMW R1200 GS Adventure 2014”

  1. Pierre G.

    C’est quoi « J’ai réparé le pneu avec une corde » ???

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