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ESSAIS   FICHE TECHNIQUE

Essai Ducati Multistrada 1200S Touring 2013
10 mai 2013

Un Superbike sur échasses
Il y a trois ans, Ducati présentait la nouvelle Multistrada 1200, une moto qui éclipsait sa devancière au profil disgracieux et redéfinissait le concept multi-routes développé par la marque. Plus tôt en avril, la firme de Borgo Panigale nous a laissé essayer une Multistrada 1200S Touring, version 2.0, pendant une semaine, en Californie

Texte et photos: Didier Constant — Vidéoclip

 
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INFORMATIONS GÉNÉRALES
  • Poids tous pleins faits: 234 kg
  • Hauteur de selle : 850 mm
  • Capacité essence : 20 L
  • Consommation : 5,77 L/100 km
  • Autonomie : 347 km
  • Durée de l'essai : 2 650 km
  • Prix : 20 995$

MOTEUR

  • Moteur : Bicylindre en L, 4 temps, distribution desmodromique, refroidi au liquide, 4 soupapes par cylindre
  • Puissance : 150 ch à 9 250 tr/min
  • Couple : 91,45 lb-pi à 7 500 tr/min
  • Cylindrée : 1 198,4 cc
  • Alésage x course : 106 x 67,9 mm
  • Rapport volumétrique : 11,5:1
  • Alimentation : injection électronique
  • Transmission : six rapports
  • Entraînement : par chaîne

PARTIE-CYCLE

  • Suspension : fourche inversée Sachs, diam 48 mm, complétement réglable; monoamortisseur Sachs complétement réglable. Ajustement électronique DSS
  • Empattement : 1 530 mm
  • Chasse/Déport : 25 degrés/110 mm
  • Freins : 2 disques de 320 mm et étriers radiaux Brembo 4 pistons à l’avant; simple disque de 245 mm avec étrier Brembo simple piston à l’arrière. ABS de série.
  • Pneus : Pirelli Scorpion Trail
    120/70 -17 à l'avant
    190/55-17 à l'arrière
 
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Le légendaire Alice's Restaurant, sur la route 35, au sud de San Francisco.

VERDICT RAPIDE
 
ON AIME BIEN
  • Suspensions Skyhook
  • Performances
  • Comportement sportif
  • Polyvalence


ON AIME MOINS

  • Prix élevé
  • Turbulences générées par le pare-brise
  • Boîte de vitesse capricieuse qui décroche parfois, particulièrement entre le 4e et le 5e rapport, à l'attaque
 
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Les pavots de Californie poussent librement en bordure de route et colorent le panorama d'un jaune orangé qui contraste avec le vert des champs et le bleu azur du ciel et de la mer.

INFOS COMPLÉMENTAIRES

Ducati Multistrada 1200S Touring 2013
Principaux changements

  • Évolution esthétique (devant du carénage, feux, tableau de bord)
  • Nouvelle bulle plus large et plus haute réglable en roulant, d'une seule main
  • Mouveaux coloris (rouge, gris)
  • Nouveau phare avant à DEL à faible intensité
  • Feux de détresse
  • Moteur Testastretta 11° de 2e génération
  • Suspensions électroniques Sachs Ducati Skyhook System (DSS)
  • Nouvelle précontrainte du ressort (amortisseur)
  • ABS Bosch 9ME dernière génération
  • Accélérateur électronique de type Ride by wire
  • Ducati Traction Control
  • Nouvelles jantes style Panigale
  • Poignées chauffantes
  • Béquille centrale
  • Valises redessinées

Quatre modes de conduite

  • Mode Sport : 150 ch, DTC sur 4, ABS sur 2, DSS orienté sport, suspensions plus fermes.
  • Mode Touring : 150 ch, réponse plus douce, DTC sur 5, ABS sur 3, DSS orienté tourisme avec plus de confort de suspension.
  • Mode Urban : 100 ch, DTC sur 6, ABS sur 3, DSS orienté ville.
  • Mode Enduro : 100 ch, DTC sur 2, ABS sur 1 (avec possibilité de bloquer l'arrière), DSS orienté tout terrain, suspensions souples.

Ordinateur de bord
L'ordinateur de bord se compose de deux parties, à savoir : un afficheur LCD à haute visibilité avec les indications principales et un afficheur LCD circulaire à matrice de points (Dot-Matrix) qui visualise diverses fonctions suivant qu'on se trouve dans des conditions statiques ou dynamiques. Durant le fonctionnement, l'ordinateur de bord est constamment en liaison avec les autres boîtiers électroniques du véhicule au travers d'une ligne de communication de données qui permet d'informer en temps réel le client des dysfonctionnements éventuels et/ou des problèmes du Système (état de la batterie, alarmes, erreurs, etc.).

Prises de courant
La Multistrada 1200 est équipée de deux prises de courant à 12 V positionnées des deux côtés dans la zone juste au-dessous de la selle pilote. À ces prises on peut relier et alimenter des charges jusqu'à un maximum de 8 A (sous fusible), à savoir : l'habillement thermique, l'interphone ou le chargeur de batterie pour cellulaires. Le GPS (Garmin) est alimenté grâce à un connecteur spécial situé dans la partie avant de la zone tableau de bord.

Bacs vide-poches
La Multistrada dispose de deux bacs vide-poches: l'un devant, sur le tableau de bord de droite, pour des objets de petites dimensions (cellulaire, etc.) et de capacité majorée et muni d'un système d'ouverture à pression (push-push), l'autre à l'arrière, sous la selle du passager, d'une grande capacité (plus de 3 litres) pour contenir le kit à outils, le manuel d'utilisation et d'entretien de la moto ou alors d'autres objets personnels.

L'AVIS DES AUTRES ESSAYEURS
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Piloter une Ducati Multistrada sur des routes californiennes… Eh oui. Je suis bien éveillé! Je ne rêve pas! La sonorité du twin et tous mes sens me confirment que je pilote bel et bien une Prima Donna italienne qui tente par tous les moyens dont elle dispose de me faire tomber sous son charme!

La selle est un peu dure, mais confortable sur une longue période. On ne peut en dire autant pour le pare-brise qui pour moi, peu importe qu’il soit en position haute ou basse, génère beaucoup de turbulences. Il est ajustable facilement d’une main en roulant (j’ignore si nos avocats sont d’accord avec cette affirmation).

Je ne suis pas de la génération qui « trippe » vraiment sur les nombreuses fonctions électroniques, alors la multitude d’options et de réglages disponibles me laisse perplexe. Mais ceux qui apprécient seront servis! Probablement qu’à l’usage, la programmation devient facile et intuitive, mais de prime abord, ce n’est pas évident; ça encombre l’afficheur de données paramétriques et il devient alors plus difficile à consulter rapidement.

Le moteur est très expressif, comme tout moteur d’origine italienne digne de porter cette appellation d’origine non contrôlée! Un peu creux à moins de 3 000 tr/min, mais quand il monte dans les tours, le défilement de la route et du paysage s’accélère de façon exponentielle! Malgré que le son soit muselé par un silencieux respectant assurément les normes, quand les tours grimpent, un grondement doux à l’oreille de l’utilisateur se fait entendre.

Les valises sont aussi certainement de conception italienne : elles n’émettent aucun son, mais c’est plutôt l’utilisateur qui en émet! Le terme «user friendly» ne s’applique pas, mais leur contenance est suffisante et elles s’intègrent parfaitement aux formes de la moto.

Le comportement des suspensions, la rigidité du cadre et les performances du moteur font qu’on a l’impression de piloter une super sportive jusqu’à ce qu’on remarque que nous sommes assis le dos bien droit, avec beaucoup de dégagement pour les jambes et qu’aucune douleur n’affecte notre cou, notre dos ou nos genoux! C’est un très bon point pour les corps un peu plus âgés… comme le mien!

La Multistrada est une machine désirable qui fait fureur auprès de tous ceux qui croisent son regard... elle sait attirer l’attention, c’est une Italienne, non? La Touring «S» a bien tout tenté pour me faire succomber, mais elle n’y est pas parvenue... moi c’est l’édition « Pikes Peak» qui me fait de l’effet.

— Richard Turenne

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C'est un dimanche matin d'avril. L'air marin qui vient du Pacifique me fait frissonner, malgré la température estivale qui règne. Pourtant, je suis bien habillé. De subtiles odeurs salines viennent chatouiller mes narines et évoquent en moi une foule de souvenirs, dont beaucoup sont reliés au périple que mon épouse et moi avions fait dans la région, en 1990. Nous avions alors rendu visite à des amis de Los Angeles avec lesquels nous étions allés au Grand Prix des États-Unis, à Laguna Seca, à moto. Même si ce voyage remonte à plus de 20 ans, j'ai le sentiment de l'avoir entrepris hier, tellement son évocation est forte.

Le bonheur est dans la route
Je roule à bonne allure sur le Highway 1, la légendaire route de la Californie qui longe la côte pacifique, au guidon d'une Ducati Multistrada 1200S Touring chargée comme une mule. Je viens tout juste d'entrer dans le parc de Big Sur, une région somptueuse qui s'étend sur environ 140 km entre les villes de Carmel, au nord et de San Simeon, au sud. Le décor de Big Sur est constitué de majestueuses falaises à pic qui semblent tomber dans l'océan. Souvent noyés dans le brouillard, ces paysages revêtent parfois un cachet mystérieux, digne des meilleurs films à suspens d'Hollywood. Au sommet des falaises poussent des cyprès solitaires qui procurent un peu d'ombre et de fraicheur au motard vagabond que je suis, tandis que dans les champs qui bordent la route, des milliers de pavots de Californie colorent le panorama d'un jaune orangé qui contraste avec le vert des champs et le bleu azur du ciel et de la mer. Tout simplement magique!

La route serpente entre océan et montagne, dessinant un long ruban gris foncé qui se tortille dans tous les sens selon la topographie. C'est l'une des plus belles routes à moto au monde. Elle se compose de centaines de courbes rapides, d'épingles et d'enchaînements que l'on négocie en seconde ou en troisième, entrecoupés de courtes lignes droites qui permettent de tester les performances du bicylindre à 90 degrés et de doubler les touristes en voiture ou en Winnebago. Malgré la circulation dominicale, je n'ai pas à baisser le rythme. On dirait que les autos ralentissent dans les lignes droites afin que je puisse les dépasser sans problème, me laissant le champ libre pour négocier les virages à ma cadence, sans devoir couper les gaz. J'ai l'impression de danser un tango langoureux avec les automobilistes. Accélération, dépassement, léger freinage… Puis tout balancer à gauche, angle maxi. Le bout de ma botte frotte l'asphalte comme pour tester la marge dont je dispose. J'accélère progressivement tandis que je suis encore légèrement penché. Je sens le pneu arrière travailler. Il lèche le bitume, sans jamais décrocher. Puis, en sortie de virage, il me procure une traction maximale alors que je mets les gaz à fond pour avaler un petit bout droit qui me permet de respirer librement pendant quelques instants, le temps de réoxygéner mon cerveau. Re-freinage, plus appuyé cette fois-ci. Et pif paf négocié en douceur, sans ralentir. Ce ballet mécanique mené à un rythme infernal va durer plus d'une heure. Dans mon casque, je jubile. Un sourire béat sur les lèvres. Moment furtif de bonheur intense. C'est le nirvana!

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Big Sur : un panorama à couper le souffle et une route magique!

Une suspension magique
Pour être équitable, je dois reconnaître qu'une grosse partie du mérite revient à la Multistrada et, en particulier, à sa suspension Skyhook. Mise au point par Sachs en collaboration étroite avec Ducati, la technologie Ducati Skyhook Suspension (DSS), composée d'une fourche de 48 mm et d'un monoamortisseur, se caractérisée par le contrôle semi-actif des suspensions qui règle en continu et en mode automatique le frein hydraulique pour maintenir une assiette constante, indépendamment de la chaussée.

La technologie DSS reçoit les données transmises par une multitude de capteurs (accéléromètres verticaux), situés sur les masses suspendues et non suspendues, et les interprète instantanément en adaptant le frein hydraulique en compression et en détente selon le mode de conduite sélectionné. Le DSS exploite aussi les signaux envoyés par le système Ride by Wire et par les capteurs de pression du système ABS pour agir sur le frein hydraulique de manière continue et intelligente afin de minimiser les transferts de charge produits par l'alternance du freinage, de l'accélération et de la décélération.

Le réglage de la précontrainte du ressort à l'arrière est intégré dans les modes de conduite; outre la sélection des différents modes (Sport, Touring, Urban et Enduro), le système permet de varier facilement et rapidement l'assiette des suspensions en fonction des diverses configurations de conduite : pilote en solo, pilote avec valises, pilote avec passager et pilote avec passager et valises. Le DSS reconnaît les paramètres personnalisés, pour les reprogrammer et commencer à interagir.

À l'usage, il en résulte une qualité d'amortissement et de roulement incroyable. On bénéficie en tout temps de la meilleure combinaison de réglages possibles selon les conditions rencontrées, ce qui permet de piloter sans arrière-pensée et d'explorer les limites de la machine. Le DSS se joue des irrégularités de la chaussée avec une efficacité extrême et il est difficile, voire impossible de prendre le système à défaut. Finis les comportements généralement associés avec les suspensions à grand débattement (plongée excessive au freinage, pompage, comportement vague en entrée de courbe…). Lors des transitions, l'assiette de la moto reste imperturbable, ce qui permet des changements d'angle plus rapides et plus précis. Dans les pifs pafs, on a l'impression que la moto virevolte, tellement la liaison au sol est bonne.

Bien entendu, le DSS est secondé par un cadre treillis tubulaire en acier qui offre une grande rigidité en torsion et en flexion. Il est complété par des platines latérales en alliage, un sous-cadre avant en magnésium et des jantes en alliage léger, à dix bâtons, inspirées de celles de la Panigale. Sans oublier le magnifique monobras oscillant en aluminium, sans doute le composant le plus «précieux» de la nouvelle Multistrada 1200. Il a été obtenu par moulage en coquille d'une seule coulée, avec 4 âmes collées pour décharger l'intérieur. Il a ensuite été usiné et peint. La garantie d'une très bonne tenue de route.

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Sur les routes sinueuses, la Multistrada est un scalpel.

Évolutions subtiles pour 2013
Cette version 2.0 de la Multistrada 1200 a subi quelques modifications esthétiques, mais aussi au niveau du moteur et de la partie cycle. Elle se décline en quatre versions : 1200, 1200S Touring, 1200S Pikes Peak et 1200S Granturismo. Elles sont équipée d'un pare-brise de plus grandes dimensions (+18 mm de hauteur et +43 mm de largeur par rapport à celui du modèle 2012) pour garantir une meilleure protection aérodynamique. Il est réglable en hauteur sur une plage de 60 mm au moyen d'un mécanisme de réglage mis au point pour être actionné rapidement avec une seule main, en roulant.

Esthétiquement, la Multistrada change dans le détail et l'ergonomie évolue peu. La selle perchée à 850 mm du sol rend l'accès à la moto difficile pour les pilotes de petits gabarits (moins de 1,70 m). Pour les gabarits moyens (1,70 m à 1,80 m), il faudra, au besoin, descendre une fesse pour poser un pied bien à plat au sol. Pour les autres, aucun souci.

Les béquilles sont moyennement bien placées et difficiles d'accès, spécialement la latérale qui est difficile à rejoindre et à déployer. À gauche, la béquille centrale vient taper dans le talon du pilote. À revoir.

Le moteur Testastretta 11° DS de deuxième génération bénéficie du double allumage (DS). Deux bougies par cylindre assurent la combustion complète du mélange, très rapidement. D'autres modifications internes ont été apportés pour favoriser la combustion, la vaporisation du mélange et le refroidissement.

Toute la gamme Multistrada est équipée de série du Ducati Safety Pack (DSP). Conçu pour garantir un haut niveau de maîtrise du véhicule et de sécurité active dans la conduite, le DSP comprend l'ABS Brembo de dernière génération, doté de 3 cartographies, ainsi que l'antipatinage Ducati Traction Control (DTC) à huit niveaux. Les réglages du DSP (ABS et DCT) prédéfinis pour chaque mode de conduite sont paramétrables au goût du pilote.

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Si l'esthétique de la Multistrada en a choqué certains lors de sa sortie, elle est plus facilement acceptée aujourd'hui. Preuve qu'en la matière, il ne faut pas juger trop vite.

La Multistrada dispose également d'un système de modes de conduite revu et corrigé (Sport, Touring, Urban, Enduro), avec cartographies distinctes selon le mode choisi. Ils sont programmés pour modifier à tout instant le caractère du moteur et les paramètres de conduite, même en roulant. On peut aussi peaufiner chacun de ces modes en fonction de la charge : usage solo, duo, solo avec bagages.

Un système Ride by Wire électronique gère les diverses cartographies pour ajuster la distribution de la puissance en interprétant les commandes du pilote. On dispose ainsi de trois cartographies moteur qui interviennent dans le mode de distribution du couple et de la puissance :

  • 150 CV avec une distribution de la puissance type sport
  • 150 CV avec une distribution progressive de la puissance
  • 100 CV avec une distribution progressive de la puissance.

Chaque mode est prédéfini sur une cartographie du moteur, mais il peut être changé et personnalisé selon les exigences spécifiques du pilote.

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Grâce à sa suspension Skyhook, la Multistrada est à la fois rigoureuse et confortable.

L'électronique aux commandes
Sur la Multistrada, comme sur beaucoup de motos modernes, l'électronique est omniprésente. On se demande parfois si tant de modes et de possibilités de personnalisation sont bien nécessaires. D'autant que le passage de l'un à l'autre ne révèle parfois que de subtiles différences. De plus, le temps de latence entre les changements de mode est un peu élevé.

Dans mon cas, après avoir expérimenté plusieurs modes, je suis resté la plupart du temps sur le mode Sport (150CV, distribution de la puissance type Sport, charge Solo avec bagages, ABS réglé sur le deuxième niveau et le DCT sur le quatrième). Pour changer de mode, il suffit de sélectionner un nouveau mode avec le bouton prévu à cet effet, en laissant l'accélérateur fermé, sans freiner, pendant une poignée de secondes...

Durant ce périple, j'ai connu un petit problème avec la clé électronique qui propose un démarrage «mains libres». Normalement, il suffit de s'approcher de la moto et d'avoir la clé électronique dans la poche; à environ deux mètres de distance, la moto reconnaît le code de la clé et permet l'activation. À ce stade, on peut appuyer sur le bouton «Key-On» pour mettre le contact et faire démarrer la moto. Sauf qu'à une occasion, le système ne reconnaissait pas la clé et m'a demandé d'entrer mon code personnel d'identification à quatre chiffres. «Quel code PIN?», me suis-je demandé, dans un moment de panique. «Je n'ai pas de code PIN!» J'ai annulé la commande, je me suis éloigné de la moto et je suis revenu. Et là, miracle! Le système a enfin reconnu ma clé. Sauf que durant tout le voyage, j'étais stressé au moment de démarrer. Je me demandais également ce qui se passerait si je perdais ma clé en roulant.

L'antivol de direction est également électronique. Lorsqu'on gare la moto, on peut décider d'activer l'antivol de direction en appuyant sur le bouton «Key-On». Quand on reprend la moto, la direction se débloque automatiquement en réappuyant sur ce bouton.

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La Multistrada pose devant le Pacifique, dans le parc de Big Sur.

Un Superbike pour la route
Une fois en action, sur les routes mythiques de la Californie du sud (Ortega Highway, Mulholland Highway) et de celles de la Californie du Nord (Highway 1, route 84 — aussi appelée La Honda — route 92, route 9, route 35, route Pescadero…), on oublie ces menus tracas pour se concentrer sur le plaisir de piloter une machine si efficace et si sportive. Et, ce qui ne gâche rien, elle ne pèse que 234 kilos tous pleins faits; pas mal dans les circonstances.

En plus de sa partie cycle super affûtée et de ses suspensions géniales, la Ducati brille par son nouveau moteur Testastretta 11° qui est un des meilleurs twins et un des plus puissants sur le marché. Plus souple que les autres bicylindres de la marque bolognaise, il reprend sans cogner à partir de 3 000 tr/min, spécialement quand on sélectionne le mode Touring, un contraste étonnant avec la Monster 1100 EVO qui nous accompagnait sur ce périple et qui est inutilisable en bas de 4 000 tr/min. La puissance du Testastretta est bluffante. Il suffit d'ouvrir les gaz en grand à partir de 4 000 tr/min, particulièrement sur les rapports intermédiaires, pour sentir le bicylindre en L tirer très fort. «Ça pousse velu, la Multistrada!», diraient mes collègues français. Avec une puissance maxi de 150 chevaux, la Ducati impressionne pour une aventurière. On se croirait au guidon d'un Superbike. Les reprises sont instantanées et dépasser le trafic sur la «1» devient alors un véritable jeu, d'autant que les freins hyper mordants permettent d'arrêter en quelques mètres. De 4 000 à la zone rouge, ce moteur est démoniaque. Il arrache les bras et vous propulse dans les hauteurs du compte-tour en un rien de temps. Un vrai régal. Spécialement sur des routes comme celles que j'ai eu le bonheur d'emprunter durant ce voyage.

Sur autoroute, calé en sixième à 3 500 tr/min, on évolue légèrement au-dessus de la vitesse permise, sans ressentir trop de vibrations. On croise pépère, mais une simple rotation de l'accélérateur permet de s'extraire de la circulation, au besoin. Le confort, dans cet environnement, est à la hauteur des prétentions de Ducati. Les suspensions avalent les moindres bosses et on a le sentiment de rouler sur un coussin d'air. La protection offerte par le carénage est bonne, dans l'ensemble, mais la bulle génère passablement de turbulences, même réglée au plus haut. La selle, quant à elle, est correcte. J'ai effectué deux longs trajets d'environ 600 km durant ce voyage sans jamais ressentir de réel inconfort.

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La Multistrada en action sur le légendaire Mulholland Highway.

En ville, il faut veiller à ne pas laisser le moteur descendre en bas de 3 000 tr/min, sous peine d'être secoué par des cognements incongrus. On peut, si on le veut, passer en mode Urban — ce que préconise Ducati en pareilles circonstances — et bénéficier d'un comportement plus civilisé. Grâce à son étroitesse relative, même avec les sacoches, se faufiler entre les files est un jeu auquel on prend vite goût, d'autant que c'est permis en Californie.

Durant cet essai, la boîte de vitesse s'est montrée revêche en plusieurs occasions. À l'accélération, je tombais parfois sur un faux point mort entre le 4e et le 5e rapport ou bien ce dernier décrochait. Et plus la semaine avançait, plus le phénomène s'amplifiait.

La tenue de route est impériale et, en mode sportif, peu de machines sont capables de tenir tête à la Multistrada dans les sections sinueuses. La machine est un vrai scalpel. Elle découpe les trajectoires avec une précision chirurgicale et ne bouge pas d'un poil. Virages rapides, épingles, enchaînements, elle négocie toutes les courbes avec une telle précision, une telle efficience, qu'on a l'impression d'être aux commandes d'une sportive pure et dure. Le confort en plus.

Le freinage est superlatif. Il offre beaucoup de mordant et de modularité à la fois. On peut même rentrer fort sur les freins et prolonger le freinage jusqu'en milieu de courbe, en relâchant tranquillement la pression, sans déstabiliser la moto. En mode Sport, l'ABS est quasiment transparent et l'antipatinage n'intervient pas inopinément. Un excellent compromis en conduite sportive.

La Multistrada est chaussée en première monte de pneus Pirelli Scorpion Trail spécialement conçus pour elle. Destinés à une utilisation mixte route /hors route (avec une prédominance pour la route), ils offrent des performances étonnantes, grâce à des sculptures qui ne se prolongent pas jusqu'au bord extérieur du pneu. On obtient ainsi une meilleure stabilité et on peut flirter avec des angles d'inclinaison dignes d'une vraie moto sportive, tout en profitant de la longévité accrue, on l'espère. Les Scorpion Trail offrent une adhérence élevée sur le sec et permettent de rouler fort, sans crainte, sur les petites routes sinueuses. Néanmoins, leur profil mixte autorise des excursions hors route occassionnelles, spécialement sur des chemins de gravier roulants.

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Bilan extrêmement positif
Au terme de ce périple de 2 650 km en six jours, j'avoue avoir été subjugué par la Multistrada 1200S Touring. Si l'on tient compte de ses performances bluffantes, de l'excellence de ses suspensions Skyhook, de son confort et de son efficacité globale, on n'a d'autre choix que de l'aimer. À moins de ne pas aimer piloter. Il s'agit d'une moto multiusage, comme le suggère son nom, même si elle ne peut pas être considérée comme une aventurière à part entière, à l'instar de la BMW R1200GS. Mais en conduite sportive, elle laisserait cette dernière dans la fumée de son échappement et de ses pneus. En plus, cette polyvalence est renforcée par ses valises suffisamment logeables pour ce type de périple, que l'on peut compléter par un sac de réservoir et un sac marin, si on part plus longtemps ou en duo. Une fois accoutumé avec leur système d'ancrage et de fermeture, ces valises s'avèrent efficaces. Cependant, je ne peux témoigner de leur étanchéité, le soleil ayant brillé tous les jours de mon séjour californien.

Le seul bémol à ce portrait flatteur, est l'omniprésence de l'électronique, qui devient vite intrusive, à mon goût personnel. Ceci mis à part, il s'agit, sans aucun doute, d'une des motos les plus excitantes de la production actuelle.

La Multistrada se décline en quatre modèles: la Multistrada 1200 de base (18 495$), la Multistrada 1200S Touring (20 995$), la Multistrada 1200 S Pikes Peak (22 995$) et la Multistrada 1200S Granturismo (22 995$).


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